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L'interview du cardinal George

par John Allen, version longue... et même très longue, mais néanmoins passionnante, qu'Anna a eu la patience de traduire en entier (21/11/2014)


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L' interviewe-testament du cardinal George

On y découvre le portrait très attachant d'un homme qui sait que sa vie est désormais suspendue à un fil, ce qui donne à ses propos un caractère quasi-prophétique.
Un pasteur qui s'est engagé à fond dans son ministère, et que les raccourcis des journalistes qui opposent l'ouverture et la miséricorde de son successeur Cupich à son propre "conservatisme" et à ses idées étroites ont profondément blessé. Toutes proportions gardées, exactement ce qu'ils ont fait avec Benoît XVI et François, et on peut légitimement supposer que Benoît XVI a lui même été blessé.

Le cardinal George s'explique aussi sur une interview datant de 2010, qui avait fait le tour du monde, dans laquelle il disait qu'il "mourrait dans son lit, mais que son successeur mourrait en martyr" (il en parlait à nouveau en 2012, dans un billet publié sur le site de l'archidiocèse de Chicago, que j'avais traduit ici. (*)

Très intéressant, voir confirmer le rôle crucial du cardinal Ratzinger, à travers son représentant, Tarcisio Bertone, dans la lutte contre la pédophilie du clergé aux USA (avaec un coup de patte implicite à la politique de relatif laxisme qui aurait été pratiquée sous JP II).

Il y a un passage consacré à la réforme de santé d'Obama qui peut sembler un peu abscons aux lecteurs français. Anna offre quelques indications plus bas (cf. Note de traduction)
Enfin, le passage le plus intéressant a été gardé pour la fin (comme il se doit!): c'est celui qui concerne le pape.
Il est en particulier question du fameux roman de Rober Benson "Le maître de la Terre", dont nous avons souvent parlé dans ces pages.

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(*) "On me cite (à juste titre) comme disant que je m'attendais à mourir dans mon lit, que mon successeur mourrait en prison et que son successeur allait mourir en martyr sur la place publique. Ce qui est en général omis dans les rapports, c'est la phrase finale que j'ai ajouté au sujet de l'évêque qui suivrait peut-être un évêque martyr: «Son successeur ramassera les débris d'une société en ruine et lentement aidera à reconstruire une civilisation, ce que l'Église a fait si souvent dans l'histoire humaine». Ce que j'ai dit n'est pas «prophétique» mais un moyen de forcer les gens à penser en dehors des catégories habituelles qui limitent et parfois empoisonnent les discours public et privé".

     
LE CARDINAL DE CHICAGO SORTANT: "L'EGLISE PARLE DE VRAI/FAUX, PAS DE GAUCHE/DROITE".

http://www.cruxnow.com
17 novembre 2014
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Le journaliste Jonathan Kwitny a publié en 1997 une biographie du Pape Jean-Paul II au titre "Man of the Century". L'idée était que la biographie du Pape Jean-Paul traversait tous les grands drames du XXème siècle, du nazisme et du communisme jusqu'au bouleversement provoqué dans l'Eglise catholique par le Concile Vatican II. Par la même logique, on pourrait dire que le Cardinal Francis George de Chicago était l'homme d'Eglise américain de la fin du 20ème et du début du 21ème, parce qu'il n'y a presque pas d'histoire dont il n'ait été l'acteur principal.

George a joué un rôle essentiel pour faire adopter une réforme du culte catholique en anglais, se servant de traductions plus proches des originaux latins et, en général, adoptant un style plus respectueux et traditionnel. Il a été, pendant les trois ans de sa présidence de la conférence des évêques, l'architecte des batailles des évêques américains contre l'administration Obama au sujet de la réforme du système des services de santé, et plus généralement en défense de la liberté religieuse, .

George a aussi été le principal défenseur des évêques américains lorsque leur nouvelle politique de tolérance zéro sur les abus sexuels semblait mort-née à Rome, parvenant enfin à l'imposer face à la résistance importante du Vatican. En plus, George a voté aux conclaves qui ont donné à l'Eglise catholique les deux papes Benoît XVI et François.

Agé de 77 ans, George se retire officiellement à Chicago demain, lors de l'installation de son successeur l'Archevêque Blase Cupich. Pour l'instant il se bat pour sa vie, soumis à un traitement expérimental contre le cancer qui a à peu près 50% de chances de succès.

Depuis longtemps considéré comme un des critiques culturels les plus accomplis parmi les évêques américains, George ne prend pas de gants en hiver (in winter). Dans une interview exclusive à Crux vendredi dernier, il refuse l'idée que le changement à Chicago soit un "changement de cap" ou un "reniement" de ce qui est habituellement considéré comme ses vues plus conservatrices.

Il rejette toute dichotomie gauche/droite, disant qu'elle est "destructrice de la mission de l'Eglise et de sa vie".

"Pour nous, la catégorie qui compte est vrai/faux", dit-il. "Je rejette toute déformation libéral/conservateur du caractère de nos vies. Si vous vous limitez à cela …alors, d'une façon ou d'une autre vous avez trahi votre vocation d'évêque et de prêtre."

