Le discours caché d'Hilarion.


C'est celui que le métropolite et porte parole de l'Eglie orthodoxe russe (grand ami de Benoît XVI) avait prononcé au Synode des évêques sur la famille d'octobre 2015, devant le pape François. Il a trouvé son épilogue le 12 février à La Havane (16/2/2016)

Voir aussi:
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François et Cyrille: une rencontre politique
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Rencontre Cyrille-François
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Derrière l'accord François/Cyrille
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Qu'y a-t-il du Pape dans la déclaration commune?




Aucune langue de bois, dans ces propos, aucune intention de flatter le monde. Il n'y a pas un seul haut prélat catholique (à l'exception peut-être du cardinal Burke) qui puisse se targuer d'utiliser un langage aussi fort et aussi direct - peut-être est-ce plus difficile pour eux, parce qu'ils sont plus exposés...
D'une certaine façon, on comprend pourquoi le discours a été censuré par les médias, y compris catholiques. On imagine quel froid il a dû jeter dans l'assistance, sans doute médusée. Sans parler du Pape, directement mis en cause pour ce qui s'est passé aux Etats-Unis juste après sa visite (il n'en était évidemment pas responsable)
Le discours figure en russe, en anglais et en italien (pas en fran,çais) sur le site de l'Eglise othodoxe russe.
Le site <Le Cronache di Papa Francesco> a eu la grande idée de le reproduire hier.
Voici ma traduction de leur article, et du discours d'Hilarion, précédée d'une photo légendée qui rappelle celle légendée par Antonio Mastino ICI.



Hilarion: Sainteté, nous ne devons pas oublier les paroles de l'Apôtre Paul adressées aux chrétiens de Rome: "Ne vous conformez pas à la mentalité de ce siècle..."


Le Pape: ....??? moi, le russe, je ne l'ai jamais compris... que peut-il bien dire, peut-être qu'il dit que je lui suis sympathique...


Quand un évêque orthodoxe défend la doctrine catholique ...


14 février 2016
bergoglionate.wordpress.com

Au synode de 2015, un évêque a défendu de manière particulière la doctrine catholique sur le mariage et la famille: le métropolite orthodoxe Hilarion.


Nous vous offrons un inédit, qui, inédit, ne devrait pas l'avoir été, et comme catholiques romains, nous éprouvons une certaine honte et un certain malaise pour le silence - devons-nous l'appeler censure? - avec lequel Radio Vatican et le Secrétariat du Synode ont traité l'évêque orthodoxe (métropolite) Hilarion, par ailleurs porte-parole officiel du patriarche de Russie Kirill dans le très important discours qu'il a prononcé lors du synode en Octobre 2015, devant le Saint-Père (cf. mospat.ru/it/2015/10/21).

Oui, ils ont fait allusion à son intervention, mais en la traitant de façon très marginale et superficielle, sans jamais rapporter le texte intégral.

Nous ne saurons jamais si les mots d'Hilarion ont par la suite influencé d'une manière ou d'une autre les travaux finaux du synode - qui ont pris un tour très différent de ce qu'avait été leurs débuts, en Octobre 2014 - mais il s'agit sans aucun doute de mots forts, un authentique parler «Oui, oui - Non, non», sans demi-mesures, auxquels nos évêques devraient réfléchir et qu'ils devraient s'approprier.

Sainteté,
Béatitudes, Éminences et Excellences,

au nom de Sa Sainteté le Patriarche de Moscou et de toutes les Russie Kirill et de toute l'Eglise orthodoxe russe, j'adresse à vous tous nos salutations fraternelles à l'occasion de la XIVe Assemblée générale du Synode des évêques de l'Eglise catholique, consacrée au thème de la famille .

Dans notre monde turbulent et inquiétant, l'homme a besoin de bases solides et inébranlables sur lesquelles s'appuyer, pour construire sur elles, avec confiance, leur propre vie. La société laïque, principalement orientée vers la satisfaction des désirs individuels, ne peut pas donner à la personne des orientations morales claires. La crise des valeurs traditionnelles à laquelle nous assistons dans la société de consommation, conduit à une contradiction entre différentes préférences, même dans les relations familiales.
Ainsi, si le féminisme extrême voit dans la maternité un obstacle à la réalisation de la femme, d'un autre côté, le fait d'avoir un enfant est de plus en plus considéré comme un droit qui peut être atteint par tous les moyens. De plus en plus souvent, la famille est vue comme une union de deux personnes, indépendamment de leur sexe, et on considère que l'individu peut choisir l'appartenance à l'un ou l'autre sexe, selon ses goûts personnels.

D'autre part, de nouveaux problèmes se présentent, qui concernent directement les fondements de la famille traditionnelle. Les conflits armés dans le monde moderne causent un exode massif en provenance des régions touchées par la guerre vers les pays plus riches. L'émigration conduit souvent à la rupture des liens familiaux, et en même temps crée un nouvel environnement social dans lequel naissent des liens qui ont souvent un caractère interethnique et inter-religieux.

