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La cote du Cardinal Kasper

Dans la polémique ayant suivi le Consistoire, sur l'accés à la communion aux divorcés remariés, selon Sandro Magister, c'est lui qui bénéficie des faveurs du Pape (10/4/2014)

>>> Voir à ce sujet: Des divorcés-remariés dans l'Église primitive?

Dans la dispute sur la communion aux remariés il y a un superfavori: Kasper
Sandro Magister
Settimo Cielo, 10 avril 2014
http://magister.blogautore.espresso.repubblica.it/
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L'un des mérites attribués au pape François est de vouloir «transformer l'Église en un lieu d'échange d'idées sans crainte, où tout le monde peut s'exprimer et être pris en compte» (paroles de son ghostwriter Victor Manuel Fernández, évêque et recteur de l'Université catholique Argentine).
Mais à voir ce qui s'est passé pendant et après le consistoire du 20-21 Février, il vient quelque doute.
Aux cardinaux réunis, il a été dit et redit que de ce consistoire, tout devait rester secret. Mais quelqu'un a brisé ce secret, par volonté même du pape: c'est le cardinal Walter Kasper, qui le Consistoire à peine terminé, prédisposa la publication de son discours d'introduction et de sa réponse finale à l'éditeur Queriniana de Brescia.
«Il Foglio» a brûlé la politesse à Kasper, anticipant la publication intégrale du rapport.
Mais quelques jours plus tard, «L'Osservatore Romano» a fait de même, anticipant la réponse définitive de Kasper et la préface au volume sous presse.
En faveur de Kasper, il y a eu l'éloge chaleureux dont l'avait gratifié le pape François au début de la deuxième journée du consistoire, après que plusieurs cardinaux soient déjà intervenus contre le soutien apporté par le rapporteur à la communion pour les divorcés remariés (1).
La contrainte du secret sur les interventions du consistoire a continué à valoir pour tous, à l'exception de Kasper, autorisé à cela par le pape.
Le résultat a été que non seulement «L'Osservatore Romano», mais aussi d'autres journaux catholiques comme «L'Avvenire», appartenant à la conférence des évêques d'Italie, se sont sentis obligés de s'en tenir à cette consigne.
Le seul à avoir droit de cité, et justement sur le journal du Saint-Siège, a été Kasper. Pour tous les autres le silence était de rigueur.
Seuls deux cardinaux, parmi les nombreux en désaccord avec Kasper, sont intervenus publiquement après le consistoire: l'L'archevêque de Bologne répond à Kasper) et l'allemand Walter Brandmüller. Mais ils ont dû le faire sur les journaux indépendants de l'institution ecclésiale, en Italie «Il Foglio» et en Allemagne «Die Tagespost».
Le texte de Brandmüller sur «Die Tagespost» est paru le 26 Février. L'interviewe de Caffara sur «Il Foglio» le 15 Mars. «L'Osservatore Romano» n'a pas dit un mot, ni de l'un ni de l'autre.
En revanche, de façon surprenante, le 5 Avril , «L'Avvnire» a repris en Italie le texte de Brandmüller. Mais il l'a fait près de quarante jours après sa sortie initiale, sous une forme synthétique et avec une mise en page peu visible. A lumière éteinte.
Dans son texte Brandmüller, en historien de l'Église qu'il est, prend pour cible et démonte la fiabilité de la source principale à laquelle Kasper fait explicitement appel: le livre de Giovanni Cereti “Divorzio, nuove nozze e penitenza nella Chiesa primitiva” (Divorce, remariage et pénitence dans l'Église primitive) publié dans sa première édition en 1977 et réédité en 2013.
Selon Brandmüller il n'existe aucune preuve que l'Eglise des premiers siècles ait admis à la communion eucharistique, après une pénitence appropriée, les gens passés à un second mariage et dont le premier conjoint est encore en vie.
Mais dans le même temps, sur le dernier numéro de «Il Regno», Cereti lui même est intervenu, avec un ton tout autre que conciliant:

«Je remercie le Cardinal Kasper, qui, je pense, conformément à la volonté du pape, a voulu citer justement à propos cette pratique de l'Eglise primitive mes recherches sur le sujet. Personnellement, je suis reconnaissant au Seigneur de voir prendre sérieusement en considération le fruit de recherches sur lesquelles, en quelque sorte, j'ai joué toute ma vie et qui, si ellee sont reconnues comme valides devraient permettre d'une part le rapprochement avec la pratique des autres Eglises chrétiennes et de l'autre un retour à l'Église et à la vie sacramentelle d'innombrables personnes dans le monde entier».

Concluant avec un anathème pour les dissidents:

«Je suis accompagné par l'espoir qu'aucun de ceux qui s'opposent aujourd'hui au tournant demandé par le pape François ne passe à une position novitienne, refusant le pouvoir de l'Église de remettre tous les péchés et risquant ainsi de sortir de la communion ecclésiale».

Les novatiens étaient, dans les premiers siècles, les rigoristes qui excluaient pour toujours de la communion ceux qui étaient responsables des péchés d'apostasie, d'adultère et d'assassinat (2).

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NDT

(1) Ma traduction d'après la version en italien, celle en français ayant été "nettoyée":

<< Hier, avant de dormir mais pas pour m'endormir, eh, j'ai lu - j'ai relu - le travail du Cardinal Kasper, et je voudrais le remercier parce que j'ai trouvé de la théologie profonde et aussi une pensée sereine dans la théologie. C'est agréable de lire de la théologie sereine. J'ai aussi trouvé ce que Saint Ignace disait, ce Sensu Ecclesiae, l'amour à la Mère Eglise. Ça m'a fait du bien et il m'est venue une idée, pardon Eminence si je vous fais rougir, mais l'idée, c'est que ça s'appelle "faire de la théologie à genoux". Merci, merci>>

On se souvient aussi de l'éloge appuyé du cardinal Kasper par le Pape, lors de son premier angélus... (cf. La croix Kasper de Benoît XVI)

(2) Carlota avait traduit à ce sujet un long et passionnant article: Des divorcés-remariés dans l'Église primitive?