Le pendu du chapiteau de Vézelay


François persiste et signe. S'adressant aux évêques polonais à Cracovie le 27 juillet, il a ressorti sa lecture erronée de l'iconographie médiévale et à nouveau instrumentalisé la figure de Judas au profit de SA conception de la miséricorde (7/8/2016)

>>> Compte-rendu de l'échange entre le Pape et les évêques polonais: w2.vatican.va
>>>A propos du Chapiteau du Vézelay: Une histoire de chapiteaux (III)

On se souvient peut-être que le 16 juin dernier, dans un discours improvisé (hélas!) prononcé en ouverture du Congrès ecclésial du diocèse de Rome, le Pape avait évoqué un chapiteau de la cathédrale du Vézelay (cf. Une histoire de chapiteaux).
S'en était suivis un recadrage sévère d'Antonio Socci (Une histoire de chapiteaux (II) ) et sur mon site un assaut d'érudition de mes lecteurs, affinant les réflexions de ce dernier; et pour finir, une lectrice spécialiste d'iconographie médiévale, au terme de son "enquête", après avoir formellement rejeté l'interprétation du Pape avait livré sa propre (et très convaincante) clé de l'énigme (Une histoire de chapiteaux (III))



Le pendu du Vézelay


A Cracovie, au milieu de propos assez décousus, le Pape est censé répondre ici à la question d'un évêque: "En premier lieu, qui devrait être objet de notre enseignement sur la miséricorde ?".
Je reproduis sa réponse en entier. Le moins qu'on puisse dire, c'est que si tant est qu'elle répond à la question, elle y met le temps, et elle le fait de façon très lacunaire, surtout à travers le rappel de ses obsessions misérabilistes, tiers-mondistes, écologistes, qui font de lui l'idole des médias et de l'extrême-gauche alter-mondialiste;
Mais j'ai souligné le passage relatif au fameux chapiteau de Vézelay (il est possible que quelqu'un lui ait parlé de l'article de Socci - je n'ose dire de celui sur mon site! - , et que son allusion au double aspect du visage du "bon pasteur" tristesse/sourire soit une réponse...).

La miséricorde n’est pas une chose qui m’est venue à l’esprit, à moi. C’est un processus. À y voir de près, le bienheureux Paul VI avait déjà fait quelques développements sur la miséricorde. Ensuite, saint Jean-Paul II a été le géant de la miséricorde, avec l’Encyclique Dives in misericordia, la canonisation de sainte Faustine, et puis l’octave de Pâques : il est mort la veille de ce jour-là. C’est un processus, [en cours] depuis des années, dans l’Église. On voit que le Seigneur demandait de réveiller dans l’Église cette attitude de miséricorde parmi les fidèles. Il est le Miséricordieux (ndlr: comme disent les musulmans!!) qui pardonne tout.

Je suis très touché par un chapiteau médiéval qui se trouve dans la Basilique Sainte Marie Madeleine à Vézelay, en France, où commence le Chemin de Saint Jacques. Sur ce chapiteau, d’un côté il y a Judas pendu, les yeux ouverts, la langue dehors, et de l’autre il y a le Bon Pasteur qui l’emmène avec lui. Et si nous regardons bien, attentivement, le visage du Bon Pasteur, les lèvres d’un côté sont tristes, mais de l’autre côté elles arborent un sourire.

La miséricorde est un mystère, c’est un mystère. C’est le mystère de Dieu. On (ndlr: Tornielli!!) m’a fait une interview, dont est issu un livre intitulé : Le nom de Dieu est miséricorde, mais c’est une expression journalistique (!!!), je crois qu’on peut dire que Dieu est le Père miséricordieux. Au moins Jésus dans l’Évangile, le révèle ainsi. Il punit pour convertir. Et puis, les paraboles de la miséricorde, et la manière dont il a voulu nous sauver… Quand est venue la plénitude des temps, il a fait naître le Fils d’une femme : avec la chair, il nous sauve avec la chair ; non pas à partir de la peur, mais par la chair. Dans ce processus de l’Église, nous recevons tant de grâces !