AUTRES POINTS SAILLANTS DE L'INTERVIEW:

  • George se défend d'être un 'guerrier culturel' (culture warrior), et affirme être profondément contrarié par l'idée qu'il ne serait pas aussi passionné pour la justice sociale et les pauvres que son successeur.
  • Il épluche une remarque fameuse faite en 2010 (*) à propos de son successeur mourant en prison, disant que ce n'était pas une prédiction directe mais un scénario du pire des cas.
  • George révèle que ce fut l'Archêveque Tarcisio Bertone, plus tard Secrétaire d'Etat du Pape Benoît, qui sauva la politique de tolérance zéro des évêques américains, sous les instructions de celui qui était alors le CardinalJoseph Ratzinger.
  • Il ne prend pas position contre l'Evêque Robert Finn de Kansas City, seul évêque américain condamné pour avoir omis de signaler une accusation d'abus de mineur, mais il affirme qu'"il est important qu'il y ait des moyens de tenir les évêques pour responsables".
  • George détaille une liste de choses qu'il voudrait demander au Pape François, y compris si le pontife comprend réellement combien certaines de ses affirmations "laissent les gens se demander s'il défend toujours la doctrine".
  • Enfin, George exprime son regret de ne pas avoir demandé plus de conseils à ses débuts à Chicago à propos de ce qu'il fallait faire, et fait l'éloge de Cupich qui pose les justes questions aux justes personnes: "Il est évidemment mieux préparé en arrivant que je ne l'étais", dit-il.

Ce qui suit constitue des extraits de l'interview, divisés en quatre sections: La transition à Chicago, la vie et l'héritage de George, le scandale des abus sexuels dans l'Eglise, et le Pape François, y compris ce que George voudrait lui demander s'il en a l'opportunité.

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1. LA TRANSITION À CHICAGO
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Crux: Nous sommes à quatre jours de la fin de vos 17 ans comme Archevêque de Chicago. Quelles sont vos sentiments?
George: Tout d'abord, il y a un sentiment de gratitude et de soulagement qui est vraiment authentique. Je suis reconnaissant de mon temps comme Archevêque. Je suis vraiment reconnaissant à Dieu pour l'appel, et reconnaissant aux gens et aux prêtres pour leur coopération. Je suis aussi soulagé, car c'est un travail à plein temps et maintenant je dois passer trop de temps à m'occuper de ma santé.
Il y a aussi un sentiment de regret des erreurs faites et des gens blessés parfois, sciemment ou non. Il y a le regret des opportunités non saisies ou pas perçues assez vite, administrativement et pastoralement. Honnêtement, je me demande aussi comment ça va se passer [pour moi]. J'ai été dans l'administration religieuse depuis que j'avais 35 ans.

- Comme le Pape François...
- Oui, ce qui est une des raisons de son élection. Nous avions besoin de quelqu'un qui sache gouverner. Je ne sais pas comment ce sera de revenir chez moi le soir et ne pas avoir à gérer deux heures de courrier.

- Vous devez l'attendre avec impatience. Non?
- Si, mais d'autres m'ont dit: "Il te manquera de ne plus être impliqué dans tellemnt de choses." Je ne sais pas; tout ce que je pense en ce moment est que j'aurai la possibilité de me reposer. Il se peut que cela me manque vraiment de ne pas être impliqué dans la vie de tant de gens comme je l'ai été.
Si j'en ai le temps, j'aimerais reprendre des relations qui ont été limitées par les préoccupation administratives et les développer en amitiés plus profondes. Vous rencontrez un grand nombre de braves gens et vous pensez qu'en des circonstances différentes il serait bien d'être amis, mais que je ne peux pas me le permettre ou je n'en ai pas le temps, ou bien encore que vous ne devriez pas le faire car ce serait comme si vous choisissiez un camp. Alors, à la fin, vous êtes quelque peu isolé. Je pense que la possibilité d'approfondir quelques amitiés est là, et je voudrais la saisir.

- Vous mentionnez la reconnaissance, le soulagement et quelques regrets. Qu'en est-il de la fierté?
- Je pense qu'il y en a, ou qu'il devrait y en avoir, mais c'est le vieux sentiment catholique de culpabilité! J'ai toujours plaisanté là dessus, mais il y a là quelque chose… vous savez, lorsque vous vous vantez d'une chose, elle revient après pour vous mordre.
Ce dont je suis le plus reconnaissant est quand je reçois des rapport, et maintenant il y en a beaucoup, de gens qui disent "Vous ne me connaissez pas, mais vous m'avez touché par quelque chose que vous avez dit". Alors, vous voyez qu'en dépit de vous même, vous avez été l'instrument du Saint Esprit qui unifie ses gens, l'agent de la grâce de Dieu pour quelqu'un à un certain moment difficile de sa vie. Les Archevêques ne l'entendent pas souvent, car vous n'êtes pas avec les gens comme le sont les prêtres de paroisse. Vous ne connaissez pas l'impact spirituel, mais c'est ce qui dure.
Comme je n'arrête pas de répéter: les édifices à la fin se dégradent, mais les gens sont éternels, et si vous aidez quelqu'un ou changez sa vie, cela dure éternellement. C'est ça la gloire du ministère sacerdotal, que ce que vous faites a des conséquences éternelles. C'est aussi notre honte si nous ne le faisons pas bien. Ce n'est pas en réalité ce dont il faut être fier, car vous vous enorgueillissez de l'action de l'Esprit Saint. Mais est-ce que je suis fier d'avoir pu être, le plus souvent, un instrument involontaire? Oui, bien sûr, j'en suis très reconnaissant.

