Dialogue et accommodement

Très intéressante réflexion, datant de février 2014, sur la "protestantisation" de l'Eglise amorcée par François, trouvée dans le blog "St Corbinian's bear"

Grâce à une traduction récente (In cauda venenum), je suis tombée par hasard sur un blog en anglais inconnu, mais au titre sympathique "St Corbinian's Bear".
Je m'étais promise de l'explorer...
Une amie, Régine, m'a devancée: elle m'a envoyé la traduction d'un extrait d'un article datant de février 2014.
Mais l'article entier est une remarquable réflexion sur la nature de ce Pontificat, j'ai donc complété son travail.
L'auteur part du Message pour la Journée Mondiale des Communications Sociales 2014.

Dialogue et accommodement

corbiniansbear.blogspot.fr
3 février 2014

[L'article souvre sur l'image ci-contre, avec la légende: "François a fait la couverture de tous les magazines, sauf The Watchover" (magazine édité en différentes langues par les Témoins de Jehovah, le nom en français est "la Tour de garde", ndt).
Le blogueur s'excuse ensuite auprès de ses lecteurs de son long silence, apparemment le blog avait cessé de publier depuis un certain temps].

 


Ce qui m'a réveillé de mon hibernation, ce sont les continuelles pitreries du cover-boy catholique chéri de tous.
Ne perdez pas de vue que ceci est un blogue ultramontain (dans le sens d'ahésion au pape, quel qu'il soit, ndt) lorsque d'autres conservateurs et tradis critiquaient tout ce que le nouveau pape faisait ou disait. Je pensais qu'il était juste et prudent de lui donner une chance, surtout compte tenu de son office. Toutefois, j'ai désormais vu assez de preuves pour être déçu et inquiet.
Le message du pape pour la 48e Journée mondiale des Communications qualifie Internet de «don de Dieu». Comme c'était la Journée mondiale des communications, il ne pouvait pas condamner Internet comme spectacle marqué du sceau de Satan sans porter de jugement envers les pornographes et les trolls athées. Mais la nouvelle est ailleurs. L'autre thème dépasse l'inepte:

«Dialoguer ne signifie pas renoncer à ses propres idées et traditions, mais à la prétention qu’elles soient uniques et absolues.»

Maintenant, comme pour toutes les déclarations de François, on pourrait donner à ces propos un tour acceptable. Mais, pris individuellement, ils sont ambigus, et collectivement, ils laissent une impression d'ensemble qui n'est tout simplement pas catholique.
Sommes-nous censés renoncer à la revendication de l'Eglise d'être la gardienne exclusive de la vérité absolue? Une lecture superficielle pourrait le dire. Sur cette question, une lecture attentive de l'arrière-plan des enseignements de Vatican II pourrait conduire à la même conclusion. Les repères ont été déplacés au cours des quarante dernières années. Si nous ne prenons pas soin de clarifier nos idées, nous pouvons facilement perdre le contrôle du message. (François pourrait humblement se demander pourquoi ses prédécesseurs ne parlaient pas autant)

Le nouveau vocabulaire du discours de l'Église
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Chaque fois que je l'entends le mot «dialogue», je cherche mon revolver. «Dialoguer», aujourd'hui, ne consiste plus tant à faire étalage de son plumage. C'est plutôt une activité destinée à communiquer parmi les gens intellectuellement pauvres et incertains l'idée qu'une personne est "la bonne". En filigranne, c'est le mot d'ordre profane de la tolérance et l'hérésie religieuse de l'indifférentisme.

Le pape a abandonné un vocabulaire catholique musclé pour les vagissements laïcs de la capitulation brutale de l'Occident. Plus le monde aime ce pape, moins il (le pape) a de rapport avec le véritable catholicisme. Certains d'entre nous ont une tournure historique de l'esprit et des oreilles qui n'est pas chatouillée par la dernière plume (feather) franciscaine. François parle depuis le monde pour le monde quand il utilise des mots comme «dialogue». Lequel n'a jamais fait partie du vocabulaire catholique.

La nouvelle évangélisation ne peut aller nulle part, sauf si les catholiques croient que nous et nous seuls avons ce dont chaque personne au monde a désespérément besoin. Dans son discours, le pape dit que les catholiques doivent "renoncer" à insister sur le fait que seule l'Eglise possède des idées et des traditions valides ou absolues. Cela fait partie du dialogue, voyez-vous. De toute évidence, nous ne pouvons pas dialoguer de bonne foi si nous avons une attitude de supériorité selon laquelle notre religion est en quelque sorte meilleure (...) Mais c'est comme si un brillant chercheur en médecine découvrait le remède contre le cancer, et n'insistait pas ensuite pour qu'il remplace les médicaments inefficaces de crainte de froisser la sensibilité des autres médecins. Si nous croyons vraiment la vérité du christianisme, comme préservée et déployée à travers l'Eglise catholique, nous devrions prêcher, pas dialoguer; convertir, au lieu de confirmer. Mais de nos jours, les Juifs sont exhortés à continuer à attendre leur Messie; les musulmans font bien de croire en un dieu; les Hindous sont admirés pour en avoir beaucoup; et les athées sont bons parce qu'ils n'en ont aucun.

Qu'y a-t-il derrière tout cela? Pas le Catholicisme tel qu'il était compris depuis le temps des martyrs qui préféreraient mourir plutôt que d'offrir une pincée d'encens à l'empereur romain. Pas le catholicisme, qui a transformé l'Empire romain, les barbares après, et le Nouveau Monde. Pas le catholicisme qui a envoyé des missionnaires comme saint François Xavier au Japon, non pas pour admirer leur religion d'origine, mais pour offrir aux gens le don précieux de l'Évangile selon le commandement de Jésus. L'exaltation actuelle du dialogue et de l'accomodement ne fait-elle pas de tous les martyrs et missionnaires des imbéciles?

«Dialogue et accommodement» pourrait être la devise de l'Eglise moderne. C'est comme si l'Eglise avait sondé le monde et en avait conclu que son temps était révolu.
La chance de recevoir les enseignements de l'Eglise a été donnée à tous, et la plupart les ont rejetés. La nouvelle mission de l'Eglise est de faire la paix avec le monde: de sauver, autant que possible, sa marque spirituelle et matérielle tout en se replaçant elle-même comme "primus inter pares", partout où le monde moderne sera disposé à accepter la religion.
Il est clair que les certitudes religieuses ne plaisent pas au monde. «Qui suis-je pour juger?» Et c'est ainsi que l'on réussit à avoir son portrait en couverture des magazines Rolling Stone (cf. benoit-et-moi.fr/2014-I) et The Advocate (benoit-et-moi.fr/2013-III), que l'on devient la personnalité de l'Année de Time Magazine (benoit-et-moi.fr/2013-III).

Un habile complot jésuite?, oserai-je dire. Ou bien peut-être la réponse est-elle plus simple.
Le Pape François semble mépriser le passé, la doctrine et la tradition (ce qui explique pourquoi les seules personnes qu'il se sent compétent pour juger sont les traditionalistes). Par ailleurs, il paraît respecter la Bible. Peut-être qu'au lieu d'essayer de trouver quelle sorte de catholique est le Pape, nous ferions mieux de trouver plutôt à quelle sorte de protestant il ressemble. Cela expliquerait bien des choses, en particulier l'absence de vocabulaire catholique, ainsi révélée à l'occasion des Journées Mondiales de la Communication.

Le message du pape ne saurait être plus clair..., si seulement nous l'écoutions.