Des idolâtres obstinés face aux surprises de Dieu


ou: les surprises de l'Esprit Saint ne sont pas celles qu'on pense...
Un blogueur espagnol catholique conservateur réagit à son tour à l'homélie du Pape, le 18 janvier, à Sainte Marthe (24/1/2016)

>>> Un autre billet du même, traduit par Carlota : benoit-et-moi.fr/2015-II/actualite/vatileaks-2-une-manoeuvre-de-campagne-electorale

>>> L'homélie du Pape du 18 janvier, sur Radio Vatican en langue française

 

Le 20 janvier dernier, Fr Hunwicke avait exprimé sa perplexité à la lecture de l'homélie prononcée par le pape à Sainte Marthe l'avant-veille (cf. Hérésie et sédévacantisme).
Le Pape y fustigeait durement ces chrétiens qui ont "le cœur fermé aux surprises de l'Esprit Saint", restant bloqués au "on a toujours fait comme ça".
Dans un souci d'apaisement et d'unité, Fr Hunwicke recommandait en conclusion d'interpréter les propos du pape "dans une herméneutique telle qu'on puisse les lire comme n'étant pas contraires à ce qui a été enseigné par Vatican I".

Un autre (présumé) religieux, espagnol cette fois, qui tient un blog nettement anti-bergoglien sous le pseudonyme de Fray Gerundio de Tormes, fait une autre lecture, il renverse le problème: et si c'était les idolâtres de Vatican II qui refusaient de s'ouvrir aux surprises de l'esprit Saint?

Des idolâtres obstinés face aux surprises de Dieu


22 janvier 2016
Fray Gerundio
fraygerundiodetormes.wordpress.com
Traduction de Carlota

* * *

Nous les moines avons des moments de récréation les mercredi après-midi. Même si pour être sincère, elles m’enchantent en réalité, il est certain que cela me fatigue d’y expliquer des choses à mes novices de toutes les tendances. Mais je reconnais aussi que c’est une jouissance pour moi de faire voir aux plus modernistes d’entre eux leurs contradictions et leurs incohérences. Les pauvres, ils sont tellement habitués à avaler les contes de vieilles femmes (les contes auxquels fait référence Saint Paul quand il écrivait sa première lettre à Timothée en 4-7 : « évite les contes de vieilles femmes et exerce-toi en piété »). Saint-Paul savait ce qui se disait, bien qu’il n’eût pas encore écouté les homélies de Sainte Marthe. Mais il était très intelligent et il savait ce qu’il allait se passer.

La question-phare de cette semaine, m’a été lancée comme une torpille ou un missile moderniste.
François a parlé de l’obstination de ceux qui s’accrochent et persistent à ne pas s’ouvrir aux nouveautés de l’Esprit et aux surprises de Dieu.
Les chrétiens obstinés, ceux du « on a toujours fait comme cela pèchent, ils pèchent par divination. C’est comme s’ils avaient été voir une devineresse : « Ce qui est le plus important c’est ce qui a été dit et qui ne change pas, c’est ce que je ressens moi - de mon côté et depuis mon cœur fermé -, de la Parole du Seigneur ». C’est aussi un péché d’idolâtrie, l’obstination : le chrétien qui s’obstine, il pèche !
Péché d’idolâtrie.
Et quel est le chemin, Père ? : ouvrir son cœur à l’Esprit Saint, discerner quelle est la volonté de Dieu.

- Qu’est ce que vous pensez de cela, Fray Gerundio? [demande un novice]. Croyez-vous, Révérend Père, qu’il a raison? (ricanements de certains, au fond…).

- Bien sûr qu’il [le pape] a raison. C’est une analyse très sûre et raisonnable. Et l’utilisation du qualificatif obstiné me semble très adéquate. Moi-même je l’ai précisément utilisé il y a peu, lors de nos conversations du mercredi.

Et je commence à leur expliquer avec toute ma patience le sens d’une obstination qui se termine forcément en idolâtrie. Mon long discours, prononcé à côté du cloître, a été précisément sur les obstinés et les idolâtres de Vatican II et de l’Église Post-conciliaire. Nous sommes à une époque où l’on a complètement idolâtré la doctrine, les textes et cet esprit du Concile Vatican II exagéré à l’infini. En son nom on a lancé et soutenu tous les désordres et toutes les mauvaises actions.

Nous avons affronté le dernier demi-siècle de l’Église sans penser à autre chose. Ou mieux, disons, en pensant uniquement à détruire tout ce qu’il y avait avant 1963. La détérioration a été hors du commun.
On peut analyser facilement le désastre ainsi que le cataclysme produit, par la sécularisation et les mariages de prêtres qui ont suivi; par la terrible et exponentielle diminution du nombre de membres des Ordres Religieux (d’hommes comme de femmes); par la baisse de l’assistance à la Messe dominicale; par le tremblement de terre catéchistique à cxause duquel plus personne le sait le catéchisme (malgré les publications des Catéchismes et des Compendiums) ni ne s’en préoccupe le moins du monde; par la débâcle de la Théologie avec une légion de théologiens officiels mettant en doute et/ou niant les dogmes fondamentaux de l’Église; par l’élimination de la foi dans les Saintes Écritures; par le vidage systématique des Séminaires…et nous pourrions continuer sur le même registre.
Personne ne peut nier que ces faits sont purement statistiques. De là le vieil adage post hoc, sed non propter hoc (après cela, mais pas à cause de cela) avec lequel ils ont farci la tête des naïfs catholiques durant 50 ans.

