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Assise: le " non " normatif des Pères de l'Eglise

Exposé prononcé lors du congrès qui s'est tenu à Rome le 1er octobre en vue de préparer la rencontre du 27 à Assise. (11/10/2011)



Le 1er octobre, un congrès s’est tenu à Rome en vue de préparer la rencontre du 27 octobre à Assise.
Carlota a déjà traduit un compte-rendu ici : Pélerins de la vérité vers Assise.
Y figurait surtout une lettre « privée » du Saint-Père, expliquant ses motivations (lire ici le commentaire de Jean Madiran: Benoît XVI et Assise III)

Le site en italien verumperegrinantes (image ci-dessus) reproduit les contributions : il semble qu’il ait été créé - ou plutôt réactivé , car il y a des archives remontant à 2002 - à l’occasion d’Assise III. Il porte en sous-titre « Pélerins vers Assise : un approfondissement sur les pas de Benoît XVI ». Les articles ont été traduits en espagnol sur le blog la Buhardilla de Jerónimo , qui titre "Le Pape appelle à la confiance et réaffirme Dominus Iesus".
Parmi eux, l’exposé d’un prêtre allemand spécialiste en patristique, actuellement professeur à la faculté de théologie de Lugano (Suisse) le Père Manfred Hauke (son site trilingue ici) qui rappelle comment les Pères de l’Eglise considéraient les « religions » païennes.

Carlota a donc traduit de l'espagnol deux textes déjà traduits de l'italien par la Buhardilla de Jerónimo.



La rencontre d’Assise et le « non » normatif des Pères de l’Église

Original en italien: ici
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Nous présentons un résumé de deux intéressantes interventions lors du récent Congrès sur la prochaine “Journée de réflexion, dialogue et prière pour la paix et la justice dans le monde”, convoquée par Benoît XVI, à l’occasion du XXVème anniversaire de la Rencontre d’Assise voulue par le Bienheureux Jean Paul II.
Dans l’un des intéressants exposés, dont nous présentons aujourd’hui le résumé, est expliquée l’authentique position des Pères de l’Église par rapport au pluralisme religieux de leur temps, et comment cela se concilie avec la journée convoquée par le Saint Père.
(texte original espagnol ici http://infocatolica.com/..)

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L’intervention d’ouverture du Congrès a été confiée au P. Serafino Lanzetta, professeur au Séminaire de Théologie de « l’Immaculée Médiatrice ». Son intéressant exposé a été centré sur la perspective de l’encyclique « Dominus Iesus » (l’unité salvatrice du Christ et de l’Église), célèbre document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi qui remonte à l’an 2000, quand le cardinal Ratzinger en était le Préfet.
Après avoir indiqué que ce document est une réponse du Magistère aux problèmes théologiques du pluralisme religieux, le Père Lanzetta en est venu à affronter quelques points particuliers importants qui émergent de Dominus Iesus

Il a mis en évidence, tout d’abord, que «dans ce panorama théologique varié, il manque un concept clair de « salut » : on le confond facilement avec de simples aspirations humaines de libération, de progrès, d’une certaine harmonie et pacification intramondaine. Pour beaucoup, le vrai dialogue interreligieux aurait atteint son but en assurant aux différents responsables religieux une coexistence pacifique dans un monde en lui-même pluriel ». Cette éventuelle « estime réciproque » dit le Père Lanzetta, « pourrait être un premier pas, mais ne suffit certainement pas à répondre à la question religieuse de « Qui est Dieu ? Comment puis-je peux rencontrer ? ».

Ensuite le Père Lanzetta a abordé le thème du Congrès à travers une considération très importante: « Fréquemment, depuis cinquante ans, on a vu se développer une équivoque: le Christianisme, comme n’importe quelle autre religion, ne peut prétendre à un caractère d’absolu, parce que personne ne peut se glorifier de posséder la vérité. La vérité est toujours au-delà de nous-mêmes. Oui, c’est certain, la vérité nous transcende toujours parce que la vérité est Dieu. Cependant, en même temps qu’elle nous transcende, elle ne se perd pas dans les tentatives pluralistes pour la rechercher. Elle demeure toujours une et identique ». Voilà pourquoi il n’y a qu’un seul pèlerinage possible dans la vie : celle qui conduit à la vérité, au Christ, lequel vient à la rencontre de l’homme en disant : «Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jean 14,6).
Le problème de la vérité n’est pas un problème de « quantité mais d’essence » : « le Chrétien », explique le P. Lanzetta, « n’est pas un cynique défenseur d’un titre de supériorité par rapport aux autres ; il est plutôt quelqu’un qui, étant sanctifié par la vérité, vit en elle, est dans la vérité, et le fait d’y rester se transforme en possibilité pour que d’ autres aussi s’approchent d’elle ».
Après un large raisonnement théologique, qu’on pourra apprécier dans sa totalité dans les actes du Congrès, la conclusion du P. Lanzetta est très intéressante :
« Aujourd’hui dans notre Église, il est nécessaire d’avoir le courage, après de nombreuses années de tentatives de dialogue, souvent sans succès, de dire au monde non pas qu’il y a plusieurs religions, - c’est un fait sociologique facilement vérifiable - mais qu’il n’y a qu’un seul Dieu, une seule religion vraie, une seule médiation salvatrice. S’arrêter au pluralisme et le justifier par tous les moyens ne résout pas le véritable problème. Alors, on ne peut plus parler de paix ? Si, mais on doit être également réaliste: elle sera toujours loin tant que nous nous serons pas touchés par Celui qui a fait des deux peuples, des Juifs, et des Grecs, un seul peuple, en démolissant le mur de séparation, l’inimité avec Dieu, au moyen de la Croix ».