- Quel est le meilleur conseil que vous avez reçu en arrivant à Chicago?
- Le Cardinal [Joseph] Bernardin venait de mourir et les gens étaient encore endeuillés, ce qui était juste. J'étais très attentif en arrivant de ne pas paraître vouloir modifier l'orientation. Tout le monde restait à sa place. Vous apprenez par la suite qui est compétent et qui ne l'est pas, qui est fiable et qui ne l'est pas… c'est ça la grande question, surtout en des situations très politisées. Je n'ai pas eu beaucoup de conseils qui m'auraient aidé à arranger les choses, de la façon où je pense qu'il [l'Archevêque Cupich] les arrange maintenant très habilement. Il pose les justes questions. Il a un esprit analytique et je suis étonné de voir à quel point il pose les justes questions. En plus, il connait beaucoup de monde parmi ceux qu'il faut interroger, et alors il est mieux préparé à assumer que je ne l'étais.
Avec le recul, quel conseil ai-je reçu? La vérité est que vous n'obtenez pas beaucoup de conseils même si vous en demandez. Cela a toujours été mon problème ici. Je disais aux gens, "Dites-moi ce que je devrais savoir", mais ils n'avaient pas l'habitude de dire quoi que ce soit [à l'Archevêque]. Il fallait le tirer des gens, parfois. Ils vous donnaient des conseils dans leur propre champ, ainsi les avocats vous disaient ce qu'il fallait faire là, les économistes ce qu'il fallait faire dans la finance et ainsi de suite. Mais il n'y avait pas de conseils d'ordre général sur le gouvernement de l'Eglise.

- Avec le recul, qu'est-ce que vous auriez voulu faire différemment?
- Je voudrais avoir posé plus de questions. J'ai cru que le réponses vendraient sans que je les recherche nécessairement, et cela a été une erreur. J'aurais dû être plus agressif avec mes questions, avec tout le monde. Pourquoi faisons-nous ceci, pourquoi faisons nous cela?

2. L'HÉRITAGE GEORGE
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- Beaucoup de monde essaie de définir votre legs. Comment le voyez-vous?
- J'ai toujours dit que la seule chose de moi dont je voudrais que les gens se souviennent est que j'ai essayé d'être un bon évêque. Je crois que je l'ai été, à bien des égards, et je suis assez fier au moins d'avoir essayé de l'être. Et c'est tout.
En ce qui concerne la liturgie, je savais qu'il fallait le faire et que j'étais dans un poste clé (key spot) pour s'assurer que ce qui était le plus important dans la transmission des traditions de l'Eglise, notamment notre façon de prier et notre liturgie, soit le plus fidèlement présenté aux gens. Cela signifiait beaucoup pour moi, car le culte de Dieu est la chose la plus importante que nous faisons.
En ce qui concerne les changements dans la conférence [des évêques], j'ai été impliqué dans la décision de nous faire évoluer vers un groupe axé sur la mission. Auparavant, la conférence avait été dans une certaine mesure menée par les comités et leur programme. Maintenant les évêques en ont pris le contrôle car ce sont nos objectifs [qui mènent les choses]. Nous avons restructuré, [de sorte que] la conférence est notre instrument, plutôt que comme une entité séparée quelque part et parfois en tension avec les évêques eux-mêmes. C'est extrêmement important, mais tellement de monde y est impliqué que je ne peux pas m'en attribuer tout le mérite.

- Votre mandat comme président de la conférence des évêques a coïncidé avec le premier mandat d'Obama et la lutte contre les règlements d'Etat (mandates) sur la contraception, et quelques observateurs vous ont classifié comme un "guerrier culturel". Pourquoi en êtes-vous contrarié?
- Je ne me vois pas comme un guerrier. Il y a eu des époques où les évêques allaient en guerre, mais ces temps sont dans le passé. Ce que nous devons faire est proclamer la vérité, à temps et à contretemps, et le faire de manière qu'elle ait des chances d'être entendue plutôt qu'en tapant les gens sur la tête avec une idée, même si l'idée est juste. Nous sommes supposés proclamer la vérité, et je crois que nous devons le faire.
Si vous menez les gens et les faites marcher, de façon qu'ils croient que vous jouez avec la vérité, vous avez trahi votre vocation. Si parler clair signifie avoir une arme dans la main, que vous êtes en guerre, alors oui, mais je ne le vois pas de cette façon du tout. Ce que je vois ce sont les évêques activement engagés dans la culture, mais ce n'est pas une guerre. C'est une question de transformation, de conversion. Nous devons tous changer, la culture aussi, il en sera toujours ainsi. Est-ce que cela signifie que nous sommes en guerre? Non, cela signifie que vous faites ce qu'un évêque est supposé faire et fera toujours.
Pour ma part, je me suis longtemps vu engagé dans la culture; l'engagement n'est pas la guerre. Je sais que c'est moins dramatique à dire, et les gens aiment le drame, mais parler de "guerre" déforme ce que je suis censé être. Réellement, c'est dénigrer mes motivations, et cela m'indigne. Je n'essaye pas du tout de frapper quelqu'un; j'essaye de proclamer la vérité de l'Evangile, ce dont j'ai l'obligation. Il y a peut-être des moments où je pourrais le faire plus adroitement, d'une manière qui semble mois abrasive. Certes, il y a des personnes qui pensent que c'est abrasif dès que vous dites, "Je ne suis pas d'accord." Là, il n'y a pas grand chose que je puisse faire.

