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JMJ: SECONDE PARTIE DE LA LETTRE DE JEANNINE
 

La veillée et la messe des Quatre Vents, les dernières rencontres. (27/8/2011)

-> Première partie ici: La lettre de Jeannine du 25 août




 

Je reviens vers vous pour terminer le voyage de Benoît XVI à Madrid.

Le 20 août, dans la matinée, avant d'aller célébrer la messe avec les séminaristes, dans le parc du Retiro, le Pape a confessé trois jeunes : un Français, un Allemand et un Italien. Il me semble avoir lu qu'un Espagnol avait aussi bénéficié de cette expérience enrichissante et appréciée. C'est une nouveauté.

Puis la papamobile l'a conduit à la cathédrale de l'Almuneda où 6000 séminaristes du monde entier attendaient ce rendez-vous inespéré avec le Pape, une nouveauté pour un temps de JMJ. La cathédrale est pleine et il y a foule à l'extérieur. Les visages irradient de joie et la procession la traverse dans une ambiance de fête. Traditionnelles paroles d'accueil, très appréciées, du Cardinal espagnol qui, suivant la tradition instaurée par Benoît XVI, reçoit un calice, cadeau du pape à la cathédrale. Un jeune séminariste dans son intervention n'oublie pas de rappeler les 60 années de sacerdoce du pape et déclenche ainsi une salve d'applaudissements. Le pape se lève pour le remercier et écoute avec une paternelle et souriante attention les mots qui lui sont confiés. On retrouve sur le visage de Benoît XVI les yeux qui se ferment brièvement pour bien montrer qu'il a compris et enregistré dans son cœur la pensée de son interlocuteur. Le buffet d'orgues est imposant et la chorale installée devant fait tomber sur la cathédrale un voiie de musique, Benoît XVI chante avec elle. La coupole est richement décorée, avec de nombreuses couleurs et l'édifice est plein de lumière. L'homélie est un carnet de route pour permettre aux séminaristes de bien vivre les années de séminaire Le séminariste est appelé à devenir un prêtre, un saint prêtre qui doit être nourri de l'amour de Dieu, ouvert à la charité, à l'amour des petits, des pauvres. Il faut du courage, de la ténacité. Il faut être certain de ne pas se rechercher soi-même mais bien de ne voir que Dieu et ainsi édifier ceux qui vont vous entourer. Le moins que l'on puisse dire est que le discours est exigeant mais il a l'avantage de ne pas jeter de la poudre aux yeux; impossible d'accuser le Pape de forcer la main des futurs prêtres pour faire du chiffre. La chaleur est étouffante, dans l'assemblée les livrets servent d'éventail, notre Saint-Père tousse et s'éponge le visage. Pour le Pater Noster introduit par le Pape toute l'assemblée participe et pour ceux qui échangent le signe de paix avec le Pape, le souvenir restera sûrement longtemps dans les cœurs. Pour conclure Benoît XVI annonce que bientôt, à Rome, il fera Saint Jean d'Avila docteur de l'Eglise. Succès immédiat avec une salve d'applaudissements, les séminaristes affichent des mines ravies. La célébration se termine et, très souriant, mitraillé pour les photos, applaudi longuement, Benoît XVI accompagné par un très bel hymne à La Vierge, sort en saluant et en n'oubliant pas la chorale installée sur la tribune, devant l'orgue, en hauteur.

Avant d'aller déjeuner et prendre un temps de repos il va rencontrer le Chef du parti de l'opposition; pas une minute perdue.

Cette célébration a été exigeante, c'est normal de la part de notre Pape, mais émouvante de par l'accueil qui lui a été réservé, de par sa disponibilité, son courage pour lutter contre la fatigue, contre cette chaleur écrasante, son effacement devant tant d'affection manifestée, aucun triomphalisme.

