Le double discours de François


Il y a loin entre les discours officiels qu'il lit, impeccablement conformes à la doctrine, et les propos a braccio, plus discutables… La preuve par l'intercommunion entre protestants et catholiques, vue par S. Magister (4/7/2016)

Quand Bergoglio disait non à l'intercommunion entre protestants et catholiques.


Settimo Cielo
1er juillet 2016
Traduction d'Anna

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Du Canton suisse de Saint-Gall, un lecteur nous fait remarquer qu'il y a deux ans le pape Bergoglio ne laissait pas du tout présager ce feu vert à l'intercommunion entre catholiques et protestants à laquelle il semble aujourd'hui consentir sans plus de réserve (cf. www.chiesa: "Communion pour tout le monde, y compris pour les protestants").

Le 1er décembre 2014, en effet, recevant les évêques de la Suisse en visite "ad limina", François les avait ainsi sermonnés à propos des rapports œcuméniques et en particulier de l'intercommunion entre catholiques et protestants (w2.vatican.va):

Nous devons veiller à permettre aux fidèles de chaque confession chrétienne de vivre leur foi sans ambiguïté ni confusion, et sans gommer les différences au détriment de la vérité. Ainsi, si, par exemple, nous devions cacher, sous prétexte de courtoisie, notre foi eucharistique, nous ne prendrions pas assez au sérieux notre propre trésor, ni nos interlocuteurs.


"Quantum mutatis ab illo!" (cf. fr.wikipedia.org/wiki/Quantum_mutatus_ab_illo), voudrait-on s'exclamer en voyant l'énorme distance entre le Bergoglio intransigeant de cette fois-là et celui ultra-accommodant d'aujourd'hui. À condition toutefois de ne pas oublier ce qui par ailleurs est désormais manifeste à tout observateur attentif: à savoir que ce pontificat a fait de la mimésis une de ses vertus cardinales.

Comme pour la communion aux divorcés remariés, pour l'intercommunion œcuménique le pape François procède par des "stop and go" constants. Il dit, se dédit, contredit et puis encore redit. Mais c'est justement grâce à ce jeu dialectique qu'il conduit l'Église plus en avant dans la direction par lui voulue.

À le lire en entier, il semble évident que le discours du 1er janvier 2014 aux évêques suisses n'était pas entièrement dse son cru ("non era farina del suo sacco") mais un produit de bureaux, avec des retouches personnelles minimes de sa main, comme par exemple là où il sollicitait les pasteurs à "paître le troupeau, en marchant selon les circonstances devant, au milieu et derrière", ou bien où il invitait l'Église à ne pas se réduire "seulement à une belle organisation, à une autre Ong".

Mais le Bergoglio authentique n'est pas celui qui d'un air fatigué donne lecture de ces discours de routine, et qui préfère aujourd'hui de plus en plus les remettre aux présents sans même plus les lire. Il est plutôt celui qui parle "a braccio", dans un désordre apparent, mais déployant en réalité un art oratoire très sophistiqué, digne d'un parfait jésuite du siècle de Pascal.


À l'instar de celui désormais célèbre, d'une sophistication peut-être inégalée, utilisé par lui le 15 novembre 2015 dans la Christuskirche luthérienne de Rome (cf. w2.vatican.va), pour donner le feu-vert, justement, à la communion des protestants dans la messe catholique, indifférent à la très profonde distance existant entre la conception catholique de l'eucharistie et celle des disciples de Luther, car, selon ses propres mots, "la vie est plus grande que les explications et les interprétations".