- Dans quelques commentaires de journalistes, la transition de vous à Cupich ici à Chicago a été vue comme un changement de cap.
- Je le sais…

- Vous êtes communément vu comme plus conservateur et lui comme plus libéral. Y a-t-il quelque chose de faux dans cette façon de voir?
- Premièrement, je ne crois pas ce que c'est un changement de cap. [Cupich] ne le voit pas comme ça. Il y aura évidemment des changements, et il faut qu'il y en ait. C'est l'avantage d'avoir un nouvel évêque. Il verra les choses différemment et apportera un ton différent. Cela arrivera certainement, et il le faut. Est-ce que cela est un changement de direction? Non, à moins qu'il n'y ait une faute fondamentale dans la direction. Lorsque vous parlez du parcours engagé par l'Eglise avec la culture, que l'Eglise mène avec son propre enseignement et histoire, je ne suis pas sûr que cela doive être corrigé. En fait, cela ne le devrait pas.

- Est-ce que vous voyez Cupich en continuité avec ce que vous avez essayé d'accomplir?
- Je l'espère, car ce que j'ai essayé d'accomplir est ce que tout évêque doit accomplir. Il y aura des différences, mais c'est l'avantage d'un changement. Je ne sais pas si je verrais tous ces changements comme bons ou pas, mais ce n'est pas de ma responsabilité.

- Vous ne sentez pas que la nomination est un rejet de votre héritage?
- Je ne l'ai pas ressenti de cette façon avant de le lire quelque part! Quelques-uns l'ont écrit, mais ils devraient mieux savoir. Je ne sais pas à quel jeu ils jouent.
En premier lieu, ils font de moi quelque chose qui n'est pas vrai… par exemple, comme si je ne m'étais jamais intéressé à la justice sociale. J'ai aidé les ouvriers agricoles mexicains à former un syndicat à Yakima (ndt: ville de l'Etat de Washington) il y a des années. J'y ai toujours été impliqué. J'ai travaillé avec les réfugiés, avec l'immigration, je me suis occupé des logements pour les pauvres car je reconnais le lien entre dignité humaine et un logement décent. Voyez Catholic Charities (équivalent du secours catholique?), c'est grand ici, j'ai fait avancer de nombreux projets avec l'aide du Père [Michael] Boland qui en est le très capable directeur. Dire que, de quelque façon, je ne suis pas intéressé aux pauvres, cela m'indigne. Profondément. Tout l'objectif de ma congrégation est de prêcher l'Evangile aux pauvres.
Si je ne peux pas vivre comme un pauvre, comme j'ai fait dans le passé, c'est parce que je parle à des gens qui donnent de l'argent pour aider les pauvres. Quand je suis arrivé [à Chicago] la première fois, j'allais à la soupe populaire. Personne ne s'en est aperçu. Je ne pouvais pas continuer cela et faire tout le reste que je voulais. J'ai pris le temps chaque semaine de visiter une famille pauvre. Boland m'indiquait "allez ici, allez là-bas". Je ne pouvais pas continuer comme ça non plus et en moins d'un an j'ai dû changer mon emploi du temps. Je regrette cela parfois, mais on ne peut pas tout faire, le jour est long comme il est. Cela me blesse profondément qu'on me dise que je ne suis pas intéressé aux pauvres et aux questions de justice sociale.

- Est-ce que vous vous voyez comme un "conservateur"?
- Je pense que cette histoire libéral/conservateur est destructive de la mission de l'Eglise et de sa vie. J'e l'ai affirmé publiquement plusieurs fois. Vous utilisez une définition qui sort de nulle part, dans le cas qui nous occupe, une distinction moderne, et en faites le jugement de la vie de l'Eglise. C'est parce que nous sommes paresseux. On met une étiquette sur une personne, une étiquette sur une chose, et cela nous évite la peine de penser.
Je pense qu'en tant que personnes capable de réflexion, nous ne somme pas capables d'autocritique. Nous sommes critiques de l'autorité, car nous sommes formés pour l'être. C'est l'histoire libéral/conservateur… les conservateurs donnent un laisser-passer à l'autorité, les libéraux non. Mais dans les deux cas, cela à faire avec l'autorité. Qu'est-ce que cela a à faire avec la vérité? Pour nous, la catégorie qui compte est vrai/faux. Je rejette simplement toute cette déformation libéral/conservateur du caractère de nos vies. Si vous vous limitez à cela, comme le fait la presse qui ne peut pas parler de la foi en utilisant ses termes propres, alors d'une façon ou d'une autre vous avez trahi votre vocation d'évêque et de prêtre.

