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Quand l'Occident sacrifie les chrétiens

Deux très remarquables articles: un en français ("Le Post"), et un en italien, d'Aldo Maria Valli, le vaticaniste de RAI 1 (5/1/2011)

Je vais me permettre de citer un exceptionnel article en français, tout en encourageant mes lecteurs à se rendre sur le site.
(cliquez sur l'image).


Pourquoi ce silence de l'Occident face à un Orient qui persécute les chrétiens ?
01/01/2011
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Aucune religion, aucune communauté n’est aujourd’hui plus persécutée que celle des chrétiens. Pourquoi alors ce silence en Occident ?
Sommes-nous devenus si étrangers à nous-mêmes que nous puissions contempler sans broncher ce déchaînement de violence ? ou si aveugles ou si lâches que nous espérions acheter la paix avec le monde musulman au prix du sacrifice de la liberté religieuse ? Comme si on pouvait construire nulle part la paix sur les décombres de la liberté…
Tout d’abord, la persécution des chrétiens ne se limite pas au Moyen-Orient : au Viêt­nam, par exemple, elle est manifeste, et on n’en parle pour ainsi dire jamais.
Aujourd’hui, dans le monde, sur cent personnes qui meurent pour leur foi, soixante-quinze sont des chrétiens. Parmi eux, les chrétiens d’Orient, là même où a vécu le Christ, paient le tribut le plus lourd. Victimes d’attentats comme les coptes d’Égypte, contraints de s’exiler comme la communauté chaldéenne de Turquie, obligés de fuir leur pays comme le tiers des chrétiens d’Irak…
On a mis beaucoup de temps à s’émouvoir de leur sort , on a réagi avec des années de retard. Comme si la dénonciation de l’antisémitisme ou de l’islamophobie avait fait passer les chrétiens à la trappe. On est en train de sortir un peu de ce déni de réalité ; le succès du film "Des hommes et des dieux" a peut-être contribué à cette prise de conscience.

Rappelons d’abord à ceux qui voudraient ignorer l’Histoire, que les chrétiens ne sont pas en Orient des “intrus”, mais qu’ils sont fondés à vouloir demeurer sur ces terres puisqu’ils en sont parmi les plus anciens habitants.
Ajoutons qu’ils sont un facteur essentiel de diversité dans des régions de plus en plus islamisées et qu’ils jouent à ce titre un rôle spécifique. Un Orient vidé de ses chrétiens, victimes d’une “épuration religieuse”, comme il y a eu par le passé des “épurations ethniques”, serait historiquement très étrange et culturellement très inquiétant.
Or leur survie, puisque c’est de cela qu’il s’agit, est indispensable pour tous les acteurs concernés.
Tout d’abord, si leur terre (ils y sont depuis deux mille ans) leur est enlevée, combien de temps pourront-ils conserver ce qui fait leur spécificité, qui est une richesse pour eux mais aussi pour leurs concitoyens et pour l’Église tout entière ? Car la disparition de son poumon oriental, serait une perte, d’autant plus importante que ses racines spirituelles sont là-bas !
Ensuite, leurs concitoyens justement, majoritairement musulmans : même si les extrémistes rêvent à voix haute de se débarrasser des chrétiens, les musulmans seront-ils plus heureux pour autant ? Cela signera la fin de toute ouverture et le rejet de l’altérité, qui est pourtant présente au milieu d’eux, ne serait-ce qu’entre sunnites et chiites.
Puis, il y a les musulmans en Occident. Croient-ils qu’ils auraient quelque chose à gagner dans cette disparition ? S’ils n’ont pas réussi à vivre avec les chrétiens en Orient, avec qui ils partageaient leur existence depuis quatorze siècles, comment réussiraient-ils dans ces nouvelles contrées occidentales où leur récente apparition ne se fait pas sans douleur ?
Enfin, il y a la masse des Européens “sans religion” qui pourraient croire que ce problème n’est pas le leur. Et pourtant ! Sans paix entre le christianisme et l’islam, il n’y aura pas de paix du tout, et, sans liberté religieuse, il n’y aura pas de liberté non plus.

