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PAPST BENEDIKT - ALIAS CHEF RATZINGER (III) |
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Dernier volet de l'interviewe du Père Hermann Gessler, qui fut collaborateur du cardinal Ratzinger à la CDF. (21/7/2011)
-> Article précédent ici: Papst Benedikt - alias Chef Ratzinger (II)
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Q3. Y a-t-il eu des changements à Rome dans la première année du nouveau pontificat? R. Il est impressionnant de voir que le flux des pèlerins, après les funérailles de Jean Paul II et l'élection de Benoît XVI ne s'est pas effondré. Le nouveau pape a à plusieurs reprises souligné la continuité avec Jean Paul II, mais signe aussi de façon claire ses propres accents. En simplifiant, on peut dire que la foule accourait chez Jean-Paul II pour le voir. Chez Benoît XVI, elle vient pour l'écouter. Le précédent pape était capable d'ouvrir de nombreux coeurs, le Pape actuel est capable de les remplir. On pourrait presque parler dans ce contexte d'une complémentarité de ces deux papes. De plus, le Saint-Père essaie de diriger l'Église avec sérénité. Il n'a publié que quelques documents, il exprime ses enseignements surtout à travers les homélies et au cours des audiences générales. Il se comporte en public de façon plutôt réservée, dans son humilité, il est comme une icône du Seigneur. Enfin, il est sur le point d'entreprendre des changements au niveau de la Curie romaine. Certains postes clés sont déjà renouvelés, le cardinal Bertone va bientôt prendre ses nouvelles fonctions de secrétaire d'État. Il semble que le Saint-Père veuille renouveler la Curie, de manière ciblée, mais surtout renforcer l'unité et la coopération entre les différents dicastères.
Q4. On a dit que le pontificat de Jean Paul II avait eu une signification particulière pour la Pologne. Pensez-vous que la même chose puisse se produire avec le pontificat du pape Benoît, pour les pays de langue allemande? R. Le pape Jean Paul II était un grand fils de la Pologne, qui fut totalement soutenu par ses compatriotes, et qui a vraiment changé le visage de ce pays: le rideau de fer est tombé, la dictature du communisme s'est brisée. Les incroyants eux-mêmes s'accordent en grande partie sur l'action du défunt pape. Benoît XVI, lui, a conscience d'être le père de tous les croyants. Il est un don pour le monde entier, mais il est certainement un don spécialement pour les pays de langue allemande. Bien sûr, nous sommes tous invités à le soutenir par notre prière et notre loyauté, comme les Polonais ont sutenu Jean-Paul II Il me semble que nous voyons déjà les prémices d'une aube nouvelle dans les pays germaniques: pensons à Cologne et à l'ouverture vers de nombreux jeunes! pensons au nombre croissant de pèlerins venant à Rome d'Allemagne et d'Autriche! Pensons à certains critiques de l'église, comme Hans Küng, qui sont devenus silencieux! (ndt: là, le bon Père n'avait pas encore vu les derniers développements!!) Ou pensons aux médias, qui progressivement perdent leur agressivité face à l'Eglise (ndt: même remarque! C'était avant les scandales pédophiles. Mais il faut reconnaître que la situation actuelle lui donne plutôt raison). Bien sûr, il n'est pas facile de passionner les occidentaux avec la foi, car apparemment, dans notre société, il n'y a plus de place pour Dieu, parce que l'on pense pouvoir se construire son futur tout seul, sans Dieu. Nous voulons espérer que les gens comprendront à quel point la foi enrichit nos vies, à quel point elle peut servir la société, l'économie, les orientations politiques. Et nous espérons que beaucoup trouvent leur chemin hors de l'indifférence et de l'égoïsme, et redécouvrent la joie de croire en Dieu, la joie de vivre, la joie de la famille et des enfants, la joie de la prêtrise et de la vie consacrée, la joie dans l'Eglise . "Non ne voulons pas être les maîtres de votre foi, mais les serviteurs de votre joie» (2 Corinthiens 1:24). Cette phrase de Saint Paul a été choisie par le prêtre nouvellement ordonné Joseph Ratzinger pour le faire-part de sa première messe. Elle fonctionne comme un fil conducteur à travers son travail en tant que professeur, cardinal et pape. Aider les gens pour qu'ils puissent redécouvrir la joie de Dieu: c'est le souhait du Saint-Père - pour les pays de langue allemande, mais aussi pour l'Europe et le monde.
