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La conversion de CS Lewis

Le grand écrivain catholique irlandais est mort il y a juste 50 ans, presque en même temps queJF Kennedy. Marco Respinti, sur la Bussola, nous raconte un épisode surnaturel de sa vie, qui implique son ami JRR Tolkien (21/11/2013)

>>> A propos de CS Lewis, voir sur ce site:
Tactique du diable.

     

La nuit où l'athée CS Lewis a admis que Dieu était Dieu
Marco Respinti
http://www.lanuovabq.it/it/articoli-la-notte-in-cui-lateo-lewis-ammise-che-dio-era-dio-7769.htm
21.11.2013
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Il y a un demi-siècle, le 22 Novembre 1963 , Clive Staples Lewis mourait, à 65 ans à peine, à The Kins, sa maison en bordure du quartier résidentiel de Headington Quarry dans le village de Risinghurst, près d'Oxford. Il était réputé comme un très subtil spécialiste en littérature médiévale et de la Renaissance, en plus d'être unanimement aimé ou au moins respecté, comme apologiste chrétien de premier ordre; mais ce jour-là les médias lui accordèrent peu de place. L'information était en effet complètement monopolisée par l'assassinat concomitant du président américain John Fitzgerald Kennedy (1917-1963), à Dallas, au Texas.

Lewis passa beaucoup de temps, durant l'adolescence, la jeunesse et l'âge adulte, à tourner entièrement le dos à Dieu. Ses talents intellectuels considérables, il les avaient tous utilisés pour élaborer une philosophie oscillant entre l'agnosticisme cynique et l'athéisme conscient, au nom d'un rationalisme aride qui lui faisait regarder les choses de la foi avec arrogance, et qui provenait de ce que, plus tard, Lewis définira comme «la mère luciférienne de tous les péchés», l'orgueil.

L'étude des littératures et des mythologies dans lesquelles, dans l'attente inconsciente de l'épiphanie du vrai Dieu, l'homme archaïque et les peuples antiques se consummaient à se représenter un lien fondateur avec la transcendance, le fascinait fortement sur le plan esthétique, mais en même temps le renforçait dans la conviction que la religion n'était qu'une pure invention humaine. En d'autres termes, la complexité de Dieu était presque trop simple, de la simplicité qui est propre aux humbles et aux petits, pour un intellect hautain comme le sien.
Mais il arriva un jour différent. En fait, une nuit.

Lewis était depuis de nombreuses années lié à l'enseignement dans la prestigieuse université d'Oxford; en 1925, il devint professeur titulaire. Il avait été dûment mis en garde contre les deux dangers majeurs qu'il pourrait rencontrer: les «papistes», c'est-à-dire les catholiques, et les philologues, autrement dit ces types qui ont l'habitude de disséquer, de se plonger dans les profondeurs, de nourrir les racines et surtout d'appeler les choses par leur nom. La même année, arriva à Oxford un nouveau collègue, qui était l'un et l'autre. Son nom était JRR Tolkien (1892-1973).

Catholique, Tolkien l'était depuis l'âge le plus tendre, grâce à sa mère, Mabel Suffield (1870-1904), qui s'était convertie au catholicisme dans des conditions difficiles, et à cause de cela fut appelée à de dures épreuves jusqu'au jour de sa mort. Et philologue, il l'était par profession et par passion. Deux choses évidemment différentes, mais qui en Tolkien se tenaient fermement par le bras, l'une débordant dans l'autre, et sa confiance dans la parole de l'homme se sublimant dans l'adoration du Verbe incarné.

Lewis apprit à surmonter ses craintes et se lia d'amitié avec Tolkien, sans pour autant abaisser sa garde. Jour après jour, l'idée le gagna, c'était 1929 que Dieu existait. Ce fut un premier grand coup, mais son idée de Dieu était encore trop théorique. Arriva ainsi 1931, le 9 Septembre. Lewis invita à dîner ses deux grands amis et collègues de l'époque, le catholique Tolkien, et l'anglican Hugo Dyson (1876-1975), professeur de littérature. Comme ils en avaient l'habitude, ils veillèrent tard dans la nuit, parlant, grignotant et buvant. Puis ils allèrent faire une promenade au clair de lune, le long de l'avenue bordée d'arbres, qui offre la plus belle des promenade, Addison’s Walk. La discussion entre eux se fit plus serrée, et la passion enflamma les trois amis. Tolkien menait la conversation, riche, imaginatif, charmant, attachant, habilement soutenu par Dyson, avec Lewis sur la défensive. Pour Lewis à ce point, Dieu existait, mais c'était encore comme un très beau conte de fées. Tolkien, qui, en contes de fées, était maître, lui en raconta alors un, le plus grand, le meilleur, le plus puissant et le plus parfait, car, en plus d'être vrai sur le plan mythique, il l'était sur le plan réel de l'histoire et du concret. C'est-à-dire qu'il lui montra l'Évangile, et le "mytho", qui avec en lui le logos, devient chair en un point précis du temps et de l'espace, une fois pour toutes et à jamais.

Les trois étaient arrivés près d'un arbre, un arbre qui est toujours là, le long d'Addison’s Walk. Une brise soudaine les enveloppa, et Lewis, Tolkien et Dyson se sentirent enveloppés, embrassés par quelque chose de plus grand, au sein d'une beauté jamais éprouvée.
Nous ne savons pas les mots exacts qui ont été prononcés lors de cette nuit mémorable. De ce que Tolkien argumenta alors, il reste une trace dans le somptueux essai On Fairy-Stories, de 1937. Dans l'autobiographie de Lewis, "Surpris par la joie. Les premières années de ma vie", en 1955, la page la plus émouvante est celle où il se rappelle de ce jour de 1929 où il se rendit, après quoi le converti le plus réticent de toute l'Angleterre tomba à genoux pour prier, en admettant que Dieu était Dieu.

Le chapitre dans lequel apparaît cette page, Lewis l'a intitulé The Beginning. Imagineer que cela est arrivé, et même plus, après cette promenade nocturne avec Tolkien et Dyson est un conte de fées vrai.