Quelle solution l'Occident peut-il trouver à ce problème ?

Cela est hélas très délicat, car il y a des situations diverses selon les pays. Tout d'abord l’Occident doit affirmer le droit des chrétiens d’Orient à pratiquer librement leur culte, mais une intervention brutale aggraverait encore le sort de ces chrétiens en accréditant l’idée fausse qu’ils sont en Orient les représentants de l’Occident.
Les moyens qui nous restent sont ceux du droit et de l’information. Il y a une bataille médiatique à mener, les journalistes ont un devoir de vigilance et d’expression. Ils doivent sans cesse rappeler que les chrétiens d'Orient existent et qu’ils sont menacés, et qu’ils risquent leur vie simplement en disant qu’ils sont chrétiens et en manifestant leur foi.
Les gouvernements occidentaux ont été, sur ce sujet, très pusillanimes. Mais c’est à nous de les dénoncer, c’est à nous de crier plus fort. Je pense par exemple au silence un peu gêné qui accompagne le durcissement antichrétien en Algérie, alors que ces persécutions, si elles avaient touché n’importe quelle autre confession, auraient suscité un tollé.
Mais pour les chrétiens, on a fait profil bas. La réticence à reconnaître l’héritage chrétien de l’Europe se combine là malheureusement avec une certaine prudence diplomatique. Il y a des impératifs de raison d’État qui jouent dans cette timidité.
Faut-il que les gouvernements occidentaux entament une démarche collective ? Il me semble que l’Onu peut leurs offrir une tribune. C’est dans cette enceinte qu’il faudrait aborder cette question. Mais la nervosité de l’islam est telle qu’il vaut mieux commencer par des échanges bilatéraux. On pourrait envisager d’obtenir pour les chrétiens, dans les pays concernés, un statut comparable à celui des maronites au Liban.
Mais nous individuellement que pouvons nous faire ? Il faut expliquer sans relâche ce que sont les chrétiens d’Orient, que le christianisme n’est pas un privilège européen. Je pense que beaucoup de gens ne savent pas que les chrétiens d’Éthiopie ont été christianisés avant nous, au IVe siècle.

Maintenant que la dictature communiste a été renversée et que la pression s’est relâchée sur eux, on assiste là-bas à un phénomène stupéfiant de retour à la foi. C’est la face lumineuse de la persécution ou du danger : c’est que ces chrétientés-là sont plus vivantes, plus actives, plus ferventes que celles de notre pays. Au Viêtnam, par exemple, quand on demande au directeur du séminaire d’Hanoi quel est son principal problème en dehors des persécutions, il répond que c’est le manque de place pour tous les candidats à la prêtrise !
Nous devons surtout travailler à construire, entre gens de bonne volonté et à l’encontre de la violence, les conditions d’un “vivre ensemble” entre chrétiens et musulmans. Si la preuve malheureuse était faite d’une impossibilité de la coexistence pacifique, cela aurait des répercussions désastreuses y compris dans notre pays.

Le silence des gouvernements Occidentaux, allié celui de la presse et de nous-mêmes chrétiens, athés et agnostiques font qu'il y a un déséquilibre flagrant entre ce que l’on attend de l’Occident démocratique et ce que l’on tolère de régimes orientaux qui ne le sont pas…

 

Aldo Maria Valli, dans Europa

Quand l'Occident sacrifie les chrétiens
Aldo Maria Valli
(Source: http://www.europaquotidiano.it/.. )
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Pourquoi face aux persécution anti-chrétiennes, le monde occidental réagit-il de manière distraite, presque avec suffisance? Pourquoi chez nous, quand une bombe tue des dizaines de chrétiens dans une église, en Egypte comme en Irak, donnons-nous la nouvelle, reccueillons-nous quelques commentaires, mais ne naît-il aucun mouvement d'opinion, n'y a-t-il aucune manifestation, ne prenons-nous aucune initiative, et en fin de compte nous hâtons-nous de tout transférer aux archives, en attendant le prochain attentat? Pourquoi, quand une paysanne pakistanaise de foi chrétienne (ndt: Asia Bibi), simplement pour avoir parlé avec des femmes musulmanes, est condamnée à la pendaison pour blasphème, et quand un gouverneur qui avait demandé sa grâce est assassiné, ici, chez nous, ces faits, au-delà des protestations de certains groupes ne causent-ils aucune véritable colère, mais sont-ils acceptés presque passivement?

