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Le conte du confessionnal

Très lié à un évènement récent... un malicieux conte "moral" argentin, traduit par Carlota (4/8/2013)

(Carlota)
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Les paroles du Pape François dans l’avion retour des JMJ de Rio, en particulier celles concernant les homosexuels et les lobbies, ont conforté, semble-t-il, tous ceux qui, en Italie, veulent toujours plus de lois homosexualistes. Certains en France se déclarent déjà ravis que le Pape mette l’homme avant les dogmes, et se demandent si cela va être désormais le nouveau visage de l’Église. Les paroles du Pape ont par contre troublé ceux qui voudraient que la miséricorde et l’amour de l’autre, frère en humanité et créature divine, ne fasse pas oublier l’importance d’expliquer ce qu’est le péché et le chemin du Salut.
J’ai trouvé un « conte » qui a été écrit pour illustrer les paroles ou tout au moins ce que le catholique primaire (donc sûrement non progressiste!) peut avoir compris des paroles de François, sur un site catholique plus que conservateur argentin (voir ici).

J’ai souri à le lire.
Ce « conte » aurait peut-être pu être écrit par le Père jésuite Castellani que nous avons déjà évoqué et qui disait que « l’ironie est le langage de l’amour indigné ».
Et qu’aurait écrit Léon Bloy (cité à l’occasion par le Pape François), ce pourfendeur impitoyable des bourgeois hypocrites du début du XXème siècle ?
Chaque époque a sa bourgeoisie que l’on pourrait aussi désigner comme la conformité institutionnelle, c'est-à-dire la recherche, à tout prix, d’une position confortable, en allant toujours dans le sens du courant.
Qu’est-ce donc qu’aller alors, aujourd’hui, à contre-courant comme l’a demandé le Pape François à Rio?

Ma traduction.

     

Tu ne feras point de lobby (*)



Cette histoire presque réelle se passe en une fin de journée quand la nuit commence déjà à tomber, dans une basilique d’une certaine ville parmi les plus grandes du monde. Le prêtre ne confesse pas habituellement, mais aujourd’hui il a décidé de “palpiter” le succès des JMJ. S’approche un pénitent, qui se met à genoux à la petite fenêtre latérale du confessionnal.

- Bénissez-moi mon Père parce que j’ai péché.
- Bon si tu veux, je te bénis, mais n’exagérons pas la note. Qu’est ce qui t’amène par là?

Le pénitent quelque peu perplexe :

- Je voudrais confesser mes péchés. Il y a trois ans que je ne me suis pas confessé.
- N’en rajoute pas avec cette façon de compter les jours. Qu’est-ce que cela donne de plus si c’est trois mois, trois ans ou trois décennies. Pour Dieu le temps n’existe pas.
- Excusez-moi, mon Père, mais j’ai été éduqué selon le catéchisme classique et en ce temps là j’ai appris cette méthode pour me confesser. D’abord on doit dire depuis combien de temps l’on ne s’est pas confessé.
- Ça c’est du passé. Maintenant cela ne nous intéresse pas de savoir ces choses. J’espère que tu as quelque chose de grave à confesser, parce il n’est pas non plus question de perdre du temps avec des enfantillages.
- Malheureusement, mon Père, j’ai commis des péchés très graves.
- Ouiiii, bon. Ils viennent tous en disant qu’ils ont commis des péchés très graves, et ensuite il en résulte que ce sont des petites grand-mères pieuses.
- Dans mon cas, mon père, j’ai gravement péché contre la loi de Dieu. Je suis homosexuel.

Silence.

- Oui, et ?
- Excusez-moi, vous ne m’avez pas compris. J’ai dit que je suis homosexuel.
- Si, j’ai compris. Quel est le problème ?
- Ah, peut-être avez-vous cru que je suis une de ces personnes avec une tendance homosexuelle qui vit dans la chasteté. Non, malheureusement, moi j’ai vécu dans l’impureté.

Silence

- Vous ne me dites rien, mon Père?
- Qui suis-je pour juger un gay?

Le Pénitent alors perplexe.