Ces défis et ces menaces sont communs à toutes les églises chrétiennes, qui doivent chercher les réponses, en se basant sur la mission qui leur est confiée par le Christ, celle de guider la personne vers le salut.
Malheureusement, même dans les milieux chrétiens, on entend souvent des voix qui réclament une «modernisation» de la conscience ecclésiale», c'est-à-dire le rejet de la doctrine chrétienne, apparemment obsolète, sur la famille. Cependant, nous ne devons pas oublier les paroles de l'Apôtre Paul adressés aux chrétiens de Rome: «Ne vous conformez pas à la mentalité de ce siècle, mais soyez transformés en renouvelant votre esprit, pour pouvoir discerner la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable à lui et parfait» (Rm 12, 2).

L'Eglise est appelée à être une lumière et un phare dans l'obscurité de ce monde, et les chrétiens sont appelés à être «sel de la terre» et «lumière du monde». Aucun d'entre nous ne doit oublier le rerrible avertissement du Sauveur: «Si le sel perd sa saveur, avec quoi pourra-t-on le rendre salé? Il ne servira à rien qu'à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes» (cf. Mt 5, 13-14). Un tel sel, qui a perdu la force de sa saveur, c'est ce que deviennent de nos jours certaines communautés protestantes qui se définissent chrétiennes, mais prêchent des idéaux moraux qui sont incompatibles avec le christianisme.

Si dans ces communautés est introduit le rite de la bénédiction des unions homosexuelles, et si une femme lesbienne, qui s'auto-proclame "évêque", exhorte à ôter les croix des églises portuaires, demandant qu'on les remplace par des croissants islamiques, une telle communauté peut-elle être définie comme "église"? Sous nos yeux le christianisme est trahi par ceux qui sont prêts à faire le jeu de la société sécularisée, décléricalisée et sans Dieu .

Les autorités de plusieurs pays d'Europe et d'Amérique, en dépit de nombreuses protestations, y compris de la part de catholiques, continuent à poursuivre une politique visant délibérément à la destruction du concept même de famille. Non seulement les unions homosexuelles sont juridiquement équivalentes au mariage, mais on en arrive à poursuivre pénalement ceux qui, en raison de leur foi chrétienne, refusent d'enregistrer de telles unions.

Immédiatement après la conclusion de la visite du Pape François, le président américain Barack Obama a ouvertement déclaré que les droits des gay sont plus importants que la liberté religieuse. Cela montre clairement l'intention des autorités séculières de continuer l'attaque aux forces saines de la société, qui défendent les valeurs familiales traditionnelles.

Les catholiques sont en première ligne dans cette lutte, et c'est justement contre l'Église catholique qu'est en cours une véritable campagne de discrédit et de mensonges. Par conséquent, la force dans la défense des convictions chrétiennes, et la fidélité à la tradition de l'Eglise d'aujourd'hui sont particulièrement nécessaires.

Aujourd'hui, où la société devient de plus en plus semblable à l'homme un fou «qui a bâti sa maison sur le sable» (cf. Mt 7: 26), il est du devoir de l'Église de rappeler à la société sa fondation solide - la famille comme union de l'homme et la femme, qui a comme fin la naissance et l'éducation des enfants. Seule une telle famille, établie par le Seigneur au moment de la création du monde, est en mesure de prévenir, ou au moins ralentir, le glissement de la société moderne vers l'abîme du relativisme moral.

L'Eglise orthodoxe, tout comme l'Eglise catholique, dans sa doctrine sur la famille a toujours suivi la Sainte Écriture et la Sainte Tradition, affirmant le principe de la sainteté du mariage, qui se fonde sur les paroles du Sauveur lui-même (cf. Mt 19:6; Mc 10:9).

A notre époque, cette position doit être plus unie et unanime. Nous devons la défendre ensemble dans le dialogue avec les autorités législatives et exécutives de chaque pays, et au niveau des organisations internationales telles que l'ONU et le Conseil de l'Europe. Nous ne pouvons pas nous limiter aux seules exhortations, nous devons garantir pleinement la protection juridique de la famille .

La solidarité des églises et de toutes les personnes de bonne volonté est indispensable afin de protéger la famille contre les menaces du monde laïc et garantir ainsi notre futur.
J'espère que l'un des fruits de l'Assemblée synodale sera la poursuite du développement de la coopération catholico-orthodoxe dans cette direction.

Je vous souhaite la paix, la bénédiction de Dieu et le succès dans votre travail!

(Cité du Vatican, le 20 Octobre, 2015)



Nous pouvons penser qu'un tel accord a été atteint aujourd'hui avec la Déclaration conjointe signée le 12 février 2016 à La Havane, entre François et le Patriarche Kirill, dans laquelle nous lisons avec satisfaction ce qui suit:
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[NDT: Ici sont cités les nn. 15, 19, 20, 21, 22 de la Déclaration commune]