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John Allen et le Pape en Allemagne

"Trois choses que nous avons apprises du voyage de Benoît XVI en Allemagne", dit-il. Que "Benoît XVI est une sensation comme critique culturel", ce n'est pas une découverte. Il apporte surtout la confirmation de l'incroyable affront infligé au Saint-Père par les organisateurs de la veillée à Fribourg! (2/10/2011)



John Allen n'a pas "couvert" le voyage en Allemagne. Il propose son analyse, presque une semaine après, ce qui autorise un recul bienvenu..
C'est du John Allen: un journaliste résolument profane, mais (considéré comme) bien informé des choses religieuses, si soucieux de ne pas choquer son lectorat progressiste qu'on a l'impression, qu'il s'auto-censure à travers une sorte de CSA qui comptabiliserait les points accordés au pape, et ceux à ses adversaires, en les mettant au même niveau.
C'est malgré tout intéressant, et on y apprend des détails sur la grossière mascarade à coup de ballons rouges et verts que les organisateurs de la veillée de Fribourg se sont permis (plus j'y réfléchis, plus je trouve cela STUPEFIANT!!) d'infliger au Saint-Père!!!

Texte original en anglais: http://ncronline.org/
Ma traduction.

Trois choses que nous avons apprises du voyage de Benoît XVI en Allemagne
Par John Allen
30 septembre 2011
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Dimanche dernier, le pape Benoît XVI a conclu un voyage de quatre jours en Allemagne, qui, selon les mots que vous aurez choisis, a enfendré soit «des acclamations unanimes» (Sandro Magister) soit un bâillement national (le quotidien de Munich Süddeutsche Zeitung titre «Il est venu, il a parlé, il a déçu»).

C'était le troisième retour chez lui du pape allemand, bien que sa première visite d'Etat, et le 21ème voyage à l'étranger de son pontificat.

À un certain niveau, il est tentant de dire que les choses se sont passées à peu près normalement. Comme d'habitude, les attentes de protestations massives ont été déçues; tandis qu'à peine quelques milliers de manifestants sont descendus dans les rues de Berlin (brandissant des pancarcartes «donnez un préservatif au Pape»), la plupart des adversaires de Benoît XVI l'ont tout simplement ignoré, alors que le pape a attiré 320 000 personnes pendant quatre jours. Comme d'habitude aussi, d'intrépide journalistes italiens ont créé les nouvelles quand le pape n'en fournissait pas (ndt: la condescendance du yankee face à ses confrères italiens est assez irritante...). Des comptes-rendus exagérés d'un tir de carabine à air comprimé avant une messe papale à Erfurt ont coulé le samedi, tandis que dimanche a été consacré à lancer, puis démystifier une rumeur selon laquelle le pape démissionnerait à 85 ans.

Il y a eu quelques surprises précieuses, pour nous rappeler que Benoît a le sens de l'humour. Lors d'un discours devant le parlement fédéral, le pape a fait allusion à un intellectuel allemand qui a changé d'avis sur quelque chose alors qu'il était octogénaire, et il a ajouté: «Je trouve réconfortant qu'on puisee encore penser de façon rationnelle à l'âge de 84 ans"

Malgré la tonalité en général familière du voyage, il y a eu chemin faisant quelques pépites sur le pontificat de Benoît XVI et sa direction de l'église. Voici donc trois choses que nous avons apprises du voyage du pape en Allemagne.

1) Une sensation, comme critique culturel
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Quiz papal: Qu'ont en commun le Collège des Bernardins à Paris, Westminster Hall à Londres, et maintenant le bâtiment du Reichstag à Berlin ? La réponse, en termes papaux, c'est qu'ils ont été le décor des moments sans doute les plus triomphaux du pontificat de Benoît XVI - des occasions où le cérébral pontife a ébloui le public laïque par un tour de force (en français dans le texte) oratoire sur la foi, la raison et les fondements de la société démocratique .

Quoi que l'on fasse de Benoît comme leader religieux, il est une sensation comme critique culturel. Fidèle à lui-même, son discours du 22 septembre devant le Bundestag, le parlement national, est rapidement devenu le dernier candidat au «meilleur discours de son pontificat».

S'adressant aux législateurs allemands, mais parlant vraiment à à la culture occidentale en général, Benoît s'en est pris au positivisme logique - l'idée que seule compte la science empirique comme connaissance réelle, et que toutes les revendications morales sont subjectives. C'est une conviction très répandue, a déclaré le pape, mais insuffisante comme fondement d'une société juste. Sans croyance en une certaine forme de droit naturel, a-t-il soutenu, il n'y a aucun fondement pour les droits humains universels. Cela signifie que "l'humanité est menacée", car la seule chose qui reste comme base de la loi et de la politique est la volonté brute du pouvoir.

Le passé nazi de l'Allemagne, a dit Benoît XVI, offre un rappel poignant de ce qui arrive quand «le pouvoir divorce du droit».