Q5. On sait que le pape Jean-Paul II était un grand admirateur de Marie, que la spiritualité mariale était quelque chose de très important pour lui. Y a-t-il aussi chez le pape Benoît un accent semblable de spiritualité? R. Il faudrait poser la question au Saint-Père lui-même. Il me semble qu'il tire sa force principalement de la Parole de Dieu et de la Sainte Messe. Il vit de l'Eucharistie et pour l'Eucharistie. Il vit avec l'année liturgique, surtout avec ses temps forts - l'Avent et Noël, le Carême et Pâques - ainsi que les fêtes du Seigneur, de Sa mère et de nombreux saints. Dans la liturgie, il voit le milieu intérieur de l'Église, le lieu de la proximité spéciale à Dieu. C'est pourquoi,la liturgie lui tient tellement à coeur, et fortifie beaucoup sa spiritualité.
Q6. Qu'attendez-vous de la visite du pape en Bavière? R. Tout d'abord, que les gens réalisent à nouveau que la foi n'est pas comme un lourd sac à dos rempli de commandements et d'interdits, qui nous écrase, et rendre la vie difficile. La foi est la relation avec le Dieu vivant qui est amour, qui a voulu et créé chacun de nous, qui soutient et nous guide et ne veut rien de plus que notre vie et notre bonheur. Espérons que le pape parviendra à convaincre les gens plus fortement encore de cet aspect positif de la oi. J'y joindrais un second voeu: beaucoup de gens regardent l'Église avec une certaine méfiance: ils entendent beaucoup parler des fautes qui ont été faites dans l'Eglise, et il en sera probablement toujours ainsi, parce que l'Église est composée d'hommes qui sont faibles par définition; ils trouvent l'Église archaïque et sans attrait, ils pensent que l'on ne peut pas être à la fois laïc et dans l'Église. Ce n'est pas vrai. L'Église a 2000 ans, mais elle est toujours jeune de cœur, parce que le Christ vit en elle. Elle ne veut rien d'autre que d'être messagère de la vérité et de l'amour de Dieu, de la grande famille des enfants de Dieu. J'espère et je prie pour que beaucoup de gens découvriront à nouveau ce vrai visage de l'église, que l'amour pour l'Eglise croîtra à nouveau dans les pays de langue allemande. Et encore, un troisième souhait: Parce que notre foi est devenue fatiguée, nous avons aussi largement perdu l'élan missionnaire . Mais lorsque nous aurons redécouvert que la foi est un grand trésor - le plus grand trésor qui soit - alors renaîtra en nous une ardeur nouvelle pour témoigner notre foi. "C'est de l'abondance du coeur que la bouche parle" (Lc 6:45) Pour le Saint-Père, la transmission de la foi est une préoccupation essentielle. Nous sommes tous appelés à vivre notre foi et à la transmettre - et cela, partout: dans la famille, à l'école, au travail, avec les amis dans les médias. Et pourquoi ne parlerions-nous pas aussi parler de Jésus avec les croyants des autres religions - avec les musulmans, avec les bouddhistes, avec tous ceux avec que la providence a conduits dans notre pays à la recherche d'une maison. Le pape serait très heureux si sa visite en Bavière contribue à renouveler l'élan missionnaire dans de nombreux cœurs.
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Ensemble de l'article
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Le Pape Benoît, alias "chef Ratzinger" Un entretien de la station de radio Horeb avec le Père Hermann Geissler, de la Congrégation pour la doctrine de la foi (12/9/2006) Voir ici: http://benoit-et-moi.fr/2011-II --------------------------
Q1 - Comment êtes-vous arrivé à la CDF? R - A vrai dire, je ne saurais vous dire exactement comment le cardinal Ratzinger m'a repéré. Après mes années de formation à Sainte-Croix, je suis entré en 1988 dans la famille spirituelle "l'Œuvre". J'ai fait mon noviciat et mon doctorat à Rome, et je fus ordonné prêtre en 1991. Après quoi on me confia le poste d'aumônier (vicaire) de la paroisse Saint Gerhard à Bregenz. C'est là-bas qu'un jour, c'était au printemps 1993, me parvint l'appel du Père Willi, le recteur de la communauté des prêtres de l'Ouvre, qui me donna l'ordre de me rendre immédiatement à Rome. Là, le Père Willi me confia que le cardinal Ratzinge lui avait demandé de me mettre à sa disposition pour œuvrer à la CDF. Cette demande fut pour moi comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Jamais je n'aurais imaginé qu'une telle chose pourrait m'arriver. Toutefois, comme l'engagement pour la vraie foi était l'un des objectifs de notre famille spirituelle, j'acceptai immédiatement. Après un bref entretien de présentation, je commençai mon travail à l'automne 1993.
