Mise au point

Mon "droit de réponse" à Monsieur Izoard. Et merci à Philippe Maxence. (21/3/2013)

Cf. Droit de réponse

     

Mise au point
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J'ai accordé à Monsieur Izoard le droit de réponse qu'il exigeait de moi - menaces de poursuites judiciaires à l'appui, sans doute au nom de la charité chrétienne. Je n'avais donc pas le choix.
Le droit de réponse lui a permis d'exposer son point de vue.
Mais comme je suis en principe chez moi dans ces pages, il me permettra je l'espère d'exposer aussi le mien.
Je n'ai rien fait d'autre, dans le billet incriminé, que commenter un article paru sur un site italien en libre accès à chacun, auquel Monsieur Izoard collabore, et qu'il avait signé.
Mon commentaire était vif, peut-être trop (et je le regrette), mais pas insultant, et exprimé en termes corrects. La comparaison entre les deux Pontifes - au détriment exclusif de Benoît XVI - mise en avant par les media n'est pas un fantasme de ma part, elle est sous les yeux de chacun, et l'article auquel je faisait allusion y ajoutait, peut-être involontairement, sa petite pierre.
Quant à l'accusation d'entrer dans la vie privée des collègues de Monsieur Izoard, elle est tout simplement grotesque.
C'est Salvatore Izzo lui-même qui racontait dans un article ses premiers pas de vaticaniste sous François (http://paparatzinger6blograffaella.blogspot.fr/2013/03/un-pastore-dalla-mano-sicura-salvatore.html).

Je prends acte que les medias sont (ou se croient) intouchables, et que ceux qui osent mettre en doute leur magistère, "bavent" sur eux. Cela me semble une inquiètante limitation de la pluralité de l'information.

PS: Au moment où j'achève ces lignes, mon irremplaçable amie Carlota, que je ne sais comment remercier, m'envoie en lien un article vraiment providentiel de Philippe Maxence, directeur de l'Homme Nouveau, sur son blog Caelum et Terra, intitulé "Le nouveau bal des girouettes".
Il illustre à la perfection mes intentions .
Je me permet de le reproduire (puisque j'y suis citée, pour le même article) tout en renvoyant expressément mes lecteurs au très beau blog que je découvre.

PPS: Si je comprends bien Monsieur Izoard, mon attitude critique envers l'information ne faciliterait pas "une lecture correcte de ses 8 années, riches, de pontificat". C'est sans doute prétentieux de ma part, mais si une poignée de journalistes influents avaient essayé, durant ces huit années, de faire connaitre la richesse du Pontificat de Benoît XVI avec autant de passion que moi, les choses auraient peut-être tourné différemment.

     

Le nouveau bal des girouettes
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Je ne suis pas vaticaniste et, vu ce qui se passe depuis une semaine (et même un peu plus) j’en remercie le Ciel. Le métier de vaticaniste n’est pas facile. Il faut connaître non seulement les rouages de l’Église, mais aussi les hommes de l’Église. Ceux qui sont à Rome ; ceux qui ont été à Rome ; ceux qui ne sont pas à Rome ; ceux qui pourraient être à Rome et, enfin, ceux qui rêvent d’être à Rome. Il faut aussi connaître la doctrine de l’Église. Au minimum son petit catéchisme, même si celui-ci a disparu. On se consolera avec le Compendium, mais l’ont-ils lu ?

À part, un très très petit nombre de vaticanistes, personne n’avait prévu l’élection du cardinal Bergoglio au siège de Pierre. Et moi qui ne suis pas vaticaniste, je ne l’avais pas prévu non plus.

Et j’avais encore moins prévu la suite.

La suite ? Comment dire ? Nous assistons, en effet, à un étrange spectacle. Nous voyons, par exemple, des cardinaux conclavistes racontant tranquillement et publiquement sur leurs blogs ou à la presse des épisodes du conclave. Ils ont pourtant promis sur les saints Évangiles de ne pas révéler un iota de ce qui se passerait dans la sainte enclave.

Je suis père de famille et j’ai appris à mes enfants qu’une promesse engageait et que les saints Évangiles n’étaient pas un livre parmi d’autres, mais la Parole même de Notre Seigneur. Devant ce spectacle, que vais-je leur dire désormais ? Qu’il y a une loi pour nous laïcs et une autre loi pour les cardinaux ?

Mais le spectacle ne s’arrête pas ici. Là aussi, comment dire exactement ? Les mots m’échappent pour décrire l’étrange situation à laquelle nous assistons. Situation tellement étrange que je suis même, ici, obligé de prendre mes précautions, en prévenant que ce que je vais écrire n’est pas une critique du nouveau pape.

