"J'ai la mémoire qui flanche...

Je m'souviens plus très bien". On pense aux paroles de cette chanson interprétée par Jeanne Moreau, en lisant les derniers propos du Pape sur les dubia. A moins que (inimaginable!!), LE PAPE MENTE délibérément (22/6/2018, note additive)

Ne voulant pas penser que le Pape mente délibérément, il reste deux possibilités: soit il souffre de trous de mémoire, soit il est otage de ses collaborateurs, qui filtrent les lettres qu'il peut voir et préparent une revue de presse "orientée"


- Dubia
- Je n'y suis pas"

En ouverture de son article d'hier, Marco Tosatti cite l'article de Paolo Rodari sur la Reppublica. Notons le titre: IMMORAL, DE SÉPARER LES ENFANTS DES PARENTS. SANS MIGRANTS, L'EUROPE EST VIDE.
Quel aveu sur ce que les pouvoirs de ce monde attendent du Pape!...

François a aussi parlé des "Dubia" sur son enseignement, mis noir sur blanc par certains cardinaux, dont le conservateur américain Leo Burke. Il a dit avoir entendu parler de la lettre des cardinaux qui l'ont critiqué "dans les journaux... une façon de faire les choses qui n'est, disons, pas ecclésiale, mais nous faisons tous des erreurs", a-t-il dit.


Commentaire de Tosatti:


La lettre contenant les "doutes" sur Amoris Laetitia a été envoyée par quatre cardinaux - Burke, Brandmüller, Caffarra, Meisner - le 19 septembre 2016.
Elle était adressée au Pontife et au Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le cardinal Gerhard Ludwig Müller.
Nous sommes allés consulter nos notes de l'époque. Nous constatons que cette lettre a été reçue à la fois par le Souverain Pontife et par le Préfet, et que ce dernier a été prié/a reçu l'ordre de ne pas répondre.
Les cardinaux signataires ont attendu plusieurs semaines, et à la fin, le 14 novembre 2016 - deux mois après la remise de la lettre - ils ont décidé de la rendre publique.

Maintenant, nous avons le Pontife: «Il a dit qu'il avait entendu parler de la lettre des cardinaux qui le critiquent "par les journaux.... une manière de faire les choses qui n'est, disons, pas ecclésiale, mais nous faisons tous des erreurs" a-t-il dit».

Si ces paroles ne sont pas corrigées et démenties, nous sommes confrontés à quelque chose de très grave.
C'est grave si le Pontife ne se souvient pas exactement - seulement deux ans après - d'avoir reçu une lettre qui est devenue l'un des points les plus controversés de son règne.
C'est grave s'il s'en souvient, et s'il affirme en avoir eu connaissance par les journaux.
Par respect pour le rôle qu'il assume, nous ne parlerons pas de mensonges, mais d'imprécision.

C'est grave si, par cette imprécision, on [?] accuse injustement des cardinaux - calomnie? justement, quelqu'un [*] en parlait récemment.... - de s'être comportés de manière incorrecte envers lui. Mais pouvez-vous imaginer les cardinaux Burke, Brandmüller, Caffarra et Meisner, tout ce qu'il y a de plus fidèles aux règles de l'Église et à la dévotion au rôle du Pape, se comportant ainsi ?

Ce n'est pas crédible. Et comme je l'ai déjà dit, je sais que ce n'est pas vrai.

Alors? Les réponses, les voies de sortie de ces interrogations sont toutes très tristes. Choisissez celle que vous préférez.
Quelle peine!

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[*] Allusion ironique à l'homélie de sainte-Marthe du lundi 18 juin, cf. fr.zenit.org]

L'étrange amnésie du Pape


Riccardo Cascioli
22 juin 2018
www.lanuovabq.it

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Dans une interview à Reuters, le pape François attaque les quatre cardinaux des Dubia, les accusant d'avoir publié la lettre sans lui demander d'abord des éclaircissements. Pourtant, les choses se sont passées tout autrement, et ce n'est pas la première fois que cela se produit.


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Les interviews au Pape François se multiplient et la tendance de ses intervieweurs est de plus en plus de le lancer sur la politique, à la recherche évidente d'un titre "facile". Du reste, le pape François ne s'y dérobe pas et a ainsi tendance à porter un jugement sur un peu tout. L'interview tous azimuts publiée mardi par l'agence Reuters - reprise par de nombreux journaux presque exclusivement pour ses critiques à l'égard du président américain Donald Trump, tant pour la politique d'immigration que pour la sortie des accords de Paris sur le changement climatique -, n'a pas fait exception.

