Articles Images La voix du Pape Lecture, DVD Visiteurs Index Sites reliés Recherche
Page d'accueil Articles

Articles


Le parvis des gentils, à Paris Catastrophe au Japon Jésus de Nazareth L'appel des théologiens allemands Béatification de JP II Assise Crise du monde arabe, et retombées Des nouvelles du site

Les racines de la haine contre les chrétiens

Une leçon d'histoire. Après l'attentat d'Alexandrie, Vittorio Messori nous rappelle que l'histoire n'est jamais en noir et blanc - les bons contre les méchants - et que sa connaissance est le meilleur des antidotes à toute tentation d'extrêmisme. (8/1/2011)

Il avait "posté" hier un commentaire sur la Bussola, synthèse orale d'un article plus consistant écrit pour Il Coriere della Sera.
Il fait entre autre une allusion à des propos d'hostilité contre le Pape, tenus dans une interviewe du Corriere au grand Imam d'Al Azhar: celui-ci, après avoir accusé le Pape d'ingérence dans les affaires égyptiennes, et lui avoir reproché une compassion à sens unique pour les chrétiens, constatait que ce n'était pas les musulmans qui étaient agressés, mais l'ensemble du pays.

J'ai traduit le premier article - puis, intéressée, le second.
Le premier constitue une bonne approche.

Vittorio Messori, dans La Bussola Quotidiana

Chrétiens et islam, souvenons nous de l'histoire
07-01-2011
http://www.labussolaquotidiana.it/...
-------------------
Ces jours-ci, à cause des événements tragiques qui ont eu lieu à Alexandrie, j'ai repensé à la relation entre chrétiens et musulmans.
J'ai toujours essayé de suivre cet impératif: l'Eglise n'a pas besoin de nos mensonges, et, comme disait le Pape Léon XIII en ouvrant les archives du Vatican, "l'Eglise n'a pas peur de la vérité."

On doit donc rappeler , par exemple, qu'en Afrique du Nord, région dont sont venus beaucoup de pères de l'Eglise et au fond, aussi l'invention du monachisme, il y a eu des affrontements et des luttes entre groupes chrétiens, entre les disciples de l'Evangile, divisés en églises et chapelles, groupes, groupuscules et hérésies.

Il est difficile d'accuser les «méchants» musulmans de nous avoir enlevé l'Afrique Nord, parce que, particulièrement en Egypte, les différentes factions chrétiennes étaient divisées sur tout, sauf sur la haine contre la domination - chrétienne, elle aussi - de l'Empire byzantin et tous accueillirent donc avec des applaudissements et des arcs de triomphe cette poignée de cavaliers arabes et musulmans venus les conquérir. Il n'y eut pas de résistance, mais au contraire, ils furent accueillis comme des libérateurs, car ils mettaient un terme à l'époque byzantine.

Ils s'en repentirent immédiatement , mais ce fait ne peut pas nous faire oublier que la chute était due à l'absence de réaction des chrétiens eux-mêmes.
Rappelons-nous ensuite qu'historiquement, la France, "fille aînée de l'Eglise" a toujours été alliés avec les Turcs (1), et comme puissance coloniale a toujours favorisé l'islam et s'est opposée au christianisme,.

N'oublions pas non plus le cas douloureux de l'Espagne : une certaine rhétorique exalte la Reconquista espagnole, oubliant que les musulmans n'auraient jamais osé débarquer dans la péninsule ibérique, s'ils n'y avaient été appelés par les wisigoths chrétiens, en raison de leurs querelles internes. Si l'Espagne est tombé comme une poire bien mûre, c'est parce que les musulmans avaient été favorisées par les chrétiens wisigoths.

Il faudrait aussi se souvenir du rôle des Républiques maritimes (2) et de la cité catalane (Madrid), qui ont toujours entretenu des relations amicales et parfois de complicité avec les musulmans.

Maintenant que la question revient , nous devons être conscients que nous ne sommes pas autorisés à diviser le monde en bons et méchants, parce que nos ancêtres n'étaient pas, disons, toujours vigilant. Et nous devons nous en tenir aux paroles de Jésus: "La vérité vous rendra libres.". Libres aussi des préjugés et des idéologies en relisant notre histoire.

