Alfie, Vincent: le silence de l'Eglise

Edward Pentin met en parallèle ces deux affaires dramatiques où l'Eglise "de la miséricorde" manque à son devoir de défense les plus faibles. Et Antonio Socci revient d'autres silences du Pape (15/4/2018. Dernière minute)

>>> Voir aussi:
¤ Affaire Alfie Evans (Cascioli, Tosatti et le tweet du Pape)
¤ Affaire Vincent Lambert (La lettre de sa mère au président Macron)

Cette fois, c'est un américain, Edward Pentin, qui s'empare du sujet, et il apparaît significatif que cette prise de position nous vienne d'outre-Atlantique...

Les dirigeants de l'église silencieux face aux décisions contre Alfie Evans et Vincent Lambert


Edward Pentin
www.ncregister.com
14 avril 2018
Ma traduction

* * *

Les dirigeants de l'Église sont pour la plupart silencieux face aux décisions défavorables à Alfie Evans et Vincent Lambert.
Vincent Lambert, un Français gravement handicapé mais pas malade en phase terminale, et Alfie Evans, un enfant de deux ans atteint d'une maladie non diagnostiquée, sont condamnés à mort par l'État contre la volonté de leurs parents.
Alors que les parents d'Alfie Evans, âgé de deux ans, se battent pour sauver la vie de leur fils face aux décisions de l'hôpital et de l'État pour couper son système de survie, un hôpital français a ordonné de cesser la nourriture et l'hydratation d'un patient âgé de 42 ans gravement handicapé depuis 10 ans.

[Edward Pentin fait ici à grands traits un résumé des deux affaires. Et conclut:]

LE SILENCE DE L'ÉGLISE
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Dans les cas de Vincent Lambert et d'Alfie Evans, le silence inhabituel des dirigeants de l'Église est significatif.
Bien que le Pape ait envoyé un tweet pour soutenir Alfie, il n'y a eu aucun commentaire des évêques anglais et français, ni aucune déclaration récente de l'Académie pontificale pour la vie.
Lorsque l'archevêque Vincenzo Paglia, président de l'académie, a fait des commentaires sur l'affaire Alfie Evans en février, il s'est rangé du côté du juge contre les parents d'Alfie (ses commentaires, dans une interview à un journal, ont depuis lors été effacés).
Le silence général persiste malgré les demandes faites par le père d'Alfie, Tom Evans, à la fois au nonce apostolique en Grande-Bretagne et à son évêque local, l'archevêque Malcolm McMahon.
Les évêques français n'ont également rien dit publiquement, même si dans le passé, ils avaient fait des déclarations pour défendre Vincent Lambert. L'académie pontificale a été sollicitée pour un commentaire, mais ne l'a pas encore fait.

Cette semaine, dans sa lettre à Macron, Viviane Lambert a souligné que le même jour où l'hôpital a décidé de mettre fin à la vie de son fils, le Président a parlé en présence des évêques français [aux Bernardins] de l'importance de la dignité humaine dans le contexte du handicap et de la vulnérabilité.
Les chefs religieux exercent peut-être des pressions en coulisses [vraiment??], mais dans ces deux cas très médiatisés, leurs efforts pour parler publiquement au nom des personnes vulnérables et des sans-voix ont été visiblement absents, inexistants, voire nuisibles.
Dans le quotidien catholique italien La Nuova Bussola Quotidiana, son directeur Riccardo Cascioli note avec tristesse et anxiété que la culture de la mort a aussi pénétré profondément dans l'Église. Il dit que le silence montre "la profondeur de la crise" que traverse actuellement le monde ecclésial qui est "tourné vers la mentalité dominante, vers l'idéologie de la qualité de vie".
L'Église, a-t-il ajouté, "est en train de vivre une trahison, une trahison de Dieu et donc de l'homme".

Sur ce sujet (et sur la Syrie), Antonio Socci est bien plus sévère:

UN SILENCE TERRIFIANT, UNE PAPAUTÉ ASSERVIE AUX PUISSANCES DE CE MONDE.
.
Il est vraiment effrayant que le Pape Bergoglio, ces jours-ci, continue à parler de tout, mais évite soigneusement d'intervenir à la fois sur la guerre en Syrie qui risque de devenir une guerre mondiale, et sur le cas du petit Alfie.
Nous avons appris par la Bussola que depuis le 28 mars, le père de l'enfant avait même demandé au Pape l'asile politique pour sa famille, mais il n'a jamais eu de réponse.
A présent, on comprend mieux la fourberie du tweet d'il y a quelques jours, par lequel Bergoglio essayait de prouver qu'il a dit deux mots (d'ailleurs ambigus) à propos d'Alfie. Il devait se pré-constituer une défense.
Voici ce que rapporte la Bussola:

Aujourd'hui, le père de l'enfant supplie le Pape d'être accueilli avec son fils au Vatican:
«Le 28 mars dernier, le Saint-Père a reçu ma demande d'asile au Vatican. Je n'avais aucune nouvelle au bout de deux jours, alors j'ai appelé le nonce apostolique à Londres. Je l'avais déjà eu plusieurs fois au téléphone, et à part me confirmer qu'il avait parlé d'Alfie avec le Pape, il ne m'a rien dit de plus. Je demande au Pape de nous aider. Je le supplie encore une fois, nous avons besoin d'être accueillis au Vatican, ici Alfie n'a pas d'échappatoire: il ne sera pas accompagné mais tué» a dit Thomas Evans à la Bussola, rappelant les nombreuses tentatives faites dans la bataille pour défendre son enfant contre un monde de la santé et du droit qui «a hâte de le supprimer, alors qu'il lutte pour vivre».

