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Lettre ouverte au Président-élu

... signée John Allen (8/11/2008)



John Allen a trés probablement voté pour Obama, sachons lui gré de ne pas sombrer de façon trop visible dans l'obamanite.

Comme le pense mon amie Catherine sur d'autres thèmes touchant à la foi catholique, tout en prévoyant que les relations avec le Pape seront difficiles, il aimerait beaucoup, selon sa nature optimiste, arrondir les angles.
Seul problème, selon moi, il considère que les problèmes d'éthique peuvent passer au second plan.

Ceux qui auraient encore des illusions sur les relations entre le Saint-Siège et une administration démocrate aux Etats-Unis doivent absolument lire le récit de l'incroyable affront fait par Bill Clinton à Jean-Paul II en 1993 (voir ci-dessous: (*)).
Là, John Allen a raison de tirer la sonnette d'alarme.
Certes, Obama représente cette nouveauté tant attendue, au point de devenir l'alpha et l'omega des désirs du monde... mais l'équipe qu'il est en train de mettre en place n'est pas si neuve, elle contient de nombreux membres de l'ex-administration Clinton.

Article original en anglais sur le site de NCR: http://ncrcafe.org/node/2253
An open letter to President-elect Barack Obama


Ma traduction
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Une lettre ouverte au président élu Barack Obama

Posté le 7 nov. 2008
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Pour mémoire, personne de l'équipe de transition d’Obama n’a sollicité mon avis sur les relations avec le Vatican, et je serais franchement surpris si la question apparaissait sur leur écran radar. D'autres, en revanche, sont déjà en train de spéculer sur la façon dont les choses pourraient se passer; mercredi, par exemple, Reuters prévoyait des relations "difficiles" entre Rome et la Maison Blanche de Barack Obama en raison de la question de l'avortement.

Comme exercice de réflexion, j'ai décidé d’écrire une lettre ouverte au président élu sur les liens Etats-Unis/ Vatican au cours des quatre prochaines années.

Monsieur le Président-élu,

Cette lettre est un plaidoyer pour faire des relations Etats-Unis/Vatican, sous votre administration, une priorité, en raison de l'immense bien pour le monde qui pourrait être accompli en exploitant les zones naturelles d'intérêt commun.

Je suis bien conscient que les étoiles ne semblent pas particulièrement bien alignées pour une telle collaboration. Un petit nombre d'évêques catholiques des États-Unis ont fait au cours de la campagne des déclarations qui ont favorisé votre adversaire, mais qui ont laissé une amertume chez certains de vos supporters et conseillers (ndt: ne serait-ce pas inverser les rôles?). Il est également clair pour tous que, sauf changement radical de cœur de votre part, la Maison Blanche et le Vatican auront de profondes divergences au cours de votre mandat à propos de thèmes sur la "vie" comme l'avortement et la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

Je vous demande instamment, toutefois, de ne pas permettre à ces points d’obscurcir quatre réalités politiques de base.

. Tout d'abord, le Vatican et les États-Unis ont besoin l’un de l’autre, quelles que soient leurs divergences en un moment donné de l'histoire. Ce que les États-Unis sont dans le domaine du «hard power», au sens de coercition militaire et de puissance économique, le Vatican l’est en termes de «soft power», à savoir la capacité de susciter l'action sur la base des idées. La religion est une puissante force de motivation dans les affaires humaines, et le pape dispose de la plus grande chaire d’autorité qui soit pour un chef religieux. C’est tout simplement néfaste pour tout le monde si ces deux forces ne sont pas disposées à discuter ensemble.

. Deuxièmement, ce serait de l’intelligence politique de votre part de ne pas négliger le Vatican. Comme vous le savez mieux que quiconque, à certains égards, votre campagne de réélection en 2012 a déjà commencé. Vous avez gagné le vote catholique, globalement, cette fois, mais perdu de peu le vote catholique blanc; travailler en collaboration et de façon respectueuse avec le Vatican pourrait vous aider, vous et votre parti avec ce groupe.

. Troisièmement, le Vatican a une tradition diplomatique vieille de plusieurs siècles, pour traiter avec les gouvernements qui, d'une manière ou d'une autre, ne suivent pas la ligne de l'Eglise sur certains points. En dépit de ces désaccords, la diplomatie vaticane s'efforce en général de maintenir ouvertes des lignes de communication et de rechercher un terrain d'entente. En d'autres termes, ils veulent faire des affaires avec vous où ils le peuvent.

. Quatrièmement, le Vatican est avide de bonnes relations avec les États-Unis en particulier, quel que soit le parti qui se trouve être au pouvoir. Le Vatican admire profondément la forte religiosité de l'Amérique, en contraste avec l'omniprésence de la laïcité d’une grande partie de l'Europe. Le Vatican estime également que les Etats-Unis sont l’allié le plus naturel dans la promotion de la liberté religieuse et de la dignité humaine dans le monde entier.

Le potentiel de collaboration est très réel, car il existe de nombreux domaines où vos positions politiques rencontrent la doctrine sociale de l'Eglise catholique et les intérêts diplomatiques du Vatican.
Parmi les exemples les plus évidents, il y a l'immigration, la justice économique, la paix et la protection de l'environnement.
Cette semaine, dans un message de félicitation, le porte-parole du Vatican, le Père Federico Lombardi a également exprimé la volonté du Vatican de travailler avec vous sur l'Irak, la Terre Sainte, les minorités chrétiennes au Moyen-Orient et en Asie, et la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales.