* * *

Notes du traducteur:
------------
(1) Faisant une recherche sur ce sujet, je suis tombée sur un article très documenté - à lire avec l'esprit critique nécessaire - sur le site de TF1.
Il s'agit d'une interviewe de Faruk Bilici, "historien, spécialisé dans l'histoire ottomane et notamment dans les relations entre la France et la Turquie. Il enseigne à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco)"
Faruk Bilci rappelle que l'alliance entre la France et la Turquie remonte à François 1er - pour des raisons de politique, puisque ce dernier, à la recherche une alliance militaire contre Charles Quint s'adressa alors à la seule puissance capable de rivaliser avec l'Empire germanique : l'Empire ottoman,
Attention: Le contexte de l'interviewe est celui de l'ouverture des négociations pour l'entrée de la Turquie dans l'UE, l'idéologie est donc bien présente...

(2) Repubbliche Marinare (« Républiques maritimes« ) est le nom collectif d'un certain nombre de villes-état qui se sont épanouies au Moyen-Age en Italie et en Dalmatie. Les quatre principales étaient Amalfi, Pise, Gênes et Venise (Wikipedia)

<<< Haut de page 

Vittorio Messori, dans Il Corriere

Les racines de la haine contre les chrétiens
------------------
Je pense que nous tous, y compris les chrétiens, devrions apprendre quelque chose de cet agnostique - mais pas athée - de cet anticlérical - mais respectueux de l'Evangile - que fut Benedetto Croce (ndt: 1866-1952, philosophe, historien, écrivain et homme politique italien, fondateur du Parti libéral italien). Ce grand réaliste soutenait que la connaissance de l'histoire est le meilleur antidote à tout extrémisme, à tout esprit de croisade.
L'Histoire - rappelait Croce - n'est jamais en noir et blanc, elle n'est pas la lutte des bons contre les méchants, mais c'est une scène, où les victimes et les bourreaux s'échangent les rôles dès qu'ils le peuvent. Ainsi, pour en revenir à nous, la solidarité avec les victimes, l'horreur pour la violence meurtrière à Alexandrie ont droit elles aussi à un cadre historique qui ne justifie certes pas, mais évite, les diagnostics et les pronostics erronés.

Restons donc sur les rives du Nil, en commençant à l'époque - à peu près au milieu du VIIe siècle - où arrivèrent les cavaliers d'Allah, venant des déserts d'Arabie. Ils étaient courageux et exaltés par les paroles du prophète Mahomet, mais ils étaient peu nombreux, n'avaient aucune organisation réelle, ni machines de guerre militaire. Jamais ces envahisseurs n'auraient pu vaincre l'armée de Byzance, dont l'Egypte était une possession, si les troupes chrétiennes ne s'étaient débandées avant l'attaque et si les populations n'avaient pas acclamé les envahisseurs comme des libérateurs. L'Egypte, en effet, avait très tôt accepté le christianisme avec une ferveur presque excessive. Donnant naissance aux sommets de l'ascétisme érémitique dans le désert, mais également à un essaim d'hérésies, en luttes, souvent sanglantes, entre elles. Tous les Egyptiens, cependant, étaient unis quand il s'agissait de lutter contre la dépendance de la Constantinople honnie. Le fait est que, face à la nouvelle que des Arabes avançaient contre l'Empire romain d'Orient, les troupes, composées principalement de mercenaires égyptiens, refusèrent de combattre, et en particulier à Alexandrie, on prépara même des arcs de triomphe pour les envahisseurs. Du reste, ne sont-ce pas les chrétiens qui en Espagne, ont fait appel au Croissant, à cause des dissensions internes entre les Wisigoths? Et la France, encore à Lépante, n'a-t-elle pas toujours été du côté de la Turquie?