La visite à la Fondation Institut San José de Madrid a été le moment où Benoît XVI apparaît avec cette profonde douceur qui l'habite. L'arrivée de la papamobile est très attendue à l'Institut mais en plus les jeunes sont venus le saluer en attendant de regagner le terrain d' aviation pour la veillée. Les personnes sont nombreuses sur place, il rencontre entre autre les frères de Saint-Jean de Dieu. Les petits drapeaux agités colorent la foule. Un jeune: Antonio fait un témoignage émouvant. Benoît XVI délivre son message encourageant pour les personnes en difficulté et exigeant pour la société : elle doit accepter les soufrants et leur donner un regard d'amour pour leur permettre de vivre. Une peinture faite par un jeune handicapé et un gros bouquet sont remis en cadeau au Pape. Il est touchant de regarder la douceur du geste, sa délicatesse pour caresser les visages, son sourire apaisant. Douze jeunes sont présentés, une mosaïque est remise en cadeau au Saint-Père. . Avant de partir pour la place de Cuatro Vientos pour la veillée il signe le Livre d'or de l'Institut.

La veillée de prière sur le terrain militaire des Quatre Vents malgré une météo déplorable: trop de chaleur puis trop de pluie, un orage aussi violent que subit, reste le grand moment de ces JMJ. La famille royale est représentée par le Prince des Asturies et la Princesse Letizia qui accueillent le Saint-Père à son arrivée en papamobile. La foule est impressionnante, un véritable océan de participants, tous les drapeaux sont mélangés et une véritable euphorie règne. les cris retentissent : "Papa a Madrid", "Benedicto". Benoît XVI, fidèle à lui-même, très simple, léger sourire se lève pour remercier les deux jeunes qui ont parlé. La croix des JMJ et l'icône de la Vierge sont portées par des jeunes jusqu'à leur emplacement. Benoît XVI suit attentivement les jeunes qui exposent leurs questions. La soirée change de visage car la pluie et un violent orage se déclenchent et obligent le Pape à interrompre son discours. Sans calotte, trempé, la splendide chevelure livrée au vent, sagement assis et entouré par des parapluies blancs qui n'offrent qu'une protection bien illusoire, cet homme réputé si sévère attend calmement que les choses se calment et n'envisage pas une seconde de quitter les lieux: il reste avec les jeunes.Au gré des photos , sous un coin de parapluie, on aperçoit le Saint-Père, calme, serein avec un sourire amusé. Sur l'une d'elles Mgr Gänswein pointe le bout de son nez entre deux parapluies pour prendre des nouvelles, toujours la même discrétion.Après un long moment le Pape peut reprendre la parole ( le micro fonctionne de nouveau). Il abandonne son discours et délivre des messages dans différentes langues; il est écouté et très applaudi. Benoît XVI s'éloigne avec ses deux cérémoniaires mais ce n'est qu'une fausse sortie. Les jeunes veulent le voir revenir et le font savoir; ils ne sont calmés par rien et débordent d'énergie, d'enthousiasme. Leurs vœux sont exaucés car le Pape revient en tenue de célébrant. Le magnifique ostensoir est en place et l'assemblée plonge dans un silence assourdissant pour l'adoration eucharistique: du grand art pour une foi solide comme le roc. Benoît XVI agenouillé, plongé dans la prière, est bien le guide de ces jeunes abîmés dans un extraordinaire silence. La caméra balaye les pèlerins en adoration. Tous ces jeunes laissent parler leur âme dans le secret d'un cœur à cœur avec Celui qu'ils sont venus rencontrer. Une jeune fille efface une larme qui coule silencieusement sur sa joue, d'autres sont là, mains jointes, yeux fermés, agenouillés, un homme jeune, debout, bras écartés et mains ouvertes paraît présenter une silencieuse offrande au Christ. Je n'oubliepas la prière de consécration des jeunes au cœur de Christ, avec des paroles vraies, sans fioritures, tout ce que j'aime. A la fin de l'adoration les jeunes sont photographiés avec le Pape puis les volontaires affluent et il faut canaliser le flot. Le vent se lève de nouveau et après avoir salué il s'en va, accompagné par l'hymne des JMJ. Un magnifique feu d'artifice clôture cette inoubliable soirée de fête pleine d'imprévus et qui est un véritable témoignage de foi avec un pasteur conforme à tout ce que l'on pouvait désirer : exigence, fermeté, totale compréhension des jeunes, maîtrise de la conduite à adopter face aux problèmes, intérêt et souci pour les conditions matérielles de ses jeunes qui vont attendre la messe du lendemain et s'organisent pour la nuit.

