Pressions sur la Pologne


... et déception. Mercredi (5 octobre) les députés polonais ont finalement massivement rejeté la proposition de loi visant à interdire l'avortement. Les médias disent que "les femmes en noir ont fait plier le gouvernement". Que se cache-t-il derrière ce revirement? (9/10/2016)

>>> Ci-contre: Manifestation des furies féministes le 3 avril 2016 à Varsovie


 


Le titre orienté du Monde

L'ONU, l'UE et les médias stoppent l'interdiction de l'avortement


Ermes Dovico
www.lanuovabq.it/
8 octobre 2010
Ma traduction

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A peine deux semaines. C'est le temps écoulé entre le «oui» initial convaincu (267 voix pour et 154 contre) du Parlement polonais à la proposition de loi d'initiative populaire 'STOP ABORTION', signée par 450 mille citoyens, et qui visait à établir le principe selon lequel «l'avortement est un délit sans exception», et le «non» ultérieur à une écrasante majorité (352 contre 58) dans la séance de jeudi.

Un revirement spectaculaire par les proportions et les temps, qui ne peut être expliqué que partiellement par la protestation de lundi dernier des femmes pro-avortement (116 mille en Pologne, selon les organisateurs, bien que certains médias aient vanté la quantité anormale de «six millions» de participants), qui s'étaient habillées en noir pour mettre en scène la mort de leurs droits, criant les slogans utilisés depuis un demi-siècle pour soutenir l'avortement et ne tenant jamais compte du droit à la vie de l'enfant à naître.

Les pressions internationales ont joué un rôle important dans cette remise en question, en provenance à la fois d'institutions comme l'Union européenne et l'ONU, et d'organisations non gouvernementales. Il suffit de dire que le premier rejet de la proposition pro-vie est venue mercredi de la Commission Justice et Droits de la chambre basse polonaise: bien que des lois de ce type ne soient absolument pas de la compétence communautaire, le soir de ce même jour une discussion était programmée au Parlement européen précisément sur... les droits des femmes en Pologne. Difficile de penser à une coïncidence, mais plutôt - comme les médias laïcistes l'ont également noté - d'une initiative préventive de la commission parlementaire, qui équivalait de fait à une reddition devant les pressions.

Il faut ensuite considérer le rôle d'une grande partie du système médiatique international qui a présenté la grève des femmes de lundi comme si c'était une protestation de toutes les femmes polonaises (comme l'a déjà observé Robi Ronza), quand au contraire les femmes en première ligne dans la promotion de l'initiative pro-vie étaient très nombreuses. Les grands médias ont en outre fait passer l'idée que la proposition «STOP ABORTION» était une «loi du gouvernement» (alors qu'elle venait d'une mobilisation de la base), voulue principalement par des «fondamentalistes catholiques» et des «groupes ultra-catholique».

L'intention de ces distorsions est claire: taxer d'extrémisme, donc marginaliser les idées, et quiconque défend un principe naturel (en l'occurrence, le droit de l'enfant dans le sein maternel), en s'opposant à la pensée unique véhiculée par le courant dominant. Voilà comment on crée un consensus, mettant les indécis de son côté.

A cette occasion, le mécanisme de conditionnement a travaillé si vite qu'il a provoqué la marche-arrière du parti de la majorité, Droit et Justice. Pour justifier le changement de ligne, son chef Jaroslaw Kaczynski a déclaré que «nous sommes en présence d'un malentendu géant. Nous avons le plus grand respect pour ceux qui ont signé la proposition relative à l'interdiction de l'avortement. Mais en observant la situation sociale, nous sommes arrivés à la conclusion que ce serait un facteur qui conduirait à des troubles».

Avec un raisonnement de Realpolitik, basée sur l'inéluctabilité supposée du mal (et trop souvent entendu), il a ajouté: «Notre parti est et sera toujours du côté de la vie, mais l'impact de l'interdiction de l'avortement peut être contraire au résultat souhaité». Peu de temps après ces paroles, la chambre basse a voté de façon compacte contre l'initiative de défense de l'enfant à naître, avec quelques voix de parlementaires hors du choeur, qui ont qualifié la prise de position de Kaczynski de trahison des valeurs conservatrices.

Selon ce que rapporte Radio Poland, les évêques polonais, tout en étant ouvertement favorables à l'interdiction de l'avortement, avaient publié mercredi une déclaration pour exprimer leur désaccord avec la mesure prévoyant une peine pour les femmes qui avortent volontairement. De toute façon, au-delà des considérations sur le type de peine le plus approprié pour ces cas, il convient de dire que l'article de STOP ABORTION prévoyait explicitement la discrétion du tribunal pour atténuer la peine, y compris la posibilité d'absoudre complètement la femme.

Malgré la volte-face de Droit et Justice, le front polonais contre l'avortement ne s'est pas laissé abattre et, comme l'annonce la plate-forme "Citizen Go" (qui a lancé immédiatement une pétition à l' appui de la nouvelle initiative: à signer ICI), a présenté au Parlement un autre projet de loi, intitulé «We love each child», lui aussi dans le but de donner pleine protection à la vie humaine depuis la conception.
Bref, malgré les nombreuses pressions contraires, en Pologne la bataille pour la défense de l'enfant à naître est encore en vie.