- Et comment cela s'applique-t-il à votre rôle dans la réforme du système de santé et des lois fédérales sur la contraception?
- Nous étions pour ce projet quand il a été annoncé parce que nous soutenons un régime de soins de santé universel en Amérique depuis 1917 ou à peu près. C'est comme la nourriture et les vêtements pour tous et tout le reste, le travail. Le problème est que nous avons insisté pour demander que les lois, quand elles seraient présentées, respectent les exceptions de conscience, y compris la conscience institutionnelle, qui faisait partie de la législation fédérale depuis des décennies, surtout l'Amendement Hyde. Il ne suffisait pas de dire, comme l'a fait le Président, nous avons l'Amendement Hyde et donc nous ne pouvons pas utiliser l'argent fédéral pour financer l'avortement. C'était une nouvelle source de financement et elle devait à nouveau être votée si on voulait rendre l'Amendement Hyde opératif.
Nous avons accepté l'objectif mais critiqué les moyens, et en effet tout ce que les évêques on dit alors s'est avéré. Nous avons dit que les échanges (??) seraient utilisés comme instruments pour obtenir l'argent fédéral en faveur du financement direct de l'avortement, et il est utilisé de cette façon là. Le gouvernement fédéral lui-même l'affirme à présent.
Relisez jusqu'au bout… toutes les critiques que nous avons soulevées se sont entièrement avérées.
(...)
Les législateurs ont trahi leur vocation, parce qu'ils n'ont pas agi pour le bien commun. Ce n'était qu'une décision politique. Il a quelques aspects positifs, ceux qui j'espère resteront, mais il a tellement de défauts qu'à un certain moment ils devront repenser entièrement la chose. Nous ne savons pas qui est couvert pour quoi, et ainsi vous avez toute une nouvelle industrie qui aide les gens à s'orienter dans le labyrinthe inventé par les compagnies d'assurance avec le Président Obama.
Ce n'est pas seulement une mauvaise loi, elle est aussi moralement défectueuse. Tout ce que nous voulions était le compromis auquel nous étions déjà parvenus avec l'Amendement Hyde. C'était un compromis, mais dans Evangelium Vitae (l'encyclique de 1995 sur la vie humaine) Jean-Paul II affirme que dans la mesure où le compromis va dans la juste direction, vous pouvez admettre une législation boiteuse. Mais celle-ci allait dans la fausse direction. Je l'ai affirmé et je pense que ce que nous avons dit est entièrement vrai.

- Une autre raison qui incite les gens à vous voir comme un 'guerrier culturel' est votre fameuse phrase de 2010, que vous vous attendiez à mourir dans un lit, pendant que votre successeur mourrait en prison et son successeur en martyr (*). C'était comme la dure constatation du point où en sont les choses. Une fois pour toutes, pouvez-vous clarifier ce que vous vouliez dire?
- Premièrement, quand je l'ai dit je ne savais pas que la presse était là. Je parlais avec quelques prêtres en difficulté, préoccupés par la sécularisation de notre culture. Je leur disais qu'ils devaient prendre du recul, prendre de la distance, et renouveler leur confiance en la providence de Dieu. Je leur disais que même si le pire des scénarios possibles se réalisait, nous nous en sortirons. C'était un jeu mental dans le sens kantien… imaginez la pire des choses qui puisse vous arriver. Au lieu de vous tordre les mains, imaginons le pire des scénarios possibles pour trouver ce que devrait être notre rôle. Ce qui n'est jamais rapporté, c'est le dernier évêque que j'ai mentionné, le quatrième, celui qui recueillera les morceaux d'une culture éclatée, comme l'Eglise a toujours fait, et deviendra un formateur de culture. L'Eglise forme la culture.

- Ce n'était donc pas une prévision directe?
- Evidemment non. Allez… comment pourriez vous prévoir une chose pareille. Vous devriez être un fou complet pour dire une telle chose comme l'affirmation de ce qui va arriver prochainement. Comment pourrais-je le savoir? Je disais simplement, "Ce n'est que le pire des scénarios possibles, mon Père, nous y passons et finalement la providence de Dieu prévaudra. Vous devez faire confiance à la miséricorde de Dieu pour son peuple, et la vie continue." Ces prêtres étaient très perturbés.

- N'était-ce pas aussi une sonnette d'alarme?
- Pas vraiment. Ces prêtres étaient déjà bien éveillés; j'essayais de faire le contraire, de les calmer. Ce que je voulais dire est que même si c'est pire que vous le pensez, comment allons nous faire en tant prêtres et évêques?

3. LE SCANDALES DES ABUS SEXUELS
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- Une question essentielle que vous avez dû affronter, ce sont les scandales d'abus sexuels dans l'Eglise. Etes-vous satisfait de l'état dans lequel vous laissez les choses?
- Oui, je pense qu'en instituant la tolérance zéro nous avons les instruments pour protéger les enfants. C'était assez difficile parce qu'il y avait plusieurs personnes très influentes à Rome qui pensaient que c'était une invention américaine et que nous voulions l'imposer à l'Eglise. En découvrant que les règles essentielles devaient être révisées pour la première fois, nous avons eu peur de revenir leur demander d'approuver nos révisions, car nous redoutions qu'ils ne les refusent en totalité et nous les renvoient comme nulles et non avenues.
[Note: Quand en 2002, lors d'une réunion à Dallas, les évêques américains adoptèrent leur politique de la tolérance zéro, une nouvelle série de règles fut envoyée à Rome pour être approuvée. Le Vatican refusa de signer, mais forma une commission mixte de responsables du Vatican et d'évêques américains chargée d'apporter des changements. La partie américaine était dirigée par George.]

