Synode et théorie du complot

Les progressistes font feu de tout bois. Dernier épisode: la (non confirmée) tumeur papale

 

Une mienne réflexion

Les grands prêtre du politiquement (et, dans le cas qui nous occupe, religieusement) correct dénoncent à grands cris les tenant de la "théorie du complot" (et son binôme la théorie du bouc émissaire) comme d'affreux réacs, et/ou des individus intellectuellement bornés, incapables d'accéder à la clé (qu'eux seuls détiennent, naturellement) nécessaire pour lire les évènements, et donc prompts à adopter l'interprétation simpliste en noir est blanc du "la vérité est ailleurs".
Comme si le fait de faire marcher son esprit critique et de ne pas croire aveuglément les mensonges que nous assène quotidiennement la machine à décerveler des gros médias était non pas une preuve de liberté, mais une tare à combattre. En réalité, elle leur fait peur, mais ils se cachent derrière l'argument rationnel: "la réalité n'est pas manichéenne" (venant d'eux, cela fait rire...).

Inversant curieusement les rôles, les mêmes font appel à la "théorie du complot", mais bien sûr uniquement quand cela les arrange. On se rappelle du "complot" dont le protagoniste aurait été le pourtant insoupçonnable Vittorio Messori, suite à une tribune qu'il avait publiée sur Il Corriere le 24 décembre 2014, dans laquelle il se posait avec repect et modération quelques questions sur le cours du Pontificat (il a du reste bien compris le message... parions qu'il n'écrira plus de tribunes, au moins de ce genre)

Le dernier exemple est la révélation de la tumeur au cerveau (réelle ou inventée) du Pape François, datant du 21 octobre.
Ici, le religieusement correct est représenté par les novateurs du Synode sur la famille, évidemment soutenus par les médias, qui prétendent que cette révélation (qu'ils jugent trop opportune pour être honnête) est en fait un sombre complot ourdi par les opposants au Pape, ces affreux "conservateurs" qui veulent l'empêcher de mener ses réformes à leur terme.
Il faut avoir l'esprit bien tordu pour arriver à une telle conclusion.
Je n'ai pas jugé utile de relayer l'information (je ne l'aurais pas fait non plus s'il s'était agi de Benoît XVI) issu d'un quotidien régional italien, réputé sérieux, mais la première idée qui m'était venu à l'esprit était diamétralement opposée: j'avais pensé au cancer de François Mitterrand, dévoilé en 1992 à quelques jours du référendum pour la ratification du traité de Maastricht, une révélation qui avait fait basculer des sondages hésitants du "non" vers le "oui", avant que celui-ci ne l'emporte définitivement de justesse par 51% des votes. Autrement dit, l'argument émotionnel avait fait basculer le camp des indécis...
Remplacez François (Mitterrand) par François (le Pape) et le référendum sur Maastricht par le Synode, et vous obtenez un tableau au moins aussi crédible que celui brossé par les inattendus complotistes du clan progressiste...

Synode et théoriciens du complot

Riccardo Cascioli
23/10/2015
www.lanuovabq.it
Ma traduction


Heureusement que le pape, le 6 Octobre, avait invité à «éviter l'herméneutique de la conspiration» à propos du Synode.
Depuis deux jours, les journaux télévisés et la grande presse - catholique et laïque - sont remplis de théorie du complot, des complots évidemment ourdis par des éléments conservateurs pour délégitimer le Pape Ce n'est pas la première fois que cela arrive au cours de ce Synode, mais le 'cirque' de ces derniers jours laisse pour le moins plutôt perplexe.
Tout est né il y a deux jours du présumé scoop, du Quotidiano Nazionale, à propos de la présumée tumeur (bénigne) au cerveau de François. Démenti immédiat du porte-parole du Vatican, le père Lombardi (et même à minuit et demi parce que quand ils veulent, au Vatican, ils peuvent faire vite?), répété dans les heures suivantes avec un contenu très dur. En fin de compte, cela pourrait s'arrêter là. Les spéculations et les faux scoop sur la santé des papes ne sont certes pas une nouveauté: Jean-Paul II et Benoît XVI en ont souffert plusieurs fois. Toujours démentis, peut-être avec un zeste de reproche contre une certaine façon de faire du journalisme, et c'est tout.

Pas cette fois: bien sûr, la nouvelle d'une tumeur au cerveau est lourde, et encore plus si elle est sans fondement. On ne peut pas non plus exclure des motifs particuliers derrière la diffusion de la nouvelles. Mais ce qui est sans doute le énième épisode à insérer tout au plus dans le contexte d'une certaine corruption journalistique est devenu le prétexte à un nouvel assaut contre les Pères synodaux qui s'opposent - disons pour simplifier - aux thèses du cardinal Kasper.

