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Bergoglio: le Pape qui va changer le monde

... en réalité, le "monde" espère qu'il va liquider l'Eglise (29/3/2014)

>>> Toutes les illustrations sont tirées de l'article d'Antonio Mastino traduit ci-dessous


>>> Sur un sujet voisin, cet article du Figaro est une plutôt agréable surprise: www.lefigaro.fr/vox/religion...le-pape-francois-est-il-devenu-un-produit-marketing

Dans son billet du 27 mars sur www.chiesa, («François, le premier pape applaudi par l'opinion publique laïque») Sandro Magister reprend et étoffe son analyse faite récemment sur Settimo Cielo, du sondage d'un institut américain sur la popularité des papes (cf. L'effet François , 8/3).

«Le pape François, écrit-il, vient de franchir le cap de la première année de son pontificat en étant soutenu par une immense popularité. Mais cela n’a rien de nouveau. (...) Ce qu’il y a de nouveau, c’est autre chose. Avec François, pour la première fois depuis des temps immémoriaux, un pape est applaudi non seulement par ses fidèles, mais presque davantage encore par les gens qui ne font pas partie de l’Église, par l'opinion publique laïque, par les médias séculiers, par les gouvernements et par les organisations internationales. Même le rapport publié au début du mois de février par une commission de l'ONU dans lequel l’Église est attaquée férocement l’a épargné, en s’inclinant devant ce "qui suis-je pour juger ?" qui est désormais universellement considéré comme la formule emblématique des "ouvertures" de ce pontificat».

Sandro Magister semble penser que les médias "forcent" l'interprétation des propos du Pape:

«(...) l'exégèse laïque des propos [du Pape] est partout la même, en dépit du fait que Bergoglio a affirmé à de nombreuses reprises et sans équivoque qu’il s’en tenait à la doctrine de l’Église. Le pape François – assure-t-on – en a fini avec les valeurs non négociables et il est ouvert au "dialogue"..

Le reste est à lire ici: chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1350751?fr=y (à propos des "valeurs/principes non négociables", Magister affirme que l'expression exacte est "principes", mais il se trompe, comme cela a été prouvé ici, Benoît XVI a bel et bien utilisé les deux mots, dont le mot "valeurs" une fois de manière très significative devant la Caritas, en présence de son président le cardinal Maradiaga)

Ce thème de l'ouverture de l'Eglise au monde, au moins telle qu'elle est perçue par les médias, est le sujet du dernier billet d'un de mes blogueurs préférés, Antonio Mastino.

Le Pape qui va changer le monde

Texte complet en italien: www.qelsi.it/2014/bergoglio-il-papa-che-sta-cambiando-il-mondo-ma-va-la/
Ma traduction

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Mastino commence par observer que toutes les révolutions (qu'il qualifie de "mot diabolique par excellence") commencent par les mots. La révolution "libérale-radicale" en cours ne fait pas exception, avec son langage "politiquement correct" devenu progressivement une insupportable chape de plomb idéologique prolongée en une législation ad hoc (en france, la loi Gayssot), comme le savent depuis longtemps ceux qui essaient de lire le monde autrement qu'à travers le prisme des médias.
«Dans la rhétorique de grosse caisse journalistique, dit Antonio Mastino, il y a des mots qui autrefois étaient d'un usage rare, leur valeur étant exceptionnelle. Dans le monde liquide, les mots aussi sont devenus liquides. Et dans l'Eglise, lieu de l'éternité et au-delà des temps, où tout devrait être méta-historique, libéré de la chronique et des modes - fussent-elles seulement linguistiques - aléatoires, là aussi tout s'est liquéfié, à commencer par les mots».

Pour illustrer son propos, Antonio Mastino développe son argumentaire autour de deux mots (ou expressions) qui devraient avoir un sens très fort, donc être d'un emploi rarissime mais que l'usage imposé par les médias tend à banaliser:

1. Historique: de nos jours, on étiquette comme historique l'évènement le plus banal, celui qui, justement, ne laisse aucune trace dans l'Histoire. A l'appui, il cite plusieurs exemples, spécialement issus des affaires italiennes.

