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La laideur des églises modernes

Réflexion sur la Bussola; c'était aussi le sujet du dernier billet de Sandro Magister (15/2/2011)

Sandro Magister consacrait son dernier article aux critiques émises par le "Vatican" (en l'occurrence, par la voix de l'Osservatore Romano...) contre les choix architecturaux très contestables de la CEI dans la construction des églises.

Beaucoup d'entre elles, disait Magister, sont construites selon un plan circulaire; et de s'interroger: "sont-elles en continuité ou en rupture avec la tradition architecturale, liturgique et théologique de l’Église ?"

L'Osservatore Romano a ouvert ses colonnes à l'architecte "star" Paolo Portoghesi (ndt: professeur à la Sapienza, il est le concepteur de la grande Mosquée de Strasbourg!!) [*], très critique, et surtout, au cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil Pontifical pour la culture, à travers une "lectio magistralis" donnée par lui à la faculté d’architecture de cette même université "La Sapienza" (la fameuse Université qui avait rejeté Benoît XVI) où il lançait une attaque en règle contre ces églises modernes "dans lesquelles on se sent perdu comme dans une salle de congrès, distrait comme dans un palais des sports, écrasé comme dans un sphéristère, abruti comme dans une maison prétentieuse et vulgaire".

Le passage le plus éclairant est celui où l'auteur explique la conception de l'Eglise du Dio Padre Misericordioso à Milan, véritable paradigme de cette dérive: en fait, elle est "multi-religions", autrement dit recyclable.
On s'en doutait un peu, pour d'autres horreurs architecturales.
Mais l'ingénuité de l'aveu n'en est pas moins un choc!

L’église milanaise, oeuvre des architectes Giancarlo Ragazzi et Giuseppe Marvelli, a été, de l’aveu même de ses auteurs, conçue comme un "lieu de rencontre et de prière pour les croyants de toutes les religions", ne comportant de signes spécifiques ni à l’extérieur ni à l’intérieur. Son espace peut être divisé par des cloisons mobiles en trois parties, celle du centre étant destinée aux rites catholiques et les deux parties latérales étant prévues pour les juifs et les musulmans.

Le curé actuel est en train de rendre, à grand’ peine, l’église à une utilisation entièrement catholique, avec deux croix à l’extérieur, des vitraux et des images chrétiennes à l’intérieur et un grand Christ en croix au-dessus de l’autel.

L'article de Sandro Magister, plus centré sur les questions d'ordre liturgique que soulèvent l'orientation et la forme des églises, que sur la laideur objective des édifices, est à lire ici: http://chiesa.espresso.repubblica.it/
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Voici sur le même sujet, mais un peu antérieur, un article, publié sur La Bussola qui pose d'autres questions, à mon avis tout aussi (sinon plus) pertinentes pour le catholique lambda, que je suis.

De nombreux articles ont été consacrés par ce site au thème de l'art sacré, notamment de l'architecture.
En particulier:


Article ici: http://www.labussolaquotidiana.it/

Les églises modernes qui semblent dédiées à un dieu inconnu
Ebe Gianotti
12-02-2011
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Que les églises modernes soient laides, ce n'est pas un lieu commun quelconque. Le jugement rassemble pour une fois simples fidèles, critiques d'art, intellectuels laïques, et jusqu'à Mgr Gianfranco Ravasi, en pratique, le ministre de la culture et du patrimoine du Vatican, qui sur cette question a cité le Père Toruldo, "aujourd'hui, les églises sont comme un garage, où Dieu est stationné et les fidèles sont tous alignés devant lui".

Pourtant, plusieurs parmi les églises nouvelles ont été confiées aux architectes contemporains les plus cotés, et le problème ne peut même pas résider dans les convictions religieuses des créateurs, ou leur absence, puisque l'un des derniers exemples négatifs est l'église de S. Paolo à Foligno oeuvre d'un certain Massimiliano Fuksas (ndt architecte contemporain italien né en 1944: http://fr.wikipedia.org/wiki/Massimiliano_Fuksas), un nouveau converti grâce au Pape Benoît XVI, comme il l'a dit dans une interviewe. Dans ce cas particulier, nous sommes confrontés à un objet qui ne démontre pas la moindre parenté avec la longue tradition des églises chrétiennes.

Un énorme monolithe de béton, composé de deux parallélépipède emboîtés l'un dans l'autre et reliés par des éléments en forme de tronc de pyramide, muet, contrairement aux véritables architecture qui chantent, comme le disait Enzo Paci.

Ce sont ces éléments - le type de composition abstraite, la simplicité, fruit de la transposition schématique de formes géométriques, et non du difficile processus qui, dans l'apparente simplicité de la forme, concentre complexité et articulation- révèlent la lignée des temples indifférenciés d'une métaphysique telle qu'elle fut conçue par les architectes des Lumières dans la France du XVIIIe siècle.

Cela commence avec Jacque-François Blondel (1705-1774) et la façade de l'église d'un couvent ressemblant à un monument funéraire, où c'est un obélisque qui soutient la croix, cela se poursuit avec son disciple le plus célèbre, Etienne-Louis Boullée (1728-1799) dont les cénotaphes sont la référence obligatoire pour tout architecte qui se prépare à construire de nouvelles églises et les dessins d'églises souterraines qu'il a conçuest (dont aucune consacrée aux Saints, à la Vierge Marie, au Christ, tous ont disparu) semblent être le modèle du Capitole à Washington ou de l'Opéra de Paris. Et puis, nous arrivons à Lequeu (1757-1826) qui achève la parabole, après les temples du silence et d'Isis des ou des sanctuaires persans, avec le temple du dieu inconnu.

