Benoit-et-moi 2017
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Le pape qui ne répond pas

Le Marco Tosatti fait le bilan des initiatives de demande de clarification. Toutes sans réponse à ce jour. (15/10/2017)

Il y a deux ans, la supplique au pape sur le mariage.
Aujourd'hui presque 900 mille signatures.
Silence embarrassant (embarrassé?) de Pierre

Marco Tosatti
www.marcotosatti.com
15/10/2017
Ma traduction

* * *

Deux ans après. Avant même que la controversée exhortation apostolique "Amoris Laetitia", avec toutes ses ambiguïtés voulues, ne soit publiée, et à la veille de la deuxième tranche du Synode sur la famille, une «supplique filiale» [cf. benoit-et-moi.fr/2015-I-1/actualites/supplique-filiale-au-pape] était partie vers François. Le texte demandait au pape «un mot de clarification» qui dissipent la «désorientation généralisée causée par la possibilité que, dans l'Eglise s'ouvre une brèche autorisant l'adultère, suite à l'accès à l'Eucharistie de couples divorcés et remariés civilement».

A ce jour, la coordination de la «Supplique familiale», qui représente une coalition de plus de 60 organisations pro-famille et pro-vie des 5 continents, n'a même pas reçu un accusé de réception de la part du Saint-Siège.

Extraordinaire, non? Surtout si l'on tient compte du fait que la toute-puissante Secrétairerie d'Etat répond à tout le monde, y compris aux couples homosexuels, en souhaitant tout le bien possible et en faisant ainsi quelques petites gaffes. Mais évidemment les catholiques n'ont pas droit à une réponse. Pendant ce temps, la supplique filiale a été signée par 1378 "signataires qualifiés"; religieux, évêques, cardinaux, universitaires et savants: alors que la collecte de signatures parmi les simples fidèles a atteint près de neuf cent mille adhérents (879 451 pour être exact).

Aujourd'hui, le comité qui a promu la supplique la repropose, demandant au Pontife régnant de rompre un silence qui désormais, en plus d'être paradoxal devient vraiment extraordinaire, sans aucune autre justification possible que l'embarras (Ceux qui souhaitent y adhérer peuvent signer sur filialesupplique.org/).

Mais une deuxième initiative est aussi restée sans réponse: une «Déclaration de fidélité à l'enseignement immuable de l'Eglise sur le mariage et sa discipline ininterrompue, reçue des Apôtres» [cf. benoit-et-moi.fr/2016/actualite/amoris-laetitia-encore-un-appel], dans l'attente, donc, d'une suggestion venant des hautes sphères ecclésiastiques. Ne disposant pas des mêmes moyens logistiques que la première initiative et s'agissant cette fois d'un document beaucoup plus volumineux, la Coordination a publié la Déclaration sur son site Internet le 29 août 2016, pour que tout le monde puisse la signer.

La Déclaration de Fidélité a atteint 35112 signatures, parmi lesquels on compte trois cardinaux, 9 évêques, 636 entre prêtres diocésains et religieux, 46 diacres, 25 séminaristes, 51 frères religieux, 150 religieuses cloîtrées et de vie active, auquels il faut ajouter 458 laïcs entre universitaires de tous types, professeurs de théologie, éducateurs religieux, catéchistes et agents pastoraux.

Le texte affirmait entre autres qu' «une conscience bien formée ne peut parvenir à la conclusion

¤ que rester dans une situation objectivement pécheresse peut constituer sa meilleure réponse à l'Evangile, ni que c'est ce que Dieu lui demande;
¤ que le sixième commandement et l'indissolubilité du mariage sont de simples idéaux à poursuivre.
¤ que la grâce n'est pas toujours suffisante pour vivre chastement dans son propre état, ce qui donnerait à certaines personnes le "droit" de recevoir l'absolution et l'Eucharistie;
¤ qu'une conscience subjective suffit pour s'auto-absoudre du péché d'adultère.

Enseigner et aider les fidèles à vivre en conformité avec ces vérités - ajoutent les signataires - constitue en soi une «œuvre éminente de miséricorde et de charité». Si l'Église consentait à ceux qui se trouvent manifestement dans un état objectif de péché grave d'accéder à l'Eucharistie, elle se comporterait comme «propriétaire des sacrements» et non comme leur «fidèle administratrice», charge qui lui est confiée par Notre Seigneur.

Silence total aussi sur cette démonstration respectueuse de fidélité.

Enfin, nous avons la manifestation la plus récente de la volonté du Pape François de garder le silence, permettant ainsi d'aggraver le climat de confusion. Il s'agit de la réticence manifestée devant la "Correction filiale pour la propagation des erreurs" (cf. Correction filiale: dénigrer les signataires), élevée à Sa Sainteté le 11 août par un groupe de pasteurs d'âmes et d'universitaires. Un groupe auquel s'ajoutent chaque jour de nouveaux membres qualifiés; la liste des membres qualifiés a maintenant atteint 235 signatures, alors que des milliers constituent la liste de soutien populaire.

Je ne crois pas que ce seront les dernières initiatives. L'état de confusion et de division dans l'Église ne donne pas de signe d'amélioration. Pas plus tard qu'hier <La Fede Quotidiana> a publié une intéressante interview de l' archevêque Henryk Muszynski, émérite de Gniezno en Pologne, et Primat émérite de la nation, ainsi qu'ex-président de la Kep, la Conférence des évêques polonais. «Amoris Laetitia? Il faut la lire en continuité avec le Magistère de Saint Jean-Paul II et Familiaris Consortio, une clarification est nécessaire», disait le prélat.

Et d'autres le diront encore et encore dans un proche avenir.

L'auteur de ces ligne a suivi attentivement le développement de l'opération "Amoris Laetitia" depuis le printemps 2014, c'est-à-dire avant l'ouverture de la première tranche du Synode. Il a publié - grâce aux indiscrétions d'une excellente source et à l'ingénuité d'un des protagonistes du Synode -, un schéma de ce qui allait être le déroulement du Synode même [cf. benoit-et-moi.fr/2014-II-1..comment-manoeuvrer-le-synode et benoit-et-moi.fr/2014-II-1..les-curieuses-modalites-du-synode], censuré et conditionné, jusqu'à son épilogue, c'est-à-dire un document délibérément ambigu. Beaucoup de choses avaient été planifiées par le think tank du Pape Bergoglio. Mais peut-être pas tout. On a peut-être pensé qu'après un peu de remue-ménage, le troupeau - cardinaux, évêques et surtout laïcs - reviendrait tranquillement, pour brouter l'herbe de l'ambiguïté préparée au sommet. Mais cela n'a pas été, et ce n'est pas le cas; et le pontificat de Bergoglio court le risque, au-delà des exhibitions de cirque médiatique, de continuer à être marqué et de passer à l'histoire pour un extraordinaire manque de sincérité, pour le défaut de courage et de clarté de la part de ceux qui ne répondent pas et se limitent à trouver des épithètes (rigides, rigides...) pour ceux qui demandent une réponse simple, claire et convaincante sur un point central de la vie chrétienne, l'Eucharistie. Pas de la fumée.