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Les Franciscains de l'Immaculée 4 ans après

Résumé d'une affaire finalement mal connue, et perspectives, après quatre ans de mise sous tutelle par la "miséricorde" bergoglienne, par Marco Tosatti (26/10/2017)

Franciscains de l’Immaculée. Sous la tutelle de commissaires depuis quatre ans.
Leurs amis parlent et demandent la justice au pape.

Marco Tosatti
Stilum Curiae
24 octobre 2017
Traduction d'Isabelle

* * *

Voici quelques jours, Ettore Gotti Tedeschi lançait, sur Stilum Curiae, un double appel au Pontife régnant : il lui demandait de mettre en œuvre l’idée de proclamer l’Immaculée co-rédemptrice du monde et aussi de s'occuper avec des yeux neufs des Frères Franciscains de l’Immaculée. Au cours de conversations avec des personnes proches des Franciscains de l’Immaculée, nous leur avons posé quelques questions, de caractère très général, sur l’ordre et sur ce que l’on pourrait faire pour rendre un peu de sérénité à l’état actuel des choses. Rappelons, notamment, que nous sommes en face de la mise sous tutelle par un commissaire qui dure depuis quatre ans et dont jamais le Saint-Siège n’a expliqué ni manifesté clairement les raisons.

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1. Que sont les Franciscains de l’Immaculée ? Quel est leur charisme ? Quelle est leur mission?
En 1970, en pleine débandade post-conciliaire, le P. Stefano Manelli et le P. Gabriele Pellettieri, deux frères mineurs conventuels, commencent, avec la permission de leurs supérieurs, la “Casa Mariana”, une forme de vie franciscaine plus en accord avec les origines, mais qui prend en compte l’époque actuelle, selon les prescriptions du décret conciliaire “Perfectae caritatis” sur le renouvellement de la vie religieuse. Les deux pères s’inspirent alors du Vénérable Maximilien Kolbe ofmconv [Ordo Fratrum Minorum Conventualium, frère mineur conventuel] (béatifié en 1971 et canonisé en 1982).
La “Casa Mariana” se distingue par une présence mariale kolbienne (dans la ligne du Concile Vatican II et de toute la tradition catholique et franciscaine), une prière intense, un climat de silence et de recueillement, l’austérité et la pauvreté franciscaines, un apostolat d’édition d’abord, puis de radio et télévision ensuite, l’aide au clergé diocésain.

En 1990, grâce à Jean-Paul II, la “Casa Mariana” devient l’Institut de droit diocésain des Frères Franciscains de l’Immaculée (FFI). Par un décret en date du 1er janvier 1998, les FFI deviennent de droit pontifical. Nous lisons dans le texte :

“Les Frères Franciscains de l’Immaculée se proposent de réaliser leur propre sanctification et le salut de leurs frères par l’intermédiaire de l’Immaculée, en cherchant, d’une manière particulière, à organiser, guider et diffuser le mouvement Mission de l’Immaculée Médiatrice, à promouvoir les études sur le mystère de Marie et à accroître le culte et la dévotion envers l’Immaculée”.

Les Frères ont une branche féminine, les Sœurs Franciscaines de l’Immaculée (SFI), avec le même charisme et les mêmes fondateurs, mais dotées d’un gouvernement autonome.

2. Qu’ont-ils fait d’important ? Comment l’ont-ils fait ? Avec quels résultats pour la foi chrétienne et surtout pour l’Eglise ?

Depuis 1990 les Frères Franciscains de l’Immaculée se sont efforcés (avec leur branche féminine) de mettre en application ce que leur demandait leur décret d’érection comme Institut de droit pontifical cité ci-dessus :

“Que les Frères Franciscains de l’Immaculée, suivant les traces de saint Maximilien Kolbe, soient toujours fidèles à leur charisme, particulièrement à leur consécration sans limites à l’Immaculée par laquelle ils deviennent sa propriété, dans un esprit missionnaire sans réserve, telle que l’exprime leur Vœu marial”.

De 1990 à 2013, on assiste chez les FFI à une croissance, lente mais constante, des vocations qui contraste avec le déclin numérique continu des ordres anciens.

