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François et la fenêtre du Pape

Les interrogations d'Angela Ambrogetti: sur le groupe de prélats chargés de travailler à un projet de réforme de la Curie Romaine; sur le fait qu'en dehors de quelques formules passe-partout, François ne s'est pas encore adressé à "son" peuple de Rome... et sur la fameuse fenêtre (13/4/2013).

>>> Image ci-contre: voir plus bas.

Le Pape François et Rome: est-ce le vrai amour?
Angela Ambrogetti
Samedi 13 Avril 2013
http://www.korazym.org (ma traduction)
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Faire le Pape n'est pas un métier facile. Non seulement parce que ce n'est pas un métier mais un ministère, celui Pétrinien, précisément, mais aussi parce que vous devez apprendre à composer avec le passé, qui dans l'Eglise s'appelle la Tradition et à façonner l'avenir, ce qui en termes ecclésiaux signifie être prophétique.
C'est pourquoi le premier mois de fonctionnement du ministère pétrinien est le plus analysé dans l'histoire d'un pontificat.
Pour sceller ses 30 premiers jours, le Pape François a décidé de nommer un groupe de «sages» pour lui donner un coup de main dans le gouvernement de l'Eglise et mettre au point une idée de la réforme de la Curie romaine. Des noms qui ne sont pas de la Curie, mais par des Eglises locales et de l'État de la Cité du Vatican; huit cardinaux, le cardinal Joseph Bertello, président du Gouvernorat de la Cité du Vatican, le cardinal Francisco Javier Errazuriz Ossa, archevêque émérite de Santiago du Chili (Chili), le cardinal Oswald Gracias, Archevêque de Bombay (Inde), le cardinal Reinhard Marx, archevêque de Munich et Freising (Allemagne), le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya, Archevêque de Kinshasa (République Démocratique du Congo), le cardinal Sean Patrick O'Malley, OFM Cap, Archevêque de Boston (USA), le cardinal George Pell, Archevêque de Sydney (Australie), le cardinal Oscar Andrés Rodríguez Maradiaga, SDB, Archevêque de Tegucigalpa (Honduras), agissant en tant que coordinateur; et un évêque, Marcello Semeraro, évêque d'Albano, à titre de secrétaire (*).

Un choix qui soulève des questions sans réponse pour l'instant: le Collège des Cardinaux a déjà par sa nature même la tâche d'aider le Pontife romain « soit en agissant collégialement quand ils sont convoqués enensemble pour traiter des questions d'importance majeure, soit individuellement, c'est-à-dire dans leurs offices respectifs, contribuant par leur action en particulier au soin quotidien de l'Église universelle».
Alors qu'un groupe doive conseiller le pape dans le gouvernement de l'Église universelle, cela semble un pléonasme.
Et puis, il y a la tâche de réviser Pastor Bonus, la Constitution apostolique qui règle la vie de la Curie romaine. Et à cet égard, dans le groupe de cardinaux «manquent» les canonistes et les experts de la Curie. À commencer par le cardinal Coccopalmerio qui pourtant avait présenté lors des Congrégations générales un projet de réforme. Il serait donc intéressant de connaître un peu mieux les raisons de ces choix du pape. Pour l'instant, nous pouvons seulement penser que dans ce choix aussi émerge clairement le style de François. Un genre décidément différent de ses prédécesseurs du post-Concile. Un style empreint de spontanéité et qui «rompt» avec la coutume romaine maintenue également par les deux Pontifes non romains du siècle.

Dans le premier mois, par exemple, à commencer par Paul VI, jusqu'à Benoît XVI, le nouvel évêque de Rome, rencontrait son clergé, le clergé romain. François ne l'a pas encore fait. Le Pape a parlé du sacerdoce en général, au cours de la Messe chrismale du Jeudi Saint, mais n'a encore jamais parlé de la vie du diocèse de Rome. Une bizarrerie si l'on pense que ses premiers mots à peine élu ont été une référence à la relation entre l'évêque et le peuple, mots répétés à Saint-Jean de Latran, mais seulement comme un salut, et sans approfondir.

Paul VI, à ses prêtres romains, mit au clair les problèmes à affronter: «Aucune époque, peut-être, n'a été dans l'histoire, à la fois par nature et par intention méditée, aussi étrangère et contraire au Sacerdoce et à sa mission religieuse que celle présente; et en même temps, aucune époque autant que la nôtre n'a manifesté un tel besoin, et nous nous dirions même (comme pour ouvrir devant nous une grande espérance), n'a été susceptible d'assistance pastorale de prêtres bons et zélés»

Vingt-deux ans après, Benoît XVI au clergé romain réuni à Saint Jean de Latran semble reprendre le discours de façon extrêmement concrète: «Chers prêtres, la qualité de votre vie et de votre service pastoral semble indiquer que, dans ce Diocèse comme dans beaucoup d'autres diocèses du monde, nous avons désormais laissé derrière nous l'époque de la crise d'identité qui a troublé tant de prêtres. Cependant, toujours présentes sont les causes de "désert spirituel" qui affligent l'humanité de notre temps et par conséquent minent aussi l'Eglise qui vit dans cette humanité. Comment ne pas craindre qu'ils puissent aussi pièger les âmes de prêtres? Il est donc essentiel de revenir encore et encore à la racine de notre sacerdoce. Cette racine, comme nous le savons tous, est celle-ci: Jésus-Christ le Seigneur».

