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Entretien avec le chef de l'Eglise Syro Malabare

dans la revue 30 Giorni, repris par le site espagnol Infocatolicà, et traduit par Carlota: " L'actuel Pape est en train de vraiment sauver l'Église de notre temps " (14/12/2011)

L'origine apostolique. La fidélités à ses propres traditions. Le rapport avec les hindous, et une floraison de vie qui ne connaît pas de confins. Les relations avec Rome.
Interviewe avec George Alencherry, archevêque majeur de l'Eglise Syro malabare, à l'occasion de sa visite à Benoît XVI.

Carlota:

« L’actuel Pape est en train de vraiment sauver l’Église de notre temps »

Une phrase magnifique prononcée par l’Archevêque majeur de l’Église syro-malabare George Alencherry, élu cette année à la tête de la deuxième Église catholique orientale la plus importante en nombre de fidèles. Il est dommage que cette phrase ne soit pas prononcée par d’autres…D’autant qu’entre personnes de bonne volonté, il doit y avoir une possibilité d’entente…à partir d’un fait acquis, nous parlons bien de Son Église, celle du Christ. La fidélité de l’Église syro-malabare est une belle leçon pour les catholiques romains de nos contrées, tant les « traditionalistes » que les « catholiques adultes » pour reprendre la terminologie en vogue. Et l’on voit que nous avons tous les mêmes interrogations et réactions, et sommes confrontés aux mêmes problèmes, même si le contexte est différent. Une plongée dans l’histoire et le continent indien pleine d’enseignements grâce à l’article du portail italien 30 Giorni repris aussi en espagnol par Infocatolicà.

(Ma traduction – Les questions du journaliste de 30Giorni apparaissent en gras)

Rome est loin de Malabar. Mais si l’on veut percevoir ce qu’est réellement la proximité que connote et exprime les termes latins de la Communio Eclesiarum, il suffit de regarder le lien de reconnaissance gratuite et de réciproque qui unit l’Église de Rome et l’Église syro-malabare. Deux réalités qui pendant près de dix siècles n’ont partagé aucun type de lien juridico-institutionnel. George Alencherry, élu au mois de mai dernier [2011] Archevêque majeur de cette Église indienne de rite orientale fruit de la prédication de l’apôtre Thomas, est venu, au mois d’octobre, rencontrer le successeur de Pierre, à son siège épiscopal. À l’occasion de son voyage à Rome, le chef de la communauté catholique de rite oriental la plus nombreuse et significative après les gréco-catholiques ukrainiens a voulu également rencontré l’équipe de 30Giorni.

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Votre Béatitude, vous nous parlez de votre rencontre avec le Saint Père?

J’ai été élu Archevêque majeur par le Synode de l’Église syro-malabar en mai et puis le Pape a confirmé mon élection. Cette procédure a été appliquée pour la première fois : en effet, les deux précédents archevêques majeurs avaient été choisis directement par le Saint Siège. L’élection a eu lieu le 24 mai et le 29 mai je me suis installé comme Archevêque majeur et archevêque du diocèse d’Ernakulam-Angalamaly. Cette visite d’octobre est ma première visite, comme Archevêque majeur, au Pape, en même temps que le Synode permanent de nos évêques. Elle a été l’occasion pour renouveler comme Archevêque majeur mi déclaration de fidélité et d’obéissance au Successeur de Pierre. Durant ce voyage j’ai rendu visite aussi à d’autres dicastères du Saint Siège, en particulier la Congrégation pour les Églises Orientales.

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Quels sujets avez-vous abordés lors de vos rencontres Vatican?