L'enthousiasme des Egyptiens devait très vite retomber: les musulmans ne forçaient pas à la conversion (au contraire, souvent, ils essayaient de la retenir, parce que chaque converti était un "soumis" de moins à opprimer), mais leur régime impitoyable de soumission du croyant dans l'Evangile au croyant dans le Coran conduisit la majorité des baptisés à changer de foi.
Ceux qui ne voulurent pas apostasier furent appelés "coptes", déformation arabe du mot grec "égyptiens", indiquant qu'ils étaient les descendants de ceux que les Arabes avaient trouvés dans ce pays.
La résistance de ce socle de baptisés, qui après quelques siècles se stabilisèrent à une proportion similaire à celle d'aujourd'hui - environ 10% de la population - inspire de l'admiration et de la reconnaissance de la part de tous les chrétiens, et est le signe de la force de la foi, malgré l'effondrement de beaucoup.
Mais il faut dire aussi que pour tous les régimes musulmans qui se sont succédés en Égypte, les Coptes ont été en quelque sorte l'épine dorsale. En effet, leur culture supérieure à la moyenne, leur esprit d'entreprise, leur ardent désir de montrer du zèle dans les fonctions qu'ils remplissaient, signifiaient que leur présence dans la politique, le gouvernement, l'économie, était essentielle. Ainsi, les guerres soutenues contre les chrétiens - à commencer par les croisades - ont été remportées par les musulmans, grâce à l'appui des fidèles coptes orthodoxes. Ceux-ci, entre autre, n'étaient pas du tout fraternels, mais impitoyables, envers les coptes catholiques et aussi contre les autres orthodoxes, grecs et slaves, qui rejetaient le monophysisme .
Ainsi, depuis les lointains début, l'histoire de l'Egypte musulmane est un enchevêtrement - souvent même fécond et culturellement prestigieux - de complicité réciproque entre Dieu et Allah. Mais c'est aussi, malheureusement, une histoire de conflits sanglants entre chrétiens d'obédiences diverses.

En tout cas, jusqu'à une date récente, la cohabitation, cimentée par tant de siècles, n'a jamais été sérieusement mise en discussion. Qu'est-il donc arrivé, depuis quelque temps?
Je pense que le Grand Imam du Caire, Al Tayyeb, n'a pas tort - au moins sur ce point - dans l'interviewe d'hier au Corriere:
"L'attentat criminel d'Alexandrie n'est pas une attaque contre les chrétiens, mais contre l'Égypte toute entière".

En effet, tous les gouvernements de toutes les nations musulmanes sont sous le tsunami ayant eu comme détonateur l'intrusion violente du sionisme, qui a été jusqu'à mettre sa capitale à Jérusalem, la ville sainte pour les croyants presque à égalité avec la Mecque.

Colère, humiliation, sentiment d'impuissance ont donné naissance à un pan-islamisme qui entend démolir les frontières et les régimes existants pour parvenir à un bloc commun de fer, des fidèles du Coran. Une sorte de superpuissance qui peut même défier les États-Unis, parrains d'Israël. Le succès incontestable de l'opération du 11 Septembre 2001, a enflammé l'enthousiasme, montrant que la guerre victorieuse est possible. Si en Egypte, et ailleurs, on s'attaque aux chrétiens, en Irak, on tue les chiites, qui, pour le pan-islamisme, ne sont pas de vrais musulmans et ne peuvent donc pas faire partie du Grand Front. Les chrétiens doivent être mis en fuite, au même titre que tous les autres qui ne font pas partie de la Sainte Oumma.
Si ce diagnostic est le bon, il y a des «remèdes», comme ceux à la manière de Bush, qui aggravent et exaspèrent le mal.
Honneur aux chrétiens tués, mémoire sincère de leur témoignage, donc; mais proclamer des croisades contre des pays comme l'Egypte, eux aussi victimes d'un projet impérial(iste), signifierait seulement - comme le disent les Américains, désormais vaincus en Irak et en Afghanistan - ajouter d'autres victimes, et jeter de d'huile sur le feu du Coran.

<<< Haut de page 
Pourquoi Mgr Negri ne dit pas "Bonne année" Angelus du 2 janvier