Enzo Bianchi et Fatima

Un extrait de "Hypothèses sur Marie" de V. Messori, reproduit aujourd'hui sur "La Nuova Bussola"

Rappelons qu'Enzo Bianchi, prieur de la communauté interconfessionnelle de Bose, est aussi un bergoglien de pointe, nommé en 2014 par François consultant du Conseil Pontifical pour l'unité des chrétiens.

 

"Cher Enzo Bianchi, Fatima n'était pas seulement pour les catholiques"

Vittorio Messori
6 décembre 2015
www.lanuovabq.it
Ma traduction

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A l'occasion de la sortie en librairie d'une version remaniée et complétée de l'ouvrage de Vittorio Messori, "Hypothèses sur Marie" (Ipotesi su Maria, ed Arès, 2008), la Bussola publie quelques passages de l'avant-dernier chapitre où l'auteur défend la véracité de Fatima contre les critique formulées par le théologien Enzo Bianchi, escorté par le père dominicain Jean Cardonnel (1).


Il m'arrive de revoir sur internet l'article paru dans Le Monde (1) en mai 2000, quand Jean-Paul II fit révéler au monde ce qu'ils appellent le «troisième secret» de Fatima. L'article-vedette du journal français à propos de cet événement est signé par Jean Cardonnel, dominicain, décédé il y a quelques années, durant toute sa vie leader intraitable de chaque contestation, qu'elle soit politique ou cléricale, l'un des veufs inconsolables des années de plomb de l'Eglise et de la société. Un pour qui non seulement les habituels Mao, Che Guevara, Ho Chi Minh mais aussi l'exterminateur du peuple cambodgien Pol Pot, étaient à vénérer dans l'Olympe des révolutions sacrées.

A Cardonnel, on doit entre autre un nouveau et dangereux précédent juridique. Il était déjà très vieux, plus près des quatre-vingts-dix que des quatre-vingts ans, insupportable pour la majorité de ses confrères pour cette obsession contestataire, pour son culte du «non» avant tout, mais on continuait à l'héberger - étant donné son âge - dans le couvent dominicain de Montpellier. A la fin, le supérieur de cette maison religieuse, n'en pouvant plus de sa perpétuelle mauvaise humeur, profita d'un de ses voyages pour débarrasser sa cellule, emballant soigneusement ses affaires et lui trouvant une place dans une maison de retraite pour personnes âgées. A son retour, la colère de Cardonnel (lui-même, comme tout prêtre "adulte" qui se respecte, interdisait à quiconque de l'appeler «père») explosa, et se disant victime d'une violence intolérable, ne pensa pas même l'espace d'un instant à s'en remettre à la loi de l'Eglise, au droit canon.
Il s'adressa au contraire à la loi de la laïcissime République française, appelant la gendarmerie et dénonçant son Supérieur pour violation de domicile. Le tribunal, après un long débat, lui donna raison, condamna le supérieure du couvent qui avait procédé au déménagement de la cellule et - pour la première fois, pas seulement en France - déclara que la cellule d'un religieux était un domicile privé, comme tout logement ordinaire. Jugement biaisé et dangereux, disais-je, parce qu'il contournait et en quelque sorte baillonnait l'autorité ecclésiastique au sein même de son espace.

Mais revenons au Cardonnel commentateur de Fatima. Il écrivait sur Le Monde: «Ce prétendu "secret" est un faux, aussi faux que la Donation de Constantin avec laquelle on a voulu légitimer un contresens diabolique: l'empire chrétien. Un grand théologien italien - n'oubliez pas son nom: Enzo Bianchi, fondateur d'une nouvelle communauté monastique - a immédiatement réalisé la superstition et la fraude perpétrée par le Vatican à Fatima. Sur le quotidien romain La Repubblica, le Frère Bianchi met implacablement le doigt sur la plaie. Il écrit: "Un Dieu qui, en 1917, pense à révéler que les chrétiens seront persécutés et qui ne parle pas de la Shoah et des six millions de Juifs exterminés, n'est pas un Dieu crédible" ».
L'article de Cardonnel poursuit: «Oui, il faut mettre au jour la plaie. Comment ne pas voir la tare du secret présumé de Fatima, la preuve flagrante que c'est un faux, qu'il ne peut pas venir de Dieu? Un faux qui disqualifie, qui discrédite l'Eternel. Un Dieu, je le répète, qui n'est pas crédible: le Dieu du racisme catholique, qui s'intéresse uniquement aux siens, à sa race catholique, dans l'oubli du peuple de Jésus».