La réponse n'est pas facile et peut être articulée à différents niveaux.
Le premier aspect concerne la foi chrétienne et l'enseignement même de l'Evangile. Quand Jésus (comme dans Luc 21, 12-19) met en garde les disciples qu'"ils poseront les mains sur vous et vous persécuteront" et que "vous serez haïs de tous à cause de mon nom", non seulement il inscrit dans l'ADN des chrétiens la conscience de la persécution, mais il transmet l'idée que la persécution est, après tout, la preuve de la vraie foi et que si on est vraiment chrétiens, témoins cohérents de l'Evangile, on doit payer un prix dans ce monde où le mysterium iniquitatis, le mystère du mal et du péché, est toujours actif.
En outre, Jésus, se présentant comme agneau sacrificiel qui devient victime pour le salut des hommes, ne se rebelle pas. Si le monde dit mors tua vita mea, le chrétien, comme le Christ dit mors mea vita tua. Ce sont là des éléments fondateurs de la foi chrétienne qui, aujourd'hui encore, continuent à avoir un poids. Ils en ont un, pour les communautés victimes des persécutions, mais aussi dans notre monde occidental, qui bien que largement sécularisé, est tellement habitué à identifier le vrai chrétien avec le persécuté et l'agneau sacrificiel qu'il n'éprouve pas le besoin d'une dénonciation.

Un deuxième aspect concerne la culpabilité sous-jacente dans la conscience de l'Occident chrétien envers les pays du Sud autrefois objets d'une période de domination coloniale .
Dans de nombreux cas ce sont des pays musulmans, où, en raison de la résurgence islamiste, les minorités chrétiennes sont soumises à des discriminations évidentes, mais l'Occident se fait timide dans la dénonciation et détourne souvent le regard ailleurs parce que, au fond de lui, il pense avoir commis autrefois envers ces pays quelque chose de moralement répréhensible et condamnable qui empêche aujourd'hui une analyse claire des événements et la réponse en conséquence.
Et on ne peut certes pas dire que, sur ce plan, la néfaste doctrine de Bush de la guerre préventive, de l'initiative unilatérale et de la puissance militaire, a contribué à atténuer certains complexes. Au contraire.
Une fois ces éléments qui touchent à la dimension religieuse, culturelle et psycho-politique dûment mis en lumière, il faut malgré tout dénoncer le comportement des gouvernements occidentaux, des organisations internationales et, surtout, de l'Europe. Une indifférence et un manque de courage qui méritent à leur tour une explication.
On dit souvent que le silence et l'amnésie occidentales sont le fruit d'un politiquement correct menée jusqu'à ses conséquences extrêmes, raison pour laquelle la suspension des jugements moraux et politiques, quand la religion est en jeu, est un dogme intouchable, à faire pâlir les dogmes catholiques .

Mais ce n'est pas vrai.
En réalité, ce que nous voyons, c'est un politiquement correct à sens unique. On suspend son jugement et on détourne le regard devant les méfaits "estampillés" islam, mais on est prompt à se déchaîner contre les catholiques et en particulier contre le Pontife romain lorsqu'il a dit ou fait quelque chose qui heurte le sentiment laïque .
Il faut être clairs: des formes de christianophobie (ou, plutôt, de cathophobie) sont également à l'œuvre chez nous. Ici , il n'y a pas de bombes qui explosent (??) et on n'enlève pas les gens, mais souvent, ce sont les idées qui finissent dans le collimateur de l'intolérance. C'est aussi dans le cadre de ce type de discrimination que nous devrions voir le silence et l'absence de dénonciation.
A juste titre, le pape a noté que la laïcité et le fondamentalisme sont deux expressions opposées mais convergentes de la même attitude: le refus de la liberté religieuse et, par conséquent, de la liberté "tout court" (en français dans le texte).

© Copyright Europa 5 Janvier 2011, ma traduction.

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