Et vous voyez ce monde malade d’injustice, de manque d’amour, de corruption. Mais c’est vrai, c’est vrai. Aujourd’hui, dans l’avion, en parlant de ce prêtre de plus de 80 ans qui a été tué en France : depuis longtemps, je dis que le monde est en guerre, que nous vivons la troisième guerre mondiale disséminée. Pensons au Nigéria… Des idéologies, oui, mais quelle est l’idéologie d’aujourd’hui, qui est au centre et qui est la mère des corruptions, des guerres ? L’idolâtrie de l’argent. L’homme et la femme ne sont plus au sommet de la création, on y a placé l’idole argent, et tout s’achète et se vend avec de l’argent. Au centre, l’argent. On exploite les gens. Et la traite des personnes aujourd’hui ? Il en a toujours été ainsi : la cruauté ! J’ai parlé de ce sentiment à un Chef de gouvernement et il m’a dit : ‘‘Il y a toujours eu de la cruauté . Le problème, c’est que nous la regardons maintenant à la télévision, elle s’est rapprochée de notre vie’’. Mais toujours cette cruauté ! Tuer, pour de l’argent. Exploiter les gens, exploiter la création. Un Chef de gouvernement africain, récemment élu, quand il est venu en audience, m’a dit : ‘‘Le premier acte de gouvernement que j’ai posé est de reboiser le pays, qui a été désertifié et anéanti’’. Nous ne prenons pas soin de la création. Et cela signifie : davantage de pauvres, davantage de corruption. Mais que pensons-nous quand 80% - plus ou moins, cherchez bien les statistiques et si ce n’est pas 80, c’est 82 ou 78% – des richesses sont dans les mains de moins de 20% des gens. ‘‘Père, ne parlez plus ainsi ; que vous êtes communiste !’’. Non, non, ce sont des statistiques ! Et qui paie cela ? Ce sont les gens qui paient, le peuple de Dieu : les jeunes filles exploitées, les jeunes sans travail. En Italie, parmi les [jeunes] de moins de 25 ans, 40% sont sans travail ; en Espagne, 50% ; en Croatie, 47%. Pourquoi ? Parce qu’il y a une économie liquide, qui favorise la corruption. Scandalisé, un grand catholique, qui est allé chez un ami entrepreneur, me racontait : ‘‘Je te ferai voir comment je gagne vingt mille dollars sans que je bouge de la maison’’. Et avec l’ordinateur, depuis la Californie, il a fait l’acquisition de je ne sais quoi et l’a vendu à la Chine : en 20 minutes, en moins de 20 minutes, il avait gagné ces vingt mille dollars. Tout est liquide ! Et les jeunes n’ont pas la culture du travail, parce qu’ils n’ont pas de travail ! La terre est morte, parce qu’elle a été exploitée en dépit du bon sens. Et nous continuons ainsi. Le monde se réchauffe, pourquoi ? Parce que nous devons gagner. Le gain. ‘‘Nous sommes tombés dans l’idolâtrie de l’argent’’ : cela, un Ambassadeur me l’a dit quand il est venu pour les lettres de créance. C’est une idolâtrie.

La miséricorde divine est le témoignage, le témoignage de tant de gens, de tant d’hommes et de femmes, laïcs, jeunes qui font des œuvres : en Italie, par exemple, les associations. Oui, il y a des gens qui sont très rusés ; mais on fait toujours du bien, on fait de bonnes choses. Et puis, les institutions pour soigner les malades : des organisations fortes. Emprunter cette voie, faire des choses pour que la dignité humaine grandisse. Mais ce que vous dites est vrai (?). Nous vivons un analphabétisme religieux, au point où, dans certains sanctuaires du monde, il y a confusion : on va pour prier, il y a des boutiques où on s’achète des objets de piété, les chapelets ; mais il y a quelques-unes qui vendent des objets de superstition, parce qu’on cherche le salut dans la superstition, dans l’analphabétisme religieux, ce relativisme qui confond une chose avec une autre. Et là, il faut de la catéchèse, de la catéchèse de vie. La catéchèse qui n’est pas seulement donner les notions, mais accompagner le cheminement. Accompagner est l’une des attitudes les plus importantes ! Accompagner la croissance de la foi. C’est un grand travail et les jeunes attendent cela ! Les jeunes attendent… ‘‘Mais si je commence à parler, ils s’ennuient !’’. Mais donne-leur un travail à faire ! Dis-leur d’aller durant les vacances, quinze jours, aider à construire des logements modestes pour les pauvres, ou à faire quelque chose d’autre. Qu’ils commencent à sentir qu’ils sont utiles. Et là, vous répandez la semence de Dieu. Lentement. Mais uniquement avec les paroles, la chose ne marche pas ! L’analphabétisme religieux d’aujourd’hui, nous devons l’affronter avec les trois langages, avec les trois langues : la langue de l’esprit, la langue du cœur et la langue des mains. Toutes les trois harmonieusement.

Je ne sais pas… Je parle trop ! Ce sont des idées que je vous expose. Vous, avec prudence, vous saurez quoi faire. Mais toujours, l’Église en sortie. Une fois, j’ai osé dire : il y a ce verset de l’Apocalypse : ‘‘Je me tiens à la porte et je frappe’’ (3, 20) ; il frappe à la porte, mais je me demande que de fois le Seigneur frappe de l’intérieur, pour que nous lui ouvrions et pour qu’il puisse sortir avec nous porter l’Évangile dehors. Pas enfermés, dehors ! Sortir, sortir!