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A table, avec Vittorio Messori (2)

Les évènements de la semaine écoulée sont passés en revue (20/3/2011)

-> Voir ici:
Messori passe à table

Nous avons eu déjà l'occasion de parler de cette nouvelle rubrique heddomadaire de la Bussola, où la sagesse, la sérénité, la "force tranquille" communicatives de Vittorio Messori se déploient sans aucun moralisme.
Cette semaine, toujours en réponse aux questions d'Andrea Tornielli, il aborde cinq sujets:
la catastrophe au Japon (et la responsabilité des hommes), la peur du nucléaire (et la politique énergétique des états), les manifestations autour du cent cinquantième anniversaire de l'unité italienne (je n'ai pas traduit cette partie, qui concerne plus la politique intérieure italienne), la déchristianisation de l'Italie, telle qu'elle ressort d'un énième sondage, et finalement, la satisfaction de figurer parmi les auteurs cités par le Saint-Père dans Jésus de Nazareth.
Décidément, à table avec Messori, on se régale avec des plats aussi nourrissants que savoureux.

Article ici: http://www.labussolaquotidiana.it/...

- Cher Victor, nous ne pouvons pas commencer cette nouvelle version de notre "A tavola" sans commenter par ce qui s'est passé il y a une semaine, le tremblement de terre dévastateur au Japon, le tsunami qui a suivi, qui a englouti des villes entières et tué des dizaines de milliers de personnes. Les images qui ont atteint nos écrans sont vraiment terrifiantes. Difficile de ne pas penser à notre caractère mortel. Difficile de ne pas se demander pourquoi Dieu permet tout cela ...

- Eh bien, tu sais, en voyant ces photos et en écoutant les nouvelles, Voltaire m'est venu à l'esprit. Mais oui, celui qui a profité du terrible tremblement de terre de Lisbonne en 1755, pour écrire plusieurs brochures et libelles (le plus célèbre est "Candide" ) pour se moquer de la notion chrétienne de Providence. Il fit semblant de s'en prendre à Leibniz ("tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles" ), en réalité, comme d'habitude, il en avait après l'infâme, l'Eglise catholique. Mais quelle sorte de Dieu-Amour est celui dont vous palabrez, demandait-il aux prêtres, s'il permet ensuite de telles catastrophes? Et il était facile de répliquer à ceux qui, comme le célèbre jésuite Gabriele Malagrida , affirmaient que le massacre venait comme une punition pour les péchés des habitants de Lisbonne. Peut-être que ceux de Paris ou de Londres avaient-ils moins péché? Et que dire des innocents, par définition, les enfants, qui eux aussi, ont péri par milliers? répondait ironiquement Voltaire. En réalité, c'est Jésus lui-même qui nous empêche de faire des discours à la Malagrida (entre autres, il finit sur le bûcher de l'Inquisition pour son exagération irresponsable), Jésus, donc, avec sa question, chez Luc: «Ces 18 sur qui tomba la tour de Siloé, croyez-vous qu’ils fussent plus coupables que tous les habitants qui habitent Jérusalem ? Non vous dis-je [c’est Jésus qui parle] ; mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous pareillement» — Luc 13:4-5 ".
Bien sûr, il convient de dire que ce que nous appelons un "destin tragique", en attribuant la responsabilité au Tout-Puissant, est en réalité la responsabilité des hommes. Lorsque des catastrophes surviennent, comme celle-ci, je ne peux m'empêcher de penser au Vésuve, l'un des volcans les plus dangereux au monde. Beaucoup plus que l'Etna: ce dernier est "effusif", c'est à dire qu'il se déverse avec des coulées de lave continues, tandis que le Vésuve est "explosif", il peut se taire pendant des décennies, voire des siècles, mais tôt ou tard la pression du gaz piégé fait exploser le couvercle qui s'est formé sur le cratère et la catastrophe est immense. Eh bien, les Napolitains, en particulier dans cette décennie, profitant de l'indifférence de ceux qui devraient assurer le contrôle, ont construit des centaines d'immeubles et de villas presque jusqu'au sommet, et entouré d'habitations pour des centaines de milliers de personnes cette espèce de bombe atomique qui explosera tôt ou tard. ... Permets-moi alors de poser une question, sachant que la charité chrétienne n'a rien à voir l'angélisme de ceux qui sont prêts à tout tolérer: ne sera-t-il pas difficile d'être solidaires des Napolitains, de pleurer sur leur sort quand (et cela arrivera, c'est une loi physique), la catastrophe se produira? Certes, celui qui a construit une maison avec vue panoramique sur le cratère, au mépris non seulement de toutes les lois, mais aussi de tout bon sens, ne peut pas s'insurger contre le ciel qui permet de telles choses ...

- D'accord, il y a aussi des responsabilités de l'homme. Mais même avec toutes ces responsabilités, la négligence, etc., il n'en reste pas moins de nombreux événements pour lesquels on peut en effet se demander où est la bonté du Créateur. Et ce qui s'est passé au Japon me semble un de ceux-là ...

