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La lettre de Jeannine du 2 février

Revue de la quinzaine écoulée: querelle de princes de l'Eglise, médias, et les deux frères à Mater Ecclesiae (3/2/2014)

>>> Ci-contre: Benoît XVI à Fribourg en septembre 2011

     

Chère Béatrice,

(...)
Maradiaga, celui que j'appelle le futur pape, l'éminence grise de François, le papabile numéro 1 en cas de conclave (il était déjà papabile en 2005), qui manage le groupe qu'il chapeaute avec beaucoup d'assurance et dont le cerveau bouillonne d'idées, bien sûr pour le bien de l'Eglise, règle ses comptes par la même occasion (cf. Le cardinal Maradiaga et le théologien allemand). L'arrivée de François a été l'occasion rêvée pour venir au premier plan et se mettre en bonne place. Entendre un cardinal hondurien traiter d'allemand, de théologien allemand, un presque collègue, le voir utiliser un vocabulaire plus qu'ordinaire, au point d'en oublier le langage très policé de mise dans ce milieu très fermé que j'appelle un nid de frelons, pourrait laisser supposer que François est d'accord: il a la réplique facile lorsqu'il le souhaite et le cardinal Maradiaga doit être bien sûr de ses arrières. Je suis peut-être peu charitable, mais comparée à ces grands noms qui ont rayé de leur vocabulaire charité, humilité, pardon, je ne crois pas avoir à rougir. Le pape souhaite que chacun fasse un petit effort pour s'améliorer mais de tels exemples ne sont guère incitatifs.

Le Père Lombardi qui a tant souffert du temps de Benoît XVI et qui était las de rattraper les impairs, les paroles mal rapportées qui faisaient naître des polémiques, doit se sentir revivre en voyant son zèle récompensé. Il a retrouvé le sourire depuis de longs mois puisque tout est devenu facile. Mais le jour où on réussira à me faire croire que les médias sont capables de former un cercle vertueux autour du pape (comme il l'affirme ici: Lombardi, les Papes et la communication) ou d'une autre personnalité, je serai en très mauvais état et mes proches pourront se faire du souci.

Parcourant la page d'accueil de votre site, j'ai aperçu "François fait la couverture de Rolling Stone", sans aller plus loin je me suis dit "tiens, une de plus". Lorsque l'on est la coqueluche des médias je ne vois pas pourquoi certains auraient le droit d'épingler à leur palmarès le pape et pas d'autres: simple question de logique, pas de préfèrence. En remontant la colonne "actualités" je trouve "Insultes à Benoît XVI" sur Rolling Stone. cette fois je lis l'article: une horreur.
Je me demande si le Vatican et la cellule chargée de sa com' réalisent bien à quel degré de bassesse, de grossièreté il faut être descendu pour afficher de telles mascarades pleines de haine. Que cherche-t-on à prouver: que pour être bien dans l'Eglise il faut applaudir à tout rompre à tout ce qui est dit, qu'il faut asseoir la popularité du Saint-Père, et c'est à bon escient que j'utilise ce titre, par tous les moyens possibles y compris les plus dérisoires, les plus odieux?

Je pense que le monde tourne à l'envers et chaque jour je me félicite de mon solide bon sens, de mes pieds bien enfoncés dans le sol qui, lui, échappe la plupart du temps à la folie des hommes. Je réagis vertement parce qu'en plus des phrases odieuses écrites et reprises avec un bel accord par tous ceux qui attendaient que le convoi se mette en marche pour se rattacher à la locomotive, quel courage!! c'est que cette verve nauséabonde s'attaque au Pape émérite, Benoît XVI, pour lequel j'ai une profonde affection et auquel je voue un profond respect et une immense admiration, le tout parfaitement étayé par tout ce qu'il m'a apporté à moi et à l'Eglise par la même occasion. Avec mon caractère le mot emballement n'existe pas, je suis rationnelle, pragmatique et sais fort bien faire la part des choses. Je précise que je trouverais aussi révoltant de parler ainsi d'une personne quelconque mais cet épilogue resterait dans le domaine des dérapages de la vie courante. Là ce n'est pas le cas et je ne pense pas que l'Eglise se rende service en tolérant de tels écarts au sujet de l'un de ses membres.

