Polémiques jusqu'au bout

à propos de la "démission". Et je regrette qu'un évêque français s'en fasse l'écho. Heureusement, il y a Mgr Aillet (15/2/2013, mise à jour le 16)

     

J'aurais aimé ne pas avoir à ferrailler pour le Saint-Père jusqu'au dernier moment de son Pontificat (Dieu merci, ces trois derniers mots changent le sens d'une phrase qui serait terrible pour moi), mais c'est malheureusement impossible.

Certains, parmi les catholiques, l'accusent de les avoir "abandonnés".

Les évêques français, dont je ne me souviens pas qu'ils aient levé le petit doigt lors des infâmes polémiques dont son pontificat a été, je ne dirais pas émaillé, mais mitraillé, se signalent - si l'on peut dire - presque tous par leur absence, au moins médiatique.

Mais le pire est à venir. L'un d'eux, que je ne connaissais pas, sinon de nom, Mgr Minerath, évêque de Dijon, lui reproche publiquement (oh, certes, en entourant le tout de louanges tout ecclésiastiques), par sa démission, de se dérober. De descendre de la Croix, comme cela a déjà été évoqué ailleurs. Si j'ai mal compris les propos de l'évêque de Dijon, je m'en excuse; mais je ne les déforme pas, puiqu'on peut les suivre en direct ici (RCF).

Eglise en marcheMgr Minnerath - Renoncement de Benoît XVI et Carême

Vraiment Monseigneur, ce n'était pas nécessaire. D'autant plus que vous avez été cité par un site local (dont je doute qu'il agisse par sympathie envers l'Eglise): www.infos-dijon.com/
Je me permets de vous faire très respectueusement observer que lorsque l'on fait partie d'une hiérarchie, dans une institution assiégée, que l'on ne veut pas quitter, si l'on n'est pas d'accord avec le patron, on se tait.

- - -

Cela me fait d'autant plus chaud au coeur de lire l'hommage de Mgr Aillet:

     

Mgr Aillet

La renonciation de Benoît XVI: communiqué de Mgr Marc Aillet
Mercredi des Cendres 13 février 2013
---
C’est dans la stupéfaction que nous avons appris le lundi 11 février 2013, en la fête de Notre-Dame de Lourdes, la décision du Pape Benoît XVI de renoncer à sa charge d’évêque de Rome et de Successeur de Pierre. Le Pape n’est ni un chef d’entreprise, dépendant de ses actionnaires, ni un chef de gouvernement, porté par ses électeurs. Pour prendre une telle décision, il ne saurait être pressé par les événements, poussé par son entourage, voire rejeté par l’opinion publique. Sa charge est d’essence spirituelle et non temporelle ; il sait, comme il l’exprime dans sa déclaration faite devant le consistoire, que ce ministère « doit être accompli non seulement par les œuvres et par la parole, mais aussi, et pas moins, par la souffrance et par la prière ». Et en cela, il rend hommage à son bienheureux prédécesseur qui est demeuré à son poste jusqu’au bout, malgré l’évolution de la maladie. C’est donc, quant à lui, en pleine conscience « de la gravité de cet acte » et en toute liberté qu’il renonce à sa charge, alors que « la vigueur du corps et de l’esprit » s’est amoindrie en lui, d’une telle manière qu’il doit reconnaître son incapacité à bien assumer le ministère qui lui a été confié.