En 23 années, les FFI réalisent : l’ouverture de “Casa Mariana” sur les cinq continents ; des œuvres de charité (par ex. au Brésil, Nigéria, Bénin) ; un service pastoral dans les paroisses et les sanctuaires ; la prédication d’exercices spirituels ; la direction des cénacles de l’Association “Mission de l’Immaculée Médiatrice” ouverte aux prêtres et aux laïcs attirés par le charisme des FFI ; des missions populaires ; des symposia mariologiques sur le mystère de Marie Co-rédemptrice et Médiatrice ; des journées d’études et des congrès théologiques (par ex. sur la pensée de K. Rahner, sur l’enfer, sur le sacerdoce ministériel, sur le Concile Vatican II, sur la mariologie de Jean-Paul II) ; un apostolat radio et TV ; un apostolat d’édition propre (Casa Mariana Editrice) avec la publication d’études théologiques, mariologiques, philosophiques (scotistes [relatifs à la pensée de Jean Duns Scot]), morales, apologétiques, des publications ascétiques et de dévotion, des missels (novus ordo missae).

Les publications et les manifestations culturelles des Franciscains de l’Immaculée ont contribué à jeter une lumière nouvelle sur le mystère de la co-rédemption mariale, injustement abandonné par le “mainstream” actuel et académique de la mariologie anthropologique (ou « basse ») qui se présente à tort comme l’unique et légitime mariologie du Concile Vatican II.

Par leur service sacerdotal, religieux et missionnaire, les FFI (aidés par les SFI) ont suscité, réveillé et fortifié la foi d’un grand nombre d’âmes fascinées par leur témoignage.

3. Qu’est ce qui a donné lieu à la réaction de mise sous la tutelle d’un commissaire ? Quelles furent les raisons officielles invoquées ? Qu’en est-il de leurs résultats ? Quelles explications les FI ont-ils données ? Quels résultats ont-elles produits ?

Dès 2008, le gouvernement des FFI accueille avec générosité le motu proprioSummorum Pontificum” de Benoît XVI sur la forme extraordinaire du Rite Romain, qui permet à des Instituts religieux (non soumis à la Commission Pontificale Ecclesia Dei) d’utiliser, et même fréquemment, à titre préférentiel et de manière régulière, le “vetus ordo missae” et le Bréviaire Romain de 1962. Ce motu proprio est une richesse pour toute l’Eglise. Dans les maisons de formation, mais aussi dans d’autres couvents des FFI, des frères (supérieurs et subordonnés, prêtres et frères religieux) utilisent le VOM. Mais un groupuscule de frères “âgés”, d’anciens frères mineurs conventuels (entrés dans la “Casa Mariana” dans les années ’70-’80) accusent le gouvernement de l’Institut de dérive lefébvriste … Nous considérons cette accusation comme fausse et idéologique ; elle sera d’ailleurs “démontée” par une personnalité du Vatican. Cinq des frères contestataires en appellent à la Congrégation pour les Religieux (CIVCSVA) qui, dès le début, est totalement gagnée à la cause des “plaignants”. A la Congrégation s’étaient accumulés de vieux préjugés contre le P. Manelli et sa famille religieuse. En fait, entre 1989 et 1990, la Congrégation s’était opposée à la naissance des FFI, mais ceux-ci jouissaient de la faveur de Jean-Paul II. Malheureusement, à partir de 2011, le nouveau préfet de la Congrégation est un théologien de la libération brésilien … En juillet 2012 est lancée, pour des motifs ambigus, la Visite Apostolique aux FFI. Le visiteur est un ami des “plaignants”, il ne visite pas les maisons de formation, diffuse un questionnaire ambigu qui reflète les préjugés des “plaignants”. Le questionnaire et la propagande des “plaignants”, pendant et après la visite apostolique, provoquèrent chez les frères plus “simples” certains doutes quant au gouvernement FFI.

En juillet 2013 commence la mise sous la tutelle d’un commissaire, pour des motifs officiels peu clairs. On sait en réalité que la Congrégation partage les préjugés des frères accusateurs : les FFI de Manelli seraient contre le Concile Vatican II.

La tutelle du commissaire a un effet dévastateur : usage du vetus ordo suspendu ; supérieurs et formateurs (proches des fondateurs) éloignés (certains même à l’étranger) et remplacés par des frères du parti “golpiste” (NdT : allusion au nom du commissaire F. Volpi, mort en 2015). Petit à petit se tisse une chaîne de calomnies, bien orchestrées par des frères, d’anciennes sœurs et des laïcs, contre le Fondateur (maladie mentale, abus d’autorité, lefébvrisme, détournement de biens, abus sexuels …) et contre d’anciens supérieurs.

