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LE VISITEUR DE "AL ME TABIÀ"
 

Rencontre du Saint-Père avec un paysan de Lorenzago di Cadore, en juillet 2007. Récit dans le journal local, Il Corriere delle Alpi (reprise, 31/7/2011).

En 2007, Saint-Père avait choisi de passer ses vacances dans les Dolomites, aux confins du Trentin et du Haut-Adige, à Lorenzago di Cadore, dans la province de Belluno, du 7 au 27 juillet .




 
 

Un Pape arrive dans un chalet de Lorenzago
Lin Fontanive retrace la longue conversation qu'il a eue avec Benoît XVI
En souvenir, le présent de deux rosaires.
Toute la famille était là.
Sa femme confesse "D'émotion, je ne savais plus que faire"


Francesco dal Mas
LORENZAGO.
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"Ici c'est un paradis". Parole de Pape. Et il faut le croire.
Jeudi soir, à 18h30, "al mie tabià" de Stabie, sur le passo Mauria.
Celestina De Zordo voit s'approcher, venant de la vallée, deux voitures avec des vitres noires, puis une moto. Elle appelle son amie Valentina Dolmen et elles s'informent mutuellement. "C'est étrange qu'il y ait des gens à cette heure. Que viennent-ils faire?", se demandent-elles.
Peu après, son mari, Lin Fontanive, qui travaille dans le pré devant sa "tabià", avec son ami Paolo De Bernardin, s'exclame : "xxx [juron local], qu'est-ce que je vois?".
"Un homme vêtu en Pape marche à pied, le long de la route", raconte-t'il . Je me dis : il est trop petit pour que ce soit lui. Mais quoi? C'est vraiment lui. Au contraire, de la main, il me fait signe d'aller à sa rencontre.
À ses côtés il y a un prêtre. Je saurai ensuite qu'il s'agit de son secrétaire, Padre Georg. Je lui baise la main puis réalise que je dois le retenir un peu, jusqu'à ce que ma femme arrive. Paolo, mon ami, va la chercher ".

Après quelques minutes de conversation, Benoît XVI est sur le point de s'en aller. "Vous ne pouvez pas partir, avant que que ma femme ne vous ait salué", lui dit Lin.
A ce moment, Lin a un instant de transport de trop. "Il me semblait, depuis le premier moment, si simple, si humain, qu'il m'est venu l'envie spontanée de l'embrasser et, avec la main droite, de lui caresser le dos, comme on fait entre deux amis. Et il s'est laissé caresser ".

Maggie, le chien, habituellement agité lorsqu'il passe quelqu'un sur la route, est inexplicablement tranquille. Lin mène Benoît XVI devant le crucifix. Le pontife se recueille en prière.
Puis commence une singulière conversation. Avec le pontife installé sur une chaise de bois. Celle-là même utilisée par Wojtyla, durant ses vacances, en 1998, pour se reposer, pendant une promenade.

- Lin : "Sainteté, cette chaise fut aussi utilisée par votre prédécesseur".
- Le Pape : "Ah, oui?".

- Lin : "Ce jour-là, malheureusement, nous n'étions pas à la maison. La chaise est toujours dehors, pour accueillir les hôtes ".
- Le Pape : "C'est vous qui avez fabriqué ce crucifix?".
- Lin : "À vous, je dois la vérité. J'ai réalisé seulement le support en bois. La ferronnerie est de Francesco Place. Le crucifix, je l'ai acheté en Autriche. Je l'ai voulu, ce crucifix, après avoir été guéri d'une attaque cérébrale en 1995 ".

- Le Pape : "Pourquoi est-il écrit 'al mè tabià' "? Qu'est-ce que cela signifie?".
- Le secrétaire Georg : "Cela semble écrit en caractères cyrilliques".
- Lin : "Non, non. C'est de l'italien (ndt: en réalité, c'est du patois). Cela veut dire "mon chalet". Mais ce n'est pas une expression de possession. Cela veut signifier que ce chalet est à l'hôte, celui qui vient me voir ou qui, plus simplement, se promène sur cette route. Donc c'est aussi votre chalet ".