Q2 - Comment s'est déroulée votre première rencontre avec le cardinal Ratzinger? R - La première rencontre avec lui, ce fut lors de l'entretien de présentation, à la CDF. Au cours de cet entretien, le cardinal Ratzinger m'expliqua un peu le travail qui me serait confié, et me donna un bon conseil pour m'accompagner: "Restez toujours simple et humble".
Q3 - Quel est le rôle de la CDF? R - La CDF est l'une des 9 congrégations du Vatican - qu'on pourrait comparer à des ministères d'un état. Elle a la fonction de protéger, d'encourager, l'enseignement de la foi et de la morale dans l'ensemble de l'Eglise. Quelques exemples pour illustrer ce que cela signifie en réalité: La CDF publie, en coopération avec le Pape, des documents afin de rendre les contenus de la foi compréhensibles au plus grand nombre. La CDF prend position sur des questions controversées. Comme par exemple la déclaration Dominus Iesus, qui nous dit que, même à l'époque du dialogue, nous ne pouvons pas oublier que seul Jésus est le sauveur de l'humanité. Dans un autre texte de 2003, on explique pourquoi le partenariat entre deux homosexuels ne peut pas être l'équivalent du mariage. La CDF est également en dialogue constant avec l'ensemble des évêques de la terre, afin de trouver les chemins qui permettent de fortifier les hommes dans leur foi. La CDF doit aussi intervenir lorsque des théologiens catholiques développent des interprétations qui ne sont pas conformes avec la foi, et qui pourraient égarer le peuple de Dieu. A chaque fois on essaie de supprimer, d'aplanir les difficultés par la voie du dialogue. Mais si un théologien refuse absolument de corriger ses théories erronées, alors la CDF devra prendre des mesures disciplinaires. La CDF est aussi chargée de contrôler la véracité d'évènements tels qu'apparitions, visions, messages de spiritismes ou de magie, ou autres phénomènes du même genre. On demande aussi à la CDF un avis avant la nomination d'un évêque par le Pape, et avant d'obtenir la reconnaissance papale d'un nouveau mouvement. Enfin, la CDF est qualifiée pour l'éclaircissement et l'approbation des questions nouvelles qui se posent. On peut citer parmi celles-ci l'ensemble des questions de bioéthique, le dialogue interreligieux, et la délicate question de l'œcuménisme, ainsi que les différents courants, sectes, New age, qui ont tendance à remplacer la vraie foi.
Q4 - Comment peut-on imaginer le travail à la CDF? R - Le travail à la CDF est le travail collégial d'une équipe. Les différents référents analysent les problèmes posés, qui leur arrivent de la terre entière. Lors de ce travail, on fait appel aux consultants, qui sont quelques 30 théologiens qui exercent à Rome, et qui couvrent tous les principaux pays, les langues, et les écoles de théologie. Ils se rencontrent presque chaque semaine pour exposer les questions les plus importantes. Le résultat de ces explications est, à peu près tous les 15 jours, transmis aux cardinaux membres de la CDF. Ces derniers prennent une décision collégiale, qui sera ensuite transmise au Saint-Père par le préfet. Le Pape a le dernier mot. Notre travail est passionnant, et parfois aussi difficile. Vous voyez pour ainsi dire de l'intérieur les joies et les soucis de l'Eglise.
Q5 - Combien de personnes travaillent-elles à la CDF? R - Actuellement 45 personnes originaires des 5 continents. La plupart des membres actifs de la CDF sont des prêtres, mais il y a aussi quelques sœurs, et quelques laïcs.