- Vois-tu, ce n'est là qu'un aspect de ce problème du Mal auquel sont consacrées des bibliothèques entières, et donc, nous ne pouvons pas l'aborder ici. À la fin de chaque raisonnement, cependant, nous devons accepter qu'il y aura un mystère qui ne s'expliquera que dans l'au-delà. Un mystère, je crois, de vie plutôt que de mort: en effet, les tremblements de terre ne sont que les mouvements naturels de cette "chose" vivante qui est le domaine que nous habitons. Le silence est ce qui caractérise la mort, et la Terre n'est pas morte, elle est constamment en mouvement, non seulement en tournant sur elle-même et autour du soleil, mais aussi dans ses entrailles. Bien sûr: cela va au-delà de notre compréhension humaine de savoir pourquoi cette vie doit parfois apporter tant de douleur. Mais justement là, la foi doit nous apporter la certitude que, malgre tout (en français dans le texte), la Providence divine sait ce qu'elle fait.

- Cette fois, aux scènes déjà apocalyptiques du tremblement de terre et du tsunami dévastateur, se sont ajoutées les craintes au sujet des incidents qui ont eu lieu dans l'une des nombreuses centrales nucléaires au Japon. La peur grandit aussi dans notre pays. On se demande si il est bon de poursuivre sur la voie de l'énergie nucléaire. A ton avis, ces craintes sont-elles justifiées?

- La réponse doit être donnée par l'objectivité scientifique, non par nos émotions. Nous avons renoncé à l'énergie nucléaire en raison de l'émotion, avec un référendum après la catastrophe de Tchernobyl. De là, on voit que, comme toute idéologie, le «démocratisme» lui aussi devient une foi irrationnelle: la conviction que, lors d'un référendum, les masses choisiront toujours le meilleur, pour elles-mêmes et le monde. Comme tu le sais, la Constitution interdit de soumettre à un référendum les traités internationaux et les lois fiscales. Mais il faudrait y ajouter cela: l'interdiction de soumettre aussi à l'opinion populaire les questions qui requièrent des compétences techniques que nous profanes, n'avons pas. Entre autres choses, le Japon a une soixantaine de centrales nucléaires qui n'ont eu aucun problème, même avec le tremblement de terre le plus dévastateur dans l'histoire du Japon; les ennuis sont venus de l'installation la plus ancienne. Quarante ans: une énormité, m'a-t-on dit, pour de telles installations. La France a encore plus de centrales, mais en cinquante ans d'expérience, elle n'a jamais enregistré de défaillances dangereuses.
Bref, le problème de savoir si nous devons nous aussi nous engager dans un parcours nucléaire doit être soustrait au "peuple" et laissé à un conseil, non pas de sages - au sens générique - mais de véritables experts. Tu sais combien je me méfie de la catégorie des "experts", mais dans ces questions, il faut vraiment une science et une expérience qui ne sont pas le fait de tout le monde. Ce sont des questions où le "selon moi" du passant n'est vraiment pas de mise. Il n'y a pas de quoi rire, si l'on pense que les prophètes les plus fanatiques de l'antinuclaire sont le monsieur qui a commencé en tant que comédien et est devenu un maître en démagogie, ce Beppe Grillo (1), et ce vieux chanteur lui aussi démagogue (et lui aussi maître en contradictions entre le dire et le faire, entre sermons anticonsumistes et mode de vie) du nom d'Adriano Celentano. Moi, ici au contraire, je préfère entendre un ingénieur expérimenté qu'un homme de spectacle ...

....

- Vittorio, changeons totalement le sujet. "Mondo e Missione" vient de publier les résultats d'unsondage selon lequel seulement 28% des Italiens disent prendre part à la messe du dimanche. Une autre étude menée par l'Université La Sapienza, atteste que seulement 77,46% des enfants nés en Italie en 2004 se sont vus administrer le baptême, contre 89% en 1991. Cela ne te semble-t-il pas des signes inquiétants qui indiquent la progression de la sécularisation en Italie?