Il ne nous abandonne pas pour autant, comme il l’a montré à bien des reprises au cours d’un Pontificat qui fut exposé à de violentes campagnes médiatiques et à des malentendus et préjugés odieux. Dans son livre-entretien avec le journaliste Peter Seewald, Lumière du monde, publié en 2010, n’écrivait-il pas : « Quand le danger est grand, il ne faut pas s’enfuir. Le moment n’est donc sûrement pas venu de se retirer. C’est justement dans ce genre de moments qu’il faut tenir bon et dominer la situation difficile. C’est ma conception ». Par ailleurs, n’avait-il pas demandé aux fidèles massés sur la place Saint-Pierre, au jour où il inaugurait son ministère pétrinien, de prier pour lui « pour qu’il ne s’enfuie pas, par peur, devant les loups ». Dans ce même livre-entretien, il n’en évoquait pas moins l’éventualité de se retirer : « On peut se retirer dans un moment calme, ou quand tout simplement on n’en peut plus. Oui, quand un Pape en vient à reconnaître en toute clarté que physiquement, psychiquement et spirituellement il ne peut plus assumer la charge de son ministère, alors il a le droit et, selon les circonstances, le devoir de se retirer ». Une telle décision, prévue par le Code de droit canonique (n. 332 § 2), n’a eu lieu que deux fois dans l’histoire de l’Eglise : le Pape saint Célestin V, en 1294, dans des conditions politiques difficiles, quelques mois à peine après son élection, et le Pape Grégoire XII, en 1415, pour mettre fin au grand schisme d’Occident. Il ne saurait donc s’agir pour lui de fuir devant la responsabilité qu’il avait acceptée, le 19 avril 2005, alors que sa santé était fragile et qu’il pouvait aspirer légitimement à une retraite studieuse bien méritée. Il ne saurait non plus faire œuvre de modernité, comme on l’a dit de manière quelque peu superficielle devant une charge de nature si intemporelle. Il nous donne plutôt une leçon magistrale de sagesse et de liberté intérieure. Cela ne devrait pour autant induire aucune règle dans l’Eglise : le Pape reçoit sa charge du Christ seul, même si c’est à travers l’élection des cardinaux, et le Christ seul peut lui suggérer dans la prière et la réflexion d’y renoncer.

Passée la stupéfaction, c’est donc dans l’admiration que nous accueillons sa décision qui manifeste un sens tout surnaturel de la responsabilité et une grande humilité. Celui qui s’était présenté à la face du monde comme « un humble travailleur dans la vigne du Seigneur », s’efface devant celui qu’il rend présent par son ministère pétrinien, le seul souverain Pasteur de son Peuple : le Christ. En cette année de la foi qu’il a promulguée, il nous invite à mettre résolument notre confiance, non dans un homme mais en Dieu ! Belle leçon d’ecclésiologie, où nous comprenons mieux que le pouvoir dans l’Eglise est un service qui ne peut s’accomplir que dans l’obéissance au Christ, dont nous ne sommes jamais que les serviteurs et les instruments. Ce n’est donc pas une leçon de modernité mais d’humilité, une ultime manière de tourner nos regards vers Dieu, dont il a tant proclamé, durant tout son Pontificat, le primat absolu.

En évoquant les circonstances présentes, « le monde d’aujourd’hui, sujet à de rapides changements et agité par des questions de grande importance pour la vie de la foi », nécessitant une singulière « vigueur du corps et de l’esprit », « pour gouverner la barque de Pierre et annoncer l’Evangile », il nous dévoile peut-être le motif secret de sa décision. Dans sa dernière rencontre avec les séminaristes romains, le 8 février, en la fête de Marie, Mère de la confiance, patronne du Séminaire de Rome, et en commentant le début de la première lettre de saint Pierre, il a décrit de manière particulièrement sentie le ministère du Successeur de Pierre, et il a évoqué la situation des chrétiens dans le monde : « Nous voyons qu’aujourd’hui dans le monde, les chrétiens sont le groupe le plus persécuté, parce que non conformes ». Il a parlé d’un « faux pessimisme » qui ne mettrait pas sa confiance dans le Christ qui a vaincu le monde, et aussi d’un « faux optimisme » qui voudrait se persuader que tout va bien pour l’Eglise, en insistant sur le « moment du martyre » qui caractérise toute vie chrétienne. Le Saint-Père n’aurait-il pas discerné, de manière toute prophétique, les tempêtes qui vont s’abattre sur l’Eglise, et décidé ainsi, dans une prudence toute surnaturelle, de préparer sans tarder une succession que la réduction de ses forces lui semblerait exiger ?

