Accueil

Pape François : restons calmes

Les 10 conseils du Père Longenecker (20/7/2014)

     

Le Père Longenecker, que nous avons croisé à plusieurs reprises est un ex-pasteur anglican marié et père de famille, converti au catholicisme en 1995 et auquel une dispense accordée par Benoît XVI en 2006 a permis de devenir prêtre catholique (cf. benoit-et-moi.fr/2014-I/benoit/une-graine-semee-par-benoit)
Sa loyauté au Pape, quel qu'il soit, est donc pour lui une obligation morale. On ne passe pas d'une religion à une autre pour s'empresser de critiquer la hiérarchie de la nouvelle.
Cette loyauté, qui est celle d'un frais converti, ne l’a pas empêché de manifester quelque inquiétude sur le cours du Pontificat, comme par exemple en avril dernier, commentant le coup de téléphone de François à une femme mariée civilement à un divorcé, qui avait fait à l’époque couler beaucoup d’encre (cf. benoit-et-moi.fr/2014-I/actualites/le-pape-au-bout-du-fil-4)
Suivant sans doute assidument la blogosphère anglophone (il y est lui-même très actif), il n'a pas manqué de constater le mouvement de "grogne" contre le Pape, qui s'amplifie dans les milieux que je qualifierai par commodité de "conservateurs" (un mouvement qui n'est curieusement pas perçu en France). Cette grogne se traduit par des injonctions à ignorer carrément les propos à l'emporte-pièce de François quand celui-ci s'exprime "en roue libre" - c'est-à-dire presque tout le temps (voir par exemple ici: connecticutcatholiccorner.blogspot.fr/2014/07/we-have-pope-problem-and-we-cant-ignore).

Il essaie ici de répondre, en dix conseils et sur un ton qui oscille entre l'humour, le bon sens et un flegme tout britannique, aux objections de ces blogueurs grognons qui avouent franchement qu'ils ont "un problème de pape".
En somme, il cherche à calmer le jeu et je lui sais gré de ne pas chercher à imposer l'idée absurde que "tout est ok", et que rien n'a changé.

Mais j'ai quelques réserves sur certains de ses arguments...

     

DIX CHOSES À RETENIR SI LE PAPE FRANÇOIS VOUS DÉRANGE
15 juillet 2014
www.patheos.com/blogs/standingonmyhead
(ma traduction)
------

Beaucoup de catholiques conservateurs expérimentent une gamme de sentiments négatifs au sujet du Pape François. Quand un titre proclame qu'il a déclaré que 2% du clergé catholique sont des pédophiles, qu'il «promet de résoudre le problème du célibat», qu'il ne veut pas convertir les évangéliques ou qu'il ne juge pas un homosexuel qui «cherche le Seigneur et a de la bonne volonté », ils ressentent de la confusion, de la colère, du ressentiment, et de la peur.

Certains ont abandonné le Pape François. D'autres disent qu'il est «un faux prophète» qui accompagnera l'anti-Christ à la fin des temps. D'autres n'aiment pas sa façon de s'habiller, regimbent contre ses gaffes médiatiques et certains pensent qu'elles sont toutes intentionnelles et qu'il est un jésuite très rusé qui veut saper la foi catholique. Le sensationnalisme ne fait rien de bon. Ces gens devraient prendre du recul et se rendre compte qu'ils sont (à leur manière) tout aussi sensationnels à propos du pape François que les libéraux l'étaient à propos du pape Benoît quand ils l'appelaient «Rottweiler de Dieu» ou «Ratzi nazi" et disait qu'il était un homosexuel refoulé et une ennemi des femmes (1).

Donc, si le pape François vous dérange - et soit dit en passant, j'ai eu mes propres moments de perplexité à propos de François - voici dix choses à retenir qui vous aideront à remettre les choses en perspective et à maintenir un certain équilibre.

* * *

1. La première chose à retenir est qu'il est le pape. Il ne va pas changer la doctrine catholique ou l'enseignement moral (2). Il ne peut pas et il le sait. Il peut être un «réformateur», mais il n'y a pas tellement de choses qu'il peut faire. Sa déclaration sur les femmes prêtres en est un indicateur: «La porte est fermée à l'ordination des femmes».

3. La deuxième chose à retenir est que nous avons été bénis pendant les trente dernières années avec deux papes stellaires. La plupart d'entre nous n'ont pas souvenir d'un autre type de papauté. Tant le Pape St Jean-Paul II que Benoît XVI ont été des hommes de sainteté exceptionnelle, accomplissement intellectuel, courage et perception, et ils étaient vraiment des balises. François est différent, et s'il n'est pas leur égal dans ces attributs, il a d'autres atouts. Au lieu de le critiquer pour ce qu'il n'est pas, nous devrions l'aimer pour ce qu'il est.