- Si l'on pense que, d'abord le cardinal Ratzinger, puis ensuite Benoît XVI, a souvent répété que l'Italie est une consolation pour lui, parce qu'ici, la foi et l'instition ecclésiale ont tenu bien mieux que partout ailleurs ... si nous pensons à cela, nous avons une idée de la façon dont est réduit cet «ailleurs» ... Mais, comme tu le sais, ce type de statistiques ne m'a jamais trop impressionné. D'abord, parce que Dieu sait ce qu'il y a vraiment dans le cœur de ceux qui, tout en n'étant plus «pratiquants» ont un contact avec lui, même supérieur au nôtre. Et puis, parce que l'Eglise n'est pas à nous, l'Eglise est au Christ, elle est son corps lui-même. Donc, ne nous prenons pas trop au sérieux, élaborant des plans et concevant des stratégies pour une récupération. Essayons de faire notre devoir, jusqu'au bout et, pour le reste, c'est à Lui d'y pourvoir: à nous seront demandés des comptes sur l'engagement, pas sur les résultats qui, en fait, ne dépendent que de Lui. Toi et moi, dans notre misère, nous nous donnons du mal, nous écrivons des livres et des revues d'apologétique, nous faisons des conférences, nous essayons - comme nous pouvons ... - de vivre un peu en chrétiens. Au moins dans le sens de ne pas tomber, si nous le pouvons, dans des péchés pires. C'est de notre devoir, notre vocation à laquelle nous devons obéir. Mais comme nous le savons, quoi que nous fassions - bien - , quoi que nous disions, nous n'arriverons jamais par nos efforts à convaincre certains de la vérité de l'Évangile, si Lui n'intervient pas. Dans cette perspective, il est certain que nous devrions compter moins sur l'activisme et plus sur la prière, peut-être (dans notre cas) vaudrait-il mieux faire quelques articles de moins et réciter quelques chapelets de plus ... Tu le sais, pour remédier à une crise, une baisse de consensus, un raréfaction des votes, le secrétaire d'un parti peut demander aux dirigeants de se mettre au travail, d'aller parmi les gens, d'augmenter la propagande. Mais, Dieu merci, l'Eglise n'est pas un parti. C'est un lieu où la contemplation de Marie vaut bien plus que l'activité de Marthe. Et l'Eglise n'est pas non plus une multinationale, qui doit tenir des concurrents et augmenter les ventes. La comptabilité de notre communauté n'est tenue par aucun administrateur humain, et nous ne connaissons ni l'actif ni le passif dans les livres du ciel. Dans tous les cas, nous devons décider de l'accepter: Comme on peut le voir, le christianisme, compris comme une adhésion massive à l'institution ecclésiale, est depuis longtemps hors service. Mais cela, je ne me lasserai pas de le répéter, peut nous aider à redécouvrir la vocation que Dieu lui-même voulait pour les siens: sel, levure, grain de sénevé planté dans le sol. En bref, la fameuse "petite communauté active et créative" dont le Pape a parlé et qui, parole d'Evangile, vaut plus et mieux que les statistiques apparemment triomphantes d'autrefois.

- La SEI, la maison salésienne qui est l'un de tes éditeurs, cette semaine a publié un communiqué de presse. Elle est heureuse, et cela se comprend, parce que dans son second livre sur Jésus aussi, le pape cite et recommande son (et ton) livre "Patì sotto Ponzio Pilato" (il souffrit sous Ponce Pilate). Dans le premier volume, dans le chapitre sur Barabbas, Joseph Ratzinger - Benoît XVI renvoie le lecteur à ce livre qu'il appelle "important". A présent, dans le nouveau livre, il est dit, à propos de l'expulsion des marchands de l'époque que "la thèse motivée principalement par Vittorio Messori, est juste". Qu'est-ce que cela te fait d'être nommé par le pape de cette façon?

- Eh bien, ce n'est pas une blague: Je dirais que si le pape me cite et m'approuve, c'est faute de quelque chose de mieux ... Vois-tu, c'est justement parce que je ne suis pas un universitaire et donc ne dépends pas des commentaires des collègues (dont il faut respecter les modes) que j'ai une liberté de dire les choses que n'ont même pas les professeurs des universités pontificales. Cette approbation de mon travail de divulgateur n'est pas une satisfaction pour le vaniteux, mais c'est une assurance pour le catholique. C'est-à-dire que la source la plus autorisée confirme que mon engagement n'est pas dangereux, comme certains spécialistes de la Bible et théologiens «adultes» l'ont écrit, parce que la défense de la tradition, y compris exégétique, serait aujourd'hui inacceptable et trompeuse. Le pape lui-même me confirme que c'est une voie encore praticable, et qu'à mon petit niveau, je l'ai parcourue sans déraper. Un allègement de conscience, donc, ce n'est pas rien! C'est même pour cela qu'à notre Pape bien-aimé,- ce "petit homme blanc"- comme je l'ai entendu appeler gentiment par un enfant - va, pour ce qu'elle vaut, toute ma gratitude.

Note

(1) Déjà rencontré ici: http://benoit-et-moi.fr/2009-II/... A l'époque, il était question qu'il se présente aux élections sous les couleurs de la coaltion de gauche.
Histrion médiatique italien, agitateur gauchiste, grand spécialiste de la provocation, un genre de Coluche. Son blog est, paraît-il, le plus fréquenté d'Italie, avec plus de 150 000 visites par jour!! Effectivement, le combat anti-nucléaire semble s'y tailler la part du lion, mais après cette première incursion, je ne crois pas que je vais le mettre parmi mes liens favoris

Benoît XVI à San Corbiniano Lettre à l"Archevêque de St-J. de Compostelle