Nous avons parlé beaucoup des problèmes de juridiction qui créent des obstacles à notre oeuvre pastorale. Les fidèles de l’Église syro-malabare sont près de quatre millions, dont 3,4 millions vivent dans vingt-huit diocèses en Inde. Parmi ces diocèses, dix-huit se trouvent dans le territoire propre de l’Église syro-malabare (Kerala, parti du Tamil Nadu et Karnataka). Nous n’avons une juridiction territoriale que dans ces dix-huit diocèses. Et nous aimerions avoir une juridiction qui couvre tout le territoire de l’Inde : c’est une de nos requêtes auprès du Saint Père et c’est pour nous une demande importante. Nous croyons que c’est notre droit. Avant l’arrivée des missionnaires occidentaux, - les Portugais arrivèrent au XVIème siècle, -notre juridiction à nous, « Les chrétiens de Saint Thomas » s’étendait sur l’Inde entière. Puis les missionnaires occidentaux, à cause des influences des souverains européens, prirent la juridiction de l’Inde, restreignant la nôtre aux zones où nous étions les plus concentrés.

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Votre demande peut paraître une revendication de droits passés déjà ensevelis par l’histoire…

Non, c’est une question qui concerne le présent, en termes très concrets. Nos fidèles croissent en nombre et se développent dans d’autres régions. Mais là-bas il arrive que nos fidèles ne trouvent pas un traitement pastoral adéquat dans la continuité de leur propre tradition et ils en souffrent. Nos fidèles sont habitués à notre liturgie, à nos coutumes, à nos modalités de prière et de participation des laïcs à l’administration des paroisses. Le rôle des laïcs dans la vie des paroisses et dans la catéchèse est une particularité de l’Église syro-malabare. Dans beaucoup de grandes villes, il y a de grandes concentrations de fidèles syro-malabars : 70 000 à Delhi, 50 000 à Chennai et Bangalore, près de 20 000 à Hyderabad. Nous voudrions pouvoir établir des diocèses au moins dans ces grands centres urbains.

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Et quelle réponse vous a t-on donnée?

Le Saint Siège nous a dit, que dans le principe, nous avons le droit à la juridiction. Mais qu’étant donné que dans les autres régions s’est installé l’Église latine, il est nécessaire d’établir un type d’entente en accord avec les latins. Le Saint Père comprend nos besoins et nous a expliqué qu’il sera nécessaire de procéder pas à pas. Il nous a rappelé les mots du Concile Vatican II, selon lesquelles chaque Église sui juris (ndt de son droit propre) a des droits à pouvoir vivre en autonomie. Il y a une anomalie historique qui doit être corrigée. Nous sommes patients, mais ce n’est pas juste que cela continue de cette façon.

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Quelles sont les objections qui sont mises à votre demande?

Déjà actuellement l’Église syro-malabare, l’Église syro-malankare (ndt environ 500 000 fidèles, elle aussi suite à l’évangélisation de Saint Thomas) et l’Église latine ont des diocèses qui se superposent sur notre territoire historique. Cependant quelques évêques pensent qu’il pourrait y avoir des difficultés si nous étendons notre juridiction à des territoires qui tombent dans leurs diocèses. Il faut prendre en compte le fait que dans quelques diocèses latins actuellement les syro-malabars représentent une grande partie des fidèles dont s’occupent les prêtres latins. Si nous étendions la juridiction dans quelques uns des diocèses il pourrait ne rester que très peu de fidèles de rite latin. Une autre préoccupation est celle qui fait référence aux prêtres syro-malabars qui ont appris le rite latin et qui travaillent dans les diocèses latins. Il y a plus de trente évêques d’origine syro-malabare qui travaillent comme évêques latins dans les diocèses du nord.

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Et hors de l’Inde, comment vont les choses?

Il y a un grand nombre de fidèles syro-malabars hors de l’Inde. Aux États-Unis ils sont près de cent mille et pour eux a été institué un diocèse qui a son siège à Chicago. La plupart des fidèles à l’extérieur se concentrent dans le Golfe Persique. En Arabie Saoudite ils sont plus de quatre-vingts mille, presque tous des ouvriers qui se sont installés là-bas d’une manière permanente. Le Pape a nommé deux vicaires apostoliques et un nonce, mais les prêtres qui ont été chargé de s’occuper de ces fidèles, bien qu’étant d’origine syro-malabare, sont entrés dans des congrégations latines et sont latins de formation. L’absence de prêtre de notre rite a créé quelques tentions dans ces pays. C’est un autre problème que nous avons présenté au Saint Siège, nous espérons être écoutés.

