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Des places remplies, ou non ?

Réflexion sur l’affluence Place Saint-Pierre (7/12/2014)

Voici un article écrit par le responsable du site <Le cronache di Papa Francesco> qui peut servir de point de départ à une réflexion plus large, et me donne en particulier l’occasion de replonger dans les archives de mon site .

     

ORDRE MEDIATIQUE: NE VIDEZ PAS CETTE PLACE!
bergoglionate.wordpress.com/2014/12/05/ordine-mediatico-non-svuotate-quella-piazza/
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Les médias peuvent être très utiles pour l'évangélisation, mais ils peuvent aussi se révéler très dangereux, surtout lorsqu'ils sont utilisés par l'ennemi mortel de notre salut. Ce n'est pas un hasard si Marshal McLuhan rappelait toujours que «le prince de ce monde est un grand communicateur». Il est donc bon de distinguer la popularité médiatique de la dévotion populaire.

Cela fait à peu près un an que les supporters ("tifosi") de François ne cessent de répéter que les critiques sont injustifiées, puisque les places sont remplies. Eh bien, nous avons suivi l'affluence des fidèles aux catéchèse du mercredi de ces deux dernières années et nous avons découvert plusieurs choses intéressantes.

Tout d'abord, il faut rappeler que François a été élu au cours de l'Année de la Foi, donc beaucoup de paroisses et de nombreux mouvements avaient déjà organisé, ou étaient en train d'organiser leur participation aux audiences du mercredi et à d'autres événements depuis la fin de 2012. Notre diocèse, par exemple, a coordonné une vaste organisation pour les réservations et les diverses requêtes bien avant l'annonce de la démission de Benoît XVI. Tous les diocèses italiens, sans exception, sans oublier les conférences épiscopales régionales, ont tout préparé pour que, à chaque occasion, la Place Saint Pierre soit toujours bondée de pèlerins. Et les pèlerins ne sont pas des touristes. Il était juste et naturel que chaque diocèse puisse se rendre chez le Successeur de Pierre au cours de l'Année de la foi, afin de recevoir sa bénédiction. Ainsi les «places pleines» de 2013 étaient déjà prévues depuis 2012. Cela ne signifie pas, bien sûr, que l'intérêt et la sympathie pour le nouveau pape n'ont pas été importantes.

A l'audience du mercredi de cette semaine (3 Décembre), le commentateur à la télévision a affirmé qu'on pouvait voir à partir des images l'afflux, en constante augmentation, des pèlerins. Avouons-le: il y a été fort!

Comme on peut le constater au contraire par les photos de L'Osservatore Romano , la place se «vide» depuis Septembre dernier. Pour certaines audiences, même, ils ont mis 100/200 personnes par «carré», entouré de barrières, laissant les autres à l'extérieur de manière à faire paraître la place plus remplie, facilitant le tour de la papamobile, suggérant qu'il y avait un contact plus long avec la foule.

«Notre» commentateur a également ajouté qu'il y avait d'autres «groupes nombreux» dans la salle Paul VI. Ceci est également faux, ou incorrect, parce que, quand le temps est froid et pluvieux, les pèlerins malades suivent toujours l'audience sur grand écran dans la salle après avoir reçu le salut du pontife. Mais, cette bienvenue aux malades, les fans médiatiques de François la font passer comme une nouveauté absolue.

Le prédécesseur immédiat de François aussi, c'est-à-dire Benoît XVI, a toujours salué les malades avant l'audience sur la place, mais les photographes, à l'époque, n'étaient pas intéressés à dépeindre ces moments. En outre, quand la salle Paul VI était pleine, bondée, certains pèlerins se trouvaient dans la Basilique, de sorte que le pape était contraint, dans un certain sens, de faire deux audience, c'est pourquoi il a été décidé d'organiser la catéchèse du mercredi place Saint-Pierre, supportant la pluie, le vent et le froid.

Quel est le but des médias, pour continuer à donner ainsi des chiffres gonflés? Craindraient-ils que la «lune de miel» avec le pape régnant soit sur le point de se terminer et utilisent-ils la «place pleine» pour endiguer le phénomène?

Franchement, nous pensons qu'au Vatican, plutôt que remplir les places, ils devraient s'employer à remplir - en particulier tout près de la Nativité du Seigneur - les cœurs avec la lumière et la chaleur de l'Enfant Divin de Bethléem.