L'Osservatore Romano fournit peut-être une certaine justification, ayant le premier affirmé que «le moment choisi révèle l'intention manipulatrice du tollé soulevé». Une accusation dure, mais très générique. Hier, pourtant il était vraiment surprenant de lire tous les principaux journaux qui consacraient de pages et des pages au «complot», rapportant tous la même thèse conspirationniste, sans aucune preuve à ce sujet, comme si une "circulaire" était passé par les rédactions.

En résumé - soutiennent en chœur Corriere, Stampa, Repubblica, Avvenire - ceux qui résistent aux changements souhaités par François aurait tramé cette affaire de maladie pour donner l'impression que certaines idées du pape proviennent d'un cerveau malade, et donc le délégitimer. Un vaticaniste perspicace s'est en effet demandé: quitte à inventer une maladie, pourquoi une tumeur au cerveau et pas une leucémie? Raisonnement digne de la Dame en jaune, mais le pire est encore à venir. Pourquoi tous mettent-ils à la file le coming-out de Mgr Charamsa la veille du Synode, la lettre de 13 cardinaux et enfin la nouvelle de la maladie du pape pour conclure que tout fait partie d'un grand projet visant à attaquer l'autorité du pape et le débat au Synode.

Trois épisodes qui n'ont manifestement rien en commun - et même, dans au moins deux cas, sont de signe opposé à celui décrit - sinon le fait qu'ils sont tous servis comme prétexte pour déclencher des agressions verbales contre les pères synodaux qui voient dans certaines propositions sur le mariage une tentative de changer la doctrine de l'Eglise, tout en affirmant le contraire.

Incroyable, surtout, que l'on continue à parler de conspiration à propos de la lettre des cardinaux, vu qu'il s'agissait d'une lettre privée signée et remise directement au pape, et à laquelle le pape a répondu publiquement le 6 Octobre. Aucune manoeuvre secrète, aucun piège derrière le dos du pape, et pourtant les grandes signatures de la presse laïque et catholique continuent avec ce mensonge. Aggravé par le fait que, dans le cas de la prétendue maladie du pape, on insinue que la tête se trouve précisément parmi ces 13 cardinaux.

Oui, c'est une vilaine manœuvre, parce qu'on calomnie des cardinaux qui ont toujours ouvertement exprimé leur pensée, évoquant des «forces obscures», des «trames subtiles» et ainsi de suite, sans jamais apporter un seul fait à l'appui de cette thèse.
Je vais donc essayer d'émettre une hypothèse sur le pourquoi de ces théories du complot: j'ai l'impression que, n'ayant pas dans le Synode la majorité pour les changements voulus, les «kasperiens» ont mis en œuvre une authentique opération d'intimidation et de mystification sur les Pères synodaux, de sorte qu'à la fin, on pourra toujours dire que le Synode aurait eu des résultats différents s'il n'y avait pas eu les pression indues et les manœuvres obscures des «conservateur». Relançant ainsi l'esprit du Synode qui - comme l'Esprit du Concile - servira à donner une indication différente, parfois opposée, par rapport aux documents écrits. Ce n'est peut-être pas par hasard que le cardinal allemand Marx a déjà dit que «le Synode ne se termine pas ici».

En outre, il est également à noter que par pure coïncidence, le cirque médiatique créé à la suite de la nouvelle de la présumée maladie du pape, à servi à couvrir une déclaration importante du cardinal sud-africain Wilfrid Napier, l'un des 13 signataires de la lettre au Pape. Dans la Conférence de presse du mercredi 21 octobre, répondant à une question précisément sur la lettre, Napier a expliqué qu'elle était née de la préoccupation de voir se répéter ce qui s'était passé lors du Synode de l'année dernière, quand fut évidente la manipulation à l'usage du public mise en œuvre par le Secrétariat du Synode. Il vaut la peine de reprendre un passage de sa réponse, où il explique très clairement ce qui est arrivé alors. Et on remarquera que les manipulateurs de l'époque sont toujours à la barre du Synode et font partie de la compagnie qui crie aujourd'hui au complot.

«Je pense que la première chose à dire, c'est que dans le synode précédent, il y avait certains éléments spécifiques qui étaient source de préoccupation. Et un en particulier était d'avoir présenté le rapport intermédiaire comme s'il était issu du Synode, comme s'il faisait partie de la délibération du synode. Et ce n'était pas vrai, parce que nous avons reçu le document environ une heure après que vous, les médias, l'ayez reçu. Et alors seulement, nous avons commencé à le lire. Et ce document diasait des choses dont je savais que deux ou trois personnes au plus en avaient parlé dans la salle. Mais il a été présenté comme si c'étaient le reflet du synode. Maintenant, ceci a certainement donné l'impression que le synode était poussé dans une certaine direction. J'ai également fait partie de la commission qui a rédigé le document final. Et il y avait là aussi, certains points qui poussaient dans une certaine direction. Et donc, dans ce sens, une certaine idéologie ou un agenda particulier, ou comment vous voulez l'appeler, semblait être à l'oeuvre».