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Un ambassadeur gay au Vatican? Impossible

A propos de la dernière polémique montée de toutes pièces par un certain lobby, un article de La Bussola, traduit par Anna

Dans cette affaire (voir un résumé ici: www.rtl.fr), beaucoup y sont allés de leur commentaire, et il est difficile de démêler la rumeur des faits.
Très étonnant (si l’on se souvient de ses commentaires assassins sous Benoît XVI, mais elle semble s’être convertie au papisme pur et dur depuis deux ans), lors de sa chronique dominicale « religion » ce matin sur Europe 1 (station de radio du groupe Lagardère, comme le JDD, dont il est question plus bas, et Paris-Match, que l’on voit très impliqué à la fois dans les revendications LGBT et le suivi bienveillant du pontificat actuel) la « vaticaniste » auto-proclamée Caroline Pigozzi a pris bec et ongles la « défense » de François, affirmant que la décision ne venait pas de lui, qui n'était peut-être même pas au courant, et qu'elle n'avait rien à voir avec l'homosexualité de l'impétrant. Il se peut que pour une fois, elle ait raison.
Il est toutefois vraisemblable, me fait observer Monique, « que le gouvernement français prend un malin plaisir à mettre à l'épreuve ce Pape...qui refuse de juger les gays. On prétend que ce dernier refuse cette proposition. Ce n’est pas si sûr - pensons à l'affaire Ricca. (1).
[..] Une chose est certaine : l'argumentaire du Pape est faible. Il aurait dû s'expliquer clairement mais il a préféré sortir sa phrase choc, qu'on lui fait payer aujourd'hui, avec cette nomination ».

(1) François ne peut pas décider seul dans une affaire diplomatique. L'affaire Ricca était interne au gouvernement de l'Eglise. Ricca a reçu une promotion pour ses bonnes actions et tout le monde s'est incliné!

* * *

Anna a traduit ce commentaire sur la Bussola, qui est assez complet dans la narration des faits, et contient de bonnes réflexions.

Un Ambassadeur gay au Vatican? Ce n'est pas possible.

Lorenzo Bertocchi, Tommaso Scandroglio
www.lanuovabq.it
10 avril 2015
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Le 5 janvier dernier, le Conseil des Ministres l'avait nommé pour devenir Ambassadeur de France près le Saint Siège, mais sur ce nom le Vatican a répondu avec un grand silence. Selon les rumeurs provenant de la presse transalpine il semblerait même qu'il y ait eu un véritable refus. Le fait est que son prédécesseur Bruno Jouvert a plié bagages le 1er mars et, après plus d'un mois, les Sacri Palazzi ("Palais Sacrés") n'ont pas encore fait savoir s'ils accepteront ou non la nomination.

Le diplomate choisi par François Hollande est Laurent Stefanini, 55 ans, déjà connu au sein des Sacri Palazzi : de 2001 à 2005 il a en effet été premier conseiller de l'Ambassade près le Saint Siège. Un curriculum tout à fait respectable auquel il faut ajouter que Stefanini est ouvertement gay. C'est pourquoi sa candidature, proposée par le très laïc gouvernement Hollande, a été qualifiée de "provocatrice". Pendant ce temps, plusieurs sites et associations du monde LGBT ont déjà activé la litanie sur l'homophobie du Saint Siège.

Et pourtant, le cardinal de Paris André Vingt-Trois, lors du Concistoire de février, aurait fait remettre au Pape une lettre de soutien à la candidature de Stefanini, et le cardinal camerlingue Jean-Luis Tauran aurait fait de même.
En somme, une alliance (« cordata ») pro-Stefanini existe donc même au sein du Vatican, mais ne semble avoir rien obtenu. Selon certains, ce serait le Pape en personne qui aurait pris la ferme décision de ne pas accepter la proposition française.

