François et l'Opus Dei



Méthode Bergoglio : la nomination du numéraire Greg Burke comme vice-directeur de la Salle de presse ne masque pas les rapports conflictuels des jésuites en général – et de CE pape en particulier - avec l’Ordre. Un cas d’école : l'épuration au Pérou (Sandro Magister) (9/1/2016)

 

L'or du Pérou.
L'Opus Dei a presque tout perdu.


Settimo Cielo
8 janvier 2016
Traduction d’Anna


Avec la nomination de Greg Burke comme vice-directeur et - murmure-t-on - futur successeur du directeur de la salle de presse du Saint Siège, le père Federico Lombardi, l'Opus Dei s’est adjugé un poste important dans le nouvel organigramme vatican.
En effet Burke, américain de Saint Louis, ancien correspondant à Rome de "Time" et de "Fox News" et, depuis 2012, "advisor" pour la communication de la secrétairerie d'État, est numéraire, c'est à dire membre avec vœu de chasteté de l'institution fondée par Saint Josemaria Escrivá de Balaguer. Exactement comme l'avait été avant lui Joaquin Navarro-Valls, l'inoubliable porte-parole du pape Karol Wojtyla.
Toutefois, cette nomination ne résout en rien les difficultés que l'Opus Dei rencontre dans ses rapports avec le premier pape jésuite de l'histoire.

L'aversion de la Compagnie de Jésus envers l'Opus Dei est un refrain de l'histoire récente de l'Église. Et Jorge Mario Bergoglio s'est toujours bien gardé de prendre ses distances de ce stéréotype.
Il est vrai que le cardinal de l'Opus Dei Julián Herranz, âgé de 85 ans, canoniste réputé, est l'un des très rares de l'ancienne garde ratzingérienne qui soit encore estimé et écouté par François. Mais lorsqu'il a été question de réformer les procès canoniques de nullité matrimoniale, le pape n'a nullement profité de sa compétence, et, à sa place, à fait confiance à un miraculé de la carrière comme l'actuel doyen de la Rote romaine Vito Pio Pinto, dont les produits confus sont à présent sous les yeux consternés des canonistes du monde entier (cf. benoit-et-moi.fr/2015-II/actualite/divorce-catholique-schisme-possible).

Il est vrai que Bergoglio a placé au sous-sommet de l'Opus-Dei - inaugurant pour lui le poste de "vicaire auxiliaire" – un de ses amis argentins, Mariano Fazio. Mais surtout avec la tâche de contrôler le numéro un de l'Opus, l'évêque prélat Javier Echevarría Rodriguez et le reste de la hiérarchie de la prélature, ainsi que l'a confessé candidement le même Fazio dans une interview (cf. opusdei.it) après sa nomination: «Le Pape m'a conseillé de faire très attention au prélat, de le suivre de très près. C'est ce que j'essayerai de faire».

Un des effets de ce contrôle, on a pu le toucher du doigt avant, durant et après le synode sur la famille, sujet sur lequel l'Opus Dei dispose de la fleur des spécialistes, surtout dans son université romaine de la Sainte Croix, mais sur lequel, de façon incroyable, elle s'est tue, à part quelques articles érudits sur la revue "Ius Ecclesiae" dirigée par l'insigne canoniste Joaquín Llobell et quelques colloques sporadiques tenus à lumières éteintes. La raison de ce bâillonnement semble être justement la position massivement orthodoxe de ses spécialistes les plus importants, très fidèles à la tradition doctrinale et pastorale de l'Église en matière de mariage et absolument pas en accord avec les "ouvertures" de François.

Pour aller à l'essentiel, il y a un fait incontestable qui prouve la poigne de Bergoglio sur l'Opus. Il a pour théâtre le Pérou.

Dans ce pays, au cours des dernières décennies, l'Opus Dei avait progressivement conquis, avec ses propres évêques, un nombre exceptionnellement élevé de diocèses, à commencer par la capitale Lima, où règne toujours l'un d’eux, le cardinal Juan Luis Cipriani Thorne.
Et comme dans un scénario, les opposants historiques de cette avancée de l'Opus avaient été des évêques appartenant à la Compagnie de Jésus, à commencer par le prédécesseur de Cipriani, Augusto Vargas Alzamora, et surtout par le combatif évêque de Chimbote, Luis Armando Bambarén Gastelumendi, partisan de la théologie de la libération et longtemps président de la conférence épiscopale péruvienne.
Pendant les années de Benoît XVI, on a pu compter parmi les évêques du Pérou qui faisaient partie de l'Opus Dei, en plus du cardinal Cipriani, celui de Yauyos et ensuite de Cuzco Juan Antonio Ugarte Pérez, d'Aréquipa Luis Sánchez-Moreno Lira, de Chiclayo Jesús Moliné Labarte, d'Abancay Isidro Sala Rivera, de Chuquibamba Mario Busquets Jordá, plus les auxiliaires d' Ayacucho Gabino Miranda Melgarejo et de Lima Guillermo Martín Abanto Guzman, ce dernier promu par la suite ordinaire militaire.
Aujourd'hui, toutefois, aucun de ces évêques n'est plus en fonction. Et leurs évictions, plus ou moins forcées, ont toutes eu lieu sous le règne de François. En plus de Lima avec Cipriani, le seul siège du Pérou encore géré par un évêque de l'Opus Dei, Ricardo Garcia Garcia, est la petite prélature territoriale de Yauyos.