L'Eglise a disparu

Une constatation amère, mais réaliste de Marcello Veneziani (16/6/2018)

Depuis quelque temps, l'Église est pratiquement absente sur certains thèmes vitaux et chrétiens auxquels elle a toujours été sensible, en particulier durant les 35 ans de pontificat de Jean-Paul II et de Benoît XVI: la famille, la vie, la naissance, l'éducation, la civilisation chrétienne, et leur opposé, la déchristianisation, le radicalisme athée, l'hédonisme et le matérialisme bioéthique, l'invasion musulmane et la persécution des chrétiens. Chaque fois qu'un fait se produit, qu'une statistique émerge, qu'un mouvement, un anniversaire, une manifestation de rue mettent l'accent sur l'un de ces thèmes, le silence du Pape, de son Église et des corps les plus qualifiés est ponctuel.

L'Eglise a disparu

QUELLE TRISTESSE SI L'ÉGLISE PERD SA VOIX

Le Vatican de Bergoglio ne se fait entendre que quand il faut parler en bien de l'immigration



Marcello Veneziani
www.marcelloveneziani.com
(éditorial paru le 15 juin dans Il Tempo)
Ma traduction

* * *

Mais en ce moment, où est donc l'Église, pourquoi est-elle silencieuse? Non, je ne parle pas de la question des migrants et des débarquements, du gouvernement gialloverde [ndt: le jaune est la couleur dominante de l'emblème du Mouvement 5 étoiles, et le vert, de la Ligue du Nord] et du "plénipotentiaire" Salvini. Et je ne dis certainement pas qu'après cinq ans de médiatisation du Pape Bergoglio, l'Église est trop taciturne. Loin de là. Je fais référence à une question plus importante, une question cruciale pour le monde, pour l'Occident, pour l'Europe et, surtout, pour l'Italie.

Depuis quelque temps, l'Église est pratiquement absente sur certains thèmes vitaux et chrétiens auxquels elle a toujours été sensible, en particulier durant les 35 ans de pontificat de Jean-Paul II et de Benoît XVI : la famille, la vie, la naissance, l'éducation, la civilisation chrétienne, et leur opposé, la déchristianisation, le radicalisme athée, l'hédonisme et le matérialisme bioéthique, l'invasion musulmane et la persécution des chrétiens. Chaque fois qu'un fait se produit, qu'une statistique émerge, qu'un mouvement, un anniversaire, une manifestation de rue mettent l'accent sur l'un de ces thèmes, le silence du Pape, de son Église et des corps les plus qualifiés est ponctuel.

L'Église du silence. Mais peut-elle garder le silence sur la formidable attaque que la famille subit depuis des années? Peut-elle garder le silence sur le remplacement de la loi naturelle par le désir individuel, de la procréation avec un père et une mère par l'insémination artificielle, les mères porteuses, les adoptions gay, l'idéologie transgenre, en plus de l'exaltation et de l'exhibition de la fierté lgbt dans chaque espace public? Peut-elle garder le silence sur le déclin sans précédent des naissances, les décès qui dépassent les naissances, l'absence de soutien aux familles, aux naissances, à la vie, en lien avec les avortements et la mort facilitée; et sur la criminalisation dans les lieux publics de mots prometteurs, comme "fécondité"? Peut-on assister à la gêne mal cachée et au silence embarrassé des autorités religieuses face à toutes les polémiques sur Noël et sur la crèche, les crucifix dans les écoles, l'éducation religieuse? Et peut-on garder le silence sur le processus imposant, radical, parfois violent, de déchristianisation en cours, qui expulse la civilisation chrétienne et ses racines, ses valeurs religieuses et ses principes moraux, ses coutumes et ses symboles et rituels; et à l'extérieur de l'Occident, à travers la persécution des chrétiens et l'intimidation? Est-il possible de garder le silence sur le fait que la population italienne et européenne fait des pas de géant vers le remplacement des chrétiens par des athées d'une part et des musulmans d'autre part ?

Mais est-il possible que l'Église, que le Pape, que la Curie, que la Conférence épiscopale, jusqu'aux paroisses, ne s'intéressent qu'aux thèmes de l'accueil et du paupérisme et aux thèmes qui diluent la foi chrétienne et l'alignent sur le politiquement correct? La mission pastorale peut-elle être réduite au thème, même important de la charité, à un anticapitalisme ostensible? Ce thème, qui rappelle peut-être vaguement le péronisme argentin de Bergoglio, n'était pas étranger à la tradition catholique et aux encycliques du pape Wojtyla, mais s'insérait dans un contexte spirituel, c'était du point de vue de la civilisation chrétienne, de la tradition catholique, du fait de considérer les biens matériels comme inférieurs et transitoires par rapport aux biens spirituels. Pas dans le contexte de la sociologie de [Zygmunt] Bauman [ndt: on lui doit, entre autre, le concept de "société liquide"] et d'un communisme para-évangélique. Par ailleurs, le thème de la charité et de l'accueil prêché dans l'Église est peu pratiqué: on ne connaît pas de dons importants aux pauvres du patrimoine ecclésial, d'adoptions significatives de migrants dans les églises, on prêche d'abattre les murs, mais les murs du Vatican s'élèvent, archaïques, au cœur de Rome, protégés par les gardes suisses ou leurs supplétifs en civil...
En somme, l'Église des pauvres est tout sauf pauvre ou franciscaine. Sans parler des églises vides, des vocations en déclin, des messes désertées... Admirables, mais disparus, les missionnaires qui vont dans les lieux de faim et de misère, tandis que les "syndicalistes" de l'accueil dans notre propre maison sont légion...

La présence et l'incidence des catholiques, du Pape, de l'Église, des principes chrétiens dans la vie quotidienne a disparu; il ne reste que de vagues traces de catho-communisme, de christianisme prolétarien (mais un prolétariat idéologique, absent dans les banlieues prolétariennes du pays), plus quelques saupoudrages paupéristes et progressistes, comme la communauté de Sant'Egidio ou la démo[cratie] chrétienne (ce n'est pas l'abréviation de démon....).

Sous Bergoglio, l'insignifiance politique des catholiques, que nous avons déjà soulignée, a atteint un point extrême: jamais auparavant le rôle de l'Église pour guider les consciences, les familles et les citoyens n'a été aussi insignifiant qu'aujourd'hui.

En somme, l'Église s'est retirée de notre monde, elle a fait naufrage en mer avec des bateaux, elle vit avec la tête ailleurs. Et l'ailleurs n'est pas le paradis, mais l'Afrique noire.

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