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La voix du Pape


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Congrès ecclésial du diocèse de Rome

Le Saint-Père aborde plusieurs thème importants: notion de Peuple de Dieu, interprétation du Concile, dignité des célébrations liturgiques, place des laïcs (29/5/2009)

Ma traduction. (texte en italien: Vatican)

OUVERTURE DE LA RENCONTRE ECCLESIALE DU DIOCÈSE DE ROME
26 Mars 2009, Saint-Jean de Latran

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(...)

Voulant transmettre la doctrine pure et complète sur l'Église, mûrie durant deux mille ans, le Concile Vatican II en a donné « une définition plus méditée», illustrant d'abord sa nature mystérique, c'est-à-dire « de réalité imprégnée de présence divine, et donc toujours susceptible d'explorations nouvelles et plus profondes » (Paul VI, Discours d'ouverture de la seconde session, 29 septembre 1963). Eh bien, l'Église, qui a des origines dans le Dieu trinitaire, est un mystère de communion. Comme communion, l'Église n'est pas seulement une réalité spirituelle, mais vit dans l'histoire, pour ainsi dire, en chair et os. Le Concile Vatican II la décrit « comme sacrement, marque et moyen de l'intime union avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain ». (Lumen gentium, 1). Et l'essence du sacrement est justement que dans le visible, on touche l'invisible, et que le visible que l'on peut toucher ouvre la porte à Dieu lui-même. L'Église, nous l'avons dit, est une communion, une communion de personnes qui, par l'action de l'Esprit Saint, forment le Peuple de Dieu, qui est en même temps le Corps du Christ.
Réfléchissons un peu sur ces deux mots-clés. Le concept « peuple de Dieu » est né et s'est développé dans l'Ancien Testament : pour entrer dans la réalité de l'histoire humaine, Dieu a élu un peuple déterminé, le peuple d'Israël, afin qu'il soit son peuple. L'intention de ce choix particulier est d'arriver, à partir de peu, à beaucoup, et de beaucoup à tous. En d'autres termes, l'intention de l'élection particulière est l'universalité. Par l'intermédiaire de ce peuple, Dieu entre réellement de manière concrète dans l'histoire. Et cette ouverture à l'universalité s'est réalisée dans la Croix et dans la Résurrection du Christ. Dans la croix, le Christ, comme le dit Saint Paul, a abattu le mur de séparation. En nous donnant son Corps, Il nous réunit dans son Corps pour faire de nous une seule chose. Dans la communion du « Corps du Christ » nous devenons tous un seul peuple, le Peuple de Dieu, où - pour citer à nouveau Saint Paul - tous sont une seule chose et il n'y a plus de distinction, de différence, entre grecs et juifs, circoncis et incirconcis, barbares, scythes, esclaves, juifs, mais le Christ est tout dans tous. Il a abattu le mur de la distinction de peuples, de races, de cultures : tous nous sommes unis dans le Christ. Ainsi nous voyons que les deux concepts - « le peuple de Dieu » et le « Corps de Christ » - se complètent et forment ensemble le concept néotestamentaire d'Église. Et pendant que « le peuple de Dieu » exprime la continuité de l'histoire de l'Église, « le Corps du Christ » exprime l'universalité inaugurée dans la croix et dans la Résurrection du Seigneur. Pour nous chrétiens, donc, « le Corps du Christ » n'est pas seulement une image, mais un vrai concept, parce que le Christ nous fait le don de son Corps réel, pas seulement d'une image. Ressuscité, le Christ nous unit tous dans le Sacrement pour faire de nous un unique corps. Donc les concepts « peuple de Dieu » et « Corps du Christ » se complètent : dans le Christ nous devenons réellement Peuple de Dieu. Et « peuple de Dieu » signifie donc « tous » : du Pape jusqu'au dernier enfant baptisé. [La première Prière eucharistique, connue sous le nom Canon romain, écrite au IVème siècle, distingue entre serviteurs – "nous tes serviteurs" - et "plebs tua sancta"; donc, si on veut faire la distinction, on parle de serviteurs et de plebs sancta, alors que le terme "Peuple" exprime l’ensemble, dans leur « être » l’Eglise].