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L’intervention du Professeur Manfred Hauke
Original italien ici.
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Le Pr Hauke, enseignant de Dogmatique et de Patrologie (ndt études des Pères de l’Église) à la Faculté Théologique de Lugano, a offert quelques éléments fondamentaux pour pouvoir s’orienter à l’intérieur de la théologie des religions, qui ces dernières années, a produit une grande quantité de publications, pas toujours conformes à la foi catholique.
Le Pr Hauke a rappelé que ce n’est pas la première fois dans l’histoire que l’Église se trouve à vivre une situation de pluralisme : déjà dans l’antiquité, les chrétiens se trouvaient au milieu d’un pluralisme religieux très large, qui incluait les cultes païens, les religions orientales, jusqu’à la rencontre, à l’époque de Jean Damascène, avec l’Islam. Dans ce contexte, sont réellement abondantes les interventions des Pères de l’Église et des écrivains ecclésiastiques qui assument pour nous non seulement un rôle informatif mais aussi normatif.

L’intérêt pour la position des Pères de l’Église face aux religions de leur temps est une caractéristique et une constante de la réflexion de l’actuel Souverain Pontife, qui a toujours a partagé le trait fortement critique des Pères de l’Église au sujet des cultes païens. Le Pr Hauke rappelle que pour Joseph Ratzinger le « Christianisme, dans sa théologie de l’histoire de la religion, ne prend pas simplement parti pour le religieux, pour le conservateur qui s’en tient aux règles des institutions dont il a hérité; le « non » chrétien aux dieux signifie bien plus une option pour le rebelle qui ose sortir de ses habitudes à cause de sa conscience : peut-être ce trait révolutionnaire du christianisme a-t-il été caché trop longtemps sous des slogans conservateurs » .

Comment peut-on résumer, alors, la position des Pères de l’Église face au pluralisme religieux de leur époque ?
La possibilité pour l’homme d’être sauvé est réelle, mais en même temps elle est menacée par le péché et par les actions du diable. Une telle influence négative se montre en particulier dans la vénération des idoles, des images qui représentent des dieux païens. Les idoles sont étroitement liées à l’action des démons. Témoignage de cette lecture patristique de la réalité pluraliste est la traduction des LXX du verset du Psaume 96 : Omnes dii gentium daemonia (les dieux des gentils sont des démons).
Il s’agit, par conséquent, essentiellement, d’une attitude plutôt négative : il ne s’agissait certainement pas d’une réception tout court (ndt: en français dans le texte) de l’héritage religieux païen. Les vieux cultes, selon les Pères de l’Église, devaient laisser la place à l’adoration du vrai Dieu et de l’Unique Seigneur Jésus Christ. Ce n’est que pour quelques points particuliers de la religion païenne qu’étaient mis en lumière des éléments positifs (ndt: l’on peut penser à un certain respect de la loi naturelle ?) tandis que les très citées « semences du Verbe » n’étaient pas tant recherchées dans les religions que dans la réflexion philosophique.

L’époque patristique était donc bien loin de considérer les religions païennes en tant que telles comme porteuses de révélation divine. Pour les Pères de l’Église, un « dialogue » paraissait possible avec les non chrétiens à titre individuel afin de les ouvrir au Christ, et non pas avec les religions en elles-mêmes.

Pour un rapprochement de la théologie des religions qui reste fidèle à la tradition patristique, il est donc fondamental de valoriser la nécessité de Dieu, de Jésus Christ et de l’Église pour le Salut, et de reconnaître l’adoration de l’unique Dieu dans les « saints païens » et la présence du Verbe dans les éléments de vérité et de bonté présents dans les religions et dans la philosophie. Cependant ce ne sont pas des éléments en eux-mêmes qui ouvrent à l’Évangile : il dépend du non chrétien à titre individuel, de la façon dont il reprend ces éléments, de parvenir à une praeparatio evangelica et de pouvoir être touché par la grâce divine.

Dans l’intéressant débat de conclusion du Congrès, le Pr Hauke a rappelé en outre comment la modalité que le Saint Père entend donner à la prochaine rencontre d’Assise tient compte justement de ce « non » normatif des Pères de l’Église ; en effet, il n’a voulu aucune prière en commun et aucune prière selon les différents rites, mais une prière silencieuse, où le cœur de chacun pourra s’ouvrir aux inspirations de l’Esprit Saint (ndt: et là même les catholiques les plus intransigeants et hostiles à une réunion à Assise, ne peuvent quand même dicter leurs ordres à l’Esprit Saint qui peut toucher qui il veut et quand il veut !), selon la droiture et la bonne volonté propre à chacun. Les moments en commun, en revanche, concerneront non pas un dialogue interreligieux avec une finalité religieuse, mais plutôt des problématiques concrètes, comme la paix, la persécution religieuse, etc. qui touchent ces mêmes religions en tant que phénomènes socialement significatifs.
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Discussions Rome- FSSPX Benoît XVI et Assise III