- C'est un aspect de votre héritage que les gens oublient parfois. Est-il correct de dire que vous avez eu un rôle important dans le sauvetage de la tolérance zéro?
- Je pense que c'est vrai. Je n'aime pas le dire pour me vanter, mais c'est juste. J'étais à la tête de la commission, et je me souviens des discussions. C'étaient trois jours de débat très minutieux, en italien et anglais. A son honneur, ce fut Bertone qui, en opposition à d'autres présents, à un certain moment a dit "possiamo farlo" [Italien pour "nous pouvons le faire."]

[Note: L'Archevêque Tarcisio Bertone était alors le premier adjoint du Cardinal Joseph Ratzinger à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Par la suite, il est devenu cardinal et Secrétaire d'Etat lorsque Ratzinger devint le Pape Benoît XVI.]

- Bertone agissait sous instructions de Ratzinger, n'est ce pas?
- Oui, il représentait le Cardinal Ratzinger dans les discussions. Possiamo farlo… Je n'oublierai jamais cette phrase. Dès qu'il la prononça je me souviens d'avoir pensé, "Merci, mon Dieu!"

- Il y a encore le sentiment que malgré tous les progrès, quelque chose manque encore, et que c'est la faute des évêques. Le Cardinal Sean O'Malley de Boston a donné un interview à "60 minutes" où il commente le cas de l'Evêque Robert Finn de Kansas City, et affirme qu'il est "urgent" que le Saint Siège fasse quelque chose. Etes-vous d'accord?
- Peut-etre qu'il en connaît plus que moi. J'imagine que c'est le cas. Le Saint Siège a réagi en envoyant un visiteur apostolique. Je ne sais pas quelles devraient en être les conclusions parce que je ne connais pas la situation à Kansas City. Vous devez prendre en considération plusieurs choses. En premier lieu, est-ce qu'il a respecté le code civil?

- Il a été reconnu coupable pour ne pas l'avoir fait.
- C'est exact. Comme conséquence de cela, a-t-il perdu l'autorité morale dont un évêque a besoin pour gouverner? C'est ça la question. Vous êtes ordonné pour gouverner l'Eglise, pour représenter le Christ comme chef de son corps. Si vous ne pouvez pas gouverner, justement ou injustement, car les gens ont perdu confiance en votre capacité de gouverner, alors évidemment il faut qu'il y ait un changement. Je ne sais pas si cela est vrai, car je ne suis pas à Kansas City, mais c'est ça la question… est-il encore capable d'être un pasteur pour son peuple? J'imagine qu'il y a des réactions mélangées à cela, et c'est un jugement prudentiel (a prudential judgement).
Une autre question est s'il y a eu négligence délibérée en ne protégeant pas des enfants. Une chose est de dire avec le recul, si cela avait été fait, alors les enfants n'auraient pas été abusés. Une autre est de dire que quelqu'un a délibérément mis les enfants dans une situation de risque. Je ne connais par l'évêque Finn, qui est un prêtre de St. Louis, mais j'en serais surpris. Je ne crois pas qu'il soit une espèce de monstre moral qui a délibérément négligé de protéger des enfants.

- Au-delà du cas Finn, est-il important que le Saint Siège fasse une déclaration sur la responsabilité des évêques?
- Je pense qu'il est important qu'il y ait un moyen de tenir pour responsables les évêques, un moyen public, et que les gens comprennent comment il fonctionne. Je crois que nous allons vers cela avec les visites apostoliques et la publication - comme ils sont en train de faire - de ce qu'ils s'attendent des évêques dans ce domaine. C'est très différent de ce à quoi ils s'attendaient il y a 20 ans!

- Finalement: il n'est pas seulement important que les évêques soient tenus pour responsables, mais qu'on voit qu'ils sont tenus pour responsables.
- Oui, certainement. Les gens ont besoin de comprendre cela. Ce doit venir du Saint Siège, compte tenu de sa structure. De manière informelle, nous nous tenons réciproquement pour responsables. Je sais que dans cette province, chaque fois que les évêques provinciaux se rencontrent nous allons jusqu'au bout… Qu'est-ce que vous avez fait? Qu'est-ce qui se passe? Ce n'est pas "légal", et tout doit être légal dans ce pays pour être vrai, mais c'est toujours une forme de responsabilisation. Cela ne répare pas le passé, mais ça compte.

4. LE PAPE FRANÇOIS
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- Parlons du Pape François. Récemment, l'écrivain italien chevronné (veteran) Sandro Magister a dit que plusieurs évêques américains paraissent "mal à l'aise" avec François, laissant penser que les évêques américains pourraient devenir les défenseurs de la tradition, à la place du Vatican, sous ce Pape. Que est-ce que vous en pensez?
- J'espère qu'il a tort! Pas parce que je n'ai pas confiance dans les évêques américains, j'ai confiance, mais c'est un jugement bien général (very broad) sur le Pape et le Vatican.

