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Le défi égyptien (I)

Première partie de ma traduction d'une longue et passionnante interviewe du Patriarche d'Alexandrie des Coptes catholiques, dans le numéro de mars de la revue 30 Giorni (22/2/2011)


Dans cette première partie, le Patriarche revient sur les évènements qui ont secoué l'Egypte, et apporte le point de vue inédit d'un chrétien, un égyptien aussi, qui a vécu la "révolution" de l'intérieur.
Le rôle de la police, de l'armée, de la jeunesse. Ce qu'il décrit comme la solidarité des égyptiens, sans distinction de religion (?), et ceux qui tentent de fomenter la division.
Quelles sont les perspectives? Que peut-on attendre?
Il tente aussi d'expliquer le massacre du 31 décembre à la lumière des développements récents.
C'est une analyse résolument optimiste.

Antonios Naguib

Photo 30 Giorni

Le défi égyptien
http://www.30giorni.it/it/articolo.asp?id=23449
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Des persécutions de Dioclétien à la chute de Moubarak. Des alliances avec les premiers disciples de Mahomet à l'inconnue des Frères musulmans. Antonios Naguib, Patriarche d'Alexandrie des Coptes catholiques, retrace la longue histoire des chrétiens dans le pays des pharaons. Une histoire pleine de surprises

Entretien avec Antonios Naguib, par Gianni Valente

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D'abord, le massacre d'Alexandrie, avec des dizaines de morts dans l'attaque contre l'Église copte orthodoxe des Saints dans la nuit du 31 décembre. Ensuite, la révolte qui explose dans les rues égyptiennes, les combats, les morts, la fin du régime de Moubarak et le début d'une transition, à l'issue encore incertaine. Pour les chrétiens d'Egypte, comme pour tous les autres Egyptiens, c'est vraiment un temps rempli de questions. Un temps où se mêlent angoisses, espoirs et anxiété désarméee. Et où le summum du réalisme coïncide avec la prière d'action de grâce et de confiance en la miséricorde de Dieu. Comme en témoigne aussi, dans l'interview qui suit , Antonios Naguib, Patriarche d'Alexandrie des Coptes catholiques.

- Béatitude, que s'est-il passé en Égypte? Et vous, comment avez-vous vécu les derniers événements?
- Antonios Naguib: Nous avons vécu des journées angoissante, que le monde entier a pu suivre dans les médias. Les partis et les groupes d'opposition au régime et au gouvernement ont commencé à organiser des manifestations énormes, à partir du mardi 25 Janvier. Ils ont demandé le «changement», un changement radical et immédiat de régime, de la Constitution, de gouvernement et de président. Le président Moubarak a cherché à satisfaire les manifestants et l'opinion publique avec des concessions partielles, qui ont été jugées insuffisantes. On sait comment cela a fini, Moubarak a démissioné.

- Comment une explosion si soudaine a-t-elle été possible?
- En vérité, nous ne pouvons pas dire qu'elle a été soudaine. De nombreux analystes soulignaient depuis longtemps les éléments qui ont préparé cette explosion, qui a eu lieu comme l'éruption d'un volcan. Un certain nombre de facteurs se sont ajoutés pour pousser le peuple à l'insurrection: l'abus de pouvoir, la corruption et le monopole de la terre et de l'industrie par certains hommes d'affaires. Ensuite, tous les problèmes sociaux: chômage des jeunes, incapacité à trouver un logement à un prix raisonnable et donc difficulté d'élever une famille; et aussi l'augmentation continue des prix des denrées alimentaires et des services.

- Il y a eu de nombreux morts. Mais à certains moments, on a craint une guerre civile bien plus sanglante.
- Dans toutes les églises de toutes les dénominations, des prières quotidiennes ont été offertes pour la paix dans le pays. Et aujourd'hui, nous rendons grâce à Dieu Tout-Puissant pour la façon dont les choses se sont passées, et nous prions pour la paix et le bien de l'Egypte bien-aimée, afin qu'elle puisse regarder vers un avenir meilleur et plus lumineux.

- Qui étaient les acteurs réels de l'insurrection? Comment voyez-vous le rôle des Frères musulmans dans la phase actuelle, et dans l'avenir? Et celui de armée?
- Les premiers à remercier, ce sont les jeunes patriotes qui ont conduit les gens au refus de la vilaine situation qui prévalait dans le pays depuis trop longtemps. Quant aux Frères musulmans, ils ne cachaient pas leur opposition radicale. Mais ce n'est pas eux qui ont été à la tête du soulèvement. L'armée a voulu éviter d'affronter le peuple avec des armes, et je pense qu'elle a joué un rôle décisif pour pousser Moubarak à démissionner.

- C'était une révolte spontanée, ou bien, il y a eu ingérence extérieure visant à déstabiliser l'Egypte?
- Le début des manifestations des jeunes, le 25 janvier, a été pacifique et très correct. Puis d'autres éléments se sont infiltrés et les actes de vandalisme ont commencé. Le retrait des forces de police a ouvert les portes à tous les malfaisants. Mais c'est alors nous avons vu la chose la plus intéressante: dans toutes les rues, les jeunes hommes, chrétiens et musulmans, dans une belle solidarité, se sont spontanément organisés en «comités populaires» pour défendre les personnes et les biens, et on a pu rétablir la sécurité et la tranquillité.