- Bon Vous être un prêtre, vous êtes en train de me confesser, vous être en train de me juger au nom du Christ.
- Oui c’est techniquement correct, mais n’exagérons pas non plus.
- Excusez-moi, mais je sais que c’est un péché très grave. Ou bien est-ce que je me trompe ? Dites-moi quelque chose ?
- Que veux-tu que je te dise ?
- Mon Père, vous devez me juger au nom du Christ. Pour moi vous êtes le Christ et j’attends votre jugement, votre pardon et la rémission de mes fautes.
- Je ne te dirais pas que tu n’es pas pertinent du point de vue réglementaire, mais je répète, ce n’est pas la peine de dire tout le temps les mêmes choses. Si tu veux savoir ce que dit l’Église sur le sujet, tu peux lire le Catéchisme de l’Église n° 2357 à 2359. Dans la pratique je préfère m’en remettre à la miséricorde. En outre, j’imagine que la bonne volonté te fait avancer et la recherche…
- C’est cela, mon Père, la miséricorde, et c’est pour cela que je me repens de tout mon cœur.
- Bon, si tu veux te repentir, ça va bien pour ton compte. La miséricorde de Dieu justifie tout.

Le pénitent, toujours plus perplexe, mais disposé à atteindre son objectif

- Voyez, mon Père, je me confesse d’avoir fauté contre la pureté, j’ai commis des actes indignes. Mais par Sa grâce, je me suis repenti. Maintenant j’essaie de réparer. Il m’a fallu du courage pour venir me confesser à ce jour, mais le repentir je l’ai depuis un certain temps. Comme pénitence et réparation je me suis imposé moi-même de réciter dix chapelets par jour, et je crois que cela m’a donné la grâce de me rapprocher du confessionnal.
- Ah, non, pas encore, avec cette histoire de compter les rosaires ! Quel sens cela a de compter les rosaires ? Tu vas participer à un concours ? Ils vont te donner un endroit plus beau au ciel?
- Je ne sais pas, mon Père, dites-le moi. Je pense que c’est une façon de réaliser une offrande spirituelle en demandant la contrition. Bien qu’on ne puisse pas réciter le rosaire sans compter les Ave Maria et les Notre Père. Compter, à ce qu’on dit, il faut compter.
- Quelle manie avec cette affaire de compter ! Pour Dieu, peut-être que c’est la même chose un rosaire que mille ? (**)

Le Pénitent, cette fois très perplexe.

- J’ai l’impression que non. Mille rosaires montrent plus de volonté de prière, de faire plus pénitence à genoux, plus réparation, de donner plus de soi-même.
- Pour Dieu, la mesure n’existe pas.
- Je comprends, mon Père, mais dans notre pauvre nature humaine, les signes extérieurs…
- Oui, je vois bien. Il me semble que tu es l’un de ces restaurationnistes (**).
- Non, mon Père, je suis un pauvre pécheur qui a été éduqué dans la foi de l’Église et qui dans sa misère actuelle, veut s’élever de nouveau à partir de la main miséricordieuse de l’Église. Je vous prie de me donne la pénitence et l’absolution.
- Hum, je ne sais pas. Qu’est ce que tu as appris de plus dans ce catéchisme ?
- J’ai appris que le prêtre est juge et médecin des âmes. Que comme juge il œuvre au nom du Christ en signalant la gravité des péchés. Et comme médecin il donne le remède avec les conseils, la pénitence et l’absolution.
- Oui, enfin techniquement c’est correct, mais c’est quelque peu démodé (ndt adjectif français passé à l’espagnol – gallicisme !).
- Mon Père, je vous supplie de me diriger parce que je veux abandonner cette vie de péché et faire pénitence déjà avec la grâce sanctificatrice dans l’âme. Je vous demande l’absolution.
- Tranquille, tout est grâce. Il ne faut pas se faire tant de problème.

Silence froid.

- Vous allez me donner l’absolution?
- Non, pas avant que tu me donnes des éclaircissements sur les choses que tu as faites pour « réparer » ton péché, comme tu dis.

Le pénitent très très perplexe.

