Benoit-et-moi 2017
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Des camps de concentration en Italie? (suite)

Une courageuse prise de position de Mgr Negri, contre - mais pas seulement! - ces catholiques de gauche qui s'érigent en défenseur du Pape (6/5/2017)

>>> Cf.
Des camps de concentration en Italie (François)?

L'archevêque - sur le départ - de Ferrara, mal vu du Prince, et désormais spécialement dans le collimateur du Vatican pour ses déclarations iconoclastes à propos de la renonciation de Benoît XVI, ne s'en prend pas directement au Pape, évidemment.
Mais venant d'un ecclésiastique qui a occupé une position importante dans la hiérarchie et surtout réputé proche de Benoît XVI - au moins de sa pensée -, ses propos (tenus dans une lettre adressée au directeur de la Bussola, publiée hier) résonnent comme une critique à peine voilée adressée à ce dernier, et peuvent même apparaître comme une petite bombe. Et quand il réclame de la "clarté", bien que ce soit sur un autre sujet, on ne peut pas ne pas penser à Amoris Laetitia.
Sans doute sa retraite prochaine lui donne-t-elle une liberté nouvelle pour s'exprimer avec la parrêsia que François appelle de ses voeux en public - mais accueille avec tellement de réticence dans les faits....

Comme ils ont cléricaux (*), ces catholiques de gauches ("catho-communistes")

Luigi Negri
04/05/2017
www.lanuovabq.it
Ma traduction

* * *

Je n'aurais jamais pensé qu'arrivé presque à la fin de mon service épiscopal, je devrais intervenir pour défendre face à des hommes politiques "catholiques" les droit inexorables et infranchissables de l'Etat. Nous sommes confrontés à des hommes politiques plus ou moins catholiques qui semblent ignorer les droits et les compétences de l'État.

Je prends un exemple concret: le Saint-Père François est intervenu à plusieurs reprises pour dénoncer le fait que même en Italie, dans certains lieux pour l'accueil des migrants, il se crée une situation similaire à celle des camps de concentration. Une accusation grave pour laquelle il n'y a que deux possibilités: soit cette dénonciation faite de façon répétée a un fondement, et alors des hommes d'Etat catholiques auraient dû faire leur cette dénonciation, remercier le Saint-Père de l'avoir faite et mis en œuvre les mesures pour remédier à cette situation; ou bien, comme je suis porté à le croire, les choses ne se présentent pas ainsi, et dans ce cas, il fallait rejeter fermement ces accusations. A la place, silence.

La défense des compétences de l'État est une responsabilité inexorable de ceux qui servent l'Etat, on ne peut pas garder le silence. Or, je crois qu'il est essentiel que les hommes politiques catholiques témoignent ouvertement leur attachement à l'Etat, leur défense des compétences infranchissables que l'Etat a envers tous, y compris les autorités religieuses.

Je suis assez vieux pour me souvenir de l'extraordinaire intervention qu'Alcide De Gasperi adressa au pape Pio XII, et nous parlons d'un pape à l'immense culture théologique et d'une autorité pastorale et culturelle incontestée et incontestable: elle eut lieu quand - selon De Gasperi - le Pape outrepassa ses fonctions en prétendant donner des indications strictement partisanes pour la gestion de la ville de Rome. Mais nous ne pouvons pas oublier que la même défense de l'État laïc a été faite par d'autres personnalités du monde politique, catholique et non.

Je crois qu'il est très important qu'il y ait la clarté de tous les côtés et surtout que ceux qui ont la responsabilité de l'Etat assument cette responsabilité à fond. La clarté est nécessaire: la clarté des devoirs et des fonctions, des limites et des responsabilités. Sans cette clarté tout est confusion.

NDT


(*) La première traduction du mot italien clericale est évidemment notre "clérical". Mais une recherche dans le Treccani, le dictionnaire de référence de la langue italienne, précise mieux le sens dans lequel Mgr Negri emploie ce mot ici, différent de celui qu'on lui donne chez nous.
Voici ce que je trouve:

Clericale: appartenant à la formation des laïcs catholiques qui, après la proclamation du Royaume d'Italie (1861) et après l'occupation de Rome, soutinrent activement le Saint-Siège dans la politique de protestation contre l'Etat italien, politique qui ne prit fin qu'en 1919, avec l'autorisation donnée par Benoît XV aux catholiques d'entrer dans le Parti Populaire Italien.
Plus généralement (utilisé surtout sur un ton polémique par les adversaires, tandis que les partisans de cette politique parlent de catholiques, ou de chrétiens), le terme indique ceux qui défendent une participation déterminante du clergé et du laïcat catholiques à la vie politique et au gouvernement de l'état, avec un programme inspiré des principes et des exigences de l'autorité ecclésiastique.

Il est intéressant de noter que Paolo Gentiloni, l'actuel premier ministre italien, membre du Partito Democrato (= socialistes italiens, donc les fameux "catho-communistes") a eu une éducation catholique. Issu d'une famille noble, il compte parmi ses ancêtres un certain Comte Vincenzo Ottorino Gentiloni, l'un des promoteurs du pacte homonyme de 1913 par lequel les catholiques commencèrent à participer à la vie politique italienne.