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Spe Salvi
Le canari dans une mine de charbon

Le Pape, la science moderne, et le canari dans une mine de charbon (*)
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Article original en anglais sur le site de NCR: The pope, modern science, and a canary in the coal mine

Traduction (synthèse)



John Allen propose son analyse de ce qu'il appelle l'épisode "La Sapienza", et il l'articule en deux parties.

1. Non, bien sûr, Benoît n'est pas contre la science (il est vrai qu'on pourrait difficilement se prétendre vaticaniste et soutenir le contraire).
Cette partie reprend simplement les faits cités par ailleurs dans ces pages, avec la conférence de Parme datant de 1990, et la citation faussement attribué à Joseph Ratzinger, et se conclut ainsi:



[..] il y a assez d'éléments de preuve que Benoît XVI n'est pas hostile à la science, tant qu'elle n'a pas la prétention de rendre la foi religieuse sans fondement.
Par exemple, le pape a récemment nommé à l'Académie pontificale des Sciences un hydrologue de Princeton, qui soutient fermement la théorie de l'évolution et du réchauffement de la planète.

Compte tenu de tout cela, on pourrait aisément conclure que le fracas de La Sapienza est l'un de ces embrasements des forces anti-cléricales en Italie, où le ressentiment contre l'église au fil de siècles de pouvoir et d'influence, engendre parfois des réactions de débordement.



2. Mais.... dans la deuxième partie, il développe l'idée qu'il y a une autre raison aux débordements des "universitaires", et là, d'une certaine façon, John Allen justifie ces débordements.
Il émet l'idée (prudemment, il ne se l'attribue pas) que Benoît XVI veut faire tourner l'horloge à l'envers, et (en lisant à peine entre les lignes), qu'il s'est ainsi attiré l'hostilité tenace de la frange progressiste, le dernier épisode étant la messe de Dimanche dernier, célébré "dos au peuple"!!!
Cela sonne presque comme un aveu!



Pourtant, deux autres points sont à noter.

Tout d'abord, le discours de Parme illustre un peu le style professoral de Benoît, qui a lui également causé des ennuis à Ratisbonne, et qui consiste à citer des mots provocateurs de quelqu'un d'autre dans le but de mettre en place un débat. ...
Dorénavant, la leçon à retenir est la suivante: une figure publique, et notamment un pape, ne peut se permettre de citer des propos incendiaires, sans immédiatement et sans ambiguïté, s'en démarquer lui-même - à moins d'en payer le prix au niveau des relations publiques (?).

En second lieu, le contretemps de La Sapienza est peut-être moins dû aux réflexions de Benoît sur la science, qu'à la perception plus large qu'il est en train de "faire reculer l'horloge» sur le catholicisme d'ouverture à la modernité, associé principalement au Concile Vatican II .
Au début de décembre, l'écrivain italien laïciste Eugenio Scalfari a publié un article dans La Repubblica, sur Spe Salvi, intitulé précisément "Le pape qui refuse le monde moderne".

Mettant de côté leurs mérites, on peut au moins comprendre comment les gens se forment ces impressions. Dimanche dernier, par exemple, Benoît XVI a célébré la Messe dans la Chapelle Sixtine, où il a fait usage d'un autel d'avant Vatican II, tournant le dos à l'assistance pendant une partie de la liturgie, et où il a lu son homélie depuis un ancien trône en bois placé à gauche de l'Autel, utilisé par Pie IX au 19e siècle.

Les critiques affirment que de tels gestes révèlent un pape déterminé à prétendre que Vatican II n'a jamais eu lieu, alors que Benoît insiste sur le fait qu'il essaye simplement de renforcer un sentiment de continuité, en soulignant l'importance de la tradition, sans renier les avancées associées à Vatican II, comme la liberté religieuse, l'œcuménisme et le dialogue interreligieux.



L'article se termine un peu comme une menace, puisqu'il est plus ou moins question de leçon à méditer.
Décidément, John Allen voit le "gouvernement" de l'Eglise comme une affaire de relation publique.
Ne se trompe-t'il pas un peu?



On peut débattre sans fin de ces positions, mais la signification immédiate de l'épisode de «La Sapienza», au moins d'un point de vue des relations publiques, est peut-être une sorte de «canari dans une mine de charbon" - le signal d'alarme d'une réaction publique à l'activité de Benoît potentiellement dangereuse, et qui, par moments, pourrait obscurcir jusqu'à des paroles et des gestes innocents.

C'est au moins quelque chose à méditer.



(*)

"Canari dans une mine de charbon":
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Un site me fournit cette information:
L’expression du « canari dans une mine de charbon » évoque la pratique des mineurs qui apportaient des canaris dans les mines. Si la qualité de l’air était médiocre, les canaris manifestaient les premiers des réactions indésirables et on leur a confié, à cette époque antérieure à l’invention des systèmes de ventilation, le rôle d’espèce sentinelle afin d’assurer des conditions de travail sécuritaires pour les personnes travaillant dans les mines souterraines.
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La métaphore choisie par JA a de quoi laisser songeur....



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