Q6 - Si autant de personnes travaillent à la CDF, combien de fois a-t-on l'occasion d'avoir affaire directement au Préfet? R - Tous les vendredis, il y a une réunion au cours de laquelle toutes les questions sont discutées en cercle restreint. A cette occasion, on rencontre à chaque fois le préfet, et lors de la pause, on a la possibilité de s'entretenir avec lui en toute liberté. En outre, les collaborateurs sont convoqués régulièrement par le "chef", lorsque des questions d'actualité se présentent, ou des rencontres sont à préparer. En dehors de ces occasions, nous nous réunissons avant chaque grande fête, nous assistons à une méditation, chantons des cantiques, réalisons une petite fête. Parfois, nous nous retrouvons aussi pour la prière, pour la messe dans la chapelle, et une fois par an, nous faisons ensemble une excursion. En général, nous visitons un des nombreux lieux historiques autour de Rome, nous célébrons la messe, et nous goûtons la bonne cuisine italienne.
Q7 - Certains imaginent la CDF, et la Curie, comme des administrations sclérosées. Que signifie pour vos travailler dans ce lieu? R - L'image d'os sclérosés n'est pas si mauvaise. Car sans les os, nous serions réduits à de malheureux tas de viande, sans colonne vertébrale, nous ne pourrions pas nous tenir dressés debout. L'Eglise a besoin, elle aussi, d'une colonne vertébrale, c.à.d. qu'elle a besoin d'une institution, d'une administration. Bien entendu, elle doit se garder du "trop" d'institution et d'administration, qui pourrait tuer l'esprit et la vie. Mon expérience me permet d'affirmer que l'administration de l'Eglise à Rome est "maigre". La CDF est la Congrégation la plus fournie, et elle emploie 45 personnes! Demandez-vous combien de personnes travaillent dans un ministère à Berlin. Alors que l'Allemagne compte 80 millions d'habitants, l'Eglise catholique compte un milliard de fidèles. De plus, la plupart des collaborateurs de la CDF exercent des charges pastorales dans des paroisses, ou des mouvements. Ils ne sont donc pas uniquement les employés de la Curie. Pour moi, mon travail à la CDF est un emploi au service de l'Eglise. Parfois, notre travail est astreignant, nous, nous avons affaire avec les difficultés et les plaies du peuple de Dieu. Mais dans mon for intérieur, je suis heureux de pouvoir travailler au coeur de l'Eglise, à l'ombre de la Basilique Saint-Pierre. Il y a le bonheur de participer de l'intérieur à l'édification de l'Eglise. Il y a le bonheur de collaborer avec le successeur de Saint-Pierre.
Q8 - Le cardinal Ratzinger, pour beaucoup de gens en Allemagne, passe pour être le PanzerKardinal, c.à.d. pour être un homme dur, sévère. De Rome, comment l'avez-vous perçu? R - Le qualificatif de PanzerKardinal dur, sans cœur, est un réel mythe. Grâce aux medias, ce type de perception a été propagé en Allemagne, puis dans le monde entier jusqu'à ce que l'an dernier (en 2005) elle s'effondre comme un château de cartes. Le cardinal Ratzinger est un homme aimable, bon et modeste. Lorsque je le rencontrais à la CDF, il me serrait à chaque fois la main et me demandait des nouvelles de mea santé. Lors de rencontres en cercle réduit, nous avons ri de bon cœur. Pour la pause journalière, à 11h, il nous faisait apporter des gâteaux, et autres bons cadeaux faits par ses amis bavarois. Au travail, j'ai pu constater qu'il était exceptionnellement compétent et travailleur. Il appréciait chez ses collaborateurs l'application dans le service, la propension à coopérer, la sincérité de la foi, et aussi le sens de l'humour. Toute forme de mise en avant, de carriérisme, lui répugnait. Il nous faisait toujours beaucoup confiance. Lors de nos réunions, il écoutait chacun, car, comme il aimait à le dire "l'Esprit Saint peut aussi s'exprimer par la bouche des plus jeunes".