Et les églises modernes semblent effectivement appartenir à un dieu inconnu.
Architectures de glace, froides et dépouillées, que ce soit celles proposées par les architectes français, ou celles contemporaines, créés à partir du geste du créateur, autrefois fortement démiurge, aujourd'hui un peu plus glamour, interrompant le lien historique avec le peuple derrière la construction de chaque église .

Les ambiances dénudées , la pauvreté des matériaux, l'iconographie minimum et, en conséquence, l'absence quasi totale d'artistes et d'artisans qualifiés, nous rappellent au contraire combien le lien au peuple dans l'édification de la Maison de Dieu s'est pendant des siècles exprimé de manière très concrète. Dans le travail des artisans, des charpentiers, des maçons, des décorateurs, des plâtriers qui se relayaient, génération après génération dans ces chantiers sans fin qu'étaient les cathédrales, où l'on retrouvait le meilleur du "savoir faire" typique de l'homme.
(ndt: je crois que c'est cet aspect que le Saint-Père a voulu souligner en inaugurant la Sagrada Familia de Barcelone)
Cette modalité particulière que Pavel A. Florenski (ndt: philosophe russe, 1882-1937) définissait avec ces mots: une constitution d'un esprit très particulier: habitudes et expériences reçues en héritage et formées au fil des siècles ... sans doute le type le plus sain de processus créatif, qui court entre des rivages bien délimités, sans souffrance, sans anxiété, sans romantisme, sans larmes et sans extase, avec une confiance tranquille dans sa propre main, qui sait déjà ce qu'elle doit faire ... cette maestria est très loin de l'esprit de notre époque, où tout est basé sur la sincérité lancinante et sur le trouble, ou bien sur le désir de produire quelque chose de différent de ce qui a déjà été fait par d'autres, de voir, de surprendre, de frapper, et la terreur de se retrouver accidentellement sur un chemin déjà parcouru.

Aujourd'hui, personne ne vient dans une église moderne pour admirer une fresque, un autel, un bas-relief, pour découvrir la beauté de l'espace intérieur et de la lumière qui filtre à travers les vitraux, et pourtant, l'expérience de la beauté est une de celles qui approche le plus fortement l'homme de Dieu, comme l'Église l'a toujours su.
Mais en parcourant le catalogue de l'Exposition internationale d'architecture pour l'espace sacré, qui s'est tenue à Bologne en 1996 sous le patronage de la CEI, il vient le soupçon qu'elle ne le sait plus, et que la faute ne doit pas être imputée uniquement aux architecte pour leurs projets, mais aussi aux commettants religieux qui les approuvent.

Il est difficile de comprendre à partir des plans qu'il s'agit d'édifices pour le culte: oubliez les nefs, transepts et absides, chapelles latérales et cryptes, ce qui prévaut, c'est le plan central, modifié et déformé par tous les moyens possibles: ellipses, prismes, triangles, cercles, carrés.
Et quand le modèle est un plan rectangulaire, on ne peut le comparer à rien d'autre qu'à une salle (de classe, de réfectoire, de conférences, de théâtre?). Presque pas de cloches, la verticalité est modeste, ou absente, et si on veut la souligner, on ne trouve souvent rien d'autre que la forme stylisée d'un arbre de Noël, avec une pente inclinée vers le sol, à la manière d'une cabane hypothétique qui n'existe même pas dans les montagnes.

Les récentes publications des résultats des concours promus par la CEI pour les nouvelles églises italiennes, je parle de 2010, n'offrent pas d'exemples encourageants.
Pourtant, chaque "projeteur" avait le soutien d'un prêtre liturgiste, justement pour éviter de ridicules inventions subjective de la part de l'architecte. Et à lire les rapports de présentation des projets gagnants, ou du moins des deuxièmes et troisièmes classés, avant d'examiner les planches et les maquettes, souvent, on ne peut qu'être d'accord avec les intentions. Mais c'est comme si ensuite, aux mots ne correspondaient pas les actes et un décalage irrécupérable se produisait entre les deux.

Et donc, nous nous retrouvons avec des églises qui semblent des crématoriums (S. Giorgio martire, Dresano),des églises aphasiques, où l'exposition de la croix est la seule concession à l'iconographie chrétienne. Disparue toute trace de récit biblique, pictural ou sculptural, il ne reste que des espaces minimalistes et mortifères, ou des formes «organique», qui, si l'on est près de la mer (S. Giovanni Battista, Porto Recanati) s'inspirent des vagues, ou même des églises attentives à réduire leurs besoins en énergie, afin de classer le bâtiment en classe énergétique A (!).

Ou encore des projets d'églises "chiffonnée" (Madonna del Carmelo, Racalmuto), inspirées par les travaux de Frank Gehry, dont personne ne remarquera si elles sont détruites par un tremblement de terre.
En bref, même avec le liturgiste sur le dos, il semble qu'on ne sache pas où tourner la tête.

Note

(*) Portoghesi dit, citant Benoît XVI:
"Il serait à souhaiter que ces interventions qui, de temps à autre, émanent de la chaire de Pierre fassent comprendre aux liturgistes et aux architectes que la ré-évangélisation passe également par les églises avec un 'é' minuscule et que, si l’effort créatif de l'innovation est nécessaire, il faut aussi une prise en considération attentive de la tradition, qui a toujours été non pas une conservation pure et simple, mais la transmission d’un héritage que l’on doit faire fructifier".

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