Le fait de ne pas avoir répondu à ce père qui se bat pour la vie de son fils en dit long sur l'hypocrisie des meetings bergogliens sur les "pauvres migrants". Un thème qui est en réalité imposé par les grandes centrales de pouvoir du monde (l'ONU et le Deep State USA Obama-Clinton).

Sur la Syrie aussi, il a dit deux mots dimanche à l'Angélus (1), mais seulement pour insister lourdement sur la question (totalement obscure) du gaz, c'est-à-dire celle-là même qui a servi de prétexte pour déclencher l'attaque.
C'est la première fois dans l'histoire de l'Église de notre époque que le Vatican assiste en silence et ne fait rien pour éviter un conflit mondial.
Voilà l'amère vérité. Bergoglio fait la volonté des grands pouvoirs mondiaux et ne fait ni ne dit rien qui, d'une manière ou d'une autre, puisse entraver leurs plans.
Tout cela nous fait beaucoup réfléchir sur ce qui s'est passé dans l'Église en 2013. Parce que ces pouvoirs voyaient certainement le Pape Benoît XVI comme un obstacle. Alors qu'avec Bergoglio, ils vont très bien....
Sous le contrôle de qui l'Église est-elle?

(1) Des nouvelles terribles de bombardements avec des dizaines de victimes, dont beaucoup de femmes et d'enfants, arrivent de Syrie. Des nouvelles de nombreuses personnes atteintes par les effets de substances chimiques contenues dans les bombes. Prions pour tous les morts, pour les blessés, pour les familles qui souffrent. Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise guerre, et rien, rien, rien ne peut justifier l'utilisation de tels instruments d'extermination contre des peuples et des populations sans défense. Prions pour que les dirigeants politiques et militaires choisissent l'autre voie, celle de la négociation, la seule qui puisse conduire à une paix qui ne soit pas celle de la mort et de la destruction.
w2.vatican.va

Dernière minute


Sans doute pressé par les circonstances et la mobilisation massive des catholiques (on pourrait même dire contraint et forcé!) , le Pape , lors du Regina Caeli d'aujourd'hui 15 avril, s'est enfin exprimé publiquement sur ces deux douloureuses affaires:

Je confie à votre prière des personnes comme Vincent Lambert, en France, le petit Alfie Evans, en Angleterre, et d'autres dans différents pays, qui vivent, parfois longtemps, dans un état d'infirmité grave, assistés médicalement pour les besoins de base. Ce sont des situations délicates, très douloureuses et complexes. Prions pour que chaque patient soit toujours respecté dans sa dignité et traité d'une manière appropriée à son état, et avec l'accord des membres de sa famille, des médecins et d'autres professionnels de la santé.


Les parents auraient peut-être espéré plus (il suffit de se mettre à leur place!)
Quant à Mgr Paglia, qui aurait dû être en première ligne, il y va lui aussi de sa déclaration, sur un ton analogue: comme celle du Pape, elle reste encore empreinte d'une certaine ambiguïté - nulle part il n'est question d'euthanasie (*), aucun des deux ne prononce le mot qui fâche, on se contente d'évoquer des "situations complexes" et de souhaiter sans autre précision "le bien intégral d'Alfie" (???), au nom des parents et de l'hôpital qui sont ainsi placés sur le même plan:

Le cas du petit Alfie Evans de Liverpool, de ses jeunes parents Tom et Kate et de toutes les personnes qui, au cours de ces longs et douloureux mois de maladie, ont travaillé de différentes manières pour le bien de cet enfant, a été montré ces jours-ci dans toute sa terrible tragédie. Je prie pour lui et pour les personnes impliquées, et j'invite chacun à s'unir à cette intention devant le Seigneur de la vie. J'espère vivement que le dialogue et la coopération peuvent être rouverts entre les parents, bouleversés par la douleur, et les autorités de l'hôpital où Alfie a été traité jusqu'à présent, afin qu'ensemble ils recherchent le bien intégral d'Alfie, et que les soins de sa vie ne se réduisent pas à une querelle juridique. Alfie ne peut pas être abandonné, Alfie doit être aimé et ses parents aussi, jusqu'au bout.


Enfin, la responsable de l'hôpital pédiatrique Bambino Gesù a affirmé que l'établissement était prêt à accueillir le petit garçon "pour l'accompagner vers sa fin naturelle" (Il Corriere-Roma).

Le Saint-Siège a donc fini par réagir (et c'est tant mieux), mais le moins que l'on puisse dire, c'est qu'au vu du timing (la supplique du père d'Alfie remonte au 28 mars!), cette réaction manque de spontanéité... d'autant plus que chaque minute compte.

Qui sait s'il n'y a pas eu une intervention de QUELQU'UN... quelqu'un, par exemple, qui prie dans un monastère caché derrière les murs du Vatican?

* * *

(*) Dans des circonstances analogues, le 1er février 2019, par exemple, alors que l'Italie se déchirait autour de l'affaire Eluana Englaro, Benoît XVI lançait son "énième appel en faveur de la vie" (disait la presse italienne), avec ce cri: L'euthanasie est une fausse solution au problème de la souffrance, une solution qui n'est pas digne de l'homme.
Eluana devait mourir une semaine plus tard, après qu'on ait cessé de l'alimenter (on relira ICI la réaction claire, nette et exemplaire, de Mgr Negri)

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