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Comment se passe la collaboration entre les différentes Églises catholique en Inde?

Les trois Églises, latine, syro-malabare et syro-malankare font partie de l’Église unique universelle et il y a une Conférence épiscopale des évêques des trois Églises. Dans cette Conférence nous travaillons ensemble sans aucun problème. L’Église catholique est une communion des différentes Églises particulières: Il y a vingt-deux Églises orientales qui à côté de l’Église latine composent l’Église universelle. C’est seulement à partir de cette théologie que l’œcuménisme est possible, si les gréco-orthodoxes percevaient l’existence de cette communion, ils s’uniraient aux catholiques. L’oecuménisme ce n’est pas mettre l’Église orthodoxe sous l’administration de l’Église latine. Nous, de l’intérieur, nous demandons un œcuménisme réel. Les orthodoxes le demandent de l’extérieur. Mais certains parmi les latins ne le comprennent pas.

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Et les relations avec les Indous?

En général, l’hindouisme est une religion qui promeut la paix et l’harmonie. La plupart des personnes nous regardent avec sympathie et nous travaillons ensemble. Mais comme vous le savez, dans un passé récent il y a eu des groupes de fondamentalistes qui ont créé des problèmes. Dans tous les pays, pour un motif ou pour un autre, il existe des fondamentalistes. Tout comme il existe des extrémistes politiques qu’on appelle terroristes. En Inde il existe des groupes extrémistes à l’intérieur de l’hindouisme, celui qui croit en un authentique hindouisme ne les aime pas, mais ces groupes créent des problèmes surtout aux chrétiens. Ils ont peur que les chrétiens, au moyen des conversions, prennent le contrôle du pays. Mais c’est une peur sans fondement et les chrétiens, au contraire, ne réagissent pas par la violence face aux attaques. Le gouvernement le sait et il nous aide.

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L'Église syro-malabare est restée dans la foi des apôtres en vivant au milieu d’une culture enracinée dans d’autres présupposés religieux. C’est un splendide témoignage du fait que l’Église est de Jésus Christ (Ecclesiam Suam, a écrit Paul VI). Que peut suggérer à la Chrétienté tout entière l’histoire des chrétiens syro-malabars ?

L’héritage que nous portons avec nous est le résultat de vingt siècles de témoignage de la foi catholique, celle à laquelle nous sommes restés toujours fidèles même quand il existait de sérieuses incompréhensions de la part des missionnaires étrangers. Notre Église a un style unique de catéchisme dans les familles, dans les paroisses et dans les écoles, où nous y enseignons selon trois niveaux, aux enfants, pour qu’ils gardent la foi. Ici à Rome il y a seize mille fidèles syro-malabars, le 16 octobre dernier nous avons célébré une belle liturgie dans la Basilique du Latran. La basilique était pleine.

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L’Église syro-malabare a confirmé la communion avec Rome après des siècles d’absence de contact. C’est le signe que la communion de l’Église ne résulte pas principalement de relations juridiques…

Notre communion c’est la foi des apôtres, transmise par Saint Thomas. Saint Thomas aurait pu initier une nouvelle Église par sa force propre. Également en Inde, il n’a fait que ce que Jésus lui avait demandé de faire. Pour le même motif, Thomas et ceux comme lui qui ont reçu l’annonce de l’Évangile sont en communion avec Pierre, et il est la garantie de notre foi. La fidélité au Pape vient de notre expérience de la foi : nous prions pour le Pape au cours de la célébration eucharistique, nous prenons en considération dans la liturgie les saints de toutes les Églises particulières à côté des nôtres. Au niveau doctrinal, nous gardons ce que nous avons reçu du Credo de Nicée (ndt en 325). L’Eucharistie et les autres sacrements, par don de l’Esprit Saint, nous unissent dans l’Église, une, sainte et apostolique.

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Vous nous parlez de votre dévotion pour Saint Thomas?