Q9 - Quelles sont les capacités particulières du cardinal Ratzinger? R - C'est un homme de dialogue. Beaucoup de gens sont frappés par sa capacité d'écoute, et de se rapprocher des autres. Très souvent, j'ai pu constater comment, après un entretien, il pouvait formuler l'exposé d'un participant que celui-ci ne l'avait fait lui-même. Mais il sait aussi répondre aux questions des hommes. Il n'a pas peur des hommes, il s'engage pour la foi et pour la vérité, et il essaie de convaincre les hommes avec des arguments. Cela est lié au fait qu'il est un grand maître en théologie. Lorsqu'au cours de réunions à la CDF, nous abordions des questions qui nous semblaient à tous très compliquées, ,il prenait souvent la parole pour nous préciser clairement les tenants et les aboutissants. Il est comme un aigle qui regarde d'en haut l'ensemble du paysage, et fond immédiatement sur l'essentiel. Je le considère comme le plus important théologien vivant. De plus, le Seigneur lui a donné le don de la parole. C'est un prédicateur doué, qui sait exposer clairement les mystères de notre foi, comme un Père de l'Eglise d'aujourd'hui. Un professeur de langue allemande m'a écrit récemment que son discours était d'une simplicité limpide et cependant plein de gravité. Lorsqu'il parle, les gens se taisent. Ils sont suspendus à ses lèvres, non seulement parce que ce qu'il dit est verbalement brillant, mais parce que cela vient de l'intérieur, de la profondeur d'une foi vécue, priée et réfléchie.
Q10. Le Cardinal Meisner, après l'élection du Pape Benoît XVI, a qualifié ce dernier de "Mozart de la théologie". Que pensez-vous de cette comparaison? R. Cette comparaison frappante du Cardinal Meisner exprime que le nouveau pape n'est pas seulement un grand théologien professionnel. Il sait aussi comment expliquer la doctrine de Dieu dans sa beauté intérieure et son harmonie. Et ainsi il nous rend un peu conscients de quelque qui est largement oublié: à savoir, qu'il est beau de croire, et que la doctrine catholique n'est pas une chose ennuyeuse, mais une merveilleuse symphonie qui veut nous entraîner et peut donner à nos vies une nouvelle profondeur et un nouveau rayonnement.
Q11. Vous avez à présent un nouveau patron à la CDF. Le cardinal Levada est le successeur que le pape Benoît XVI a nommé à ce poste. Avez-vous été surpris par la décision? R. Un petit peu, même s'il y a de bons arguments pour la nomination du cardinal Levada. En tant que prêtre, le nouveau patron a plusieurs années d'expérience à la CDF et connaît donc le travail par expérience personnelle. Comme archevêque de San Francisco, il a su combiner une véritable charité pastorale et une orientation claire vers l'autre. Durant plusieurs années, il a géré avec compétence la Commission doctrinale de la conférence des évêques américains. C'est certainement un atout pour le CDF, d'avoir un préfet issu d'un pays anglophone, qui connaît très bien le monde moderne, connaît bien les problèmes des gens, et est aussi enraciné dans la foi et l'amour pour l'Eglise.
Q12. Est-ce un gros changement pour vous? R. Non, le travail est essentiellement resté le même, même si bien sûr le cardinal Ratzinger nous manque. Mais en tant que pape, il suit avec grand intérêt la congrégation qu'il a dirigée pendant plus de 20 ans, et continue à en tracer la ligne directrice.
L'élection du Pape ------------------
Q1. Le 19 Avril, il y a eu un grand moment, quand on a annoncé que le cardinal Ratzinger était le nouveau pape. Comme avez-vous vécu le moment de l'élection du Pape, et comment avez-vous réagi? R. Je me tenais - avec quelques collègues - Place Saint-Pierre. Je voulais prier, mais j'en étais à peine capable, car de plus en plus de gens arrivaient et la tension intérieure ne cessait d'augmenter. Quand le nom du nouveau pape a été proclamé, nous avions tous les larmes aux yeux, des larmes de joie. Ce qui m'a énormément impressionné alors, c'est qu'il y avait une telle foule sur la place Saint-Pierre, il y avait plus de cent mille personnes, ils ont immédiatement acclamé le nouveau pape comme ils avaient acclamé son prédécesseur. J'en étais certain: les fidèles l'ont tout de suite accepté comme le nouveau Pierre, le rocher qui les soutient, eux et l'Église.
