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Culture et religion en dialogue

Un texte magistral (10/12/2008)

C'est le message que le Saint-Père a adressé au Cardinal Jean-Louis Tauran, président du Conseil Pontifical pour le dialogue inter-religieux, et au cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la Culture, à l'occasion d'une journée d'étude sur le thème "Culture et religion en dialogue" qui s'est déroulée le 4 décembre.

Ce beau texte reprend point par point les éléments de la lettre qui a fait couler tant d'encre ces jours-ci, malgré sa briéveté. Et développe les grands axes de la pensée "politique" du pape:

- L'Europe est chrétienne (on notera la très belle métaphore du tissu brodé, qui me laisse supposer que ce texte est bien de la main du Saint-Père, car son style est riche de métaphores)
- L'héritage d'Athène et de Rome est revendiqué, on est loin du langage à la mode...
- L'Europe a un rôle, et même une responsabilité, de modèle (on dirait aujourd'hui de pédagogie, ou on parlerait de paradigme européen) pour le monde entier: réponse à ceux qui critiquent l'eurocentrisme du pape (autre belle métaphore, avec "les antiques racines dont une sève abondante s'est écoulée au cours des siècles").
- Oui au dialogue interreligieux "sur des thèmes d'intêret réciproque, comme la dignité de la personne humaine, la recherche du bien commun", non au relativisme, au syncrétisme
- Priorité à la défense de la vie, puis à celle des droits des personnes et des familles.
- Il n'est pas question d'"environnement", encore moins de "planète", mais de "créé" (creato, et non creazione)

Comme il le fait souvent, il redonne aux propos de ses prédécesseurs (ici, Paul VI) souvent mal compris, leur juste interprétation. Cela se rattache à son discours sur la juste herméneutique du Concile Vatican II (cf voeux à la Curie, décembre 2005)

Enfin, on notera la formulation ouverte "Une fois accueillie la diversité comme donnée positive..." (Una volta accolta la diversità come dato positivo, occorre fare in modo che le persone accettino non soltanto l'esistenza della cultura dell'altro, ma desiderino anche riceverne un arricchimento). Je ne veux surtout pas lui faire dire ce qu'il ne dit pas, à dessein, mais cette formulation me paraît différente de la simple affirmation: La diversité est une donnée positive. Et encore plus de l'injonction "la diversité doit être accueillie comme une donnée positive" que certains ont décelé. Elle suppose à tout le moins un cheminement. Et "les personnes" ne sont pas précisées. On peut comprendre que l'enrichissement est celui que des européens fiers de leur vraie culture et soudés entre eux par leur patrimoine chrétien, pourraient apporter aux nouveaux arrivants.


Depuis longtemps déjà,l'Europe a pris conscience de sa substantielle (profonde) unité culturelle, malgré la constellation de cultures nationales qui en ont modelé le visage.
Il est bien de le souligner: l'Europe contemporaine, qui aborde le Troisième Millénaire, est le fruit de deux millénaires de civilisation. Elle fonde ses racines autant dans le considérable et antique patrimoine d'Athène et de Rome que, surtout, dans le terrain fécond du Christianisme, qui s'est révélé capable de créer de nouveaux patrimoines culturels tout en intégrant la contribution originale de chaque civilisation.
Le nouvel humanisme, issu de la diffusion du message évangélique, exalte tous les éléments dignes de la personne humaine et de sa vocation transcendante, en les purifiant des scories qui offusquent l'authentique visage de l'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu.
Ainsi, l'Europe nous apparaît aujourd'hui comme un tissu précieux, dont la trame est formée par les principes et les valeurs jaillies de l'Évangile, tandis que les cultures nationales ont su broder une immense variété de perspectives qui manifestent les capacités religieuses, intellectuelles, techniques, scientifiques et artistiques de l'Homo europeus.

En ce sens nous pouvons affirmer que l'Europe a eu et a toujours une influence culturelle sur l'ensemble du genre humain, et elle ne peut éviter de se sentir particulièrement responsable non seulement de son avenir mais aussi de celui de l'humanité entière.
Dans le contexte présent, où de plus en plus souvent nos contemporains se posent les questions essentielles sur le sens de la vie et sur sa valeur, il apparaît plus que jamais important de réfléchir sur les antiques racines dont une sève abondante s'est écoulée au cours des siècles.
Le thème du dialogue interculturel et interreligieux, donc, émerge comme une priorité pour l'Union Européenne et intéresse de manière transversale les secteurs de la culture et de la communication, de l'éducation et de la science, des migrations et des minorités, jusqu'à rejoindre les secteurs de la jeunesse et du travail.
Une fois accueillie la diversité comme donnée positive, il faut faire en sorte que les personnes acceptent non seulement l'existence de la culture de l'autre, mais désirent aussi en recevoir un enrichissement. Mon Prédécesseur, le serviteur de Dieu Paul VI, en s'adressant aux catholiques, énonçait en ces termes sa profonde conviction : "L'Église doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit. L'Église se fait parole, l'Église se fait message, l'Église se fait conversation"(Enc. Ecclesiam suam, n. 67).
Nous vivons dans ce qu'on a coutume appeler un "monde pluraliste (pluriel?)", caractérisé par la rapidité des communications, la mobilité des populations et leur interdépendance économique, politique et culturelle. En ces moments que nous vivons, parfois dramatiques, même si malheureusement beaucoup d'Européens semblent ignorer les racines chrétiennes de l'Europe, elles sont vivantes, et devraient tracer le chemin et alimenter l'espoir de millions de citoyens qui partagent les mêmes valeurs.

Que les croyants, donc, soient toujours prêts à promouvoir des initiatives de dialogue interculturel et interreligieux, afin de stimuler la collaboration sur des thèmes d'intêret réciproque, comme la dignité de la personne humaine, la recherche du bien commun, la construction de la paix, le développement.
...
Pour être authentique, un tel dialogue doit éviter de céder au relativisme et au syncrétisme et être animé d'un respect sincère pour les autres et d'un esprit généreux de réconciliation et de fraternité. J'encourage tous ceux qui se dédient à la construction d'une Europe accueillante, solidaire et toujours plus fidèle à ses racines et, en particulier, j'exhorte les croyants afin qu'ils contribuent non seulement à garder jalousement l'héritage culturel et spirituel que les distingue et qui fait partie intégrante de leur histoire, mais qu'ils soient encore plus engagés à rechercher des voies nouvelles pour affronter de façon adéquate les grands défis qui marquent l'époque post-moderne. Parmi ceux-ci, je me bornerai à citer la défense de la vie de l'homme dans chacune de ses phases, la protection de tous les droits de la personne et de la famille, la construction d'un monde juste et solidaire, le respect du créé, le dialogue interculturel et interreligieux.

Du Vatican, le 3 décembre 2008



La traduction est de moi (j'ai omis les salutations), le message intégral en italien est ici: http://magisterobenedettoxvi.blogspot.com/
Je n'ai plus envie de "copier-coller" les textes du Saint-Père déjà traduits (je comprends mieux ce qu'il dit en l'écrivant moi-même, et en plus, cela me permet de court-circuiter les interprétations, comme c'était le cas ici).

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Prière à l'Immaculée Droits de l'homme, Loi naturelle