* * *

Photos: le mot magique pour moi car je sais que je vais trouver des détails et un Benoît XVI rencontré récemment et je ne me trompe pas; mon affectueux merci pour ces moments privilégiés et votre patient travail de fourmi pour fouiner, regrouper, traduire, mettre en forme tout ce qui touche à lui.

Le 15 janvier, une période festive pour le Monastère, annoncée par Mgr Gänswein, avec Mgr Georg Ratzinger pour ses 90 ans, un chiffre rond qui se souhaite particulièrement. Une ambiance bavaroise donc joyeuse, une fête de famille avec le grand frère et la famille qui vit au Monastère et l'entoure d'affection, de respect, de prévenances. Je comprends qu'il puisse apprécier à sa juste valeur cette vie calme, sereine, planifiée afin que le temps s'écoule doucement loin de l'agitation du palais pontifical: un jardin, des fleurs, une maison simple, confortable, offrant tout ce qui est nécessaire à une personne âgée, fragile, un lieu propice au recueillement de celui qui prie sans cesse pour l'Eglise.
Le retrouver sur des photos me comble de joie. Il est bon de l'entendre parler, la voix de son frère est forte, très assurée et la journaliste qui l'interviewe est très respectueuse (cf. Un film pour l'anniversaire de Mgr Georg).

Le commentaire de cette pianiste venue jouer pour cette réunion est vrai, sincère (cf. Elle a joué du piano pour Benoît et son frère et Un concert au Vatican). Elle a l'aisance de ceux qui n'ont rien à prouver tant leur vie est accomplie, et j'aime cela. Les deux frère assis côte à côte sont touchants. Benoît nous offre une nouvelle façon de se protéger du froid: ce béret blanc qui lui donne un air de très grande simplicité, installé bien calmement , avec une visage reposé et un air un brin amusé, c'est rassurant.
Rien n'a séparé ces deux frères; les points communs qui cimentent cette belle affection résistent aux intempéries de la vie pour leur permettre de se retrouver assis côte à côte à chacune de leurs rencontres, comme si le temps n'avait pas passé. Ceux qui ont la grâce de le rencontrer ne sont pas animés par le souci d'être vus, le pape était discret, effacé et ce n'est pas son renoncement qui l'a transformé en star soucieuse de son image.
Dans la salle de concert Benoît a près de lui ceux et celles qui partagent sa vie ou le rencontrent souvent je pense : les memores, Mgr Gänswein, Sœur Christine, le docteur Polisca, ceux qui ont organisés dans le secret ce concert pour en faire une magnifique surprise aux habitants du monastère. Les visages sont souriants, sereins et ce temps hors du temps doit être goûté avec plaisir. Mgr Gänswein est très présent pour accueillir, diriger les invités, discret et toujours très attentif. Dans la salle du concert à 17h30, selon la pendule, une photo avec Benoît XVI, son frère à sa droite, un évêque mais à la gauche du pape émérite il y a Mgr Gänswein.
Sur un autre cliché on voit la salle avec un organisateur qui salue Mgr Georg Ratzinger pendant que les personnes présentes applaudissent; Benoît XVI, feuille dans sa main gauche n'est pas le dernier à le faire et son visage est heureux. Cet anniversaire va être un précieux souvenir pour ceux qui ont partagé ces moments de joie simple enrichis par la musique toujours présente dans la vie des deux frères.

En relisant un compte-rendu de l'Habemus Papam du 19 avril 2005 et de réactions à cette annonce j'avais relevé cette phrase prononcée par Sr Marana, Libanaise de l'Ordre maronite, en parlant du nouveau pape : " Il viendra du nouveau à travers lui. Il faudra toujours prier pour lui, pour le soutenir"; prémonition?

Cette lettre commencée depuis hier, arrêtée, reprise, va enfin partir. Je vous joins deux photos que j'aime beaucoup.
La couverture de Vanity Fair est si belle qu'elle ne me choque pas : on y retrouve Benoît XVI avec son élégance innée.
Sur l'autre prise à Fribourg, en septembre 2011, j'apprécie la simplicité du mouvement, le visage doucement souriant, et la classe de celui qui est le pape à l'époque.
Comme tout cela paraît loin.

Jeannine