Q2. Aviez-vous envisagé que le cardinal Ratzinger serait élu pape? R. Oui, j'étais presque sûr qu'il serait élu. À la congrégation de la foi, j'ai souvent pu voir combien il était apprécié par les cardinaux et les évêques, avec quel respect et quel amour ils s'adressaient à lui et lui demandaient des orientations. Nous avons tous été impressionnés par la manière dont il a dirigé les funérailles du pape Jean-Paul II et les réunions des cardinaux avant le conclave. Un cardinal italien a déclaré récemment: "Quand le cardinal Ratzinger prenait la parole lors du pré-conclave, les cardinaux se regardaient, et se concertaient du regard comme pour dire: "Oui, c'est bien lui qu'il faut". L'après-midi du 19 Avril, j'ai eu une séance de travail avec mes frères et sœurs de la famille spirituelle, "L'Œuvre". Et j'ai soudain eu la certitude intérieure qu'il serait le nouveau pape. De nombreuses autres personnes m'ont dit avoir eu des expériences similaires.
Q3. Pensez-vous que le cardinal Ratzinger lui-même avait envisagé cette possibilité? R. Non, il ne s'y attendait pas. Deux jours avant le début du conclave, nous avons célébré avec lui son 78e Anniversaire à la CDF. A cette occasion, il nous a invités à prier pour les cardinaux, afin qu'ils trouvent vite un bon nouveau pape. Il reviendrait - a-t-il dit - à la Congrégation pour quelques semaines, puis, après la nomination d'un nouveau préfet, il prendrait la retraite souhaitée
Q4. La plupart des gens vont à la retraite à 65 ans. Le pape Benoît aura 80 ans l'année prochaine. Où trouve-t-il la force pour accomplir son ministère? R. Le pape sait que le Seigneur l'a choisi pour ce poste, et il a la ferme conviction que Dieu dans sa bonté, ne distribue pas seulement des tâches, mais donne aussi la force de supporter les charges liées à sa fonction. En outre, il est conscient que beaucoup de gens prient pour lui, et la prière des fidèles le porte et le soutient. Enfin, c'est un homme qui vit entièrement de la liturgie, surtout dans l'Eucharistie; ici est sans doute la véritable source de sa force.
Q5. L'avez-vous rencontré personnellement après l'élection papale, ou bien n'est-ce plus possible? R. Bien sûr, les rencontres avec le Pape ne sont plus aussi fréquentes qu'avec le cardinal Ratzinger. Le pape a la lourde tâche de s'occuper de la Curie et de prendre soin des fidèles du monde entier. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a plus de rencontres. Le lendemain même de l'élection papale, il est venu à la congrégation doctrinale et a passé environ deux heures avec sa "famille" comme il nous appelait à l'époque. Une fois, nous avons célébré en petit comité une messe avec lui. Une autre fois, les membres et le personnel de la CDF ont été invités à une audience privée. Et occasionnellement, il y a d'autres occasions de le rencontrer.
Pontificat ----------------- Q1 Certaines personnes prétendent que Benoît XVI est différent du cardinal Ratzinger. Votre ancien chef a-t-il changé depuis l'élection papale? R. Bien entendu, il a en tant que pape d'autres responsabilités qu'avant et cela rend plus apparents certains traits de son caractère qu'on ne percevait pas aussi nettement avant. Mais, pour l'essentiel, son comportement et ses orientations n'ont pas changé. Il se donne entièrement à son rôle de successeur de Pierre et en même temps, il reste totalement lui-même.
Q2. Vous connaissez très bien le Saint-Père à travers la CDF. Pensez-vous qu'il rencontre des difficultés particulières dans son pontificat, qu'il ait des préoccupations particulières? Si oui, lesquelles? R. Il me semble que le Saint Père veut apporter aux hommes, en particulier aux catholiques, l'assurance que la foi est solidement fixée. Après le Concile Vatican II, ils avaient parfois l'impression que tout devait changer maintenant, même la foi. Cela a perturbé beaucoup de gens. Bien sûr, il faut un renouveau, mais la véritable réforme, celle que voulait le Concile, ne peut finalement naître que dans l'approfondissement et la renaissance de la foi. Ensuite, l'une des préoccupations du Pape, est certainement de révéler à nouveau les fondements du christianisme. Assez souvent, durant ces dernières années, nous avons gaspillé notre énergie dans des débats longs et stériles portant sur des questions secondaires, et nous avons perdu de vue les vraies questions: que signifie être chrétien? Qui est Dieu et qu'est-ce que l'homme? Qu'est-ce qui va changer pour ma vie si je dis oui au Christ et à l'Eglise? Qu'est-ce qui distingue le chrétien du musulman ou de l'incroyant? Ces questions, nous devons aujourd'hui y faire face, et le Saint-Père nous en parle dans sa première encyclique, où nous pouvons trouver les réponses. En plus, le pape Benoît veut également poursuivre plus loin le dessein œcuménique, particulièrement en direction des églises orthodoxes, dont nous sommes en effet très proches dans la foi. Il ne s'agit pas pour lui d'aboutir à une unité externe, que finalement seul Dieu peut donner. Avant tout, il a à cœur d'atteindre une profonde unité intérieure par une plus grande fidélité de tous à l'Evangile et le témoignage commun rendu au Christ dans un monde qui s'organise sans Dieu, et même contre Dieu.