Le rôle des groupes religieux dans une démocratie, a suggéré le pape, n'est pas de «proposer une loi révélée à l'Etat et à la société», mais plutôt de proposer «la nature et la raison» comme sources fiables pour faire des choix moraux sur l'ordre social - incluant, a- t-il souligné, le respect du pluralisme et de la diversité.

Sur ce terrain, Benoît XVI peut être surprenant, et même lyrique. Devant le Bundestag, la surprise est venue dans son éloge du mouvement écologiste, qui, dit-il, représente «un cri qui aspire à l'air frais», une prise de consciencd que la nature inclut une boussole morale. (Ironie du sort, plusieurs Verts ont été parmi les 70 politiciens qui ont boycotté le discours). Le côté poétique de Benoît XVI, quant à lui, a refait surface en assimilant le positivisme à un «bunker en béton sans fenêtres», qui exclut la lumière naturelle de la vérité morale et spirituelle.

Les médias séculiers (libéraux), même ceux qui étaient par ailleurs critiques, ont été élogieux à propos du discours. Der Spiegel l'a qualifié de «courageux» et «brillant», tandis que Bild a cité un éminent député qui l'a salué comme un «chef-d'oeuvre». Même Die Welt a convenu à contrecoeur qu'il n'était «pas complètement dénué de ruse». (Dans une indication supplémentaire que Benoît a obtenu grâce, le journal de gauche de Londres The Guardian a publié un long commentaire sur le discours, encourageant les environnementalistes libéraux à voir au-delà de leurs stéréotypes le pape comme «un professeur allemand guindé et refoulé ».)

Dans ces lieux, Benoît a aussi marqué des points en termes de style. Il s'est imposé comme aimable et attentionné, un contraste avec les vantards et les idéologues qui dominent la vie publique. Comme George Weigel l'a dit récemment, il semble le «premier adulte au monde».

Tout cela suggère une note d'encouragement pour les agitateurs catholiques (??) du monde entier. La polémique s'agite autour de l'église, en ce moment, un point que Benoît l'a reconnu ailleurs en Allemagne en disant que, parfois, le scandale de la crise des abus sexuels a éclipsé le «scandale» de la foi, c'est-à-dire la mort du Christ sur la croix, sa résurrection et la vie éternelle. Pourtant, malgré cela, quand un chef catholique a quelque chose d'incisif à dire, et trouve un moyen de le dire en temps opportun et efficacement, il est toujours possible de faire penser les gens.

2) L'avenir œcuménique: Collaboration, mais pas communion
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Le retour de Benoît XVI en Terre de Luther était destiné à être scruté pour son impact sur les relations œcuméniques, notamment avec les églises protestantes de la Réforme. Sur ce point, pour le dire poliment, Benoît a attiré des comptes-rendus mitigés.

Le pape a clairement indiqué son engagement œcuménique, en présidant un service avec un évêque luthérien dans le monastère d'Erfurt où Martin Luther fut ordonné moine augustin. Le souverain pontife a exprimé son admiration envers la quête passionnée de Luther pour comprendre la miséricorde de Dieu, et l'archevêque Robert Zollitsch, président de la Conférence épiscopale allemande, a même dit que Benoît lui a demandé de trouver un moyen pour l'Eglise catholique de participer aux célébrations du 500e anniversaire de la Réforme protestante en 2017 - une touche remarquablement irénique de la part d'un pontife romain.

Pourtant, Benoît XVI n'a pas offert de percées, ou même de signaux de flexibilité, sur les points litigieux dans les relations Catholique / Luthérienne, comme l'inter-communion ou les mariages mixtes. Pour ceux qui croient de telles réformes sont une condition préalable au progrès, la performance a donc laissé beaucoup à désirer.

Mgr Klaus Krämer (ndt: président de Missio Internationalis, qui soutient de multiples projets au Moyen-Orient et en Terre Sainte, et ce grâce à la générosité des catholiques allemands) , a par exemple écrit que Benoît continue à voir l'Église catholique comme un « navire de croisière» alors que l'église protestante est, au mieux, un «navire porte-conteneurs» qui devrait suivre le cours du Vatican. Le Frankfurter Rundschau a même été plus acerbe, en qualifiant le voyage de «catastrophe œcuménique» et l'approche de Benoît XVI aux protestants de «spectaculairement en demi-teinte, condescendante et cynique».

Dans son discours devant les leaderss protestants à Erfurt, Benoît a identifié deux priorités pour les relations œcuméniques au 21e siècle:

•La «nouvelle géographie du christianisme», par laquelle le pape semblait entendre la croissance spectaculaire du christianisme pentecôtistes et évangéliques dans monde entier, en particulier dans l'hémisphère sud. Il l'a appelé «une forme de christianisme avec peu de profondeur institutionnelle, peu de rationalité et encore moins de contenu dogmatique, et avec peu de stabilité» - impliquant que malgré leurs différences, les catholiques et les luthériens ont encore plus de points communs entre eux qu'avec, disons, les pentecôtiste brésiliens de la “Church of Christ’s Spit.”