2. Changer le monde.
Comme cela a un rapport direct avec l'objet de ce site, je traduis cette partie de l'article:

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Ensuite, il y a toute la série des différents personnages qui sont censés «changer le monde» et vous vous demandez, si c'est vrai, dans quel sens, puisque le monde, nous l'avons à chaque instant sous les yeux. Et voilà l'autre mot-totem du journalisme radical, réservé généreusement à tous ses héros transitoire: «changer le monde».

Parmi ces changeurs du monde , selon les journaux, les papes ont souvent été comptabilisés: pas tous, un oui et un autre non, en fonction de leur degré d'instrumentabilité.

Je vais dans un kiosque à journaux et je vois un magazine. Grande photo du pape. Puis le titre: «Le secret de Bergoglio: le Pape qui est en train de changer le monde» (et, cela va de soi, «l'Eglise»). Et je me souviens de titres similaires honorant dans l'ordre Jean XXIII, Jean-Paul 1er avec ses seulement 33 jours de pontificat, puis Jean-Paul II. Benoît XVI non, il a ramené le monde en arrière «de 200 ans», parce qu'il parlait clair, se foutait (sic!) des journalistes et des gros titres des journaux, et encore plus de leur consensus ... et donc, c'est le «réactionnaire» à leurs yeux. Mais ce pape, ce pape-la, il «change le monde».

Mais de grâce: qu'a-t-il fait au juste?
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Pendant ce temps, alors que le monde serait en train de changer, peut-être par oeuvre (Dieu sait comment!) d'un pape, dans les écoles les cours obligatoires d'homosexualisation forcée se généralisent; à Londres (où, entre autres choses, on alimente le chauffage avec des fœtus avortés), les catholiques ne sont pas embauchés ou licenciés parce qu'ils sont tels, au Moyen-Orient ils sont martyrisés à flux continu et des ethnies chrétiennes entières disparaissent dans le sang; l'avortement, l'euthanasie, même des enfants, la pédophilie rampante et institutionnalisée, la zoophilie, les lois familicides, l'obligation pour les écoles catholiques de censurer les passages bibliques dérangeants pour la pensée dominante unique, le «mariage» homosexuel ... , tout ce train infernal continue sa triomphale marche mortelle.

Et alors, qu'est-ce que François serait en train de changer et où?
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Quand on le demande aux journalistes - y compris «catholiques», et il va sans dire organiques à la pensée radicale, et plus à gauche que ceux laïcs - qui lui attribuent ce changement du monde, ils se gênent, tâtonnent dans l'obscurité, bégaient des mots entendus au hasard, ici ou là: «miséricorde», «nouveau visage», «changement», «liquidation». Non plus du monde, attention, mais de l'Église elle-même. Celle «d'avant», comme s'il en existait une pour chaque saison. Et voilà le point critique, pour le journaliste présumé «franciscain» (françoismaniaque), le lapsus freudien. Ils disent changer le monde, mais c'est pour ne pas révéler leur véritable intention: «liquider» l'Église, comme si elle n'était pas devenue d'elle-même suffisamment liquide depuis un an. Une Eglise dont on prétend l'«ouverture». C'est-à-dire le «rompez les rangs» général. Qui va bien au-delà de la «miséricorde», laquelle ouvre ses bras: ils veulent aussi ouvrir les jambes. L'Église. Au monde.

Mais cette fois, François en a peut-être eu l'intuition, quand dans l'interview (dernière mode papale) au Corriere, il a admis avoir été un peu troublé et peut-être agacé par la «mythologie» que les journalistes lui ont construite: «Sigmund Freud disait que dans toute idéalisation, il y a une agression». Il l'a compris, peut-être!

Ainsi, le pape est en train de «changer le monde», dit-il, disent-ils.

Je me demande plutôt si Flaubert n'avait pas raison, quand il remarquait que c'est Dieu qui a créé le monde, mais c'est le diable qui le fait avancer (ndt: Peut-être est-ce tiré de la "Tentation de Saint Antoine". A moins que ce ne soit une licence de l'auteur de l'article, càd une citation "à la manière de"...).