Enfin, le Pape désire défendre les grands principes éthiques de la société, en dialogue avec les fidèles des autres religions et toutes les personnes de bonne volonté, et donc de servir l'humanité tout entière. Pensons aux questions de protection de la vie, du mariage et de la famille, de la biotechnologie, de la justice sociale, de la paix, de la réconciliation entre les peuples et les nations, de l'égalité entre les riches et les pauvres, pour n'en nommer que quelques-unes.
Q3. Y a-t-il eu des changements à Rome dans la première année du nouveau pontificat? R. Il est impressionnant de voir que le flux des pèlerins, après les funérailles de Jean Paul II et l'élection de Benoît XVI ne s'est pas effondré. Le nouveau pape a à plusieurs reprises souligné la continuité avec Jean Paul II, mais signe aussi de façon claire ses propres accents. En simplifiant, on peut dire que la foule accourait chez Jean-Paul II pour le voir. Chez Benoît XVI, elle vient pour l'écouter. Le précédent pape était capable d'ouvrir de nombreux coeurs, le Pape actuel est capable de les remplir. On pourrait presque parler dans ce contexte d'une complémentarité de ces deux papes. De plus, le Saint-Père essaie de diriger l'Église avec sérénité. Il n'a publié que quelques documents, il exprime ses enseignements surtout à travers les homélies et au cours des audiences générales. Il se comporte en public de façon plutôt réservée, dans son humilité, il est comme une icône du Seigneur. Enfin, il est sur le point d'entreprendre des changements au niveau de la Curie romaine. Certains postes clés sont déjà renouvelés, le cardinal Bertone va bientôt prendre ses nouvelles fonctions de secrétaire d'État. Il semble que le Saint-Père veuille renouveler la Curie, de manière ciblée, mais surtout renforcer l'unité et la coopération entre les différents dicastères.
Q4. On a dit que le pontificat de Jean Paul II avait eu une signification particulière pour la Pologne. Pensez-vous que la même chose puisse se produire avec le pontificat du pape Benoît, pour les pays de langue allemande? R. Le pape Jean Paul II était un grand fils de la Pologne, qui fut totalement soutenu par ses compatriotes, et qui a vraiment changé le visage de ce pays: le rideau de fer est tombé, la dictature du communisme s'est brisée. Les incroyants eux-mêmes s'accordent en grande partie sur l'action du défunt pape. Benoît XVI, lui, a conscience d'être le père de tous les croyants. Il est un don pour le monde entier, mais il est certainement un don spécialement pour les pays de langue allemande. Bien sûr, nous sommes tous invités à le soutenir par notre prière et notre loyauté, comme les Polonais ont sutenu Jean-Paul II Il me semble que nous voyons déjà les prémices d'une aube nouvelle dans les pays germaniques: pensons à Cologne et à l'ouverture vers de nombreux jeunes! pensons au nombre croissant de pèlerins venant à Rome d'Allemagne et d'Autriche! Pensons à certains critiques de l'église, comme Hans Küng, qui sont devenus silencieux! (ndt: là, le bon Père n'avait pas encore vu les derniers développements!!) Ou pensons aux médias, qui progressivement perdent leur agressivité face à l'Eglise (ndt: même remarque! C'était avant les scandales pédophiles. Mais il faut reconnaître que la situation actuelle lui donne plutôt raison). Bien sûr, il n'est pas facile de passionner les occidentaux avec la foi, car apparemment, dans notre société, il n'y a plus de place pour Dieu, parce que l'on pense pouvoir se construire son futur tout seul, sans Dieu. Nous voulons espérer que les gens comprendront à quel point la foi enrichit nos vies, à quel point elle peut servir la société, l'économie, les orientations politiques. Et nous espérons que beaucoup trouvent leur chemin hors de l'indifférence et de l'égoïsme, et redécouvrent la joie de croire en Dieu, la joie de vivre, la joie de la famille et des enfants, la joie de la prêtrise et de la vie consacrée, la joie dans l'Eglise . "Non ne voulons pas être les maîtres de votre foi, mais les serviteurs de votre joie» (2 Corinthiens 1:24). Cette phrase de Saint Paul a été choisie par le prêtre nouvellement ordonné Joseph Ratzinger pour le faire-part de sa première messe. Elle fonctionne comme un fil conducteur à travers son travail en tant que professeur, cardinal et pape. Aider les gens pour qu'ils puissent redécouvrir la joie de Dieu: c'est le souhait du Saint-Père - pour les pays de langue allemande, mais aussi pour l'Europe et le monde.