Non, mais c’est une critique du bal des girouettes auquel nous assistons.

Nous lisons sous la plume de sérieux vaticanistes – ceux qui hier se sont trompés du tout au tout et qui aujourd’hui n’en font nullement repentance – ; nous lisons donc que François Ier est le pape de la simplicité et qu’il est le pape de la rupture.

Pape de la simplicité ? Est-ce à dire que Benoît XVI n’était ni humble ni simple ? Est-ce à dire que saint Pie X n’était pas simple ? Est-ce à dire qu’aucun pape avant le pape actuel ne fut humble et simple ? Il y a là non seulement un emballement dans le commentaire – car tous ils disent la même chose – mais un mensonge.

Le site Benoît et moi l’a montré très justement à propos d’un fait précis et je renvoie à la lecture éloquente de cet article.


François Ier, un pape de rupture ? Ceux qui écrivent de telles choses comprennent-ils les mots qu’ils utilisent ? En qualifiant ainsi un pontificat à peine commencé, sur un pontife dont on sait très peu de choses, mesurent-ils qu’au regard de la doctrine catholique ils torpillent celui qu’ils veulent encenser ?

La rupture n’a jamais été catholique puisque l’Église repose justement sur la transmission et la continuité. Certes un pape peut donner des inflexions et des directions nouvelles, mais s’il rompt avec ses prédécesseurs, d’une certaine manière, il se met hors course. C’est tellement vrai que Paul VI tout en assurant avoir introduit une « nouvelle messe » a tenu à dire qu’elle s’inscrivait dans la continuité de la messe précédente, ce que nous avons du mal à voir, avouons-le.

Les vaticanistes et les prélats qui parlent aujourd’hui nous montrent un spectacle affligeant. Hier, ils se réclamaient de l’autorité de Benoît XVI pour légitimer leurs prises de position et leurs actions. Aujourd’hui, ils n’ont que les mots de rupture, de changement, de transformation à la bouche. Un vaticaniste oppose même « l’autorité cléricale autoritaire » (sic) d’hier à « l’autorité d’estime » de celui qui n’a encore pris vraiment aucune décision. Les vaticanistes sont tellement collés à l’événement qu’ils sont submergés par l’émotion et incapables du moindre recul. Ils étaient hier pour Benoît XVI ; ils lui opposent maintenant François Ier. Ils brûlent ce qu’ils ont (trop) adoré, allant du connu à l’inconnu, drogués par l’effervescence et la chaleur romaine. Au lieu de maintenir la distance, ils se noient dans l’événement. Ce bal des girouettes va se terminer par un appel au Samu.

Il est étonnant de voir leur réaction quand nous osons proclamer notre attachement à la papauté. Pour les vaticanistes, il s’agit là d’un signe d’opposition au pape actuel, qu’ils traitent sur le registre de la dérision et de la psychanalyse de bazar. Or, n’est-ce pas eux qui glosent dans la pamoison sur le fait que François Ier a déclaré que le pouvoir est un service ? À vrai dire, le pape n’a fait qu’énoncer la vision catholique traditionnelle du pouvoir. Faut-il leur rappeler, à ces grands experts, que le pape a pour titre « serviteur des serviteurs de Dieu ». S’ils l’ignorent qu’ils aillent vérifier dans l’Annuaire pontifical, à la page consacrée au pape.

En tant que catholiques, nous devons bien sûr être attachés au pape et à la personne du pape. Non pas parce qu’il s’agit d’un magicien, du super curé du monde et du personnage le plus charismatique de la planète. Tout simplement parce qu’il est le vicaire du Christ et le successeur de Pierre. Au-delà de ses mérites et de ses défauts, la fonction papale ne lui appartient pas. Elle est le bien commun de l’Église, qu’il rend certes visible à sa manière. La véritable humilité consiste à se fondre en elle et à se laisser épouser par elle. Il faut du temps. Mgr Tardini a témoigné que Pie XII lui-même – pourtant au service de la curie depuis le début de sa carrière sacerdotale et ancien secrétaire d’État – a mis plusieurs semaines avant d’entrer complètement dans son rôle nouveau, qui dépasse pour une part les forces humaines. Bien qu’il fut préparé à ce poste, le pape Pacelli aura mis du temps. On comprend mieux ainsi pourquoi il aura fallu du temps aussi à Benoît XVI hier, et aujourd’hui à François Ier, pour se laisser investir par la fonction suprême.

La papauté est trop importante pour être abandonné aux ratiocinations des vaticanistes, aux feux médiatiques et au bal des girouettes. Après cette semaine importante pour l’Église, il serait temps qu’ils se taisent et qu’ils entrent en retraite