3. La troisième chose à retenir est que les papes vont et viennent. Chacun apporte des dons différents et des personnalités différentes à la papauté. Dieu sait ce qu'il fait, et si un pape particulier défie votre foi ... eh bien cette foi n'est pas très bonne, sauf si elle est contestée. Quel genre de foi est-ce, s'il n'y a que certitude et confiance tout le temps? Pensez à St Pierre marchant sur l'eau. Cela, c'est de la foi.

4. Votre foi est-elle en Jésus-Christ et dans l'église, ou bien est-elle dans le pape? Les catholiques devraient aimer le pape, mais ils devraient aimer Jésus davantage. Si un pape arrive et si vous trouvez difficile de l'aimer et de le comprendre, prenez courage. Vous n'étiez pas censé l'aimer tant que cela, de toute façon. Il est normal d'aimer le pape, mais quid de ceux qui accusent les catholiques d'idolâtrer le pape?

5. Découvrez l'époque dans laquelle nous vivons. Avec les médias sociaux modernes, chaque conversation peut devenir un titre mondial. C'est un pape qui aime les gens et être en relation avec eux. Voici un pape qui se connecte avec les gens, parle avec les gens, partage avec les gens et embrasse des gens. Lorsque cela se produit, il y a une multitude de risques de communication qui s'installent. Le pape dit "X" mais la personne entend "Y" et rapporte "Z". Cela ne vous est jamais arrivé? Vous avez eu une conversation et elle a été rapportée par une troisième puis quatrième partie et vous vous écriez: «Mais ce n'est pas ce que j'ai dit!» (3).
Pour le Pape, la seule façon d'éviter cela est d'être une figure de proue silencieuse dans le palais apostolique, se contentant de saluer les personnes et ne disant jamais rien, sauf dans une déclaration papale officielle. Peut-être certaines personnes pensent-elles que c'est ce que le pape devrait être, et quelques papes ont pu se contenter d'être ce genre de figure de proue. Pas François.

6. Les gens des médias gens aiment écrire des titres à sensation et ils savent que le conflit fait vendre. Les gens aiment lire les potins. Ils aiment lire les scandales. Ils aiment revenir sur les choses négatives. Si une personne aigrie peut mettre un titre négatif et choquant sur une histoire, elle le fera. C'est la vie (4).
Nous sommes stupides de croire les titres et nous sommes encore plus stupides de croire les titres qui ne font rien d'autre qu'alimenter nos tendances négatives. Exemple: un libéral qui n'aimait pas le pape Benoît aurait tourné autour de titres le dépeignant comme le Rottweiler de Dieu et Ratzi nazi. Ils étaient faux, mais la personne stupide avalait le titre, parce qu'il renforçait renforcé une tendance déjà existante chez lui. Vous n'aimez pas François? Etes-vous assez crédule pour ramasser les gros titres négatifs sur François et les croire sans écouter toute l'histoire? Croyez-vous le titre sans même lire l'article en entier? Alors, c'est en partie de votre faute (5).

7. Souvenez-vous que François vient d'Argentine. La scène ecclésiale est très différente de l'atmosphère aux Etats-Unis et en Europe. Il nous surprend à bien des égards. Il surprend les catholiques américains de la droite conservatrice avec ce qui semble être des positions économiques penchant à gauche. Il surprend les catholiques libéraux avec l'accent mis sur le diable et la bataille contre les démons. Il surprend ceux du monde développé avec sa passion pour les pauvres. Cela fait partie de son don à l'église: qu'il soit un étranger et que comme tel, il surprenne et dérange. Cela ne fait-il pas partie de ce que l'Évangile doit faire? Il est censé nous rendre mal à l'aise. Il est censé nous faire revoir nos idées préconçues, notre propre vertu et nos certitudes. N'est-ce pas ce que Jésus a fait pour l'establishment religieux? Bien sûr, par moments, c'est angoissant. Alors attachez vos ceintures de sécurité.

8. N'oubliez pas que vous n'avez pas à accorder une attention sérieuse à chaque mot qui tombe de la bouche du pape. Il n'est pas une sorte d'oracle divin, et plus il parle de façon informelle aux gens, plus il est susceptible d'être mal compris, de faire des gaffes et d'être mal rapporté. Il est normal de hausser les épaules et de le laisser continuer à être pape et pour vous de continuer votre vie catholique de prière, d'adoration, d'étude, de service et de poursuite de la sainteté. Donc, soyez un bon catholique et ne vous inquiétez pas au sujet du pape. Même si il est un monstre corrompu (et nous avons eu quelques papes comme cela) l'église continue. Les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle, ni le pape étrange qui ne correspond pas à votre idéal.