Il y a de quoi être très surpris par de tels propos, et surtout, pour nous, catholiques italiens, surpris par la citation (non démentie, et même confirmée par l'intéressé) du frère Bianchi. Il circule désormais une conviction, y compris parmi certains chrétiens, selon laquelle la persécution des juifs par les nazis dans les 12 années entre 1933 et 1945 serait, sans comparaison possible: le Mal absolu, le plus grand Crime de toute l'histoire, l'Exemple Radical du mal humain. Ce n'est pas un hasard si la faute nazie est considérée comme inexpiable et aujourd'hui encore, on trouve des nonagénaires, sinon des centenaires - considérés à un titre quelconque responsables de ce qui vient d'être dit, nommé du terme religieux par l'excellence, «l'Holocauste» - à traquer, pour poursuivre et condamner cette faute. Pour ce crime, et rien que pour celui-là, il n'y a pas de délai de prescription. Selon Cardonnel et Bianchi, Dieu lui-même - s'il veut nous parler à travers Marie - doit, je souligne, DOIT, rappeler et bien entendu maudire la Shoah, sinon il ne serait pas «n Dieu crédible». Ce n'est pas le vrai Seigneur s'il n'exècre pas explicitement Auschwitz.

Qu'il soit bien clair - il est vraiment inutile de le souligner - qu'il ne s'agit pas de minimiser la gravité du crime commis dans l'ombre de la croix gammée, qui était le renversement tragique de la croix chrétienne. On ne peut évidemment que se joindre à la condamnation universelle. Mais il est vraiment paradoxal de refuser Fatima parce qu'en 1917, la Sainte Vierge n'aurait pas prévu et condamné - au nom de son Fils et de la Trinité entière - les camps de concentration allemands qui devaient venir vingt ans plus tard. En 1917, répétons-le: l'année même où Lénine prenait le pouvoir, donnant naissance à ce monstre communiste qui allait faire au moins 100 millions de morts et pratiquer la plus violente et sanglante répression religieuse de l'histoire, au nom d'un athéisme d'Etat proclamé dès la Constitutions de l'Union soviétique et de ses satellites.
La plus récente recherche historique, derrière le célèbre professeur allemand Ernst Nolte, démontre, documents en main, que le national-socialisme est né comme une réaction au marxisme-léninisme: sans Lénine en 1917, pas de Hitler en 1933. Sans le coup d'état de Saint-Pétersbourg, l'ancien peintre de Vienne aurait fait tout au plus l'idéologue dans quelque stube de Munich pour quelque obscur groupuscule de fanatiques. Mettre en garde, à Fatima, contre le communisme tout juste né, signifiait mettre en garde contre les autres idéologies meurtrières qui viendraient après lui et à cause de lui. Le nationalisme en premier.

Entre autre, Bianchi et Cardonnel sont incompréhensibles également quand ils dénoncent qu'à Fatima se serait manifesté «le Dieu du racisme catholique qui s'intéresse uniquement aux siens, à sa race catholique». Mais quel est donc ce discours? Pour l'athéisme soviétique, il n'y avait pas de zones franches, dans le monde religieux: outre le fait que la grande majorité des victimes, de Lénine jusqu'à Gorbatchev (qui eut lui aussi une jeunesse de persécuteur) en passant par Staline, n'étaient pas catholiques, mais orthodoxes, tous deux oublient que dans l'immense Union soviétique, toutes les religions étaient présentes. Ainsi, les popes fuerent massacrés au même titre que les prêtres, les rabbins, les imams, les maîtres bouddhistes.

La même chose s'est passée partout dans le monde là où le communisme est arrivé au pouvoir: pas d'échappatoire pour ceux qui n'acceptaient pas le matérialisme et ne condamnaient pas la religion, toutes les religions, comme «opium du peuple». Et cela a commencé dès ce fatidique 1917, quand la Sainte Vierge donna l'alarme pour une idéologie perverse, même si elle se présentait avec un visage noble, apparemment évangélique (justice, liberté, égalité, fraternité), mais qui allait réveiller tous les démons, y compris ce régime allemand qui se présente, à commencer par son nom, comme l'union du nationalisme et du socialisme.

Les apparitions de Fatima, comme toutes les autres, même officiellement reconnues, ne sont pas de fide, elles peuvent être critiquées, voire non acceptées par les croyants. À condition, toutefois, de le faire sur des bases plus présentables que celles-ci.

NDT

(1) A propos de Jean Cardonnel
>>> "Eloge funèbre" du Monde: www.lemonde.fr/disparitions/article/2009/07/08/jean-cardonnel-pretre-dominicain_1216703_3382.html
>>> L'article de Cardonnel dans le Monde sur le "3ème secret", en vo: www.bibleetnombres.online.fr/fatima.htm (voir aussi: prolib.net/pierre_bailleux/dialogue/205.027.cardonnel.jcb.htm)