- Craignez-vous un abandon systématique de la tradition?
- Je ne crois pas à un abandon systématique de la tradition. Le pape a demandé que toutes les questions soient soulevées, ce qui s'est passé, il a eu ce qu'il voulait, et maintenant il doit régler les choses. Il a dit lui-même que le pape a le charisme de l'unité, et il sait très bien que c'est l'unité autour du Christ, pas autour de lui. Par conséquent, la tradition qui nous unit au Christ doit être la norme. Comment il interprète cela, et comment quelqu'un d'autre peut interpréter cela, c'est entrer dans des conversations qui façonnent le gouvernement.
Je comprends que des gens puissent être inquiets. Si vous n'approfondissez pas (If you do not push it), il semble remettre en question l'enseignement doctrinal bien reçu. Mais si vous réexaminez, en particulier si vous écoutez ses homélies, vous voyez que ce n'est pas le cas. Très souvent quand il dit ces choses, il se place dans le contexte pastoral de quelqu'un qui est pris dans une sorte de piège. Peut-tre la sympathie est-elle exprimée d'une manière qui laisse les gens se demander s'il tient toujours la doctrine. Je n'ai pas de raisons de penser qu'il ne la tient pas.

- Jusqu'au Synode d'Octobre, la plupart de ceux qu'on pourrait généralement appeler les "conservateurs" semblaient enclins à donner à François le bénéfice du doute. Depuis, cela semble être moins le cas, et les gens posent sur le pape un regard plus critique. Est-ce que c'est aussi votre sentiment?
- Je pense que c'est probablement vrai. La question est, pourquoi ne clarifie-t-il pas lui-même ces choses? Pourquoi est-il nécessaire que des défenseurs se chargent d'essayer de les rendre plus présentables? Est-ce qu'il se rend compte des conséquences de quelques-unes des ses affirmations, ou même de ses actions? Est-ce qu'il se rend compte des répercussions? Peut-être pas. Je ne sais pas s'il est conscient des conséquences de choses qu'il a dites ou faites et qui soulèvent des doutes dans l'esprit des gens.
Ça c'est une des choses que j'aimerais pouvoir lui demander, si j'y parviens. Est-ce que vous comprenez ce qui est arrivé, juste par cette simple phrase "Qui suis-je pour juger?" Combien elle a été utilisée à bon et mauvais escient? Elle est très mal utilisée, parce qu'il parlait de quelqu'un qui a déjà demandé pardon et a été absous et qu'il connait très bien. C'est complètement différent que de parler de quelqu'un qui demande d'être accepté plutôt que d'être pardonné. Elle est constamment utilisée de façon abusive.
Il a créé des attentes autour de lui auxquelles il ne pourra peut-être pas répondre. Cela m'inquiète, car à un certain moment, ceux qui l'ont dépeint comme l'acteur de leur scénario de changements dans l'Eglise vont découvrir qu'il ne l'est pas. Il ne va pas dans cette direction. Alors il obtiendra non seulement de la désillusion mais aussi de l'opposition, et cela pourrait être nuisible à l'efficacité de son magistère.

- Est-ce que les évêques américains peuvent jouer un rôle afin de lui fournir ces informations, et l'aider à comprendre comment ces choses se passent.
- Je pense que les évêques ont un rôle pour faire cela. Je ne pense pas qu'il serait bon de lui donner un caractère national. Nous ne sommes jamais dans une Eglise nationale, pas dans ce pays ni ailleurs. Je ne pense pas qu'il serait bon d'affirmer "Les évêques américains face au Vatican". Les évêques devraient prendre individuellement leurs responsabilités et faire ce qu'ils doivent. S'il s'agit de quelque chose qui nous affecte collectivement, alors peut-être devrions nous parler collectivement. Mais dans une matière comme celle-ci, à savoir les impressions causées par les affirmations non expliquées du pape, je ne crois pas qu'une entière conférence devrait assumer la tâche de "corriger" le pape ou de décider comment ils vont faire à ce sujet. Nous pouvons discuter, ce que nous faisons, et puis décider individuellement du moyen d'arriver au pape.
Je crois qu'un certain nombre d'évêques ont essayé de le faire.
S'ils y sont parvenus, je ne le sais pas, ni comment lui-même reçoit ces nouvelles. C'est la grande inconnue, n'est-ce pas? J'entends parfois dire que lorsque vous alliez chez le Pape Benoît avec des nouvelles qu'il n'aimait pas entendre, il ne les entendait pas toujours très bien.

- Il y a eu la fameuse interview avec le Cardinal [Joachim] Meisner, disant qu'en 2009, il était allé chez Benoît au nom de plusieurs cardinaux, pour lui suggérer quelques mouvements de personnel au Vatican, et Benoît n'a pas voulu l'entendre.
- Oui… Der mensch bleibt [Note: une expression allemande signifiant à peu près qu'un office n'enlève pas la personnalité humaine de quelqu'un.] Je ne sais pas comment ce Pape réagit à cela. Avant d'y aller et d'essayer il serait sage de parler à ceux qui lui sont très proches et savent si ce serait utile ou nuisible.

- Vous ne voulez pas encourager de tendance à voir les évêques américains comme un contrepoids au Vatican sous François?
- Nous n'avons pas de Jésus le mandat d'être un contrepoids au Saint Siège!