Au lendemain du Concile, cette doctrine ecclésiologique a trouvé un large accueil, et grâce à Dieu beaucoup de bons fruits ont mûri dans la communauté chrétienne. Nous devons cependant aussi rappeler que la réception de cette doctrine dans la pratique, et l'assimilation qui s'en est suivie dans le tissu de la conscience ecclésiale, ne se sont pas toujours et partout produites sans difficulté et selon une juste interprétation. Comme j'ai eu l'occasion de le préciser dans le discours à la Curie Romaine du 22 décembre 2005, un courant d'interprétation, en appelant à un présumé « esprit du Concile », a entendu établir une discontinuité et même une opposition entre l'Église d'avant et l'Église d'après le Concile, franchissant parfois les frontières objectivement existantes entre le ministère hiérarchique et les responsabilités des laïques dans l'Église. La notion de « peuple de Dieu », en particulier, a été interprétée par certains selon une vision purement sociologique, avec une coupe presque exclusivement horizontale, qui excluait la référence verticale à Dieu. Une position, en totale opposition avec la lettre et avec l'esprit du Concile, lequel n'a pas voulu une rupture, une autre Église, mais un vrai et profond renouvellement, dans la continuité de l'unique sujet Église, qui croît dans le temps et se développe, restant cependant toujours identique, unique sujet du Peuple de Dieu en pèlerinage.

En second lieu, on doit reconnaître que le réveil d'énergies spirituelles et pastorales au cours de ces années n'a pas toujours produit la croissance et le développement désirés. On doit en effet constater dans certaines communautés ecclésiales qu'à une période de ferveur et d'initiatives, ont succédé un temps d'affaiblissement de l'engagement, une situation de fatigue, parfois presque de stagnation, et même de résistance et de contradiction entre la doctrine conciliaire et les différents concepts formulés au nom du Concile, mais en réalité opposés à son esprit et à sa lettre.
Pour cette raison aussi, l'assemblée ordinaire du Synode des Évêques en 1987 a été consacrée au thème de la vocation et de la mission des laïques dans l'Église et dans le monde. Ce fait nous dit que les pages lumineuses dédiées par le Concile au laïcat n'ont pas encore été suffisamment traduites et réalisées dans la conscience des catholiques et dans la pratique pastorale. D'une part, il existe encore une tendance à identifier unilatéralement l'Église avec la hiérarchie, en oubliant la responsabilité commune, la mission commune du Peuple de Dieu, que nous formons tous dans le Christ. De l'autre côté persiste aussi la tendance à concevoir le Peuple de Dieu, comme je l'ai déjà dit, selon une idée purement sociologique ou politique, en oubliant la nouveauté et la spécificité de ce peuple qui ne devient peuple que dans la communion avec le Christ.