En accueillant cette nouvelle dans la foi, nous n’en sommes pas moins affectés dans notre identité de fils et de filles de l’Eglise. Le Pape est le « Saint-Père », le Père de tous les fidèles et nous pouvons bien nous sentir un peu orphelins. C’est important de le souligner, car plus que jamais dans une société sans père et sans repères, le Pape incarne, pour les jeunes en particulier comme nous le constatons aux JMJ, ce père, voire ce grand-père, dont ils ont tant besoin. Mais le Seigneur pourvoit aux besoins de son Peuple et nous sommes dans la paix. Nous pourrons manifester notre reconnaissance au Pape Benoît XVI, le jeudi 28 février à 20 h, où le siège de l’évêque de Rome deviendra vacant, et où je célébrerai une messe d’action de grâce pour son pontificat lumineux à la Cathédrale Sainte-Marie de Bayonne. Il doit pouvoir compter sur notre prière en ces dernières semaines de son ministère pétrinien, alors qu’il s’apprête à se retirer. Il ne choisit certes pas la facilité, il ne décide pas de se retirer pour couler une retraite tranquille. Après avoir a tant insisté sur l’importance de la prière, comme source de tout apostolat, il souhaite « servir de tout cœur, aussi dans l’avenir, la Sainte Église de Dieu par une vie consacrée à la prière ». Comme s’il ne manquait plus à Joseph Ratzinger que l’état de vie consacrée qu’il tient en si haute estime, comme sa référence à saint Benoît, patriarche des moines d’Occident, l’indique clairement.

Le Carême qui commence, « ce temps d’entraînement au combat spirituel », devrait être marqué par la fin du Pontificat de Benoît XVI et la tenue du Conclave qui élira un nouveau Pape. Des veillées de prière seront organisées pour en accompagner la préparation spirituelle. Entrons donc dans l’Espérance que donne la foi !

+ Marc Aillet,
Évêque de Bayonne, Lescar et Oloron.

Mise à jour (le commentaire de Monique T)

Quelle suffisance chez cet évêque qui, à n'en pas douter, ira bien se reposer à seulement 75 ans!
Pour répondre à son blabla, sur "Riposte catholique", un lecteur répond: "Si tous les prêtres et évêques de France en particulier avaient toujours soutenu Benoît XVI dans les pires moments, peut-être n'aurait-il pas renoncé à sa charge si tôt".
Je crois, en effet, que le Pape a subi de telles agressions morales, dans une solitude quasi totale (1), que son vieillissement physique en a été accéléré.
Les mêmes qui l'ont conspué s'étonnent aujourd'hui de son épuisement et se permettent de lui faire la leçon (ce n'est pas comme Jean-Paul II", etc).

Rien que dans ma paroisse, en 2009, le curé (qui depuis est parti avec une femme) l'a calomnié par deux fois devant une église pleine.
J'ai écrit au curé pour protester; il m'a répondu avec deux lignes totalement désinvoltes sans aucune conscience de la gravité d'une calomnie (c'est grave pour un confesseur!) et il ne s'est jamais excusé devant l'assemblée. Telle est la médiocrité de ceux qui jugent le Pape!

* * *

(1) Il me semble qu'à l'époque des orages, le Pape n'a trouvé un appui véritablement énergique et loyal ni à la Secrétairerie d'Etat, qui ne savait pas quoi dire, ni à la Curie (le cardinal Re qui, après tout, avait signé le décret sur les 4 évêques sans jamais en endosser la responsabilité et que les médias ont tranquillement ménagé, n'a cessé de faire des coups tordus), ni dans l'épiscopat mondial, ni chez les prêtres, ni dans le public, qui réclamait sa démission dans les sondages. Ce public devrait se sentir comblé aujourd'hui!
Le sentiment de solitude de Benoît XVI a dû être abyssal. Seule sa foi en Dieu a pu le soutenir.
Je rends cependant justice à deux évêques français. Je me rappelle qu'au tout début de l'affaire Williamson, le Cardinal Barbarin avait déclaré que le Pape n'était certainement pas au courant des opinions de l'évêque avant la signature du décret (ce qui était vrai) et Mgr Simon avait publié un article pour défendre le Pape et dire "ASSEZ". Il y a eu sans doute d'autres interventions que je n'ai pas remarquées mais, dans l'ensemble, on sentait que presque tout le monde avait honte de ce qu'avait dit et fait le Pape (les bons catholiques se disaient "désorientés").
Ceux qui déplorent que Benoît XVI se" dérobe" aujourd'hui, semblent avoir oublié que sa croix, il l'a déjà largement portée sur la chaire de Pierre!
Monique T.