Déjà dans une autre occasion le Vatican avait refusé la candidature d'ambassadeur proposée par le gouvernement français: c'était entre 2007 et 2008, à l'époque du gouvernement Sarkozy et avec Benoît XVI. Dans ce cas le candidat était Kuhn-Delforge, un gay cohabitant dans une union enregistrée selon les PACS prévus par la loi française.
L’hebdomadaire français Le JDD affirme qu’afin de sortir de l'impasse de la candidature Stefanini, une « terna » (ndt: liste de trois noms) de nouveaux noms à soumettre au Vatican serait déjà en circulation.

Contre cette candidature, Ludovine de la Rochère, présidente de la "Manif pour tous", s'était également exprimée: début février, elle avait fait connaître directement au Nonce Apostolique l'opposition de son mouvement à la proposition du gouvernement français.

Jusqu'ici, la chronique.

Entre-temps, les commentaires abondent sur ce présumé refus provenant directement de la part du Pape du "qui suis-je pour juger" les gays. "Si une personne est gay, avait dit François sur l'avion de retour de Rio, et cherche le Seigneur et a bonne volonté, qui suis-je pour la juger? Le Catéchisme de l'Église Catholique explique cela de manière très belle…". Le premier point à souligner est le rappel au Catéchisme: il suffit en effet de le lire pour comprendre ce que l'Église pense en la matière, et François a toujours affirmé être en tout "un fils de l'Église".

Une clé de lecture pour comprendre la question de l'ambassadeur français peut toutefois venir de la phrase suivante de cette réponse du Pape. Il est même utile de rappeler quelle fut la question posée par la journaliste Ilza Scamparini: "Comment Votre Sainteté entend-t-elle affronter toute la question du lobby gay?", demanda-t-elle avec une certaine outrecuidance. "Le problème - répondit le Pape - n'est pas d'avoir cette tendance, non, nous devons être des frères (…) Le problème c'est de faire un lobby de cette tendance: lobby des avares, lobby des politiciens, lobby des maçons, tant de lobbies. Ceci est le problème le plus grave pour moi".

Le silence de François semble donc indiquer la crainte du Vatican qu'un ambassadeur homosexuel n'apporte pas seulement l’ambassade de son propre gouvernement mais aussi celles du monde gay. Il y a d'un côté certainement l'exigence que le rôle d'ambassadeur soit occupé par une personne de vertu irréprochable et de droiture morale. A ce propos le Catéchisme de l'Église Catholique, qui vaut plus que tous les traités internationaux pris ensemble, parle clair à ceux qui satisfont leurs propres pulsions homosexuelles. De l'autre côté - qui est le plus important - le fait d'accepter comme ambassadeur un fonctionnaire qui approuve sa propre condition homosexuelle signifierait pour le Saint Siège la caution indirecte de l'homosexualité et des revendications des lobbies gays.

Les affaires privées de Stefanini acquerraient une dimension publique. Dans ce cas l'ambassadeur ne serait plus neutre, et comment ! (allusion à la phrase italienne "ambasciator non porta pena", l'ambassadeur n'est qu'un messager, ndt). Pensons par exemple, mutatis mutandis, à un ambassadeur qui aurait exprimé des opinions xénophobes à peine voilées. Non seulement son gouvernement lui aurait donné un coup de pied dans le derrière, mais le pays hôte aussi l'aurait certainement embarqué sur le premier vol en classe économique. Dans ce cas-ci, par contre, le Saint Siège serait "raciste" envers Stefanini s'il n'acceptait pas sa nomination.

Cette affaire diplomatique est un bon microscope pour comprendre quelles sont les choses importantes dont la politique, celle supranationale aussi, devrait être faite. L'homosexualité, ainsi que l'éducation, la protection de la vie, la famille, la liberté d'expression et de religion, sont des questions cruciales du vivre ensemble. Ne pas faire entrer au Vatican Laurent Stefanini signifie non seulement réitérer au niveau international un "non" franc à l'homosexualité, à la théorie du genre, aux "mariages" gays, mais aussi et surtout un "oui" à la famille, aux rôles masculins et féminins et à la tutelle des enfants.
Voici le langage diplomatique que le baptisé - citoyen de l'Église catholique - s'attend à être utilisé par ceux qui sont dans les hautes sphères du Vatican.

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