- Maintenant vous êtes concentré sur votre santé. Si les choses changent et si vous avez plus de temps, avez vous d'autres projets en vue?
- J'ai un livre qui sort sur la tradition intellectuelle catholique, chez l'éditeur Catholic University Press. …Vous savez, il y a eu de nombreux sujets qui m'ont intéressé à un moment ou un autre. Quelques-uns sont en rapport avec l'épistémologie car j'ai toujours été fasciné par ce que nous pouvons savoir et ce que nous ne pouvons pas savoir, et pourquoi nous pensons que nous pouvons. En théologie, j'ai toujours été intéressé par l'eschatologie.
Il est intéressant pour moi que ce Pape parle du roman "The Lord of the World" (La Maître de la Terre). Voici une chose que je veux lui demander. Comment conciliez-vous ce que vous faites et ce que vous dites être l'interprétation herméneutique de votre ministère, avec cette vision eschatologique que l'anti-Christ est avec nous? Est-ce que vous le croyez? J'aimerais demander au Saint Père: qu'est-ce que cela signifie? Dans un sens, peut-être cela explique-t-il pourquoi il semble être pressé. Personne ne parait s'y intéresser mais je trouve cela fascinant, parce que j'ai trouvé le livre fascinant.
[Note: Ecrit par Robert Hugh Benson, prêtre catholique converti et fils d'un ancien archevêque anglican de Canterbury, c'est un roman apocalyptique imaginaire qui aboutit à une confrontation entre l'Eglise et une charismatique figure d'anti-Christ]
Je l'ai lu par hasard quand j'étais au lycée. C'est écrit en 1907, il y a les voyages en avion, il y a tout ce qui est moderne. Il est vraiment inquiétant parce qu'il semble qu'il voyait notre époque, je veux dire juste maintenant. Est ce que le Pape croit à cela? Or cela est beaucoup plus intéressant que mon histoire de mon successeur mourant en prison. Qu'est-ce que le pape croit au sujet de la fin des temps?
L'eschatologie pourrait être un projet que j'aimerais continuer. Ratzinger, comme vous le savez, a écrit un livre su l'eschatologie et l'aurait probablement poursuivi s'il n'avait pas été élu Pape. J'ai lu le livre et je l'ai beaucoup aimé.
En ce qui concerne le pape, j'espère avant de mourir avoir l'opportunité de lui demander: Comment voulez vous que nous comprenions votre ministère si vous mettez cela [la fin des temps] devant nous comme la clé de tout?

- Voici deux fois que vous mentionnez les choses que vous voudriez demander au Pape. Il me semble que vraiment vous voudriez avoir un face-à-face avec lui.
- Oui je le voudrais. Tout d'abord, je ne le connaissais pas bien avant qu'il soit élu. Je le connaissait à travers les évêques brésiliens, qui le connaissent bien, et je leur ai posé beaucoup de questions. Depuis l'élection, je n'ai pu aller à aucune des rencontres ou consistoires car j'ai été sous traitement et ils ne vous laissent pas voyager. Je n'ai pas été le voir depuis qu'il a été élu.
Je voudrais juste lui parler. C'est moins important maintenant parce que je ne serai plus à la gestion des affaires, mais vous êtes supposé gouverner en communion avec et sous le successeur de Pierre, donc il est important d'avoir quelque communion d'esprits, quelque entente. Je pense évidemment que nous sommes des personnes très différentes. J'ai toujours ressenti une sympathie naturelle envers le Cardinal Wojtyla, avec Jean-Paul II… une très profonde sympathie, de ma part en tout cas. Il avait cette capacité de le faire avec des milliers de personnes. Avec le Cardinal Ratzinger, il y avait de la distance mais aussi un profond respect. Je ne connais pas assez bien le Pape François. Je le respecte certainement en tant que Pape, mais il n'y a pas encore cette compréhension du "Que est-ce que vous faites ici?"

- L'Archevêque [Joseph] Kurtz a récemment écrit dans un blog qu'il vous a téléphoné, à Chicago, après sa rencontre avec le Pape et que François a demandé de votre santé.
- J'en ai été très touché. Comme je vous ai dit, je n'ai jamais eu la chance de lui parler et je ne savais pas qu'il connaissait ma situation.

En réalité, voilà la grande question, n'est ce pas? Qui conseille le Saint Père? Je ne lui ai pas encore demandé… voilà une autre chose que je voudrais lui demander, si j'en ai l'occasion.

     

Note de traduction (Anna)

Anna, qui a vécu aux Etats-Unis , et connaît donc le problème tel qu'il a été ressenti par les gens, m'apporte quelques précisions sur l'"Obamacare" qui me semble être la version américaine de l'"usine à gaz"....:

La plupart des gens n'y comprenaient rien.
Pas grand chose n'a changé par rapport à la situation de l'assistance de santé précédente, des structures d'assistances aux plus démunis étaient déjà en place depuis longtemps et elles continuent de fonctionner; un labyrinthe informatique s'est ajouté, auquel il est obligatoire de s'inscrire, sous peine de perdre toute assistance. Tous les aspects innovateurs de la réforme ont été annulés à cause de la pression des compagnies d'assurance, et cette réforme qui devait être LA rẻforme de la présidence Obama est devenue l'image de l'impuissance du président du "yes we can".
En outre, il y a eu le débat dont parle George, du financement de l'avortement avec les fond publics, contrasté pas les évêques américains, à qui Obama opposait l'Amendement Hyde comme garantie que l'avortement ne serait financé par des fonds publics (ce qui, dit le cardinal, s'est révélé faux).
Et pour finir, Obama lui-même s'est excusé publiquement du flop de sa réforme, après que les premières polémiques aient commencé à fuser.

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