L’autorité ecclésiastique ne fait aucun cas des justifications et des défenses des frères et des fondateurs, pas plus que de leurs appels et recours. On se rend compte que l’autorité veut les détruire, les transformer de l’intérieur, éliminer leur formation, leur “forma mentis”, les mettre dans le rang des autres ordres franciscains…

Les frères du P. Manelli (et les sœurs aussi, qui se sont vu, elles aussi, imposer un commissaire en 2015, avec l’accusation explicite et calomnieuse de ne pas être dans la ligne de Vatican II) résistent avec des recours auprès de la Congrégation, auprès de la Signature Apostolique … Mais, en haut, quelqu’un entrave leur défense et le cours légitime de la justice … Résultat ? Beaucoup de frères et de sœurs quittent l’ordre, les vocations européennes tombent à zéro : conséquence de la boue jetée contre le Fondateur par le modus operandi des commissaires et de la CIVCSVA.

Jusqu’à présent, c’est la magistrature laïque qui, d’une certaine manière, donne raison au P. Manelli : classement sans suite des accusations d’abus et de maltraitance ; verdict de cassation qui a ordonné la dé-séquestration des biens et leur restitution aux associations de bienfaiteurs (il faut bien savoir que c’est le gouvernement des commissaires qui a recouru à la magistrature contre les associations précitées).

4. Quelles décisions l’Autorité a-t-elle prises ? Avec quel résultat ? Où en sommes-nous aujourd’hui ?

La Congrégation et les commissaires travaillent en réalité à la transformation déformante du charisme mariano-franciscain des FFI et des SFI : le vœu marial (premier vœu) est réduit à un simple quatrième vœu de disponibilité aux missions ; la pauvreté communautaire est bafouée (on veut que l’Institut possède des biens, ce qui est contraire à son charisme approuvé par l’Eglise) ; l’ascèse est méprisée et réduite ; la formation particulière a été éliminée (suite à un dossier rempli de calomnies, le séminaire FFI avec ses études propres a été supprimé en décembre 2013).
La CIVCSVA (forte de l’autorité du pape d’”Amoris Laetita”…) a essayé de faire pression sur le P. Manelli pour que celui-ci

1.-remette les biens qu’il ne possède pas ( ceux-ci sont, depuis toujours, propriété des Associations de bienfaiteurs) à l’Institut FFI dirigé par les commissaires ou, à tout le moins, convainque les associations de céder la propriété de ces biens aux nouveaux FFI

2.-“exhorte” (ou convainque) les frères “résistants” d’accepter toutes les modifications génétiques faites au charisme et aux Constitutions FFI (voeu marial, pauvreté,etc)

La situation est encore dans l’impasse. De plus, la CIVCSVA ne veut pas que les frères du P. Manelli quittent l’ordre et se reconstituent en tant que groupe; pour cela, directement ou indirctement, la CIVCSVA et les commissaires mettent en garde les diocèses et les religieux eux-mêmes.
La CIVCSVA veut un chapitre général et entend liquider les FFI en les obligeant à une pareille “réforme”…

5. Quelle perte subira l’Eglise universelle s’ils sont supprimés ?

Une perte terrible. Surtout vocationnelle, personnelle, pour les frères et les sœurs qui, après 20 - 25 années de vie consacrée au Seigneur et à l’Immaculée, se voient injustement privés de leur identité vocationnelle, sous des prétextes de soi-disant obéissance – en réalité du pur autoritarisme qui véhicule un relativisme juridique et doctrinal.

Une perte pour l’Eglise, appauvrie par la perte de la richesse spirituelle d’un charisme marial et franciscain comme celui vécu par les FFI et les SFI avant l’arrivée des commissaires, avec tous les fruits évoqués plus haut qui auraient pu être suivis d’autres encore.

6. Quelle serait une décision sage de la part de l’Autorité ? Et pourquoi ?

Faire se poursuivre la mission des commissaires par des milieux vaticans moins imbus de préjugés et plus en accord (liturgique et doctrinal) avec les FFI et les SFI du P. Manelli, à l’exemple de la Commission Pontificale Ecclesia Dei. Permettre la séparation : d’un côté les frères qui se retrouvent dans la ligne du Fondateur avant la mise sous tutelle (avec usage du vetus ordo) et, de l’autre, les frères qui se retrouvent dans la ligne de la CIVCSVA et des commissaires, laquelle conduit toutefois à une égalisation ou une incorporation à d’autres réalités franciscaines.