- Eh bien, mon Père, dans ce sens je n’ai rien à confesser. Par la grâce de Dieu, je me suis lié à un groupe de catholiques qui lutte contre la légalisation du « mariage gay ». Là j’ai pu comprendre la gravité de mes fautes, non seulement pour mon âme, quelque chose que je savais déjà, mais comme terrible influence pour la société.
- Et qu’est-ce qu’ils font ?
- Nous formons les gens, nous envoyons des lettres, nous parlons avec les législateurs et nous manifestons dans les rues. Souvent on m’a tapé dessus (ndt comprendre les forces de l’ordre contre les manifestants) dans les manifestations, mais moi je l’accepte pour l’amour de la Croix et comme réparation de mes péchés.
- Et tu n’as pas pensé à te confesser de ce péché ?

Le pénitent plus que perplexe.

- Quel péché, mon Père ? C’est contre la légalisation du mariage gay que je milite…Peut-être que vous ne m’avez pas compris. Il me semble que souffrir des humiliations est une pénitence que je mérite et un bien pour la soc…
- C'est-à-dire que tu te réunis avec d’autres pour aller contre les gays ?
- Oui, mon Père. Disons, contre la diffusion de leurs habitudes dans la société.
- Tu as fait un lobby contre les gays ?
- Oui….
- Tu as fait un lobby ?
- Je ne sais pas ce que signifie exactement « faire un lobby » pour vous, mais si c’est ce que je comprends, oui, j’ai fait un lobby.
- Tu viens te confesser que tu es gay en grandes pompes, et sans circonstances atténuantes, comme si il n’y avait personne qui naissait avec cette tendance, en mettant ton doigt accusateur sur tous les gays, qui sont d’habitude des personnes de bonne volonté et pleines d’amour et tu ne dis pas que tu as fait un lobby contre les gays ?
- Oui, mon Père, si vous voulez le dire de cette façon. J’agis avec d’autres personnes contre ceux qui font la promotion du vice et du péché.
- Et tu ne pensais pas t’en confesser?
- J’ai déjà confessé ma faute…et cela m’a beaucoup coûté.
- Non, non, non, mon petit gars. Du péché de lobby tu ne t’es pas confessé, mieux tu t’en es vanté.

Le pénitent, perplexe...

- Mais, mon Père, je n’ai rien fait d’immoral dans cette lutte contre la légalisation du mariage gay. J’ai seulement protesté, j’ai essayé de convaincre et s’il y a eu de la violence, c’est moi qui en ai souffert.
- Cela te semble moral de faire du lobby ?
- Mon Père, je ne comprends pas très bien ce que vous voulez me dire.
- Faire du lobby est une des pires formes de corruption. Je peux accepter que tu sois un pécheur mais non pas un corrompu. Je te refuse l’absolution jusqu’à ce que tu démontres ton repentir. Et quand tu seras disposé à donner des preuves, tu vas demander pardon à ceux que tu as offensés et tu vas faire 500 fois le tour de la place qui se trouve en face avec une pancarte qui dira « Je me repens d’avoir faire du lobby contre les gays ».

Le pénitent plus qu’au-delà de la perplexité la plus totale…

- Oui, mon Père, ce que vous direz. Une question : je dois compter les tours ou je peux en faire un et me considérer comme quitte… ?

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Il est possible que ce récit ne soit pas vrai…aujourd’hui. Mais peut-être qu’il le sera dans une semaine ou le mois prochain. Si au lieu de proclamer la doctrine nous continuons à jouer l’émotion « amorale », la « solidarité » sans contenu doctrinal, la « proximité » sans charité, et la « communisation avec les masses » au lieu de « prêcher ». Quoique, en y pensant, peut-être que déjà cette confession s’est déjà passée.

Notes

(*) Évidemment parodie du début d’un nouveau commandement, après les 10 autres… et en référence directe à ce qu’a dit le Saint Père dans l’avion.

(**) Allusion, probablement, aux confidences faites par le Pape aux groupes "restaurationnistes", lors de sa rencontre avec les délégués du CLAR, en juin dernier (cf. La bombe du Pape François ):

"Une anecdote, seulement pour illustrer, ce n’est pas pour rire, je l’ai prise avec respect, mais cela me préoccupe ; quand ils m’ont choisi, j’ai reçu une carte de l’un de ces groupes, et ils me disaient ; « Votre Sainteté, nous vous offrons ce trésor spirituel, 3525 rosaires » Pourquoi ne disent-ils pas nous prions pour vous, nous demandons… mais ce fait de tenir le compte"...