Des jugements politiques respectables mais en même temps contestables, mélangés à des thèses bizarres ou même discutables, comme l'immigration en Europe nécessaire pour couvrir le déclin des naissances (c'est curieux, c'est la même politique poursuivie par Emma Bonino) ou l'exploitation de la part de l'Occident comme cause principale, sinon la seule, de la pauvreté en Afrique (thème repris hier soir lors du vol de retour de Genève).
Dans tous les cas, il s'agit de commentaires sur lesquels - en l'absence de présupposés magistériels - il ne vaut pas la peine de s'attarder.

Il y a toutefois un passage de l'interview par Reuters qui ne peut pas passer inaperçu, c'est celui dans lesquel il fait référence à l'affaire des Dubia. Selon ce que rapporte Reuters, le pape François a dit qu'il avait eu connaisance de la lettre des quatre cardinaux qui l'ont critiqué «par les journaux.... un procédé, si l'on peut dire, pas très ecclésial, mais tout le monde fait des erreurs». Mais que la lettre des Dubia ait été rendue publique sans passer par le Pape est une contre-vérité flagrante, et pourtant c'est le fait dont dérive un jugement pesant sur les quatre cardinaux: Caffarra, Meisner, Burke et Brandmuller.

Hier, le cardinal Burke a tenu à reconstruire l'histoire, en répondant à une question de Lifesitenews:

«La proposition des Dubia au Saint-Père a été faite selon la procédure en usage de tout temps dans l'Église, c'est-à-dire qu'ils ont été proposés au Saint-Père sans leur donner aucune publicité, afin qu'il puisse répondre pour le bien de toute l'Église. Le défunt cardinal Carlo Caffarra a remis personnellement la lettre contenant les Dubia à la résidence du Pape et, en même temps, à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 19 septembre 2016, ainsi que la correspondance ultérieure des quatre cardinaux concernant lesdits Dubia. Ce n'est que plusieurs semaines après, alors qu'il n'y avait aucun signe de prise en considération ou de réponse aux Dubia et à nous, cardinaux, que nous avons compris qu'il n'y aurait aucune réponse à ces questions concernant les sacrements du mariage et de la sainte communion, et les fondements de l'enseignement moral de l'Église, et que les quatre cardinaux, dont moi-même, en conscience, en tant que cardinaux, furent contraints de rendre les Dubia publics, le 14 novembre 2016, afin que les fidèles prennent conscience de ces graves questions touchant au salut des âmes».


Rappelons que ce 14 novembre, c'est La Nuova Bussola Quotidiana, Settimo cielo, National Catholic Register et l'Homme Noveau qui ont rendu les Dubia. publics

Mais l'affaire ne s'est pas arrêtée là. Face au silence du Pape et à la confusion croissante dans l'Église concernant l'accès aux sacrements, le Cardinal Caffarra - également au nom des autres - a écrit le 25 avril 2017 une nouvelle lettre au Pape François demandant une audience privée. Ici aussi, la réponse a été le silence et, le 20 juin 2017, cette lettre a été rendue publique de la même manière que les Dubia. Aucune réponse du Pape n'est arrivée.

La déclaration à Reuters nous laisse donc plus que perplexe.
De plus, ce n'est pas la première fois que le Pape François présente des reconstitutions d'événements qui contrastent avec ce qui est déjà connu.
Le dernier exemple flagrant est le cas récent du scandale des abus sexuels au Chili. Sur le vol de retour de son voyage au Chili et au Pérou, dans la nuit du 21 au 22 janvier dernier, il a dit n'avoir jamais reçu de témoignages des victimes, alors qu'on savait qu'elles avaient demandé à plusieurs reprises à rencontrer le Pape et qu'elles lui avaient aussi envoyé une lettre.

Face à la répétition de ces épisodes, il est difficile d'échapper à une simple réflexion. Ne voulant pas penser que le Pape mente délibérément, il reste deux possibilités: soit il souffre de trous de mémoire, soit il est otage de ses collaborateurs, qui filtrent les lettres qu'il peut voir et préparent une revue de presse "orientée" (du reste, c'est le Pape lui-même qui a dit qu'il ne regarde pas la télévision, qu'il lit un seul journal et que l'information lui parvient par ses collaborateurs).

Dans les deux cas, la situation n'est pas rassurante.

Note additive


Edward Pentin, sur son blog du National Catholic Reporter, a sollicité son confrère américain Phil Pullela, de Reuters, l'auteur de l'interview. Et il apporte ces précisions:

« La transcription de l'interview à l'agence de presse Reuters dans laquelle il a donné les commentaires, n'a pas encore été publiée dans son intégralité, et le Pape en dit apparemment plus sur la question, qui doit encore être rapportée.
...
Pullella nous a dit le 21 juin que d'autres commentaires du Pape sur les Dubia seront bientôt publiés
»

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