Le 11 septembre de l'Eglise

C'est ainsi que Mgr Gänswein qualifie l'explosion du scandale des abus sexuels dans le clergé. Et l'on perçoit la voix de Benoît XVI, suite ax révélations de Mgr Vigano. Le commentaire d'AM Valli (12/9/2018)

>>> A suivre, la traduction d'un article du site hispanophone <Info Vaticana> qui donne plus de détails sur les propos du secrétaire de Benoît XVI

Attention, Gänswein parle. Et l'on peut entendre l'écho de Benoît XVI


www.aldomariavalli.it
11 septembre 2018
Ma traduction

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Les paroles prononcées par Mgr Georg Gänswein, Préfet de la Maison pontificale et secrétaire particulier de Benoît XVI, lors de la présentation à la Chambre des députés du livre de Rod Dreher, The Benedict option, méritent l'attention.
Avec la crise des abus sexuels, a dit Gänswein, l'Église vit son 11 septembre. Nous n'avons pas eu d'avions contre la basilique Saint-Pierre, mais l'Église est profondément ébranlée et blessée.

Dans le livre de Dreher, il y a la proposition, pour sortir de la crise de l'Église, de suivre l'expérience des communautés bénédictines, selon une formule aussi simple que radicale: quaerere Deum, chercher Dieu dans la prière, comme le firent les moines qui ce faisant, en levant les yeux vers l'absolu et en se posant sérieusement la question de la vérité, réussirent à jeter les bases de la civilisation occidentale. La même proposition que celle faite par Benoît XVI à Paris, dans un discours célèbre [le fameux "discours des Bernardins", en septembre 2008]: un choix qui implique évidemment l'abandon de la tentative de plaire au monde en adoptant la pensée imprégnée de subjectivisme, de relativisme moral et d'indifférence à la question de la vérité.

La comparaison entre la crise des abus et le 11 septembre 2011 - l'effondrement des Twin Towers à New York -, est forte, mais Gänswein n'a pas hésité à la proposer. C'est le rapport du Grand Jury de Pennsylvanie et l'affaire McCarrick, explique l'archevêque, qui lui ont suggéré le parallèle. Bien sûr, nous n'avons pas eu d'églises écroulées, mais le message inhérent aux scandales est «encore plus terrible que ce qu'aurait pu être la nouvelle de l'effondrement de toutes les églises de Pennsylvanie et de la basilique du sanctuaire national de l'Immaculée Conception à Washington».

C'est justement là, dans le sanctuaire, qu'en 2008 Benoît XVI parla de «honte profonde» pour les abus [ICI], une plainte qui pourtant «n'a pas réussi à contenir le mal».

Joseph Ratzinger avait certainement une idée claire de la question. En 2010, en route pour Fatima, il disait que la persécution la plus dangereuse pour l'Église n'est pas celle venue de l'extérieur, mais de l'intérieur même de l'Église, et en 2005, peu avant de devenir pape, dans les méditations pour le Chemin de Croix, il parlait explicitement de la «saleté» qui existe dans l'Église et de l'autocélébrations des hommes d'Eglise, qui ignorent Dieu.

Alors Dieu a-t-il abandonné l'Église?

Gänswein dans son analyse ne fait pas de concessions. En tant qu'Allemand, il connaît bien la réalité dévastatrice de l'Église catholique dans son pays. Une Église «morte depuis longtemps», marquée par les chiffres dramatiques relatifs aux abandons et par le fait que, parmi ceux qui restent, moins de dix pour cent vont à la messe chaque dimanche.
Quelle Église est-ce donc là? Et dire que les premiers chrétiens défièrent l'empereur et acceptèrent la mort pour revendiquer le droit à la messe dominicale.

«Avant la venue du Christ - a dit un jour l'archevêque d'Utrecht, le cardinal Willem Jacobus Ejik [Cardinal Eijk: la grande apostasie], citant le Catéchisme (n. 675) - l'Eglise doit passer par une épreuve finale qui secouera la foi de nombreux croyants. La persécution qui accompagne son pèlerinage sur terre révélera le "mystère d'iniquité" sous la forme d'une imposture religieuse qui offre aux hommes une solution apparente à leurs problèmes, au prix d'une apostasie de la vérité.»

Le fait que Gänswein ait rappelé ces paroles d'Ejik semble assez éloquent.

Les instructions de Rod Dreher, dans un tel contexte, ressemblent donc à celles pour construire une sorte d'arche. L'inondation ne peut absolument pas être contenue. L'Occident chrétien sera envahi par les eaux d'autres philosophies, d'autres cultures, d'autres religions, d'autres visions. Même l'Église en sera submergée, mais un petit reste sera sauvé, et son salut ne sera pas dû à qui sait quelles manœuvres, mais à la prière humble, sincère, constante et confiante. Comme on le fait dans tant de monastères cachés et comme Benoît XVI l'a fait depuis qu'il a renoncé à l'exercice actif de son pontificat.

Quelle est la part de Ratzinger dans les mots de Gänswein? Probablement beaucoup, si l'on considère la proximité et la familiarité entre le pape émérite et son secrétaire. D'un autre côté, l'archevêque ne s'exprimerait pas d'une certaine manière s'il ne sentait pas qu'il avait l'approbation de Benoît. Et l'écho de la voix de Benoît XVI est assez clairement perceptible quand l'archevêque dit: «Pour beaucoup, tout porte à croire dès aujourd'hui que l'Église de Jésus-Christ ne pourra plus se remettre de la catastrophe de ses péchés qui risque de l'engloutir». Mais l'Église n'est pas morte et ceci est un temps de grâce, car «à la fin, ce qui nous rendra libres, ce ne sera pas un quelconque effort particulier, mais la vérité, comme le Seigneur nous l'a assuré».

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