La vengeance d'Henry VIII

Le blog catholique conservateur < www.adelantelafe.com>, version hispanisante de <The Remnant> (*) revient sur les deux motu proprio simplifiant les procédures de nullité matrimoniale. Traduction de Carlota (12/9/2015)

(*) Je ne parviens plus à accéder au site The Remnant, bien que j'ai la preuve qu'il est toujours actif.

>>> Voir aussi:
¤ Un plan B au Synode?
¤ Le plan B au Synode est déjà en acte
¤ Mouiller la poudre (Tosatti)
¤ Motu Proprio sur l'annulation du mariage (Socci)
¤ Une blessure au mariage chrétien (de Mattei)
¤ Un pas en avant vers la démolition de la famille (Paolo Deotto, <Riscossa Cristiana>)
¤ Motu proprio: les réserves du cardinal Burke

 

(Carlota)

Je ne suis évidemment pas une spécialiste du droit canon et je n’ai sans doute pas lu avec suffisamment d’attention les deux récents motu proprio du Pape François «facilitant» les annulations du mariage catholique, mais du fin fond du bout du banc de l’église et derrière un pilier, me vient à l’esprit la constatation suivante : nous qui nous sommes mariés jeunes à l’église, nous étions tous (et sauf sans doute de très notables exceptions), des immatures! Qui peut en effet à vingt ans (un peu plus ou un peu moins) avoir la maturité pour envisager l’après. Par ailleurs je reste persuadée que nous ne sommes pas plus ni moins mûrs que nos ancêtres sur le sujet. Mais eux, à l’inverse de nous, n’avaient pas cette facilité de séparation donnée aujourd’hui par les lois civiles. La vertu (admettons que ce soit seulement celle apparente) s’obtient aussi par la crainte et la coercition (ou dit autrement et sur un autre sujet, tu tueras moins facilement si tu sais que les lois civiles te condamnent à mort si tu donnes la mort).

S'il y a quelque chose à changer, c’est sans doute et d’abord dissocier l’union civile (ou mariage tel que les lois de nombreux pays occidentaux le définissent désormais) du sacrement catholique du mariage, et notamment dans les pays où l’on peut directement et uniquement passer par l’église pour se marier (l’acte reçu par le curé est ensuite transcrit sur l’état civil, c’est le cas notamment en Europe dans de nombreux pays, et évidemment dans les pays non européens qui furent de forte tradition catholique via l’Empire espagnol) ; ou à l’inverse ne pas lier le mariage religieux (comme en France et sauf urgence) à une inscription au préalable à la mairie, obligation d’ailleurs qui n’est prise en compte que par les curés catholiques (ou les pasteurs du monde protestant) sous peine de fortes amendes.
Mais qu’on ne me parle pas d’immaturité du fait d’une dé-catholisation de nos sociétés qui nous aurait fait oublier ce qu’est le sens du mariage catholique. C’est trop facile ! Ne plus prononcer les mots qui fâchent, ne change pas la situation mais trompe encore plus ceux qui n’ont pas les capacités à se prémunir des tromperies de langage.
Quant à la gratuité, là encore qui peut penser que lorsqu’il y a vraiment une raison valable, l’on ne peut pas trouver une possibilité d’aide financière de la famille, d’amis ? La non gratuité était également une façon de faire mûrir la demande d’annulation, tout comme la lenteur de la gestion du dossier et ce n’est pas parce qu’il y aurait eu des affaires peu claires que c’était une généralité.

Quant à décentralisation de l’autorisation : on peut craindre des jugements de «Cour» bien variables selon le lieu où siège la «Cour» et la personnalité du juge unique! (on en a eu déjà un triste exemple avec l’eucharistie tolérée aux divorcés remariés civilement pour ne parler que de cela…). Et quand les jugements de «Cour» sont de ce type, ce sont toujours les plus faibles qui en pâtissent.

Les récents motu proprio favorisant l’annulation sont vus chez les catholiques anglo-saxons non adultes d’une façon particulièrement négative et pour cause (rappelons nous ce qu’il en est advenu de la pauvre Catherine d’Aragon, épouse fidèle et mère de 6 enfants que lui avait donnés un certain Henri Tudor, même si seule Mary vécut assez longtemps pour devenir reine d’Angleterre).
Voici à ce sujet un texte paru sur le blog catholique conservateur étatsunien, The Remnant, à partir de sa traduction en espagnol (www.adelantelafe.com)

LA VENGEANCE D’HENRI VIII


Ah, si l’on m’avait accordé l’annulation au lieu du divorce!
Les premiers rapports sont arrivés et il paraît que Sa Sainteté François, comme on s’y attendait, a effectué une réforme radicale dans la procédure par laquelle on peut annuler un mariage, en accélérant des démarches que beaucoup de Catholiques libéraux considéraient excessivement ennuyeuses.
Cette initiative est la dernière d’une série par laquelle le pape François tente de rendre son pontificat en apparence plus réceptif aux besoins des laïcs, en particulier ceux qui depuis longtemps se sentent rejetés par la hiérarchie (lire : qui n'aiment pas les enseignements moraux de l'Église).

