Présomption d'innocence et théorie du complot
A propos de l'affaire DSK. Je ne voulais pas en parler, mais trop, c'est trop. (16/5/2011)
Les débordement érotiques "présumés" du peu sympathique DSK ne m'intéressent VRAIMENT pas. Il n'est pas question de se laisser prendre au piège du moralisme - qui fonctionne généralement comme un boomerang - comme l'a dit Vittorio Messori à propos de Silvio Berlusconi, même si les faits reprochés sont très graves.
Ce qui est intéressant dans cette affaire, ce ne sont pas tant les faits, que leur stupéfiante, ahurissante, délirante, scandaleuse couverture médiatique. Les mots me manquent.
Dès dimanche matin, à entendre les habituels pantins qui défilent à la radio et dans la lucarne pour "décrytper l'actu" (sic!), i.e. "former" l'opinion (cette fois pitoyablement pris au dépourvu), on avait l'impression de se trouver dans un funerarium.
Brusquemement, tous découvraient la théorie du complot (voir ici: Les adeptes du complot ) , en d'autres circonstances tournée en dérision, quand elle était le fait des attardés extrêmistes (de droite, de préférence). Ils nous disaient "c'est trop gros pour être vrai", ou carrément, en interrogeant les gens "vous ne pensez pas que...", alors que dans la mise en scène grotesque de la mort d'Oussama Ben Laden (et, pour remonter un peu plus loin, l'affaire de la fameuse "fille du RER"), ils avaient tout gobé, la ligne, et même l'hameçon.
Une telle unanimité dans le commentaire fait plus pour alimenter la théorie du complot que tous les démentis, pour l'invalider.
La classe politique complice se retranche lâchement derrière la "présomption d'innocence", superbement ignorée dans d'autres cas : quand je me souviens de la féroce campagne de lynchage contre le Pape, au printemps dernier, s'en étant pris jusqu'à son frère, le pauvre Mgr Georg, presque accusé de violences pédophiles, pour avoir, un demi-siècle plus tôt, distribué quelques taloches, j'ai du mal à garder mon calme.
D'ailleurs, les dernières déclarations que j'entends évoquent davantage la proclamation, que la présomption d'innonce.
La "Socialie" toute entière (et ce qu'elle charrie avec elle...) défile à la télévision pour pleurer derrière son héros, et en écoutant certains commentaires du week-end, on aurait presque pu croire qu'il était tombé au champ d'honneur dans une opération héroïque de sauvetage de la planète. Ce n'est qu'au bout de 24 heures de délire (probablement sous la pression de certains forums internet) que certains ont eu une pensée pour la "présumée" victime du "présumé" innocent: une jeune femme noire de 32 ans, "sans casier judiciaire"!!! Tous ces champions de la parité, ces défenseurs sourcilleux de la dignité de la femme et des pauvres contre les puissants s'apprêtent à se jeter comme des loups sur le passé de la malheureuse femme de chambre, dans l'espoir de prouver qu'elle est une putain, en service commandé, ou appâtée par le gain.
Sans oublier l'amalgame: tous les hommes politiques sont "sex-addict" (c'est comme cela qu'on dit, aujourd'hui, pour faire branché).
Ben voyons! De Gaulle doit se retourner dans sa tombe (je me souviens d'un commentaire comparable après les débordements d'un animateur-télé camé dans un avion long-courrier: c'est le mal des transports, nous avait-on alors expliqué alors... Un phénomène tout à fait normal et courant - comme si chaque vol long-courrier était le théâtre de débordements de bambocheurs éméchés !!)
Maintenant, renversons les faits. Imaginons - c'est vraiment très facile! - d'autres noms, derrière les faits imputés.
Au lieu de parler de présomption d'innocence, les salles de rédaction toutes entières se mobiliseraient pour traquer tous les témoins de leurs turpitudes, et ceux qui les emploient réclameraient à grand cris leur immédiate incarcération. C'est d'ailleurs ce qui se passe en Italie avec Silvio Berlusconi, dont la personnalité et le charisme, pas plus que les faits reprochés, ne peuvent se comparer avec ceux du président (ex!) du FMI.
Finissons avec un dernier effort d'imagination: que DSK parvienne à s'en sortir... Je n'ose même pas imaginer à quoi nous aurions droit!!!! Un acte de contrition collectif, public et obligatoire, peut-être?
Peut-on encore parler de liberté de la presse?