Dans chaque domaine, vous trouverez un bilan de l'enseignement des derniers papes et une forte détermination de la part de l'appareil diplomatique du Vatican de faire bouger les lignes (to move the ball). En fait, bon nombre de ces sujets représentent des domaines dans lesquels le Vatican est en contradiction avec l'administration Bush et a vivement désiré pour cela de nouveaux dirigeants américains. (ndt:?)

Le Pape Benoît XVI lui-même a clairement ouvert la porte à une relation de travail positive.

Le pape a envoyé mercredi un télégramme qualifiant votre élection d' "occasion historique», et offrant sa prière afin que Dieu "vous soutienne, vous et le peuple américain, de sorte que, grâce à la bonne volonté de tous, un monde de paix, de solidarité et de justice puisse être construit ".
Lombardi a également exprimé l'espoir que vous serez en mesure de correspondre aux attentes et aux espoirs dirigés vers le nouveau Président, de servir la justice et les droits, de trouver les meilleurs moyens de promouvoir la paix dans le monde, en favorisant la croissance et la dignité des personnes dans le respect d des valeurs spirituelles essentielles de l'homme ".

Vous remarquerez que ni le pape ni son porte-parole n’ont mentionné explicitement l'avortement ou d'autres zones de désaccord (ndt: sans doute n'est-ce pas le moment idéal!), et sans doute le ton suggère-t’il que les inquiétudes à propos de la "vie" n’excluront pas la coopération dans d'autres domaines. Au contraire, le Vatican semble faire tout son possible pour y inviter.

Puis-je proposer une autre possibilité de partenariat entre les États-Unis et le Vatican? Je crois qu'il existe une occasion historique pour votre administration et le Saint-Siège de travailler ensemble à engager enfin la communauté internationale dans un effort sérieux en faveur de la paix et du développement en Afrique.

Vous êtes un héros pour beaucoup, en Afrique, ayant sur ce continent un degré de capital politique avec lequel aucun autre dirigeant occidental ne pourrait rivaliser.
En même temps, 2009 se dessine comme une "Année de l'Afrique» dans le catholicisme mondial.
Au cours des 12 prochains mois, le Pape Benoît XVI se rendra au Cameroun et en Angola, les évêques d'Afrique tiendront leur assemblée plénière à Rome et les évêques du monde entier convergeront vers Rome pour un "Synode pour l'Afrique." Tout cela suggère la possibilité d'une synergie entre les deux plus importants leaders mondiaux respectivement politique et spirituel - c'est-à-dire, vous et le pape - pour promouvoir la paix et le développement de l'Afrique, où les personnes les plus pauvres et abandonnées du monde se trouvent aujourd'hui.

Si vous avez envie de nouer un tel partenariat, le premier choix important à faire est celui de la personne que vous enverrez au Vatican en tant que votre ambassadeur.
Dans l'idéal, vous vous adresserez à une personne connue pour avoir votre oreille, ayant une réelle influence politique dans votre administration, et connaissant aussi le monde catholique. Ce que vous recherchez, en d'autres termes, est un équivalent démocrate de James Nicholson, le premier ambassadeur au Vatican du président Bush. Nicholson avait servi comme président du Comité national républicain, et avait contribué à orienter le parti vers les électeurs catholiques. Avec cette nomination, Bush avait envoyé un signal clair qu'il était intéressé par le Vatican, et c'est un cas où il vous incombera de suivre son exemple.

Enfin, un dernier échantillon de conseils non sollicités: Monsieur le Président élu, quoi que vous fassiez par ailleurs, s'il vous plaît, essayez d'éviter de répéter les erreurs de la dernière administration démocrate en ce qui concerne le Vatican.

(*) Dans ses mémoires, l'ancien ambassadeur du Vatican Raymond Flynn raconte une triste histoire datant de 1994 pour illustrer ce que je veux dire. Au cours de la préparation de la conférence de l'ONU sur la population au Caire en 1994, le Pape Jean Paul II fit venir Flynn au Vatican, un samedi matin, afin de demander personnellement une conversation téléphonique avec le président Clinton. Flynn relaya d'urgence la demande à la Maison Blanche dans l'après-midi, et n’obtint aucune réponse. Il appela de nouveau le dimanche et le lundi, les deux fois sans résultat. Frustré, Flynn prit alors l’avion à destination de Washington, le mardi. Il fit le pied de grue devant le bureau du président toute la nuit et une partie du mercredi. Enfin, il fut admis à la cellule de la Maison Blanche préparatoire pour la rencontre du Caire, où il lui fut dit par le Secrétaire d'État adjoint Timothy Wirth que "personne n’a la moindre chance de faire pression sur le président à ce sujet".
Sidéré, Flynn expliqua que l’Evêque de Rome n'était pas un lobbyiste, et que cela serait considéré comme un acte profond de manque de respect si le président ne répondait même pas au téléphone. Après presque une semaine, Clinton accepta finalement de prendre l'appel du pape.

L'épisode est symptomatique d'un désintérêt de base au sein de l'équipe Clinton pour le Vatican, qui, parfois, tournait à l'hostilité.
Le résultat en est que les relations Vatican/États-Unis au cours des années Clinton ont été plus souvent définies par des différends prévisibles que par l'imagination de zones d'objectif commun.

Pour ce que cela vaut, Monsieur le Président-élu, mon conseil est de répondre au téléphone si le pape vous appelle. Mieux encore, d’engager la conversation vous-même.
Vous pourriez être surpris de savoir où il va.

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Paul VI, le Pape surhumain Le top 10 des oublis 2008, selon J. Allen