Après les fêtes de Notre Seigneur, de Noël jusqu’à Pâques et les fêtes de la Très Sainte Vierge, - Immaculée Conception, Noël et Ascension, la fête la plus solennelle dans l’Église syro-malabare est la « Dukhrana » ou commémoration de Saint Thomas. Nous la célébrons dans le monde entier, y compris en Arabie Saoudite où l’on ne peut avoir de célébrations officielles mais où trois cents fidèles se sont réunis dans un lieu privé et m’ont appelé par téléphone, me demandant une bénédiction. Selon la coutume, Thomas a fondé sept communautés en Inde. Ces lieux se sont transformés en autant d’autres lieux de pèlerinage. Et le premier dimanche après Pâques se célèbre la fête de Saint Thomas qui a touché le côté de Jésus. C’est une grande fête à laquelle participent de nombreux hindous.

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Le cardinal Levada, lors du dernier Synode des Églises d’Orient a annoncé qu’il consulterait les patriarcats orientaux sur la possible réforme des exercices du ministère pétrinien. Que surgérez-vous, en particulier par rapport aux relations avec les Églises orientales?

L’Église catholique, à travers le Conseil pour l’Unité des Chrétiens, a déjà initié un dialogue sur le primat (ndt donc celui du successeur de Pierre, le Pape). Je pense que l’on doit poursuivre ce dialogue et chercher un accord commun avec les Églises d’Orient, comme il y avait dans les quatre premiers siècles de la Chrétienté. En ce temps-là il y avait une compréhension commune du primat. Actuellement l’Église orthodoxe objecte que c’est impossible de remonter à la théologie précédant le Concile de Calcédoine (ndt en 451) parce que nous ne possédons aucun document de cette époque. Mais je crois également qu’à partir des documents et des déclarations à l’époque de Calcédoine, un dialogue est possible et un accord sur le ministère pétrinien. Parce qu’il existe l’expression primus inter pares (ndt Πρῶτος μεταξὺ ἴσων - le premier parmi les égaux). Nous avons tous besoin d’un ministère pétrinien qui soit une référence d’unité pour toutes les Églises. J’ai l’espoir que se trouve un point à mi chemin où l’Église catholique et les Églises orthodoxes puissent se trouver en plein communion de l’Église du Christ.

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Pendant des siècles, votre Église a du faire face aux processus de « latinisation » mis en marche avec vous. Certains vous croyaient hérétiques ou schismatiques parce que vous aviez vos prières, vos liturgies et parce que vous ne parliez pas latin. Voyez-vous aujourd’hui circuler des séquelles de cette mentalité ?

La façon de penser à beaucoup changé, dans l’Église latine aussi. Parmi les théologiens, la plupart des évêques, et au Saint Siège apostolique. Le Père Placid Podipara MI (ndt congrégation des Carmes de Marie-Immaculée), un théologien et historien très renommé de notre Église, a dit que l’Église syro-malabare est chrétienne par la foi, hindoue par la culture et orientale par le culte. Malheureusement les missionnaires qui arrivèrent au XVIème ne l’ont pas compris. Ils n’avaient pas de mauvaises intentions, c’était l’attitude de l’époque. Mais maintenant ce qui leur semblait erroné peut être restauré. C’est ce que dit le Concile Vatican II. Beaucoup de choses ont changé mais là où il n’y a pas eu de changement il y a des problème. Je l’ai aussi dit au Pape, j’ai dit : « Votre Sainteté, il y a beaucoup d’évêques latins qui comprennent correctement l’ecclésiologie de communion, mais il y en a d’autres…

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La liturgie a un rôle central pour la continuité historique de votre Église. Comment voyez-vous l’importance reconnue à la liturgie par le magistère du Pape actuel?