Chers frères et soeurs, c'est le moment de se demander : où en est notre Diocèse de Rome ? Dans quelle mesure est reconnue et favorisée la co-responsabilité pastorale de tous, particulièrement des laïques ? Dans les siècles passés, grâce au témoignage généreux de nombreux baptisé qui ont donné leur vie pour éduquer à la foi les nouvelles générations, pour soigner les malades et secourir les pauvres, la communauté chrétienne a annoncé l'Évangile aux habitants de Rome. Cette même mission est confiée aujourd'hui à nous, dans une situation différente, dans une ville où un nombre non négligeable de baptisés ont perdu l'Église et où ceux qui ne sont pas chrétiens ne connaissent pas la beauté de notre foi.
Le Synode Diocésain, voulu par mon bien-aimé prédécesseur Jean Paul II, a été un effectif "receptio" de la doctrine conciliaire, et le « Livre du Synode » a engagé le Diocèse à devenir toujours plus Église vivante et active au coeur de la ville, à travers l'action coordonnée et responsable de toutes ses composantes. La « Mission citadine », qui en est résultée, en préparation du Grand Jubilée de 2000, a permis à notre communauté ecclésiale de prendre conscience du fait que le mandat d'évangéliser ne concerne pas seulement certains mais tous les baptisés. Ce fut une salutaire expérience qui a contribué à faire mûrir dans les paroisses, dans les communautés religieuses, dans les associations et dans les mouvements la conscience d'appartenir à l'unique peuple de Dieu, que - selon les mots de l'apôtre Pierre - « Dieu s'est acquis afin qu'il proclame Ses oeuvres merveilleuses » (1 Pierre 2.9). Et ce soir, de cela, nous voulons rendre grâce.
Toutefois, beaucoup de chemin reste encore à parcourir. Trop de baptisés ne se sentent pas intégrés à la communauté ecclésiale et vivent en marge d'elle, ne s'adressant aux paroisses que dans quelques circonstances pour recevoir des services religieux. Rares aussi sont les laïques, par rapport au nombre d'habitants de chaque paroisse qui, tout en se professant catholiques, sont prêts à se rendre disponibles pour travailler dans les différents domaines apostoliques. Certes, les difficultés d'ordre culturel et social ne manquent pas, mais, fidèles au mandat du Seigneur, nous ne pouvons pas nous résigner à la seule conservation de l'acquis. Confiants dans la grâce de l'Esprit, que le Christ ressuscité nous a assurée, nous devons reprendre le chemin avec un entrain renouvelé.
Quelles voies pouvons-nous parcourir ? Il faut en premier lieu renouveler l'effort pour une formation plus attentive et ponctuelle à la vision de l'Église dont j'ai parlée, et cela aussi bien de la part des prêtres que des religieux et des laïques. Comprendre toujours mieux ce qu'est cette Église, ce peuple de Dieu dans le Corps de Christ. En même temps, il est nécessaire d'améliorer l'organisation pastorale, et aussi, dans le respect des vocations et des rôles des personnes consacrées et des laïques, de promouvoir graduellement la co-responsabilité de l'ensemble de tous les membres du Peuple de Dieu. Cela exige un changement de mentalité concernant particulièrement les laïques, passant de les considérer comme des« collaborateurs » du clergé à leur reconnaître réellement comme« co-responsables » de l'être et d'agir de l'Église, favorisant la consolidation d'un laïcat mûri et engagé. Cette conscience commune de tous les baptisés d'être Église ne diminue pas la responsabilité des prêtres. Il vous revient vraiment, chers prêtres, de promouvoir la croissance spirituelle et apostolique de ceux qui sont déjà assidus et engagés dans les paroisses : ils sont le noyau de la communauté qui servira de ferment pour les autres. Afin que de telles communautés, parfois même numériquement petites, n'égarent pas leur identité et leur vigueur, il est nécessaire qu'elles soient éduquées à l'écoute priante de la Parole de Dieu, à travers la pratique de la
lectio divine, ardemment souhaitée par le récent Synode des Évêques. Nourrissons nous réellement de l'écoute, de la méditation de la Parole de Dieu. Nos communautés ne doivent pas perdre de vue qu'elles sont « Église » parce que le Christ, parole éternelle du Père, les convoque pour être son Peuple. La foi, en effet, est d'une part une relation profondément personnelle avec Dieu, mais elle possède une composante communautaire essentielle et les deux dimensions sont inséparables. Elles pourront ainsi expérimenter la beauté et la joie d'être et de se sentir Église, même les jeunes, qui sont plus exposés à l'individualisme croissant de la culture contemporaine, laquelle comporte comme conséquence inévitable l'affaiblissement des liens interpersonnels et l'affaiblissement de l'appartenance. Dans la foi en Dieu nous sommes unis dans le Corps du Christ et devenons tous unis dans le même Corps et ainsi, en croyant profondément, nous pouvons vraiment réaliser la communion entre nous et dépasser la solitude de l'individualisme.

