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Incendie de l'Institut d'Egypte, au Caire

Du danger de perdre la mémoire historique. Un article à méditer par nous aussi, français, dans la Bussola (21/12/2011)



A deux pas de la place Tahrir, au Caire, l'Institut d'Egypte fondé par Napoléon Bonaparte a été incendié dimanche 18 décembre lors des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre. D'inestimables archives et ouvrages historiques sont partis en fumée.
Source.


Certes, la Révolution française a connu ses horreurs, dans son acharnement à détruire tout l'héritage de la Royauté, au point que l'évêque constitutionnel de Blois, l'"Abbé Grégoire" (pour lequel j'éprouve par ailleurs une sympathie médiocre, il sera accusé de régicide sous la Restauration, ce qu'il contestera, il était contre la peine de mort, mais pas lorsqu'elle s'appliquait au Roi, chercher le mot "régicide" dans cette page) adressa en 1794 un rapport à la Convention afin de protéger le "patrimoine artistique" de l'Ancien Régime des fureurs de la populace et de l'armée républicaine .
Et cela ne fait guère plus de deux cents ans que nous avons connu l'abomination de la profanation des tombes des Capétiens, à la Basilique Saint-Denis.
Il est bon de le rappeler, même si aujourd'hui, en France, on n'en est plus, ou pas encore, à mettre le feu aux bibliothèques et aux monuments.
Il n'en reste pas moins que la volonté de réécrire l'histoire en fonction de l'idéologie, et d'arracher des jeunes têtes toute référence, en particulier chronologique, à l'histoire de leur pays, avec ses zones d'ombre mais aussi sa grandeur, comme en témoigne l'article ci-dessous (voir la polémique autour des nouveaux programmes d'histoire au collège) est une catastrophe que la France, qui se croit éclairée, partage avec l'Egypte, et dont nous risquons nous aussi de payer un jour le prix fort.

C'est un peu le sens de ce billet de la Bussola.

L'incendie criminel qui efface l'histoire
Valentina Colombo
La Bussola
20/12/2011
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Après la destruction de la bibliothèque d'Alexandrie, très probablement sur ordre du second calife Omar, l'Égypte est témoin d'un autre incendie qui emporte avec lui une partie de l'histoire de l'Egypte dans les deux derniers siècles. L'Institut d'Égypte au Caire est parti en fumée. Plus de deux cent mille volumes compromis. Le fait grave est que l'incendie est un incendie criminel. Il y a deux jours un certain nombre de manifestants ont atteint l'Institut, situé entre la rue Kasr al-Aini, et la rue Sheikh Rihan, c'est-à-dire entre le Parlement et la place Tahrir, et ont mis le feu au bâtiment historique. En agissant ainsi, ils ont détruit un vaste patrimoine culturel, mais aussi détruit une partie de la mémoire de leur propre pays.

Fondée par Napoléon Bonaparte, le 22 août 1798, c'est-à-dire un peu moins de deux mois après le débarquement, dans le but d'étudier le pays en voie de colonisation.
Le 22 Novembre 1799, les dirigeants de l'Institut décidèrent de rassembler toutes les études réalisées sur le territoire égyptien lors de l'expédition napoléonienne et de les publier. C'est donc dans ses murs qu'est née la célèbre "Description de l'Egypte" , dont l'original était conservé dans la bibliothèque de l'Institut. En 1859, il fut soumis à de nouveaux changements et à un changement de nom, Institut Egyptien.
Né à nouveau, sous les auspices du vice-roi d'Égypte Saïd Pacha, l'Institut compta parmi ses nouveaux membres des noms éminents, dont l'égyptologue Gaston Maspéro.
Si le ministre égyptien de la Culture, Shaker Abd al-Hamid a déclaré qu'il s'agit d'une "catastrophe pour la science" et qu'il formera une comission "de spécialistes pour procéder à la restauration des livres et des manuscrits dès que les conditions de sécurité le permetteront", je me demande combien d'Egyptiens, mais surtout combien de ceux qui ont jeté les cocktails Molotov connaissent la signification et l'importance de cette institution et de la conquête napoléonienne, pas seulement pour l'Egypte mais pour le monde arabe tout entier. Combien d'Egyptiens savent que l'arrivée des troupes françaises a réveillé de la torpeur, de l'immobilisme, les esprits arabes, donnant vie à la période connue comme la "Renaissance"? En avril dernier, Abdel Moneim Saïd écrivait dans l'hebdomadaire Al-Ahram Weekly: "Je ne veux pas de revisiter toute l'histoire de l'Egypte, mais l'histoire moderne a vu le débat entre révolution et réforme. Très probablement la naissance de l'État moderne en Egypte remonte à la révolution du peuple égyptien contre l'occupation française, un mouvement qui s'est poursuivi jusqu'à ce que Muhammad Ali soit nommé vice-roi d'Egypte Cette révolution a été entièrement égyptienne, dirigée par al-Azhar et par un groupe d'esprits éclairés qui réclamaient la fin de la domination ottomane". Il est évident que le moment négatif de l'occupation, combiné avec l'introduction d'une nouvelle culture, a secoué de l'intérieur un pays qui a métabolisé l'apport étranger, donnant vie à une véritable renaissance culturelle. Malheureusement, la révolution à laquelle nous assistons est loin d'avoir les mêmes spécifications et d'obtenir ces résultats.

Malheureusement, les nouvelles générations égyptiennes ont perdu et continuent de perdre leur mémoire historique.
En avril dernier, le ministère égyptien de l'Education a nommé un comité scientifique dans le but de réformer les manuels d'histoire afin de les "purger" de la louange excessive du régime de Moubarak, pour introduire un chapitre sur la révolution du Lotus (i.e celle en cours) et pour introduire certaines parties de l'histoire du pays effacées auparavant.
Il s'agit d'une initiative utile et nécessaire, mais seulement si elle est faite au nom de la vérité et de la mémoire historique au-delà de toute idéologie. Les manuels devraient rappeler à la fois le passé pharaonique, l'histoire des Coptes, la vérité sur la conquête islamique de l'Egypte, et toutes les étapes historiques qui ont conduit à l'Egypte d'aujourd'hui, y compris la fondation de l'Université islamique de Al-Azhar par la dynastie chiite fatimide, et la colonisation dans ses aspects positifs et négatifs. Une attention particulière devrait être accordée aux manuels de littérature afin que le patrimoine arabe littéraire ne soit pas annulé au profit de celui purement islamique. Il ne faut pas oublier qu'en 2003, l'ancien ministre de la Culture Farouk Hosni a ordonné de brûleres œuvres du célèbre poète arabe Abou Nuwas parce qu'il faisait l'éloge des relations homosexuelles et du vin, en oubliant le fait que ce dernier avait écrit avec le soutien du calife abbasside qui régnait au nom de l'islam et qui respectait le poète au nom de son art admirable.

La destruction de l'Institut d'Egypte et les résultats du second tour électoral en Egypte confirment d'une part l'absence totale de connaissance et de respect pour l'histoire de leur propre pays et de l'autre la prédominance de mouvements liés à l'extrémisme islamique qui, dans un futur gouvernement insisteront pour gérer le ministère de l'Education et qui, avec de nouvelles censures au nom de l'idéologie et de l'islamiquement correct, tueront les générations à venir qui grandiront avec une mémoire tronquée qui tôt ou tard se retourneront contre ceux qui, en Occident aussi, l'a favorisé.





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