Le magistère du Pape actuel est vraiment en train de sauver l’Église de notre temps. Il y a beaucoup d’aberrations qui sont en train de pénétrer dans l’Église, parfois au nom du Concile Vatican II. Il y en a qui ont interprété mal ce Concile, en s’arrêtant sur des choses accidentelles et en perdant de vue l’essentiel. Le Pape veut suivre ce que Vatican II a voulu réellement dire. Et quand il arrivera, peu à peu, à faire passer ces choses, l’Église sera réellement unie. La dissipation et la sécularisation de l’Église sont en train de réellement s’étendre, spécialement en Europe, et pour la recomposition il faudra plus de temps. Mais c’est l’intention du Pape et l’Église syro-malabare est avec lui.

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Cependant il y a eu aussi dans l’Église syro-malabare des controverses allumées entre ceux qui soutiennent la récupération intégrale du patrimoine liturgique traditionnel et ceux qui jugent cela comme une forme d’esthétisme traditionaliste. Entre les « chaldéisants » et les « latinisants »…(ndt ici, comme dans le reste du texte, bien sûr le terme latins, latinisant ou latinisation n’est pas à prendre forcément stricto sensu pratiquant de ceux qui parlent la langue latine dans l’Ordo Missae mais de rite romain en général).



Je dirais une chose: si quelque chose est chaldéen, ou européen, ou de tout autre lieu, ce qui est valide est valide. Mais certains, comme conséquence de la latinisation, se sont convaincus de ce qui appartient à la culture occidentale est bon et ce qui vient de l’Orient n’est pas bon. C’est une impression créée par la latinisation à laquelle nous avons été soumis pendant trois siècles. De sorte que si le Concile Vatican II nous a restitué la liberté de récupérer les éléments valides de notre patrimoine, une bonne partie de l’Église les a oublié et ne ressent pas l’exigence de cette récupération. Ils disent : « continuons à aller de l’avant avec que nous avons aujourd’hui, et si nous avons besoin d’autre chose, prenons-là dans l’Église latine ». C’est leur attitude. D’autres répondent que pour continuer à être ce que nous sommes, nous devons avant tout récupérer ce qui a été enlevé et que nous avons perdu. Moi, dans mon travail, j’essaie de créer plus d’unité et aussi une certaine uniformité dans les célébrations liturgiques. Non pas une uniformité totale mais une unité dans l’essentiel. Qui doit se réaliser de façon graduelle. Par exemple, avant dans l’Église latine il y en avait qui disait qui nous célébrions en regardant le mur. Mais regarder vers l’Orient ce n’est pas avoir la tête vers le mur. C’est regarder vers d’où vient le Seigneur. Dans la théologie de notre Église le peuple et le célébrant offrent ensemble le sacrifice à Dieu le Père, orientés vers l’Orient.

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L’Inde est en train de devenir une espèce de superpuissance géo-économique. Il y a de nouveaux problèmes: Comment ces processus affectent-ils votre travail pastoral ?

Le monde qui change, nous change aussi. Nos fidèles émigrent, pour étudier ou chercher du travail. Il n’y a qu’un tiers d’entre eux qui vivent dans leurs diocèses d’origine. Près des deux tiers sont à l’extérieur, dans les grandes villes. En Amérique et en Europe il y a des médecins, des entrepreneurs, des commerçants syro-malabars qui sont en train de grimper dans l’échelle sociale. Si on nous reconnaît la juridiction universelle sur nos fidèles, nous pouvons réellement favoriser cette énergie de manière à ce que sa force soit au service de l’Église universelle. Autrement ce que nous perdrons nous, l’Église universelle le perdra. Et si nos fidèles rencontrent des difficultés pour rester en contact avec leur patrimoine spirituel propre, ils chercheront le sens du spirituel dans les groupes pentecôtistes ou dans des réalités de ce genre. Et c’est déjà ce qui est en train de se passer. Nous sommes en train de perdre nos fidèles. Ils arrivent de l’Inde vers l’Occident, ils rencontrent quelqu’un qui leur dit : « Pourquoi dois-tu aller vers les églises des latins ? Viens avec nous, prions ensemble ». Nous en avons beaucoup perdus. Nous sommes angoissés par cela et nous avons exprimé nos angoisses aux dicastères du Vatican. Tous semblent comprendre ce que nous disons mais ensuite les décisions ne se prennent pas. Il faut consulter de nombreuses personnes et le temps passe. Et les choses empirent. Beaucoup ne paraissent pas comprendre que si l’Église syro-malabare fleurit, l’Église universelle fleurit. Parce que chaque Église particulière est pour l’Église universelle. Et l’Église latine est aussi une Église particulière. Alors que dans l’esprit de certains, universel correspond avec latin. Ce n’est pas évidemment la doctrine officielle. Ce n’est pas la pensée d’un théologien sérieux. Mais cela continue à être une mentalité répandue chez beaucoup et cela provoque des retards.