Cette pluie m'a fait repenser à Mariazzel où les éléments déchainés avaient poursuivi le Saint-Père de leur assiduité en mettant dans l'embarras Mgr Gänswein et le Cardinal Schönborn, ce dernier riait beaucoup en voyant le pape lutter désespérément avec sa cape rouge qui lui cachait le visage et l'empêchait de lire.

Calme, imperméable à la peur pour lui, responsable des autres, serein, amusé parfois par cette situation déconcertante, ces intempéries ont permis à ceux qui ne le connaissaient pas de découvrir un aspect inconnu de ce pape à la tête de un milliard deux cent millions de catholiques et qui, trempé, reste fidèle au poste sans exigences particulières, attentif à toutes les paroles qui lui sont dites et discute de la meilleure façon de sortir de l'impasse. Les jeunes sont avec lui et il n'est pas question de manquer ce rendez-vous, le tout dans la simplicité, dans l'effacement; j'aime infiniment. Benoît XVI est bien le guide sûr, qui garde la tête froide et sait où il mène son troupeau. Merci Très Saint-Père.

La dernière journée du voyage, le 21 août, débute sous le soleil revenu en force. Les souverains espagnols assistent à la messe de clôture devant un nombre impressionnant de participants et sous une chaleur accablante. La pluie de la nuit a été séchée bien vite. Benoît XVI est fatigué mais la célébration se déroule avec la sérénité et la beauté habituelles pour les cérémonies présidées par lui. La messe tout comme la veillée sont centrées sur l'Eucharistie qui est le point culminant des JMJ . La foi est un don de Dieu qu'il faut alimenter par une relation personnelle avec le Christ. Un chrétien seul est un chrétien en danger, il faut s'appuyer sur les autres, se soutenir sans se refermer sur soi. La procession des offrandes permet de retrouver le Saint-Père qui accueille, écoute, signe les fronts penchés vers lui avec cette bienveillante douceur qui le caractérise. Malgré la lassitude, la voix enrouée, il continue imperturbable; le marathon n'est pas fini mais le Seigneur et Marie, tout comme au long de la veillée, l'aident.

A la fin de la célébration le Pape bénit les petites croix des JMJ et en remet une à chacun des cinq jeunes agenouillés devant lui. La passation de la croix et de l'icône de la Vierge aux Brésiliens se fait dans l'enthousiasme . L'Angelus conclut cette messe intense par la participation en nombre et par la qualité de l'écoute.

Le lent balancement de l'encensoir rythme un temps qui n'est pas le nôtre: c'est celui de l'Eglise. Malgré les embûches, les attaques, les coups bas venant même de ceux qui devraient la soutenir Elle reste le bâtiment fort qui résiste dans la tempête. Cette conviction qui s'est développée dans le cœur du jeune Ratzinger n'a pas quitté celui du Pape âgé qui donne un merveilleux exemple de sagesse, de profondeur de foi, de sûreté dans les décisions prises, trop lentement au gré de beaucoup, et qui apporte un témoignage de stabilité, de confiance dans ce monde superficiel, volatile dans lequel nous vivons.

Son pas lent s'accorde à l'intériorisation de l'homme. Dans ces JMJ la foi, la place de l'Eucharistie n'ont laissé aucune place à la séduction, à la personnalisation et pourtant les occasions étaient nombreuses. Toujours en retrait, assurant le service minimum pour le "fun", restant égal à lui-même: patient, disponible, attentif à l'autre dans le sens le plus large du terme, il a séduit les jeunes habitués au clinquant de notre monde car il leur parle, avec une voix douce, de la " vraie vie ", de Celui qui ne déçoit pas, qui les aime. La côte de popularité, pfft!!, le résultat des sondages, de l' audimat, la une des médias : ce n'est pas pour lui. Il est heureux de l'accueil reçu là où il est venu mais l'essentiel c'est l'enracinement, l'engagement dans la durée.