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Regard en arrière

Très honnêtement, ne suivant pas les catéchèses de François, je ne peux pas confirmer ce qui est dit ici. Je me souviens que du temps de Benoît XVI, il y avait généralement moins de monde aux catéchèses dans la période autour de Noël - ce qui paraît naturel. Mais il y avait aussi des périodes où la foule était très compacte (je ne parle pas des dernières apparitions publiques, en février 2013), et Raffaella relevait souvent que la Préfecture de la maison Pontificale, à l'époque dirigée par Mgr Harvey, donnait des chifffres largement sous-évalués, ne tenant pas compte des très nombreuses personnes qui assistaient aux audiences sans avoir pris de billet - je ne sais pas ce qu'il en est aujourd'hui.

A la fin de la première année de Pontificat de Benoît XVI, l'affluence cumulée officielle était considérable, faisant exploser les records établis sous Jean Paul II et suscitant la perplexité des médias laïcs, cherchant à tout prix à expliquer, c'est-à-dire à minimiser, comme en témoigne cet article datant de décembre 2005: beatriceweb.eu/archives2005.

En 2007, le phénomène s'amplifiait même (voir ici: Affluence au Vatican et également Le charisme de Benoît XVI).

A partir de 2008, bien informés par l'Osservatore Romano (dont on pourrait s'interroger sur la loyauté!), les medias hostiles commençaient à parler de baisse d'affluence, comme par exemple (ce n'est pas un hasard) Marco Politi dans la Repubblica du 2 janvier 2009 (cf. benoit-et-moi.fr/2009-I). Au point que le vaticaniste de l'AGI, Salvatore Izzo, apportait par souci d'honnêteté professionnelle quelques mises au point de bon sens (benoit-et-moi.fr/2008), et qu'interrogé par le Time, Vittorio Messori en personne volait à la rescousse de Benoît XVI, disant que « le pape représente Jésus-Christ, et le Christ ne peut pas être mesuré par des indications de popularité. En fait on pourrait dire que plus un pape satisfait les foules, moins il est une icône authentique du Christ. Les applaudissements ne sont pas tout : c'était la foule après tout qui a sauvé Barabbas et crucifié Jésus ».
Il ajoutait n'avoir aucun désir de voir la Place Saint-Pierre désertée, mais aussi qu'il n'était pas emballé de la voir déborder. Il y avait le risque de voir l'affluence aux audiences papales comme un phénomène de tourisme. « Il serait absurde d'utilliser les foules sur la place comme mesure de la foi ».
En passant, des propos qui trouvent un écho spécialement aujourd'hui, mais j'imagine que Messori ne les redirait pas...

L'insistance des médias sur ce thème avait probablement agacé Benoît XVI lui-même, puisque peu après, lors des voeux à la Curie romaine du 22 décembre 2007, il y répondait indirectement en rappelant à ses cardinaux: « le Pape n'est pas lui non plus la star autour de laquelle tout tourne. Il est totalement et seulement le Vicaire. Il renvoie à l'Autre qui se trouve au milieu de nous» (il parlait des JMJ de Sidney, mais c'était aussi une allusion claire aux polémiques dans l'air à ce moment).

La baisse d'affluence, répétons-le alimentée par les chiffres fournis par l'OR, est restée jusqu'au bout l'un des chevaux de bataille des pires ennemis de Benoît XVI.
Début juillet 2009, un commentateur d'une chaîne publique italienne, Rai Tre, (dite "traditionnellement de gauche"!!) Roberto Balducci, ironisait méchamment sur les "quatre chats qui avaient encore le courage et la patience d'écouter ses paroles". Propos déplacés, et même stupéfiants, qui avaient valu à leur auteur d'être relevé de ses fonctions de vaticaniste (!!) de Rai Tre (on trouvera des détails ici: benoit-et-moi.fr/2011-I).
En témoigne encore les propos de Nuzzi, l'auteur de "Sua Santità" (qui a connu son heure de gloire avec les Vatileaks, mais qui est depuis retombé dans l'oubli dont il n'aurait jamais dû sortir) dans un documentaire diffusé sur Arte en juin 2013, affirmant mensongèrement qu'au bout d'un an du pontificat de Benoît XVI, l'affluence aux audiences avait diminué de moitié (benoit-et-moi.fr/2013-II/articles/complot).

Mais revenons à aujourd'hui: les pélerinages organisés à l'occasion de l'Année de la foi constituent une donnée objective qui ne peut pas être niée, et à eux seuls, ils redimensionnent à la baisse la visibilité du fameux effet Bergoglio. Sans parler de l'effet de curiosité naturelle, forcément destiné à s'atténuer.

Sous Benoît XVI, les médias, comme nous venons de le voir relevaient malicieusement la moindre baisse d'affluence, réelle ou présumée: c'est le contraire qui se passe aujourd'hui, et c'est un fait en soi significatif, qui interpelle.

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