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Ces jours derniers, à l’Université Pontificale Grégorienne, a eu lieu un important Congrès international sur ce qui est appelé l’ « Anaphore d’Addaï et Mari » (ndt cf ici). Pourquoi cette anaphore a-telle une importance particulière du point de vue œcuménique et liturgique ?



L’Anaphore d’Addaï et Mari est l’anaphore la plus ancienne de l’Église universelle. En elle nous percevons la plus simple théologie des Évangiles, la compréhension la plus initiale du mystère du Christ, sans les formulations doctrinales venues par la suite. Ainsi comme l’Évangile de Saint Marc est le plus simple, l’Anaphore d’Addaï et Mari est la liturgie la plus simple. De cette façon quand nous la célébrons nous avons l’intense expérience de la présence de Jésus avec nous. De même que les attentes et les suppliques de l’Église sont très bien intégrées dans l’Anaphore. Elle comprend des prières pour les faibles, les opprimés, les martyrs, les pauvres, les réfugiés. En résumé elle a la beauté de la simplicité. L’Anaphore d’Addaï et Mari est utilisée par l’Église assyrienne d’Orient et elle a la caractéristique de ne pas contenir de manière explicite les phrases de l’institution, celles prononcées par le Christ lors de la Dernière Cène (« Prenez et mangez, ceci est mon corps…Prenez et buvez, ceci est mon sang…Faîtes cela en mémoire de moi »). De même l’Église syro-malabare a utilisé une forme traditionnelle de cette anaphore jusqu’au XVIème siècle, sans interpolations. Mais les théologiens latins soutenaient que sans les phrases de l’institution il n’y avait pas de véritable consécration, par conséquent ils considéraient comme non valide l’Anaphore d’Addaï et Mari. Puis en 2001, le Conseil Pontifical pour la Doctrine de la foi a reconnu cette anaphore, utilisée depuis les temps immémoriaux également dans noter Qurbana, le sacrifice eucharistique selon le rite malabar.

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Notes

(1) L'Église catholique syro-malabare est une des Églises catholiques orientales du Kerala en Inde. Elle appartient au rite chaldéen. Le chef de l'Église porte le titre d'Archevêque majeur d'Ernakulam-Angamaly des Syro-Malabares, avec résidence à Ernakulam (wikipedia).

(2) Le 17 octobre dernier, le Saint-Père recevait au Vatican une délégation de l'Eglise Syro Malabare.
Il leur a dit, entre autre:

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L’Eglise syro-malabrare au Kerala continue à jouir du respect de la communauté locale pour son œuvre dans le domaine de l’éducation et pour ses institutions sociales et caritatives au service de toute la communauté. Je sais que la vie des chrétiens a été compliquée par une méfiance de nature sectaire et même par la violence, mais je désire vous exhorter à continuer à œuvrer avec les personnes de bonne volonté de toutes les religions dans la zone, en vue de maintenir la paix et l’harmonie dans la région, pour le bien de l’Eglise et de tous les citoyens.
...


En fidélité à l’Evangile et à la grâce déversée sur nous par le Christ notre Seigneur, votre foi s’est développée avec vos fidèles dans votre pays et à l’étranger en union avec l’Eglise universelle. En promouvant votre tradition liturgique authentique, vos fidèles ont été nourris par la Parole et le sacrement, selon ce qui vous a été transmis par vos pères dans la foi. (Discours entier ici: www.vatican.va )

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