Rencontre de Benoït XVI avec les bénévoles des JMJ. Thomas Wallut précise que d'habitude ce genre de séquence n'est pas retransmis mais, étant donné le travail accompli par eux et leur importance dans la réussite de ces journées inoubliables il aurait été regrettable qu'elle ne soit pas retransmise (c'est de moi). Pour ma part je l'ai trouvée infiniment touchante dans sa simplicité, sa sincérité. Une foule joyeuse entourait la papamobile. Les volontaires étant venus en famille, le secrétaire et le garde du corps se sont prêtés avec sourire et empressement à l'acheminement des nombreux bébés pour qu'ils soient embrassés par Benoît XVI. C'est une parenthèse que j'aime beaucoup. J'apprécie que le caractère très humain de cet homme soit mis en valeur pour qui veut bien s'en apercevoir. Le Saint-Père, d'excellente humeur, d'un bon pas, se dirige vers le grand podium. D'un petit geste de la main il remonte sa ceinture blanche, sourit et étend ses bras grands ouverts pour accueillir toutes les personnes présentes qui l'acclament. On retrouve une fois de plus son infinie délicatesse dans son souci de n'oublier personne, ceux qui étaient dans la lumière et ceux qui, dans l'ombre, ont permis ce déroulement heureux. Deux jeunes, un Espagnol et une Brésilienne s'adressent au pape et le remercient pour la confiance qu'il a placée en eux; pendant qu'ils parlent le pape, légèrement tourné vers eux, les suit avec un visage heureux, pas d'exubérance de sa part, tout est en nuance, en retenue. Debout pour les saluer, Benoît XVI pose ses mains avec douceur, délicatesse, sur le visage de la jeune Brésilienne qui lui parle.

Les mots sont simples pour remercier les volontaires et les valoriser. Aimer c'est servir et cela a enrichi ces journées. Ils ont aimé les autres en aimant Dieu, en acceptant la fatigue, ce long travail exigeant, ingrat mais qui a donné tant de bonheur. Après le Notre Père, suite à une légère erreur d'aiguillage, Benoît XVI entame un texte qui n'est pas le bon, s'en aperçoit de suite (ce qui bien sûr déclenche les applaudissements et le sourire des cérémoniaires) et conclut sa visite; il n'oublie pas de bénir ceux qui sont derrière lui sur le podium et embrasse une jeune choriste (en fauteuil je crois) très émue de pouvoir saluer le Pape. Emouvant dans sa simplicité, son attention aux autres, il repart en voiture pour l'aéroport.

Dernier rendez-vous : la cérémonie de départ à l'aéroport. Les meilleures choses ont une fin mais je suis soulagée de savoir que dans quelques heures il va retrouver le calme et la fraîcheur de Castelgandolfo. Les souverains sont présents, la mini-garde suisse et les jeunes sont encore là avec leur joie, leur enthousiasme pour dire au revoir à celui qui les a mené avec doigté, insistance et beaucoup d'amour sur le chemin qui peut les conduite au bonheur, le résultat dépend d'eux. Il y a une grande complicité avec le roi et la reine, la conversation est libre, spontanée. Benoît XVI monte aisément dans l'avion, salue et dans ses bras grands ouverts , du haut de la passerelle, accueille tous ses enfants rassemblés et gagne l'intérieur de l'avion. Bon voyage de retour à la maison Très Saint-Père, à mercredi pour l'audience générale.

J'ai vécu ce voyage avec beaucoup d'émotion, d'intensité et j'ai encore la tête pleine de tout ce que j'ai vu, entendu, lu. Je suis admirative de ce pasteur âgé, humble, effacé mais immense par son intelligence, la fulgurance de sa pensée, la sûreté dont il fait preuve pour mener la barque de Pierre. Dans ces JMJ marquées par la chaleur, l'énorme fréquentation, l'enthousiasme débordant des jeunes il est resté le pôle de stabilité vers lequel tous les jeunes convergeaient car ils étaient bien conscients de la valeur de leur pape. Ce que j'ai ressenti n'est pas lié à un quelconque emballement. Depuis six ans je le suis et mon enthousiasme est nourri d'observations bien précises; je trouve cet homme fascinant par la diversité des facettes qu'il offre à qui veut bien chercher à le comprendre et à l'aimer.

Jeannine




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