Révolution de palais au Vatican

Où l’on voit que les méthodes de François sont de plus en plus critiquées au sein de la Curie, notamment parmi les ‘cadres intermédiaires’.

L’article ci-dessous, traduit par Isabelle, a été publié sur le site allemand www.katholisches.info.
L’auteur, Manfred Ferrari, un allemand vivant en Suisse, né en 1944 (voir CV en italien ici), y est présenté comme vaticaniste et photographe.
Jusqu'en 2010, il a travaillé pour Vatican News.
Sur la page d’accueil de son blog, apparemment inactif depuis un certain temps, il y a ce très éloquent dessin ainsi légendé : « Ouf ! En retraite… mais vigilent sur ce qui se passe ».

Ce qu'il dit rejoint d'autres témoignages déjà publiés dans ces pages, notamment par Giuseppe Rusconi (benoit-et-moi.fr/2015-I../photo-instantanee-de-la-curie-sous-franois) et le Père Ray Blake (benoit-et-moi.fr/2014-II..curie-lenvers-du-decor et aussi benoit-et-moi.fr/2015-II/..des-pretres-qui-sen-vont). mais il semble que le mouvement aille crescendo.

CRIS ET LAMENTATION

18 novembre 2015
Manfred Ferrari
www.katholisches.info
Traduction par Isabelle


Les initiés s'y attendaient depuis longtemps : une bombe à retardement explose ces temps-ci au Vatican. Le pape venu d'Argentine avait tenté de transformer la structure existante en une « Eglise des pauvres ». Et cela, avec les meilleures intentions. Mais ce faisant, il ignore le fait que leVatican est un édifice qui a pris forme au fil des siècles. François ne pouvait ou ne voulait pas voir que la Curie est un appareil puissant dont les cadres intermédiaires sont plus importants que la direction, couverte d'honneur, que constituent évêques et cardinaux. Le pape venu de la lointaine Argentine, dont le style de gouvernement autoritaire est bien connu, a cru pouvoir imposer sa nouvelle façon de voir, sous des airs populistes, contre la volonté des cadres exécutifs du Vatican.

Maintenant s'est déclenchée une « révolution de palais ». Les prélats anonymes de niveau intermédiaire se sont confiés à des journalistes. Beaucoup de gens qui connaissaient la situation s'attendaient depuis longtemps à cette explosion. A mesure que grandissait l'assentiment de la base catholique, s'enflait la colère interne contre un style de gouvernement qui rompait avec les habitudes. Des dizaines de mauvaises décisions n'ont pas été portées à la connaissance du public parce qu'elles n'avaient que peu d'intérêt pour les médias. Elles concernaient des questions marginales de théologie qui relevaient jusqu'ici de la compétence des « cadres intermédiaires ». Les archevêques et cardinaux de curie sont facilement interchangeables, mais les « cadres intermédiaires» du Vatican ne se modifient pas aussi vite. Beaucoup de décisions pontificales ont été et sont toujours empreintes d'une confondante naïveté. Très vite, tous eurent conscience que François projetait des changements qui altéreraient dans ses fondations la structure de l’Église. Un petit exemple: depuis des décennies, il était d'usage que les sièges épiscopaux des grands diocèses fussent occupés par des évêques de diocèses plus petits. On pouvait ainsi éprouver l'expérience des aspirants et créer une « réserve de recrutement ». Mais François ne tint pas compte de cet usage et installa un simple prêtre dans l'important siège archiépiscopal de Palerme. On imagine l'indignation des candidats évêques évincés et leur rancune envers le Pontife. Au début de son pontificat, François fit, de sa propre initiative, du manager de la pension pour prêtres où il résidait, le prélat de l'IOR, un poste important au Vatican. Très vite il apparut que Mgr. Ricca avait été, depuis des années, renvoyé du service diplomatique pour relations homosexuelles répétées. Dans son dossier personnel manquaient précisément les pages qui l'accablaient. François refusa de revenir sur sa décision. Comment la curie devrait-elle prendre au sérieux un tel pontife ? En effet à peu près tout le monde au Vatican était au courant de l'inconduite du prêtre.

Et le gaspillage au Vatican a, sous le pape François, plutôt crû que diminué. Alors que le pape passe symboliquement devant la Maison Blanche dans une petite voiture, ses cardinaux s'envolent en jet privé de la compagnie suisse MAX AIR pour Astana au Kazachstan pour y assister à l'inauguration de la nouvelle église gréco-catholique, un luxe qui aura coûté environ 20 000 francs suisses.

Pour beaucoup de membres de la curie, ce pape n'est tout simplement plus supportable, car personne ne sait réellement où il se situe au plan moral. François s'est rendu célèbre par ses déclarations contradictoires. N'a-t-il pas dit lui-même au cours du vol qui le ramenait de Manille de Rio de Janeiro à Rome : « Qui suis-je pour juger ? » . Et de plus en plus de prélats se demandent qui d'autre peut juger, si le pape ne le peut pas .

Le pape continue à « se vautrer » dans l'enthousiasme des masses. Le problème est que le nombre de sorties de l’Église catholique en Allemagne a fortement augmenté. Où est donc « l'effet François » impatiemment attendu ? Les medias italiens « de gauche » l'acclament et l'athée Scalfari, ex-directeur (et fondateur) de la Repubblica, se vante d'être un ami de François. Il subsiste encore au Vatican quelques centaines d'hypocrites qui font des courbettes devant le pape et lui donnent l'illusion d'être « un pape pour tous ». Mais le pape venu d'Argentine court le risque, avant même son décès, de devoir se trouver une nouvelle résidence dans sa patrie. Au Vatican même, il 'n y aura pas de place pour un deuxième pape à la retraite.