Parce que la logique aurait été qu’au minimum, l’un de ces chefs reconnaisse le désordre, au moins pour en faire une analyse et au vue de cette dernière, recommencer, changer de direction, restaurer ce qui avait été perdu, éliminer ce qui était erroné, reconnaître les erreurs, récupérer le catholicisme de toujours et envoyer en exil théologique les responsables (*).

Eh bien, malgré cela, ces idolâtres continuent obstinément à revendiquer le succès de la doctrine conciliaire et postconciliaire. François a raison. Je pense qu’il fait référence à eux. Ce sont des idolâtres de Vatican II et ils ne s’ouvrent pas aux surprises de Dieu. Ils persistent: Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Que l’Esprit permette que l’on puisse récupérer la Sainte Messe de l’Église de tous les temps et que l’on voie qu’il y a assez grand nombre de fidèles qui la valorisent et y assistent… Pourtant les Évêques se ferment à une telle possibilité de changement. Ils interdisent la Messe et poursuivent les laïcs comme des traditionalistes récalcitrants. Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Que l’Esprit fasse voir l’échec de l’Œcuménisme et des cinquante ans de conversations œcuméniques, comme les Rencontres d’Assises... car les idolâtres enfermés dans leurs habitudes continuent à converser avec les autres religions, - plus que converser ils se sont mis dans le même lit, tandis que l’Église catholique se vidait de ses fidèles. Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptions aucun changement.

Que la possibilité soit ouverte de Séminaires avec beaucoup de jeunes vocations à l’expérience sacerdotale pieuse, moins mondaine et plus surnaturelle… eh bien l’on destitue un Évêque, on ferme le portail [du séminaire] et on renvoie les séminaristes dans leur petite maison. C’est qu’il ne s’agit pas de séminaristes qui vivent l’Esprit du Concile, ils ne vont pas dans des bars gays, ils ne sortent pas avec des filles et ils ne vont pas à Taizé. Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Que l’on perçoive que beaucoup de fidèles catholiques considèrent la Sainte Messe comme un véritable Sacrifice, et on les montre du doigt comme des gens qui exagèrent, des tridentins, parce que la Messe est un Banquet. Interdit de parler de Sacrifice. Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Que l’on veuille changer cette dérive de l’Église et de ses pasteurs et être ouverts à ce que l’Esprit veut nous dire, à savoir que c’est un véritable désastre, que Dieu a disparu de l’horizon de la prédication et que l’Église s’est transformée en quelque chose de moins qu’une ONG, collaboratrice de l’ONU païenne, collaboratrice de toutes les religions (même celles qui sont en train de tuer de chrétiens sur la base du bien)…Eh bien on empêche de faire du prosélytisme et on visite une synagogue un dimanche et une mosquée un autre dimanche. Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Qu’il y ait une disposition du Pape précédent pour changer les paroles de la consécration et dire Pro Multis, au lieu de ce qui a été établi d’une manière indigne par l’esprit du Concile (ndt la traduction littérale « pour beaucoup », a été traduite dans les années soixante et notamment en français par « pour tous », ce qui évidemment n’est pas la même chose)…eh bien ils s’obstinent dans leur obstination et ils n’ont pas tenu compte du changement. J’ai déjà parlé ici de la Conférence Épiscopale Espagnole (ndt dans un article intitulé "Désobéissance obstinée de la Conférence Épiscopale Espagnole" en date du 20 novembre 2015). La même chose pour François lui-même, qui continue sans faire le changement quand il dit les messes en italien (soit toujours). Parce que depuis le Concile les choses sont ainsi et que nous n’acceptons aucun changement.

Nous pourrions continuer. Ils sont contre le changement. Ils sont des ennemis du changement. Ce sont des idolâtres de la stabilité de la doctrine conciliaire. Ils sont obstinés. Cela m’enchante que François, enfin, se soit rendu compte de cela. Moi je le dis…

Les yeux des novices les plus perspicaces lançaient des éclairs et de grosses goutes de sueur leur tombaient sur les joues. Mais moi je me renforce dans ce qui a été dit. Merci, Saint Père, pour nous avoir ouvert les yeux et l'esprit. Je me refuse à l’immobilisme postconciliaire et je m’unis avec ferveur au changement vers les doctrines de toujours. Ça oui, ce serait un vrai changement. Je suis ouvert à ces insinuations de l’Esprit.

Pour sûr, là je leur laisse une des insinuations de l’Esprit qui actuellement plait beaucoup dans les milieux du Vatican, des évêchés, des congrégations et des paroisses : un reality show de novices (ndt l’auteur renvoie vers un article du journal espagnol « El Mundo » où il est question de religieuses espagnoles qui accueillent dans leur couvent des jeunes filles pour leur noviciat) qui doivent vivre la chasteté durant quelques jours devant les caméras. Surprise insolite. Ils ne savant pas quoi inventer et quoi profaner.
L’authentique surprise serait que le/les Évêques et Supérieurs correspondants disent NON à cette ouverture à l’Esprit Saint.

NDR

(*) Dès 1985 (et même avant, dans des conférences qu'il a données après le Concile), dans son livre d'entretiens avec Vittorio Messori, le cardinal Ratzinger a pris acte des faits et posé le bon diagnostic.
Comme Pape, il a essayé de toutes ses forces d'y porter remède - dans la limite évidente fixée par son désir de "ne pas déchirer davantage la tunique sans couture du Christ". On sait aujourd'hui qu'on lui a résisté à tous les échelons de l'Eglise.