Libé fasciné par Benoît XVI? (II)

Patatras!! Après la publication du second volet, le point d'interrogation demeure, mais la remarque qui me vient à l'esprit est : c'était trop beau pour être vrai (27/8/2012)

>> Voir ici:
Libé fasciné par Benoît XVI?

Le second volet est une déception: le premier, consacré au théologien, laissait espérer une analyse du Pontificat, critique, certes, mais plus subtile.

Or l'auteur de l'article (intitulé "Pape à part", il y a peut-être un jeu de mots, mais il m'échappe) semble avoir"picoré" dans Lumière du Monde tout ce qui pouvait servir pour dresser un portrait relativement caricatural, et de toutes façons très réducteur.
On a droit aux poncifs dont il été pourtant été fait largement justice, en 7 ans (au passage, il y a aussi une erreur dans l'âge, mais celle-là est plutôt flatteuse):
Le pape dans son bureau "veillé par ses chats" (ndr: c'est plutôt gentil, mais cela augure mal du sérieux de la suite, et on sait depuis longtemps qu'il n'y a jamais eu de chats), le pape néonconservateur, l'insistance sur les mea culpa et l'accent surdimensionné mis sur la pédophilie, la rivalité avec Hans Küng, simplement "coupable d’avoir remis en question le dogme de l’infaillibilité pontificale", la sempiternelle comparaison avec JP II ("D’un côté un homme solaire, tribun qui a toujours adoré le théâtre, doté d’un grand sens politique. De l’autre, un universitaire réservé, à l’intelligence brillante mais dénué du moindre charisme ").
Et aussi:
Le pape "monarque très solitaire à la tête (ndr: le Pape n'est pas "à la tête" de la Curie, il est tout au plus aidé par elle!) d’une curie déboussolée et ravagée par les luttes intestines". Les "gaffes" du discours à Auschwitz et de Ratisbonne. Le témoignage de Philippe Levillain, dont on connaît les lumières! (voir par exemple ici) et qui en remet une louche sur " le pape [qui] travaille très seul et il est mal entouré mais surtout, à la différence de son prédécesseur, il ignore ce qu’est la communication contemporaine".
"Les critiques [qui] fusent de toutes parts (ndr: des noms!) pour dénoncer la restauration à l’œuvre. Y compris dans les formes du culte qui, au Vatican, retrouve toute sa pompe préconciliaire avec force chasubles, mitres et dentelles"!

Avant la plate conclusion:

La nuit tombe. Il est épuisé et va comme souvent regarder un DVD (ndr: en réalité, cela arrive très rarement) avec son secrétaire et quelques proches. Il adore les Don Camillo et Peppone (!!!), comédies sur la rivalité entre un curé et un maire communiste dans la très rouge Emilie-Romagne des années 50. Ce monde d’avant où tout était plus simple…

* * *

Il faut bien mal connaître l'histoire pour croire qu'à un moment, quel qu'il soit, le monde a été "simple".
Et cette dernière phrase transmet, sans doute intentionnellement, l'image d'un Pape déphasé, dépassé par le monde actuel.
Mais c'est tout le contraire!
Je n'ai rien lu de meilleur à ce sujet que ce qu'en disait Vittorio Messori, répondait aux questions d'un journal espagnol (ici) au lendemain de l'élection:

Ratzinger a été présenté comme un réactionnaire, mais c'est un Pape post-moderne, et là est l'équivoque. Küng et les siens, c'est-à-dire, les théologiens post-Vatican II, sont modernes, ils sont encore ancrés dans la modernité. Mais la modernité est finie, et ils ne l'ont pas compris.
Küng est resté coincé aux années soixante, tandis que Ratzinger a dépassé les mythes et les illusions de ces années, et est en contact avec le monde d'aujourd'hui.

Au final, donc, une certaine déception.
Mais je ne suis pas naïve au point de ne pas comprendre dans quel journal et pour quel lectorat Marc Semo écrit. Il ne pouvait pas faire "plus": pas un article "élogieux" - ou même simplement factuel.
Sans doute faut-il prendre celui-là comme un moindre mal - ou un léger mieux, par rapport à d'autres, dans le passé - qui pourrait aider certains lecteurs à découvrir par eux-mêmes, à partir de ces anecdotes insignifiantes ou ces lieux-communs, réducteurs, la vraie personnalité de Benoît XVI