Le Pape sourit. Et ensuite il demande :

- "Que veut dire cette autre inscription "Aga furba "?".
- Lin : "Elle signifie de l'eau rusé".

- Le Pape : "Pourquoi rusée?".
- Lin : "C'est une blague pour les amis. Ou pour ceux qui passent sur cette route. Cette inscription indique une fontaine factice. Vous la voyez? Ceux qui veulent se désaltérer ne trouvent pas l'eau. Elle est fausse ".

Le Pape sourit. Puis il demande :
- "Qui a réalisé ces faces sculptées dans le bois?". (ndlr: Il s'agit de troncs d'arbres, qui portent au sommet des visages de personnes ).
- Lin : "Ce sont les visages d'amis".

- Le Pape : "Mais celui avec les lunettes, c'est vous?".
- Lin : "Comment votre sainteté a-t'elle deviné? Il y a aussi mes filles, Tatiana, Lara, et mon gendre Alexandre. Il y a également ma femme. C'est Renzo le furlan qui les a sculptés. Nous l'appelons ainsi parce qu'il est de Forni ".

- Le Pape : "C'est un paradis, ici".
- Lin : "C'est vous, qui avez amené ce beau temps";

Emu, il fond en larmes
. Et il demande au pape la permission d'aller dans le chalet chercher l'appareil photo, au moins pour un cliché. Accordé.

- Le Pape : "Etes-vous sûr qu'il y a une pellicule?".
- Lin : "Je n'en suis pas sûr. C'est un vieil appareil, que j'utilise seulement de temps en temps. En tout cas, s'il n'y a pas de pellicule, il faudra que vous reveniez".

Lin raconte ensuite : Padre Georg a pris une photo, un des accompagnateurs en a pris deux autres. Benoît XVI est pris en photo, tenant par la main la femme de Lin, Celestina.

- Le Pape : "Oui, oui". Il répond avec un sourire. Et il demande : "Qu'y a-t'il, là-bas?".
- Lin : "Mon jardin".

- Padre Georg : "Que cultivez-vous dans ce potager?".
- Lin : "Kartofen".
- Le Pape, en riant : "Non, des pommes de terre". Et il ajoute : "Il tombe beaucoup de neige, ici?".
- Lin : "Jusqu'à deux mètres".

- Le Pape : "Et ce drapeau ? (ndlr: du Vatican, sur le chalet)".
- Lin : "Sainteté, comme vous le voyez, c'est encore celui de Papa Wojtyla. Le vôtre je l'ai à la maison. Je l'exposerai demain. Vous le trouverez, quand vous reviendrez ".

Le Pape sourit.

- Lin : "Sainteté, je peux vous offrir quelque chose à boire?".
- Le Pape : "Eh bien...".
- Padre Georg : "Il vaut mieux pas".

Arrive l'épouse, et son amie. Et avec eux Paolo.

- "Le Saint-Père m'a embrassée. Je ne savais pas quoi faire, j'étais très émue. Je n'ai pas réussi à lui dire un mot ".

Le Pape et ses accompagnateurs saluent, après avoir offert des chapelets.
"Nous avons eu peur", racontent les deux dames, " à cause des hommes que nous avions vu passer un peu plus tôt. Et la peur s'est accrue lorsque nous avons constaté qu'ils avaient été faire le guet derrière le chalet, avec les voitures dissimulées. Nos jambes tremblaient, parce que nous imaginions qu'ils avaient de mauvaises intentions. Et l'inquiétude n'a pas diminué lorsque l'un d'eux s'est retourné, mordant tranquillement une pêche. En nous approchant il nous a tranquilisées : madame, j'étais bien caché, n'est-ce pas? Je lui ai répondu : certes, en mangeant la pêche. Et l'interlocuteur : même les gardes du Pape mangent des pêches.
Ensuite, s'adressant à Lin et à son ami Paolo, mais d'un ton rassurant : nous avons entendu de loin de quoi vous parliez ".

© Copyright Corriere delle Alpi, 14 Juillet 2007




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