Jean-Paul II avait reçu les séminaristes et les laïcs du diocèse, les religieux, et avait pris possession du Latran le 12 Novembre 1978, alors qu'il avait été élu le 16 Octobre. Au Latran, il avait déclaré: «Dans le cadre de cette merveilleuse rencontre de l'ancien et du nouveau, je désire aujourd'hui, comme nouvel évêque de Rome, commencer mon ministère vers le Peuple de Dieu de cette ville et de ce diocèse, qui est devenu, par la mission Saint-Pierre, le premier dans la grande famille de l'Eglise, dans la famille des diocèses-frères. Le contenu essentiel de ce ministère est le commandement de l'amour: ce commandement qui fait de nous, hommes, des amis du Christ:. "Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande" (Jean 15:14)».

En prenant possession de Saint-Jean de Latran, le milanais Montini avait exprimé son attention pour le diocèse avec des paroles affectueuses, mais des mois étaient passés depuis son élection. C'était le 10 Novembre 1963: «Et il Nous semble tout comprendre de cet intérêt spirituel et affectueux, si l'on pense au Peuple, à cette grande, chère, bonne communauté, que nous voulons considérer Nôtre plus que toute autre chose: non enim quaero quae vestra sunt, sed vos! Je ne veux rien, je ne veux que vous (2 Co 12, 14). Vous, les Romains. Romains d'hier et de toujours, Romains d'origine et de naissance: svez-vous que nous avons immense estime et confiance en vous? Vous des anciennes rues de Rome, vous des maisons anciennes, vous des institutions traditionnelles de Rome, vous du Trastevere! Nous connaissons la bonté qui est dans vos âmes et dans vos coutumes, nous vous savons fondamentalement fidèles à la religion et à l'Église; Nous espérons que vous aimerez toujours le Pape. Et même, Nous espérons que vous Nous entendrez et Nous obéirez, si Nous vous disons qu'aujourd'hui, il faut raviver votre héritage religieux et moral, et insuffler un nouvel enthousiasme et de nouvelles vertus dans votre vie».

Jean-Paul Ier avait rencontré les prêtres de Rome le 7 Septembre 1978. Il avait parlé de la discipline du sacerdoce et de ce que cela signifie l'amour de son propre poste: «Je sais qu'il n'est pas facile d'aimer son poste, et d'y rester, quand les choses ne vont pas bien, quand on a le sentiment de ne pas être compris ou encouragés, quand d'inévitables comparaisons avec le poste accordé à d'autres nous poussent à être tristes et découragés. Mais ne travaillons-nous pas pour le Seigneur? L'ascètique enseigne "ne cherche pas à qui tu obéis, mais pour Qui tu obéis. Et puis la réflexion est un secours. J'ai été évêque pendant vingt ans, j'ai souffert à plusieurs reprises de ne pas être en mesure de récompenser quelqu'un qui l'avait vraiment mérité; mais soit le poste manquait, soit je ne savais pas comment remplacer la personne, soit des circonstances adverses survenaient».
Même l'évêque de Rome doit, comme chaque prêtre, aimer son poste; et ce n'est certes pas facile.

Le Pape François n'a salué son diocèse de Rome qu'une seule fois, jusqu'à présent, depuis le balcon de la basilique du Latran, avec des paroles spontanées et émotionnelles, avec son caractéristique «Frères et sœurs, bonsoir!». «Je vous salue de tout coeur. Je vous remercie pour votre compagnie à la la messe aujourd'hui. Merci beaucoup! S'il vous plaît priez pour moi, j'en ai besoin. N'oubliez pas. Merci à tous! Et allons de l'avant tous ensemble, le peuple et l'Evêque, tous ensemble; toujours de l'avant avec la joie de la résurrection de Jésus; il est toujours à nos côtés».

Le peuple de Rome attend encore de le rencontrer vraiment, de sentir que François aime Rome, comme l'a fait Pierre. Et il y en a qui attendent aussi que la lumière au troisième étage du Palais apostolique soit allumée le soir. De là, les papes ont regardé la Ville Éternelle et, comme le racontait le Pape Jean-Paul II, béni la Ville tous les soirs.

(*) OFM: ordre des frères mineurs (franciscains)
SDB: Société de Saint François de Sales (Salésiens)
(source)

     

La fenêtre du Pape

C's photos (modestement réussies!) ont été prises par moi le 25 avril 2006, vers 21h, Place Saint-Pierre.

Dans un très bel article sur "Présent" du 22 avril 2006, Olivier Figueras écrivait:
Lorsque, la nuit venue, on prend le temps de traverser la place [Saint-Pierre], on est saisi, attiré par une petite lumière qui brille, tout là-haut, dans les hauteurs du Vatican. C'est celle du bureau du Pape, qui nous rappelle, là, simplement mais clairement, la continuation de cette réalité dont la basilique conserve les reliques.
Daniel-Rops l'a écrit plus précisément encore: « ... Cette petite lumière, notait-il en préfaçant l'édition française du livre de Nazareno Padellaro sur Pie XII, a valeur de symbole : dans l'immense abandon, flamme qui monte la garde ; dans l'incohérent déroulement du destin, gage de certitude ; et dans l'ombre la plus opaque, signe d'espérance et promesse de clarté. »