Q5. On sait que le pape Jean-Paul II était un grand admirateur de Marie, que la spiritualité mariale était quelque chose de très important pour lui. Y a-t-il aussi chez le pape Benoît un accent semblable de spiritualité? R. Il faudrait poser la question au Saint-Père lui-même. Il me semble qu'il tire sa force principalement de la Parole de Dieu et de la Sainte Messe. Il vit de l'Eucharistie et pour l'Eucharistie. Il vit avec l'année liturgique, surtout avec ses temps forts - l'Avent et Noël, le Carême et Pâques - ainsi que les fêtes du Seigneur, de Sa mère et de nombreux saints. Dans la liturgie, il voit le milieu intérieur de l'Église, le lieu de la proximité spéciale à Dieu. C'est pourquoi,la liturgie lui tient tellement à coeur, et fortifie beaucoup sa spiritualité.
Q6. Qu'attendez-vous de la visite du pape en Bavière? R. Tout d'abord, que les gens réalisent à nouveau que la foi n'est pas comme un lourd sac à dos rempli de commandements et d'interdits, qui nous écrase, et rendre la vie difficile. La foi est la relation avec le Dieu vivant qui est amour, qui a voulu et créé chacun de nous, qui soutient et nous guide et ne veut rien de plus que notre vie et notre bonheur. Espérons que le pape parviendra à convaincre les gens plus fortement encore de cet aspect positif de la oi. J'y joindrais un second voeu: beaucoup de gens regardent l'Église avec une certaine méfiance: ils entendent beaucoup parler des fautes qui ont été faites dans l'Eglise, et il en sera probablement toujours ainsi, parce que l'Église est composée d'hommes qui sont faibles par définition; ils trouvent l'Église archaïque et sans attrait, ils pensent que l'on ne peut pas être à la fois laïc et dans l'Église. Ce n'est pas vrai. L'Église a 2000 ans, mais elle est toujours jeune de cœur, parce que le Christ vit en elle. Elle ne veut rien d'autre que d'être messagère de la vérité et de l'amour de Dieu, de la grande famille des enfants de Dieu. J'espère et je prie pour que beaucoup de gens découvriront à nouveau ce vrai visage de l'église, que l'amour pour l'Eglise croîtra à nouveau dans les pays de langue allemande. Et encore, un troisième souhait: Parce que notre foi est devenue fatiguée, nous avons aussi largement perdu l'élan missionnaire . Mais lorsque nous aurons redécouvert que la foi est un grand trésor - le plus grand trésor qui soit - alors renaîtra en nous une ardeur nouvelle pour témoigner notre foi. "C'est de l'abondance du coeur que la bouche parle" (Lc 6:45) Pour le Saint-Père, la transmission de la foi est une préoccupation essentielle. Nous sommes tous appelés à vivre notre foi et à la transmettre - et cela, partout: dans la famille, à l'école, au travail, avec les amis dans les médias. Et pourquoi ne parlerions-nous pas aussi parler de Jésus avec les croyants des autres religions - avec les musulmans, avec les bouddhistes, avec tous ceux avec que la providence a conduits dans notre pays à la recherche d'une maison. Le pape serait très heureux si sa visite en Bavière contribue à renouveler l'élan missionnaire dans de nombreux cœurs.
(Original en allemand ici: www.daswerk-fso.org , traduction VB)
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Mgr Charles Chaput à Philadelphie | Oslo: le honteux déni de réalité des medias
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