•La laïcité en Occident, où «Dieu est de plus en plus chassé de notre société» et l'histoire de la révélation racontée dans l'Écriture est «enfermé dans un passé toujours plus éloignées». Le sécularisme met tous les chrétiens dans le même sac, dit le pape, de même que par le passé ils ont fait face à une menace commune de la part des nazis - et tout comme le témoignage des martyrs a donné naissance au mouvement œcuménique du 20e siècle, a-t-il dit, aujourd'hui, une foi commune vécue dans le monde séculariste est «la plus puissante force oecuménique qui nous rassemble».

Ce qui semblait évident à partir du voyage en Allemagne, c'est que Benoît XVI regarde la collaboration en réponse à ces défis externes comme l'avenir à court terme du mouvement œcuménique - et non pas, par conséquent, l'unité structurelle qui pourrait conduire à l'inter-communion. L'agenda oecuménique sur sa montre, en d'autres termes, est plus ad extra qu' ad intra .

3) Un terrain commun sur la réforme?
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Bien que Benoît XVI n'en ait probablement pas besoin, son voyage lui a offert un rappel que ce n'est pas simplement avec les protestants que cela grince; de nombreux catholiques allemands sont mécontents aussi. Par exemple, le président du pays, un catholique divorcé et remarié civilement nommé Christian Wulff, a ostensiblement dit le pape, vendredi, «Beaucoup de gens se demandent comment l'Eglise traite avec miséricorde ceux qui ont souffert de ruptures dans leur vie», et a conseillé à l'Église «de rester proche des gens et ne pas se replier sur elle-même». (!!!)

A Fribourg, des dizaines de milliers de jeunes catholiques ont participé à une veillée samedi, en attendant la Messe finales du pontife. En guise d'échauffement, les organisateurs, à un moment, ont fait passer des bâtons gonflables verts et rouges et demandé aux jeunes de les utiliser pour répondre à un sondage informel, avec le vert pour «oui» et le rouge pour «non».

En réponse à l'énoncé «Je modèle de ma vie d'après les normes établies à Rome», une vaste vague de rouge a roulé à travers la foule. A «la Confession ne joue pas un grand rôle dans ma vie», toutefois, ainsi qu'à «Les femmes exercent trop peu de responsabilité dans l'église», la couleur dominante était le vert. Le rouge a fait un retour en force lorsque la question a tourné à «la pratique de l'homosexualité est-elle un péché?»

Dans ce contexte, le discours de Benoît XVI, le 25 septembre, à la Salle de concerts de Fribourg, prenant la parole devant ce qui était décrit comme un échantillon de catholiques «impliqués dans l'Église et dans la société», a été assez unique dans les annales de la rhétorique papale.

D'un côté, le pape n'a pas mâché ses mots sur les réalités sociales: «Depuis quelques décennies, nous avons connu une baisse de la pratique religieuse et nous avons pu voir un nombre important de baptisés s'éloignant de la vie de l'église», a- t-il dit . Il a ensuite posé précisément la question que la plupart des réformateurs réclament: «est-ce que, par hasard, l’Église ne doit pas changer ? Est-ce que, par hasard, dans ses services et ses structures, elle ne doit pas s’adapter au temps présent, pour rejoindre les personnes d’aujourd’hui qui sont en recherche et dans le doute ?» (ici)
En réponse, Benoît XVI a dit que bricoler les structures ecclésiales n'est pas la réponse.

Une véritable réforme, a-t-il laissé entendre, est intérieure et spirituelle, et non pas externe et structurelle. Il a cité Mère Theresa, à qui on avait demandé une fois quelle serait la première chose à changer dans l'église. Sa réponse est restée célèbre, «Vous et moi».

C'est une note familière, et pourrait sembler suggérer un abîme infranchissable entre deux modèles de réforme: structurel, et spirituel. (Benoît lui-même a fait allusion à la division, suggèrant qu'un agnostique sincère est préférable à un croyant tiède qui voit l'église en termes purement institutionnels.)

Malgré cette impasse apparente, il y a eu un méandre dans la vision de Benoît XVI du renouveau, quand il a fait allusion à une intersection possible entre les réforme spirituelle et structurelle: son enthousiasme pour la réduction du pouvoir et des privilèges de l'église.

Dans le discours à la salle des Concerts de Fribourg, Benoît XVI a appelé à l'église à embrasser «la pauvreté du monde» afin que son «témoignage missionnaire brille avec plus d'éclat». Il est même jusqu'à suggérer qu'historiquement, la sécularisation a été un agent de la réforme , car elle a libéré l'église «des fardeaux matériels et politiques et des privilèges».

Comme Sandro Magister l'a noté: «Jamais [Benoît XVI] n'a donné une telle importance à l'idéal d'une Eglise pauvre dans ses structures, dans ses possessions, dans son pouvoir."

Le voyage en Allemagne, en d'autres termes, a peut-être découvert une zone surprenante de terrain d'entente entre le pape et les forces de la réforme - la pression pour une église humble, qui parle au monde plus de pauvreté que de pouvoir. Cela, du moins, semble un endroit où la conversation est possible.

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