La justice au Vatican, un cas emblématique (II)

Celui de la Fraternité des Saints Apôtres, à Bruxelles. Cette fois, Marco Tosatti donne la parole à "Super Ex" (13/4/2018)

>>> La justice au Vatican, un cas emblématique (I)

Isabelle

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Nouvelles réflexions de Marco Tosatti sur l’affaire de la Fraternité des Saints-Apôtres. Le vaticaniste commente l’intervention du pape en la confrontant à ses propos récents dans « Gaudete et exsultate » (§77), avant de reproduire un message de son correspondant « Super Ex », qui cite fort opportunément une parole du regretté cardinal Caffarra : « Si le droit canon n’existe plus dans l’Eglise, celle-ci de monarchie devient tyrannie ».

Bergoglio et le droit dans l’Eglise. De la monarchie à la tyrannie. Le cas belge.


Marco Tosatti
Stilum Curiae
12 avril 2018
Traduction d'Isabelle

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Chers amis et ennemis de « Stilum Curiae », dans un article sur la « Nuova Bussola » (cf. La justice au Vatican, un cas emblématique (I)), je parle de la manière dont on a détruit une communauté religieuse belge, la Fraternité des Saints-Apôtres et j’explique surtout comment on l’a empêchée de recourir à la justice ordinaire de l’Eglise. Dans ces derniers jours, nous avons reçu des documents qui expliquent comment tout cela s’est produit : comment le Pontife régnant a signé un acte qui empêchait le cours normal de la justice ordinaire dans l’Eglise. Il m’est alors revenu que, voici quelques jours, le Pontife lui-même, dans son dernier texte « Gaudete et exsultate », parle précisément de justice :

« Heureux les affamés et les assoiffés de la justice, car ils seront rassasiés »
77. « Avoir faim et soif » sont des expériences très intenses, parce qu’elles répondent à des besoins vitaux et sont liées à l’instinct de survie. Il y a des gens qui avec cette même intensité aspirent à la justice et la recherchent avec un désir vraiment ardent. Jésus dit qu’ils seront rassasiés, puisque, tôt ou tard, la justice devient réalité, et nous, nous pouvons contribuer à ce que ce soit possible, même si nous ne voyons pas toujours les résultats de cet engagement.


Il ne nous semble pas que cela se soit produit dans ce cas précis, – pas plus que pour les Franciscains de l’Immaculée. Nous nous apprêtions à écrire sur ce thème un commentaire pour « Stilum Curiae » quand, après avoir ouvert notre boîte aux lettres, nous y avons trouvé un message de « Super Ex » (« ex » du Mouvement pour la Vie, « ex » de Avvenire et de bien d’autres choses, mais pas encore – et c’est miraculeux ! – « ex » catholique). Nous transmettons le texte et en conseillons la lecture à tous, spécialement à nos collègues.

Cher Marco,

Dans ton dernier article dans la « Nuova Bussola Quotidiana », tu expliques la décapitation violente de la Fraternité des Saints-Apôtres de Bruxelles par Bergoglio. Au mépris et à l’encontre de la procédure juridique codifiée par l’Eglise.

Ce faisant, tu nous rappelles à tous
pourquoi Bergoglio, peu après son élection, a voulu au plus tôt se débarrasser du cardinal américain Raymond Leo Burke, choisi par Benoît XVI pour diriger la Signature Apostolique à laquelle, comme tu l’écris toi-même, « tout membre de l’Eglise, laïc ou clerc, peut recourir s’il pense devoir défendre son droit ».

Pourquoi Burke était-il un problème qu’il fallait traiter sans délai ? Parce que sa mentalité catholique reconnaît que, même dans l’Eglise, structure hiérarchique par excellence, il y a une justice à respecter, faute de quoi « hiérarchie » finit par signifier « arbitraire » et « tyrannie ».

Quand Burke rappelle, en pleine fidélité à la doctrine catholique de toujours, les limites de l’autorité pontificale en matière de doctrine, il continue simplement à raisonner comme il le faisait quand Benoît XVI l’a choisi pour lui confier son rôle de juge. Que fait le juge ecclésiastique ? Sans aucun doute, il s’assure que l’autorité ne devient pas despotisme ou tyrannie, qu’elle n’est pas prétexte à abus de pouvoir sur un prêtre, un laïc, un baptisé. Comme juge, Burke vérifiait que l’autorité respectait bien ses limites en matière de gouvernement.

Mais Bergoglio ne veut pas de limites ; il ne se voit pas comme le vicaire du Christ, mais comme le patron absolu de l’Eglise, tant en matière de doctrine (il se moque complètement des cardinaux, des papes qui l’ont précédé et même de l’Evangile) qu’en matière de droit canon.

« Si le droit canon n’existe plus dans l’Eglise – disait le cardinal Caffarra, – l’Eglise, de monarchie, devient tyrannie ». Le livre ‘Le pape dictateur’ n’avait pas encore été écrit, mais tout était déjà évident.

En matière doctrinale, Bergoglio décide-t-il de changer l’Evangile sur « le mariage » ? Il force la main au Synode. Il se réserve à lui-même et à un petit cercle d’affidés la rédaction d’"Amoris Laetitia", ameute un quarteron de journalistes pour qu’ils couvrent de boue les opposants, refuse de répondre aux « dubia » légitimes qu’on lui soumet.

Veut-il décapiter les Franciscains de l’Immaculée ? Son premier geste est de les empêcher de recourir à la justice de l’Eglise. Ainsi, depuis des années, cet ordre est massacré, sans même un véritable chef d’accusation.

Décide-t-il de renverser l’Ordre de Malte ? Il agit d’autorité, précipitamment, en s’appuyant sur la force, pas sur le droit.

Doit-il protéger son ami, le cardinal Maradiaga ? Il bloque toute procédure et s’approprie le dossier, si bien que plus personne n’en sait rien.

Le diocèse de Bruxelles, en la personne du triste cardinal De Kesel, veut-il la tête de la Fraternité des Saints-Apôtres ? Le voilà servi sur un plateau : il force le cours naturel des choses et empêche la procédure de se dérouler.

C’est triste, mais il nous faut l’admettre : Bergoglio n’est pas le premier sanglier dans la Vigne du Seigneur. Nous avons déjà eu des papes tyranniques et pécheurs, qui aimaient, comme lui, la Cour et le Pouvoir, et méprisaient le droit, confondant leur rôle de vicaire de Dieu sur la terre avec celui de Dieu lui-même. Mais il s’agissait, dans la plupart de ces cas, d’hommes qui abusaient de leur pouvoir en matière de gouvernement, dans la gestion des affaires de l’Eglise (gestion des biens, des hommes…).

Avec Bergoglio, gouvernement et doctrine sont aux mains d’un homme qui ne reconnaît aucune limite à son pouvoir. Qui a tout le temps à la bouche des mots (« miséricorde », « écoute ») que ses actes ne cessent de contredire.

Mais pourquoi y a-t-il si peu de cardinaux qui combattent ouvertement cette dérive ? Peut-être parce que nombreux sont ceux qui, s’ils craignent un tant soit peu le jugement de Dieu, redoutent terriblement la colère de son vicaire ?

Il me reste à conclure en rappelant encore la réunion du 7 avril dernier ["
Eglise où vas-tu?", ndt) : des centaines de fidèles ont manifesté, par leur présence à Rome, leur désarroi. Ils subiront pour la énième fois les anathèmes et les excommunications de Bergoglio, mais il est clair qu’ils n’ont plus l’intention de se taire.

 

Super Ex


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