Si c'est la parole qui convoque la Communauté, c'est l'Eucharistie qui en fait un corps : « Puisqu'il y a un seul pain - écrit Saint Paul -, nous, tout en étant beaucoup, sommes un seul corps : tous en effet nous participons de l'unique pain » (1 Cor 10.17).
L'Église donc n'est pas le résultat d'une somme d'individus, mais d'une unité parmi ceux qui se sont nourris de l'unique Parole de Dieu et de l'unique Pain de vie. La communion et l'unité de l'Église, qui naissent de l'Eucharistie, sont une réalité dont nous devons avoir toujours plus conscience, même en recevant la sainte communion, être toujours plus conscients que nous entrons en unité avec le Christ et ainsi devenons, entre nous, une seule chose. Nous devons toujours à nouveau apprendre à préserver et à défendre cette unité des rivalités, des disputes et des jalousies qui peuvent naître dans et entre les communautés ecclésiales. En particulier, je voudrais demander aux mouvements et aux communautés nées après Vatican II, qui aussi à l'intérieur de notre Diocèse sont un don précieux dont nous devons toujours remercier le Seigneur, je voudrais demander à ces mouvements, qui je le répète sont un don, de prendre toujours soin que leur itinéraires de formation mènent leurs membres à mûrir un vrai sens d'appartenance à la communauté paroissiale. Le centre de la vie de la paroisse, comme je l'ai dit, est l'Eucharistie, et particulièrement la Célébration dominicale. Si l'unité de l'Église naît de la rencontre avec le Seigneur, il n'est pas secondaire alors que l'adoration et la célébration de l'Eucharistie soient très soignées, permettant à ceux qui y participent d'expérimenter la beauté du mystère du Christ. Vu que la beauté de la liturgie « n'est pas pur esthétisme, mais modalité par laquelle la vérité de l'amour de Dieu dans le Christ nous rejoint, nous fascine et nous ravit » (Sacramentum caritatis n. 35), il est important que la Célébration eucharistique manifeste, communique, à travers les signes sacramentaux, la vie divine et révèles aux hommes et aux femmes de cette ville le vrai visage de l'Église.

La croissance spirituelle et apostolique de la communauté porte ensuite à en promouvoir l'élargissement à travers une action missionnaire convaincue. Prodiguez-vous par conséquent à redonner vie à chaque paroisse, comme aux temps de la Mission citadine, aux petits groupes ou aux centres d'écoute des fidèles qui annoncent le Christ et sa Parole, lieux où il est possible d'expérimenter la foi, d'exercer la charité, d'organiser l'espérance. Cette articulation des grandes paroisses urbaines à travers la multiplication de petites communautés permet une plus large respiration missionnaire, qui tient compte de la densité de la population, de sa physionomie sociale et culturelle, souvent considérablement diversifiée. Il serait important que cette méthode pastorale trouve une application efficace aussi dans les lieux de travail, aujourd'hui à évangéliser, avec une pastorale d'environnement bien pensée, puisqu'en raison de la mobilité sociale, la population y passe une grande partie de la journée.

Enfin, on ne doit pas oublier le témoignage de la charité, qui unit les coeurs et ouvre à l'appartenance ecclésiale. À la question comment s'explique le succès du Christianisme des premiers siècles, l'ascension d'une présumée secte juive face à la religion de l'Empire, les historiens répondent que c'est essentiellement l'expérience de la charité des chrétiens qui a convaincu le monde. Vivre la charité est la forme primaire de la mission. La Parole annoncée et vécue devient crédible si elle s'incarne dans des comportements de solidarité, de partage, dans des gestes qui montrent la face du Christ comme le vrai Ami de l'homme. Que le témoignage silencieux et quotidien de la charité, promue par les paroisses grâce à l'engagement de nombreux fidèles laïques, continue à s'étendre toujours plus, afin que celui qui vit dans la souffrance se sente proche de l'Église et expérimente l'amour du Père, riche de miséricorde. Soyez donc de « bons samaritains » prêts à soigner les blessures matérielles et spirituelles de vos frères. Les diacres, conformés par l'ordination comme serviteurs du Christ [conformati con l'ordinazione a Cristo servo], pourront accomplir un service utile en promouvant une attention renouvelée vers les anciennes et nouvelles formes de pauvreté. Je pense en outre aux jeunes : très chers, je vous invite à mettre au service du Christ et de l'Évangile votre enthousiasme et votre créativité, vous faisant les apôtres de vos contemporains, disposés à répondre généreusement au Seigneur, s'il vous appelle à le suivre de plus près, dans le sacerdoce ou dans la vie consacrée.

Chers frères et soeurs, le futur du christianisme et de l'Église à Rome dépend aussi de l'engagement et du témoignage de chacun de nous. J'invoque pour cela l'intercession maternelle de la Vierge Marie, vénérée depuis des siècles dans la Basilique de Sainte Marie Majeure comme Salus populi romani. Comme elle le fit avec les Apôtres au Cénacle, en attendant la Pentecôte, qu'elle nous accompagne aussi et nous encourage à regarder demain avec confiance.

Saint Benoît, l'Europe, son patrimoine spirituel La voix du Pape