9. L'Eglise catholique est universelle. C'est une très grande famille. Tout, ou tout le monde, ne sera pas à votre goût. En parlant de goût - quelle part de votre malaise avec le pape François est tout simplement une question de goût? Avez-vous «fait vos devoirs», lu ce qu'il a vraiment dit, regardé ce qu'il a vraiment fait? A-t-il une fois contredit l'enseignement de l'Eglise officielle? Y a-t-il la moindre hérésie? Non (6).
Peut-être que vous n'aimez pas le pape François et peut-être que vous pensez qu'il est vraiment un pape nul. Peut-être que vous pensez qu'il pourrait s'y prendre mieux avec les médias et peut-être que vous vous inquiétez au sujet de certaines de ses opinions. Alors, bienvenue dans le mystère confus qu'est l'Église catholique. Si vous voulez une église à votre goût je suppose qu'il vaudrait mieux que vous rejoignez une secte parce que l'Eglise catholique ne sera jamais à 100% comme on l'aimerait. Quelqu'un m'a demandé après que je sois devenu catholique si «j'aimais l'Eglise catholique». J'ai dit: «Non, Je n'ai pas rejoint l'Eglise catholique parce que je l'aime. Si je rejoignais une église que j'aime, je serais encore anglican. Je l'ai rejointe parce que c'est la vraie église».

10. Rappelez-vous, où d'autre iriez-vous? Une secte protestante? Les lefebvristes? Les orthodoxes de l'Est? Commencer votre propre église dans un garage? Par ailleurs, à quoi bon vous énerver sur le pape? Allez-vous en élire un nouveau? Vous en faites toute une montagne, et pour quoi? Soyez en paix. Priez à ce sujet. Impliquez-vous davantage dans l'annonce de l'Evangile avec joie. Retroussez vos manches, mettez-vous au travail dans le service des pauvres, la construction de votre paroisse, le partage de votre foi et soyez un catholique vivant dans l'Esprit et plein d'optimisme, de foi et de la joie du Christ. Si le pape actuel éprouve votre foi et votre patience, alors faites-en l'offrande. Il y a une chance d'avoir une foi plus forte dans le Christ et de devenir un peu plus patient.

* * *

Notes (et objections)

(1) La comparaison avec Benoît XVI n'est pas pertinente, et je la rejette fermement. Les calomnies (pesantes et grossièrement diffamatoires) contre lui n'étaient pas dûes à des propos qu'il avait tenus, mais uniquement à la méchanceté de ses ennemis. On n'a jamais pu penser qu'avec Benoît XVI, le dépôt de la foi n'était pas en sûreté. Ses moindres propos étaient ciselés, millimétrés. Dire que François est un jésuite rusé qui cherche à saper la foi catholique, c'est une opinion; dire que Benoît est un nazi et un homosexuel refoulé, c'est une attaque ad hominem (ce que personne ne se permet avec François) qui relève de la diffamation la plus grave et qui, s'agissant d'autres personnes, se terminerait devant les tribunaux.
Les deux n'appartiennent absolument pas au même registre.
Par ailleurs, j'en reviens à ce que je disais ici: renvoyer dos à dos les progressistes, qui insultaient Benoît XVI hier, et les conservateurs qui critiquent François aujourd'hui, c'est faire abstraction de la Vérité: François enseigne-t-il la Vérité? Et Benoît XVI? Les réponses à ces questions ne dépendent pas de nous.

(2) C'est justement ce dont certains doutent, et plusieurs propos du Pape laissent effectivement planer le doute

(3) Mais avec toutes les occasions qui lui sont offertes, le pape n’a jamais démenti.

(4) Justement, le Père Longenecker feint d’ignorer que, si les médias à manchettes ne se sont pas privés de faire des gros titres négatifs avec Benoît XVI (ils n’ont en réalité fait que cela !), ils ne font rien de tel avec François, qu’ils présentent de façon extrêmement flatteuse : il suffit de voir les multiples "unes" le sacrant "homme de l’année".

(5) Le Père Longenecker semble ignorer que les critiques contre le Pape émanent précisément des gens qui ne se contentent pas de lire les titres, mais la totalité des articles, et même retournent souvent "à la source". Ceux qui lisent seulement les titres le trouvent à une écrasante majorité "épatant"!! (cf. Comment est perçu le Pape François)

(6) On en revient au (2)

* * *

>>> Haut de page













  © benoit-et-moi, tous droits réservés