- Mais dans la démission de Moubarak, quel a été le poids de la pression de l'Occident - en particulier les États-Unis - et de l'armée? Et comment ces pressions sont-elles considérées par le peuple égyptien?
- Je ne peux pas dire si la pression des Occidentaux, et en particulier des États-Unis, a vraiment eu un poids effectif dans la décision finale de Moubarak de démissionner. Parce que si les manifestations s'étaient arrêtées avec ses premières concessions, il ne se serait pas retiré avant la fin de son mandat. Ce sont les jeunes et les autres manifestants, déterminés à ne pas accepter moins que la démission totale et définitive, qui ont déterminé la décision finale. S'il n'avait pas démissionné, je crois que l'armée aurait décrété et déclaré son expulsion du pouvoir.

- Et maintenant? A votre avis, comment cela va-t-il finir?
- Selon moi, il y une chance réelle d'entamer un processus qui conduise progressivement l'Egypte à avoir sa place parmi les pays modernes. Un pays civil et démocratique, fondé sur les lois, où la liberté de chacun est respectée et où les relations entre les personnes sont réglementées sur la base de la citoyenneté partagée et commune, avec des obligations et des droits égaux pour tous. Les manifestations exprimaient ce type de revendications politiques. Cela peut vraiment être le moyen d'éviter les divisions et les conflits entre les groupes religieux et sociaux, assurant à chacun une chance de s'exprimer et de contribuer au bien commun. Sans qu'il y ait des catégories et des groupes discriminés dans la société et la politique. L'Egypte est à un carrefour important en termes de développement politique, économique et social. La reconstruction du pays peut vraiment raviver les racines d'une civilisation qui a marqué le monde pendant des siècles.

- Comment les chrétiens ont-ils vécu ces temps?
- Avec et comme tous nos concitoyens, nous avons vécu ces événements tragiques avec un profond sentiment d'appréhension. Comme je l'ai dit, toutes les Eglises se sont tournés vers notre unique secours: la miséricorde divine. Nous mettons toute notre confiance en Dieu, et à présent nous l'implorons de donner lumière et courage aux leaders des groupes et des organisations pour marcher sur la voie de la reconstruction.

- Au début des protestations, les leaders chrétiens étaient prudents. Certains ont appelé les chrétiens à ne pas participer aux manifestations. Craignaient-ils que la déstabilisation du régime finisse par les conduire à de nouvelles catastrophes, comme cela s'est passé en Irak?
- Je suis rassuré par le fait d'avoir vu en oeuvre ces jours-ci quelque chose que je n'avais pas vu depuis longtemps: une unité concrète entre les citoyens, jeunes et vieux, chrétiens et musulmans sans distinction ni discrimination, dans un but commun d'agir pour le bien de l'Egypte, pour la sûreté et la sécurité du pays. J'espère que ces sentiments vont rester et prendre racine dans nos cœurs. Cette expérience a illuminé les yeux de beaucoup. A présent, tout le monde voit que ceux qui fomentent les divisions et les oppositions entre Egyptiens sur la base de différences religieuses visent en réalité à détruire cette unité et à déstabiliser l'Egypte.

- Le fait est que le régime autoritaire de Moubarak dans son expression officielle s'opposait aux conflits religieux et, malgré tout, était considéré par de nombreux observateurs comme un facteur de «protection» des chrétiens, victimes de violences récurrentes dans les dernières décennies. N'y a-t-il vraiment pas le risque de regretter, peut-être même dans un certain temps, l'omniprésence rigide des forces de sécurité ?
- C'est un fait que beaucoup de chrétiens croyaient que le régime de Moubarak leur garantissait une certaine protection, et craignaient que le changement de régime puisse amener les Frères musulmans au pouvoir. Jusqu'à présent, ce danger est assez loin, bien que pas totalement écarté. D'autre part, l'armée a clairement indiqué que sa tâche est temporaire, en vue de la préparation de la restauration complète d'un régime civil.

- Peu de temps avant le soulèvement général, l'Egypte a été l'objet de l'attention, et de polémiques internationales en raison du massacre des chrétiens coptes à Alexandrie, en Egypte, le 31 Décembre. Pensez-vous que les deux évènements sont liés?
- J'ai étudié cette hypothèse dès le début. Parce que j'avais vécu des événements similaires dans les années 80 et 90, lorsque j'étais évêque de Minya. Alors, nous avions vécu presque cinq ans d'attaques meurtrières contre les chrétiens. Les auteurs de ces attaques voulaient renverser le régime, mais ils n'ont pas réussi. Puis ils ont commencé à attaquer directement les fonctionnaires de police et le gouvernement, allant jusqu'à tuer le Grand Imam d'Al-Azhar. La cible était le régime, les chrétiens n'étaient qu'un passage pour atteindre cet objectif.
Dans les événements récents, il a été dit que la police, qui s'était retirée durant les trois premiers jours du soulèvement, et qui avait ainsi ouvert la voie à tous les actes de vandalisme que vous connaissez, avait reçu cet ordre du ministre de l'Intérieur, qui voulait prouver de cette manière que sa personne était indispensable pour le président et le régime. En ces jours, malgré l'absence totale de la police qui occupait d'habitude des postes de garde devant chaque église, il n'y eu aucune attaque contre les églises. Cela a donné du poids à l'hypothèse, qui circulait en particulier chez les chrétiens, que le ministère de l'Intérieur avait planifié le massacre d'Alexandrie, pour justifier un renforcement des contrôles de police. Dans tous les cas, la spontanéité du soulèvement populaire et de la jeunesse a balayé tous éventuels calculs criminels.

- Après le massacre du 31 Décembre à Alexandrie, les grands médias internationaux se sont concentrés sur les chrétiens coptes d'Egypte. Souvent, sans expliquer vraiment qui ils sont.

...
Fin de la première partie.
A suivre

Benoît XVI, comme Léon le Grand Le Pape a parlé des roms...