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Voici plusieurs articles à lire sur ce sujet:
1. Ici, d'un site que je ne connaissais pas, une remarquable synthèse: DSK ou la Divine surprise
"Puisque les journalistes sont complices dans leur majorité, le reste est lâche et pleutre, il fallait bien faire un travail dans ce sens" (http://www.lelibrepenseur.org/... )
2. Le site royaliste lafautearousseau.hautetfort.com/ publie aussi un très bon article sous le titre LA CHUTE DE LA MAISON STRAUSS-KAHN.....
" (...) ne maîtrisant pas ses penchants personnels, bien connus, Dominique Strauss-Kahn, vient, paradoxalement, de s’exclure, de lui-même, de la participation à un Système dont il est, pourtant, l’archétype.
La vie privée des souverains qui ont régné sur la France ou sur l’Europe n’a pas toujours été exemplaire, si celle de certains autres l’a, par contre, été. Ces Princes, ces Rois, s’inscrivaient dans une Tradition, une Lignée, une Légitimité, dont ils n’étaient, somme toute, qu’un maillon, et, s’ils n’étaient à l’abri ni des critiques, ni des conséquences et sanctions de leurs actes, leurs fautes ne remettaient vraiment en cause ni la continuité des Institutions, ni la pérennité des États ni la cohésion de la société civile.
Les Pouvoirs politiques nés de notre Révolution ne se prévalent ni de ce type de Légitimité, ni de notre Histoire qu’ils nient, rejettent et combattent, au nom d’une idéologie. Ils ont voulu que leur pouvoir relève de la Raison, appliqué à la mise en œuvre de cette idéologie, censée organiser le monde nouveau sur des bases nouvelles, et gérer des citoyens, des hommes nouveaux, sans roi et sans dieu. Aujourd’hui, le monde, le Système, dont ces principes ont accouché nous répugne.…"
3. De mon ami Le Suisse Romain, qui étudie à Rome les techniques de la communication moderne: une analyse remarquablement bien vue.
Extraits:
Et si la vérité n'existait pas?
To spin
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Les USA ont de l'avance sur l'Europe en matière de communication. Ce qui se passe aux USA arrive en Europe, les USA sont les leaders mondiaux de tout notre système. Le phénomène des spin-doctors y est très répandu. Nous sommes moins habitués à en percevoir les astuces, les trucs et les intrigues. "Spin" veut dire "faire tourner", comme une toupie. Les conseillers en communication connaissent tous les tours et les coups, comme de la magie, au point qu'on les surnomme les sorciers, les magiciens ou les créateurs de l'information. La vérité ne les intéressent pas, le monde de l'info est un spectacle, un business. Il faut des coups, tordus, tournant comme les toupies et qui fassent circuler les infos rapidement. "Mentez, mentez", il restera toujours la communication.
Les idées claires
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DSK a une batterie de "communiquants", comme on dit en France, à son service. Ils sont déjà en action. Ils annoncent: "DSK n'est pas parti précipitamment, il avait son avion à l'horaire prévu". "Il n'a pas oublié son portable car il en possède 7". "Un de ses hommes, son chauffeur, est d'ailleurs parti le rechercher. Cela arrive d'en oublier un". C'est de la défense, non pas via avocat, mais via conseillers médiatiques.
Mme Sinclair, ancienne brillante journaliste, a déclaré ne pas croire en ces affaires qui accusent son mari. DSK nie tout en bloc. L'avocat plaidera non coupable... je retiens encore une fois l'aspect comm.
New York, centre nerveux de la communication mondiale, plus puissant que Paris
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Il se pourrait bien, que son innocence prouvée, justement aux USA dans un pays puritain et plus sévère que l'Europe, avec une pièce judiciaire à l'appui, puisse en fait propulser, dans un second temps, DSK au sommet de la popularité médiatique. Il ne lui restera alors plus qu'à faire valoir son innocence face à la droite puritaine, avec la même force de communication dont il bénéficie actuellement. Cela "laverait les casseroles", lui donnerait enfin une réponse aux accusations qui se murmurent en coulisse et que les journalistes semblent bien connaître.
Sembler être vrai
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Si Machiavel, l'auteur du Prince, disait "que l'homme d'Etat" devait seulement sembler vertueux, les hommes de la communication se préoccupent parfois essentiellement de la vraissemblance de la vérité. Tout peut être machiavélique lorsque la vérité n'existe pas.