Voilà les trois changements principaux annoncés ce mardi : Il ne sera plus nécessaire qu'un second juge étudie le cas pour annuler un mariage. Dans certaines circonstances, les évêques pourront accélérer les démarches et accorder eux-mêmes la nullité. Par exemple, dans des cas de mauvais traitements (ndt la séparation de facto était déjà prévue par l’église, en cas de danger pour le conjoint, sans que cela entraîne la nullité bien évidemment) par le conjoint, ou d'infidélité (ndt combien de mariages depuis 2000 ans auraient du ou devraient être annulés ! Le couple des parents de Saint Augustin lui-même. Et nos rois qui pourtant firent bien plus que de vertueux républicains pour défendre leur pays et le transmettre à leurs enfants, non pas comme un butin, mais comme un héritage à faire fructifier comme c’est dit dans la Genèse).
Le processus sera gratuit, sauf pour un tarif nominal couvrant les coûts du jugement, et devra être conclu dans un délai de 45 jours.

La réforme a été publiée ce mardi au moyen de deux motu proprio. C'est-à-dire, comme le nom l’indique, des documents rédigés à l'initiative du Souverain pontife lui-même. Ils entreront en vigueur comme partie du Code de Droit Canonique le 8 décembre prochain, avec le début de l'Année de la Miséricorde proclamée par François.

* * *

COMMENTAIRE DE THE REMNANT: il faudra attendre que la traduction officielle soit publiée, mais tout cela menace de miner gravement le mariage, surtout dans les pays du Tiers Monde (ndt: a priori c’est un observateur étatsunien qui parle et sa notion de tiers-monde doit s’appliquer au moins à tout l’ex empire espagnol catholique des Philippines à la Terre de Feu !) où les procès de nullité sont moins populaires et où les promesses de mariages ont plus de poids.

L’information a été donnée que le Pape a supprimé les coûts, donné l’autorité aux évêques pour déléguer les sentences de nullité aux prêtres de leurs diocèses, éliminé l’un des tribunaux, comme la décision d’appel automatique, et autorisé la nullité quand les deux partis la veulent: bien sûr, c’est ce qui plaît le plus, puisque par essence cela signifie que pour mettre fin à un mariage il suffit que les deux se mettent d’accord dans le fait qu’ils ne se sont jamais mariés. Comme c’est opportun, n’est-ce pas ?

Et pourquoi pas, le Saint Père ajoute le « manque de foi » à la liste croissante des motifs trouvés pour en arriver à la conclusion que le mariage n’a jamais existé. Finalement, si tu la veux, la nullité, tu l’obtiendras…Cela, non, nous ne l’appellerons pas divorce Bien sûr que non, quelle idée ! Ce serait altérer l’indissolubilité du mariage !

A propos, que se passera-t-il pour ceux d’entre nous qui nous sentons marginalisés parce que nous croyons ce que les catholiques ont cru pendant des milliers d’années, que se promettre en mariage c’est un serment sérieux qui ne peut se résilier qu’avec la mort parce que nous nous sommes mariés devant Dieu et qu’il n’y a pas de causes qui valent pour l’annuler ? Quid de nous alors ?

Que se passera-t-il pour ceux qui accepteront les règles et prendront leur mariage au sérieux, ceux qui croiront fermement qu’ «accélérer le processus de nullité » n’est pas autre chose qu’un euphémisme honteusement transparent pour désigner rien moins que la concession du divorce à tout catholique qui le demandera. Il n’y aura pas de miséricorde pour nous ? Non ? Il me semble qu’il n’y en aura pas!

Quelle blague! Henri VIII, en enfer, rit à s’en arracher la mâchoire.

Elle est bien bonne, François. Et encore une fois, en mettant la pagaille !

NDT

Je terminerai cette traduction en rappelant que la nièce du Pape François, María Inés Narvaja, a obtenu l’annulation de son premier mariage au bout de 4 ans, et qu’elle s’est donc « remariée» d’abord civilement. Les papolâtres m’accuseront sans doute de mauvais esprit, mais pour moi ce n’est pas qu’une simple coïncidence…