Un certain 11 février, à midi


Il y a juste trois ans aujourd'hui, Benoît XVI annonçait qu'il se retirait "sur la montagne" pour prier... "Ce n'est qu'un au revoir", disait l'abbé Hervé Benoît (11/2/2016)

>>> Ci-contre: la foudre s'abat sur la coupole de Saint-Pierre le soir du 11 février 2013 (*).
C'est aussi l'image dramatiquement symbolique qu'Antonio Socci a choisi pour illustrer son livre "Non è Francesco"...

 

Ceux qui auraient le désir de revivre cette journée, après laquelle rien ne devait plus jamais être pareil, peuvent "flâner" à travers les pages du dossier spécial fourni que j'avais consacré à l'évènement: benoit-et-moi.fr/2013-I/demission
J'avais reçu alors beaucoup de couriers de lecteurs désamparés, peinés, émus, ou qui tenaient tout simplement à dire merci à celui qui avait conduit la barque de Pierre d'une main si sûre pendant huit ans, et qui allait désormais se cacher aux yeux du monde. Certains de ces témoignages sont rassemblés ici: benoit-et-moi.fr/2013-I/des-lecteurs-mont-ecrit (cela ne veut pas dire, évidemment, que les autres étaient moins dignes d'intérêt!)
J'avais également consacré une page (hélas très courte) aux rares articles issus de la presse française échappant aux clichés, notamment cette "réduction moderniste" qui ne voyait dans le geste du pape que son caractère "révolutionnaire" et saluait la reconnaissance des limites humaines de la papauté et son alignement (enfin!!!) sur le pouvoir temporel. Sans parler de ceux qui le congratulaient fielleusement, voyant dans sa "démission" le geste le plus important d'un pontificat pourtant si riche mais qu'ils n'avaient cessé de critiquer: benoit-et-moi.fr/2013-I/vu-de-france

J'aimerais conclure en donnant la parole à l'abbé Hervé Benoît, ce prêtre courageux sanctionné par sa hiérarchie pour avoir formulé en termes (peut-être) vifs les sentiments que lui inspirait la tuerie du Bataclan du 13 novembre dernier (j'en avais parlé ICI et ICI, mais à l'époque, je n'avais pas fait le rapprochement...).
Il m'avait écrit le 28 février 2013, après le départ pour Castelgandolfo, en me disant "pour vous remercier de votre site".

Ce n'est qu'un au revoir

Il est parti comme il l’avait désiré, dans la simplicité, la beauté, au moment où, après une longue réflexion, une si longue méditation intérieure dont il nous a jugé dignes d’être les confidents. Il a choisi de répondre à la volonté de Dieu telle qu’elle s’était révélée à sa conscience.

Comme elle était belle, cette lumière d’un calme soir d’hiver romain, comme suspendue entre ciel et terre, à l’image de cet hélicoptère aux formes épurées survolant la Ville éternelle. Quelle splendeur à couper le souffle des coupoles romaines aux toits dorés, des castelli romani, du lac d’Albano dans son écrin de verdure… Et la bonhommie du peuple romain juché sur les terrasses, la joie du curé de Castel Gandolfo à la fenêtre de son presbytère saluant son nouveau paroissien, le visage de ces religieuses en larmes sur lesquels se lisait aussi la catholicité de l’Église. Cette petite fille aux yeux écarquillés dans les bras de son père, qui ne savait s’il fallait rire ou pleurer.

Même cette ampleur des moyens matériels mis à la disposition d’un vieil homme partant à la retraite, le ballet des militaires, des véhicules et des télévisions, c’était encore un hommage de ce monde au ministère de Pierre.

Il y avait là bien plus que l’émotion dont les journalistes nous rebattent les oreilles et qu’ils cherchent partout à défaut de vouloir comprendre. Ce départ a été en tout point à l’image du pontife. Familier, recueilli et spirituel. Certains grands de ce monde, partent dans la honte, dans l’indifférence ou dans la violence de la haine accumulée contre eux. Il est parti à l’heure de Dieu. Dans la paix.

Peut-être reverrons-nous son visage. Peut-être passerons-nous, un jour, dans les jardins du Vatican, sachant qu’il est là, priant, travaillant, consumant ses dernières forces dans le service du Christ et de son Église. Son silence nous réconfortera. Il sera encore une prédication et un appel à nous tourner avec confiance vers le Christ.

Au revoir, très Saint Père, buona notte

Abbé Hervé BENOÎT
Prêtre catholique

Note

(*) Voici le commenaire que donnait un journal aussi peu suspect de religiosité superstitieuse que le Parisien du 12 février 2013:

La décision du pape de démissionner aurait-elle froissé le Créateur ? En écho au choc qu'a provoqué l'annonce de Benoît XVI au sein de l'Eglise catholique lundi matin, la foudre s'est abattue le soir même sur la basilique Saint-Pierre, symbole du Saint-Siège au Vatican.
L'image du dôme frappé par un violent éclair, immortalisée par unphotographe de l'Agence France Presse (AFP), Filippo Monteforte, a déjà fait le tour du monde.

A l'instar des premiers hommes qui interprétaient l'orage comme le signe de l'existence de Dieu, certains y ont vu l'expression de la colère du Créateur face au départ anticipé du souverain pontife, une première depuis 1924. «Un signe de Dieu», titrait The Sun (Royaume-Uni), «Un signal de l'au-delà ?», s'interrogeait Le Sydney Morning Herald (Australie). L'Agence France Presse elle-même parle d'un «coup de tonnerre céleste».
(...)



Mais avec le recul, on voit plutôt l'éclair comme l'annonce d'une catastrophe imminente... que nous vivons en ce moment.